Aujourd’hui je suis en proie à des questionnements relativement intéressants, ils sont enrichissants pourrais-je même dire. Jusqu’à maintenant je me suis montré plutôt confiant, je suis resté fidèle à moi-même et je dirais également que j’ai parfois énormément pris sur moi mais il semblerait que ça ne soit pas suffisant. Peut-être qu’au final être soi-même ne fonctionne pas dans une émission comme Fake Lover ? J’en viens à me poser ce genre de questions parce qu’il y a honnêtement de quoi se demander ce qui tourne mal. On a voulu me faire sauter il y a trois primes de cela et les candidats ont presque réussi d’ailleurs puisque j’ai été éliminé puis réintégré le lendemain dans la matinée suite à l’abandon d’Auguste. Je pensais avoir obtenu une deuxième chance, rattrapé certaines de mes erreurs en me montrant plus à l’écoute et en utilisant ce temps supplémentaire pour apprendre à connaitre mes colocataires mais hier soir j’ai encore eu la preuve du contraire. J’ai en effet remporté l’award du candidat qu’on ne veut surtout pas voir en finale et même si je me fiche de cet award ça m’a malgré tout fait réfléchir et fait un petit pincement au cœur. Je n’ai pas l’impression de ne pas m’entendre avec les autres, au contraire, je dirais même que le courant passe bien avec quasiment l’intégralité des candidats mais on tombe parfois de haut et on ne peut compter que sur soi-même. Je m’en rends compte à présent et je vais me la jouer solo, ne pas trop accorder ma confiance puisque je me suis probablement fait pas mal d’idées sur les autres. C’est une version pleine de doutes qui s’arrête près du banc sur lequel se trouve Gaëtane, je m’installe à côté d’elle. « Bonjour... » Je tourne la tête pour pouvoir lui adresser un sourire très poli. « Hey ! » La petite rousse mérite probablement davantage d’attention, il y a certains candidats que j’ai clairement négligés et je le regrette, comme je déplore qu’on me juge sans même me connaitre. Autant faire un effort là-dessus, il y a beaucoup à faire mais je n’ai pas peur de la quantité de travail, au contraire c’est plutôt ce qui me motive. « je suis désolée pour la dernière fois... dans l'ascenseur, tu sais, » L’ascenseur, je me souviens maintenant de pourquoi je n’ai pas eu une super première impression à son sujet. « Boh ne t’inquiètes pas pour ça, j’ai déjà oublié ! » Nous pouvons perdre le contrôle lorsque nous sommes apeurés, il n’y a donc pas de quoi se montrer rancunier. « Je ne suis pas très polie quand je fais des crises comme ça, » Mon sourire s’étire bien plus naturellement à présent. « C’est bon à savoir, dis-moi, tout va bien ? » Elle m’a l’air dans le même état que moi, oscillant entre plusieurs humeurs. « Comment tu vis ton aventure ? »

Je ne sais pas pourquoi je me suis assis à côté de Gaëtane mais il est grand temps que je me donne un bon gros coup de pied aux fesses pour m’intégrer davantage. C’est surement de là que vient le problème, je ne suis peut-être pas assez avenant avec les autres candidats et ça risque de me coûter ma place sur le court terme et le long terme, autant vous dire que je frôle clairement l’impasse car je n’ai pas la moindre idée de ce que je pourrais faire de plus. Ce n’est après tout pas comme si je n’avais pas tout fait pour me lier d’amitié avec les autres, le problème c’est que ça ne fonctionne pas, plus j’essaye et plus j’ai l’impression que l’écart se creuse. Certains d’entre nous sont déjà liés comme les deux doigts de la main, prenons un exemple tout bête, il y a de superbes amitiés et les prémices de couples comme Aaron et Adnan… Je prends peut-être le plus mauvais des exemples parce que je me sens coupable de me mettre entre eux et terriblement jaloux paradoxalement de ce qu’ils ont. Aaron est le seul candidat duquel je me sens proche, il n’y a peut-être que pour lui que je compte un minimum et c’est triste de constater que tout cela pourrait s’arrêter dès maintenant s’il se met en couple avec Adnan. Pourquoi est-ce que cela s’arrêterait ? Parce qu’il m’a fait tomber dans un cercle vicieux, il m’a aidé à me découvrir une bisexualité que j’ai du mal à comprendre pour le moment et je ne pourrais tout simplement pas être là, impassible et la jouer bon pote pendant qu’ils flirteront et s’épanouiront sous mon nez. Complexité du genre humain quand tu nous tiens. Je n’ai pas envie de cogiter davantage, c’est tellement désagréable de tout donner sans parvenir à avoir ce que l’on veut en retour. Je choisis donc de me concentrer sur le moment présent et de m’intéresser à Gaëtane qui mérite que l’on se penche sur son cas plus sérieusement, je me dis qu’il y a du potentiel et j’ai désespérément envie de discuter avec quelqu’un qui ne me connait pas, quelqu’un qui osera tout me dire sans me ménager. Elle répond à mes questions et je sens immédiatement qu’un « mais » se prépare, tout va bien mais quelque chose manque pour que tout soit parfait. « Tu n’as pas à t’excuser, au contraire ! » Tous les deux nous avons l’air de rencontrer le même problème et j’ai donc soudainement envie de me confier moi aussi, c’est comme si ma langue généralement pas très branchée bavardages et confessions profondes se déliait. « Je comprends ce que tu ressens, t’as l’impression que peu importe ce que tu feras pour arranger les choses… Beh tu ne feras jamais suffisamment ! » Je baisse la tête pour me concentrer sur mes doigts qui s’entrecroisent les uns contre les autres et me procurent un sentiment de chaleur. « On ne peut pas dire que ça se passe mal mais j’ai le sentiment de ne pas être à ma place ici. » Je soupire, presque blasé de me rendre compte de cela. « Tout le monde se fait des amis, tout le monde s’amuse et j’ai l’impression qu’au final je ne suis qu’une brise de vent, un personnage secondaire qui attend gentiment d’être sacrifié pour offrir la luminosité nécessaire aux autres. »

Je n’ai pas un tempérament pessimiste par nature, je tâche toujours de regarder le côté lumineux du tableau plutôt que de me concentrer sur les nuages qui entachent mon bonheur mais aujourd’hui je me sens nettement moins d’humeur à éclipser le négatif. Je me pose énormément de questions sur ma place dans cette aventure, je ne regrette pourtant pas de m’être présenté aux castings et je ne pourrais jamais regretter mon passage dans cette émission et certaines rencontres que j’ai pu faire mais… Oui, il y a toujours un mais. Le problème c’est qu’ici je ne suis pas forcément à l’aise, moi qui suis toujours très confiant je me sens intimidé et je ne sais sur quel pied danser. C’est dingue d’avoir des problèmes de confiance à mon âge, je n’ai jamais eu le moindre souci là-dessus alors forcément, je ne sais pas quoi faire ou comment me comporter. Gaëtane sourit et esquisse même un léger rictus qui me permet de comprendre qu’elle partage le même point de vue que moi et c’est ce qui me surprend davantage encore que cette fameuse perte de confiance. Nous n’avons rien en commun, elle m’a l’air d’être une fille timide, réservée et en retenue permanente là où je suis relativement dans l’exubérance, je fonce tête baissée et mon dieu ce que je peux être une grande gueule parfois… Nous sommes entièrement opposés l’un à l’autre et pourtant nos différences n’entrent pas en compte aujourd’hui. « Je pense que nous ne sommes pas les seuls à le ressentir, enfin je l’espère en tout cas. » J’ai envie de me montrer optimiste en imaginant que l’on doit tous se sentir plus ou moins seuls ici mais je doute d’un autre côté que ce soit réellement le cas. « Me rendre compte que les seules personnes de qui je suis proche ici sont Aaron et Ana… Ana qui me déteste plus que tout au monde m’a fait vraiment bizarre… J’me suis rendu compte que je n’étais peut-être pas autant à ma place que ce que je croyais. » Je marque une pause, un sourire naissant sur mes lèvres. « J’en viens à me demander si le problème vient de moi. »

(mais non, c'était très bien ♥)

Je n’ai pas la prétention de prétendre que si je rencontre ce problème alors tout le monde doit aussi y faire face parmi les candidats, je préfère juste me dire que si nous traversons tous les deux une telle épreuve c’est que d’autres peuvent être dans le même cas que nous. N’est-ce pas logique ? Nous ne sommes pas étranges, nous n’avons rien de bien différent des autres qui pourrait vraiment nous discréditer ou que sais-je alors pourquoi serions-nous les seuls ? Ce qui est certain c’est que je ne suis pas encore parvenu à me faire de réels amis, j’ai pourtant eu l’impression à plusieurs reprises que je m’en rapprochais mais non, il n’y a finalement qu’Aaron pour qui je compte peut-être un peu et Ana… Ouais sauf qu’Ana me déteste surement plus que jamais. « Pourquoi elle te détesterait ? Vous n'êtes plus ensemble mais elle t'a aimé, avant, alors... elle a peut-être juste oublié pourquoi. Je ne trouve pas ça logique. » Au fond elle n’a pas tort, nous nous sommes sincèrement aimés, elle fut même mon premier grand amour. Avant Ana j’étais déjà sorti avec des filles mais jamais ça n’avait été aussi intense, prenant. « J’aimerais pouvoir y croire, mais il y a certaines choses qui font qu’elle me détestera probablement pour le restant de ses jours, j’ai fait deux énormes erreurs ! » Et je les regrette amèrement, j’aimerais avoir une baguette magique pour remonter le temps et réagir différemment à tout ce qui nous arrivé mais… Mais c’est impossible. « Enfin, je ne devrais pas parler de ce que je ne connais pas, désolée. » Gaëtane gagne des points dans mon estime, elle monte rapidement et je ne sais pas si c’est parce que nous sommes tous les deux dans un état de questionnement immense ou si c’est parce que j’apprends à la découvrir sous un angle nouveau et plaisant. « Tu n’as pas à t’excuser, ça ne me dérange pas d’en discuter, au contraire… Ça me fait du bien ! » La question qui me brûle les lèvres ne tarde pas à naturellement trouver des mots explicites, le problème vient-il de nous ou d’eux ? « Je crois que j'idéalise trop les autres. Je me pensais presque prête à mettre des mots sur quelques gens que j'ai rencontrés et les appeler "amis", mais je ne suis plus sûre que ça soit vraiment le cas. Je crois que ce n'est pas réciproque. » Je l’écoute attentivement, intéressé par son analyse. [color=deeppink] « Ca a toujours été comme ça, et je sais que le problème vient de moi... je suis sûre que tu n'as rien à te reprocher... j'espère. C'est très frustrant. »[/color ] Qui aurait cru que nous avions autant de points communs ? J’en suis le premier surpris. « Tu sais, j’ai un peu le même problème. Le truc c’est que chez nous, les gens du voyage, on s’accepte tous les uns les autres et on n’a pas besoin de beaucoup pour se lier entre nous. Du coup, j’ai du mal à me rendre compte qu’ici ça prendra plus de temps probablement. » Un problème de mentalité ? J’ai reçu une éducation différente avec d’autres valeurs que celles inculquées, les autres apprennent à s’accepter, à vivre indépendamment, à faire les bons choix pour être heureux là où chez moi nous apprenons surtout à nous concentrer sur la famille et à respecter leurs choix nous concernant. C’est un retour logique pour remercier de nos premières années de vie sous leur dépendance je crois. « Je... pourquoi tu es venu participer au jeu, en fait ? » Difficile de tout dire sans en dévoiler trop sur mon secret, je choisis donc de répondre à cette question en prenant un nouvel angle d’approche. « Je suis très joueur, j’avais envie de m’investir dans quelque chose de dingue, loin de mon quotidien et de jouer sans avoir peur des conséquences. Et toi ? »

Ana et moi c’est une longue histoire, une très longue partie de mon passé qui m’a permis de grandir malgré tout. Les erreurs sont là pour ça je pense, pour permettre à quelqu’un d’avancer tout en gagnant en maturité. Après tout ce qu’il s’est passé entre nous je suis parvenu à en prendre de la graine et je n’ai jamais plus répété les erreurs du passé. Vous en voulez une preuve concrète ? Je n’ai jamais plus trompé personne, à l’époque ça s’est passé sous le coup de l’alcool en plein milieu d’une soirée beaucoup trop arrosée et nous étions jeunes, insouciants, ça m’a malgré tout marqué au point où je me suis toujours méfié au moment de me mettre en couple. Je n’ai plus jamais franchi cette limite et j’en suis heureux, c’est une preuve de mon évolution, j’ai avancé et même s’il m’a fallu une vilaine expérience comme celle-ci j’en suis fier. Personne n’est parfait après tout. « J'espère que ça s'arrangera. Ca serait idiot de laisser disparaître une partie aussi importante de votre vie à tous les deux... » J’ai envie d’y croire moi aussi, c’est ce que je désire le plus au monde en tout cas. « Nous sommes d’accord, c’est en tout cas ce que j’essaye de faire depuis le début de l’aventure. Bon, j’ai le sang-chaud du coup je réagi parfois stupidement mais bon… Dans le fond ça me fait chier. » Nous avons été tellement fusionnels tous les deux à une époque, aujourd’hui j’ai simplement l’impression de faire face à une toute nouvelle personne dont j’ignore tout. Arrêtons de parler de moi une seconde, je préfère lui demander ce qu’il en est pour elle à propos de notre petit problème. « Oh moi... » Elle cherche ses mots, je patiente donc tranquillement, restant confortablement installé sur le banc. « Ma tutrice légale s'inquiète pour moi, parce que je n'ai pas vraiment d'amis, et que je ne côtoie jamais personne de mon âge... alors, mon docteur nous a parlé de l'émission... » Ce qu’elle dit pique ma curiosité et je ne peux m’empêcher de demander, incertain. « Tu as été adoptée ? » C’est ce que le tutrice légale m’inspire en tout cas. « Ils voudraient bien que j'aie une vie un peu normale même si c'est presque impossible alors... voilà. » Beaucoup de mystère et j’en viens à me demander si ça n’a pas rapport avec son secret. Difficile d’aborder le sujet puisque nous sommes là pour défendre chacun notre petit secret. « Je suis indiscret si je te demande pourquoi tu penses que c’est impossible ? »