Henley & Danaé
#6

Une fois j’ai laissé quelqu’un me distraire parce que cette personne avait la trouille de perdre au billard contre une nana, mais là il est hors de question que je me laisse avoir. J’ai envie de faire une partie de billard depuis que je suis entré dans ce château et à chaque fois c’est la même chanson. Soit la personne est un macho de première est à peur de se prendre une correction venant de la part d’une nana. Soit la personne ne sait pas jouer. Soit Cupidon balance sa musique romantique et casse tout mon délire. Sauf que depuis le temps que je suis dans ce château, je commence à connaître le fonctionnement de chacun des candidats et encore plus celui de l’angelot. Il suffit que je reste assez loin de la personne qui va entrer dans cette pièce d’une seconde à l’autre et Cupidon va trouver ça tellement nul qu’il ne va même pas penser à mettre sa musique à l’eau de rose. Concernant le fait de donner l’envie de jouer à quelqu’un, j’ai toujours quelques petites idées bien sympathiques pour parvenir à mes fins. J’attends depuis une bonne grosse heure quand Henley, ma partenaire, fait son apparition. Un large sourire vient s’emparer de mes lèvres. « Un billard, ça te dit ? » que je demande dans un premier temps. J’attrape une queue pour le tendre vers elle tout en reprenant : « Et histoire de rajouter un petit peu de piment à tout ça, celle qui perds quitte le lit conjugal pendant une semaine entière. » Je lui fais mon plus beau sourire. Si elle refuse, je l’empale avec ce que je tiens dans ma main droite, à savoir une queue de billard. Je suis certaine que l’enjeu va lui plaire. Après tout avoir notre lit, tout entier, pendant une semaine complète, ce n’est pas mal comme cadeau. Elle sera débarrassé de moi pendant plusieurs nuits si elle gagne et moi d’elle si jamais je viens à gagner. Avouez que c’est offre qu’elle ne peut pas refuser.

« Quitter le lit ? T'es sérieuse ? Tu te rends compte qu'on serait toutes les deux gagnantes étant donné que celle qui quitte le lit pourra très bien se foutre dans un plumard inoccupé ? Et si ma présence te fait chier à ce point-là, j'te retiens pas, tu peux prendre un autre lit. » Apparemment faire une partie de billard ça lui plait, mais que je la vire comme une mal propre de notre lit conjugal, un petit moins. Je fais une grimace. Je la trouve quand même assez susceptible sur ce point-là. Je n’avais pas envie qu’elle le prenne mal comme ça. D’ailleurs je ne dis pas ça pour me débarrasser d’elle comme elle est en train de le crier sur tous les toits. J’ouvre la bouche pour dire quelque chose, me défendre au moins, mais elle me devance de quelques secondes : « Tu peux aller dans le lit de Zoran, par exemple. » Tiens donc, voilà que ma partenaire remet le sujet Zoran sur la table. Je pousse un soupir tout en levant les yeux vers le plafond. Je n’ai même pas envie de relever ce qu’elle est en train de dire parce que je ne veux pas entrer dans un quelconque conflit avec ma partenaire. Ce serait bête. « Parions quelque chose de plus passionnant. » C’est comme elle veut. Je m’occupe de sortir les boules et le triangle tout en disant : « Eh bien je t’écoute. » Après tout, puisqu’elle trouve mon idée stupide, autant qu’elle propose quelque chose, elle. Je croise mes bras sous ma poitrine et l’observe tout en attendant qu’elle prenne la parole pour me proposer un pari plus intéressant à son goût. Attention, je l’attends au tournant.

J’suis pourtant certaine que ça lui plait de se débarrasser de moi toutes les nuits durant une semaine. Après tout, elle n’a pas l’air de me porter dans son cœur ma partenaire. Mais bon, si elle pense que c’est stupide, c’est tout à son honneur. Moi je trouve que c’est une assez bonne idée. Je lui demande alors de proposer quelque chose puisqu’elle est si forte que ça et qu’elle pense que son idée sera bien meilleure que la mienne. Elle est en train de sourire comme si elle se moque de moi. Elle tourne tout autour du billard. Franchement elle me fait peur là. « Hm... celle qui perd fait tout ce que l'autre lui demande ? Pas les trucs cons du genre la vaisselle, la lessive, non. Mais tout le reste. Aucune limite. » J’trouve ça complètement con jusqu’à ce qu’elle prononce une toute petite phrase. Une dernière. Aucune limite. Un mince sourire s’empare de mes lèvres. Je dois bien avouer que c’est une proposition plutôt alléchante. « On peut dire que ça durera une semaine. Ça ajoutera ta petite touche à l'histoire... » Et en plus pendant une semaine. Parfait. Je ne montre pas un sourire satisfait, mais quelque chose de plus diabolique. Ma main droite se tend vers elle. « Compte sur moi pour faire de toi un esclave pendant une semaine alors. » Cette petite provocation signe également le fait que je suis tout à fait d’accord avec elle et que j’approuve son idée. Je regarde le jeu et le désigne d’un petit signe de la tête. [i] « J’suis plutôt gentille alors, commence. »[i] Oui je fais ma galante aujourd’hui.

Son idée m’emballe dans le sens où elle prononce le aucune et le mot limite. Et puis je n’ai pas non plus envie d’attendre quarante ans avant de commencer à jouer alors je flanche et j’accepte ce qu’elle propose. J’ai envie qu’on scelle notre contrat en se serrant la main, mais elle ne semble pas du même avis. C’est peut-être ma toute petite provocation qui ne lui plait pas. « T'es bien sûre de toi. » Je hausse les épaules en lui tournant le dos. Disons juste que je sais jouer. Je ne suis pas une novice en matière de billard. Je la laisse commencer. Elle tire dans la boule blanche qui vient percuter toutes les autres. Aucune de rentre, mais c’est plutôt un joli coup. J’en suis d’ailleurs assez étonné. « Pourquoi t'es dans ce jeu, toi, de toute façon ? » qu’elle me demande comme ça sans me prévenir. Je ne la regarde même pas et me concentre sur le jeu. Je tire dans la boule blanche et, par chance, vient en faire rentrer une de couleur. C’est cool. Je lui montre un petit peu de qui elle doit se méfier là. Je continu sur ma lancée, mais rate mon coup. La boule blanche percute une boule qui s’arrête non loin du trou. Je grimace. C’est cadeau pour elle là. « Parce que mon patron pense que c’est une bonne chose pour la notoriété de mon blog. » que je réponds en me tournant vers elle et en lui désignant le jeu d’un petit signe de la tête. « Et toi ? » Elle n’est pas la seule à avoir le droit de faire la curieuse.