SAYID & @IMMA
lundi 09 mars - 15:43

La vie en communauté avait ses limites. Et si Sayid avait bien compris que c'était une chose à laquelle il devrait se faire s'il espérait passer le cap de cette semaine, il ne perdait pas non plus de vue que durant les sept prochains jours chacun jouait pour sa pomme, et par conséquent il n'avait pas attendu après qui que ce soit pour décider de se lancer dans une exploration des lieux ; Il préférait de toute façon la faire à son rythme. Il avait compris au même titre que les autres que de cette semaine dépendrait la suite, et il n'avait aucune envie d'être pris de court pour quelque raison que ce soit ... cela sous-entendait se repérer rapidement et connaître les lieux et leurs limites dans un délai aussi court que possible. Il lui fallait compenser ses lacunes avec ses points forts, et se repérer et emmagasiner tout un tas d'informations dans un court laps de temps constituait ses deux atouts principaux. La vie "sauvage" aurait pu en être un autre également, mais celle à laquelle on avait décidé de les confronter le laisser dubitatif ... tout était trop carré, trop "joli". L'herbe de la plaine était trop verte, la chaleur du feu de camp semblait factice, et les dorures du portail sentaient la peinture dorée façon cache-misère. Ce n'était pas ça la nature à ses yeux, la nature c'était inégal, imprévisible, ce n'était pas fait d'herbe savamment tondue et de lacs artificiels ... et quelque part le décalage entre le sauvage dont on leur parlait et le sauvage qu'on leur offrait le faisait grincer des dents, quand bien même il tentait de conserver son air impassible. Il n'avait pas bien dormi. Le fait qu'il ait dormi au-dessus du sac de couchage et sans retirer ses chaussures y était sans doute pour beaucoup, mais il en serait de même toute la semaine alors il s'y habituerait, comme souvent avec Sayid tout n'était que question de volonté. Dessinant dans un coin de sa tête l'itinéraire qu'il avait emprunté un peu par hasard, le voilà en tout cas qui avait atterri devant une cabane aux allures de remise et qu'il avait sans mal identifié comme ce que le présentateur de l'émission leur avait vendu comme le garde-manger. « Tu te caches ? » C'est la première chose qui lui était venue à l'esprit lorsque, ouvrant la porte, il était tombée sur une silhouette féminine se mouvant dans la pénombre de la cabane. Refermant la porte derrière lui sans penser un seul instant à demander s'il dérangeait, il avait tendu la main vers ce qui lui semblait être une caisse de fruits et en avait ressorti une orange qu'il avait fait tourné entre ses mains avant de relever les yeux vers celle qu'il venait de déloger. De surprendre. De rencontrer. Il ne savait pas trop. « T'es le genre de caméléon qui ne passe pas inaperçu, pourtant. » Cela pouvait être ou non un compliment, ce serait à elle de décider ce qu'elle préférait, mais le sourire que Sayid avait flanqué sur son visage témoignait de ce qu'il s'agissait bien d'un compliment à ses yeux à lui. Un drôle de compliment pour sa drôle de façon de raisonner.

Imma n’était alors là que depuis quelques minutes, son maigre « goûté » avalé, prêt à être digéré. La porte de la cabane s’ouvrant alors sur une carrure beaucoup plus large que la sienne, cachant la lumière qui aurait pu filtrer dans la pièce. Bougeant d’un pas en arrière, elle regarde l’homme dont elle ne connait le nom. D’instinct elle se referme sur elle-même surprise par sa voix brisant le silence. Elle bouge sa tête de droite à gauche pour lui signifier que non, elle ne se cachait pas. Elle se met simplement et volontairement à l’écart, seule chose qu’elle exige et ose imposer aux autres. Sa solitude. Si seulement ses amis étaient venu avec elle, une autre Imma aurait pu se dévoiler, moi prude, moins sauvage et insaisissable, très certainement. Le silence faisant séparation nette entre eux, Imma n’hésite pas à garder ses yeux sur lui, la pure contradiction entre sa nature timide et sa capacité à fixer les gens sans perdre de son aplomb. Ou tout du moins l’espace d’un bon moment. Elle pourrait rester des heures à le contempler – lui au même titre qu’un autre – si celui-ci ne soupçonnait pas sa présence. Mais il est là, planté devant elle. Un léger souffle s’échappe de ses lèvres, baissant alors les yeux. Son corps cherchant naturellement la pénombre, comme le tournesol le fait avec le soleil. Elle est gênée par ce qu’il vient de dire, plus encore par le sourire qu’il affiche fièrement. Loin du rire graveleux du Ziggy ou du doigt curieux de Hugo et pourtant tout aussi gênant. Elle s’est fait traiter de tout au pays, de zèbre en passant la vache qu’elle n’a jamais vu de ses propres yeux en passant par le grand panda d’Asie. Jamais de caméléon. C’est pourtant ce qu’elle essaie de faire – passer inaperçu – en vain. Tout du moins avec lui. Soufflant une deuxième fois, ses yeux cherchant un accroche pour se stabiliser et ne pas paniquer. « Je ne me cache pas. » Elle répond en décalé, espérant ne plus avoir à faire à ce genre de remarque qui la met plus mal à l’aise qu’autre chose. Ce qui assez drôle d’ailleurs, au vue de ce qu’elle a pu entendre « chez elle ». Pinçant ses lèvres, elle avoue à demi-mot. « J’avais faim. » Honteuse d’être venu prendre un bout de pain, sans avoir rien proposé à personne.

Son trajet en forêt avait eu le mérite de lui permettre de se recentrer et de souffler un moment, de faire le vide et de se débarrasser, même pour quelques instants, de tous les tics de comportement et de langages qu'il attrapait parfois sans plus s'en rendre au contact des autres. Alors c'est vrai, lorsqu'il avait poussé la porte de la cabane qui faisait office de garde-manger c'était en partie dans l'optique de profiter de cet état de solitude encore quelques instants, mais pour autant - et contre toute attente - la présence d'Imma ne l'avait pas agacé outre mesure lorsqu'il s'en était aperçu. Il n'était même pas particulièrement surpris maintenant qu'il y réfléchissait, si lui avait recherché la solitude pourquoi d'autres n'en auraient-ils pas fait autant ? Peut-être fuyait-elle quelqu'un, et si tel était le cas il n'était sans doute pas difficile de deviner qui, pour peu que l'on ait été un tant soit peu attentif au prime de dimanche ... Et Sayid était attentif. Toujours. « Je ne me cache pas. » lui avait-elle pourtant assuré d'un ton qu'il ne savait pas trop comment interpréter. Il avait cette capacité à mettre les gens mal à l'aise sans le vouloir, c'était un autre de ses "talents" cachés, et il n'avait même pas mis longtemps à remarquer que son "compliment" n'avait pas vraiment été interprété comme tel. « J'avais faim. » Et maintenant elle avait l'air honteuse, il était presque certain d'avoir bien déterminé cette fois-ci. Même s'il ne comprenait pas en quoi le fait d'avoir faim était une tare ... D'autant plus qu'il avait lui-même une pomme à la main, et était donc on ne peut plus mal placé pour faire le moindre commentaire à ce sujet. « Moi aussi. » avait donc été sa seule réponse tandis qu'il haussait les épaules et croquait dans sa pomme. Non sans une arrière pensée le faisant tout à coup hésiter ... Il y avait peut-être une raison au fait qu'elle réagisse ainsi. Peut-être qu'il avait loupé un wagon, qu'ils n'avaient pas le droit de se servir. Mais en même temps à quoi bon entasser des vivres ici si ce n'était pas pour qu'ils se servent ? « Et j'étais venu pour ça aussi, me cacher. Mais du coup je suppose tu es plus courageuse que moi. » Parce qu'il en fallait selon lui, du courage, pour se mêler aux autres et tenter d'avoir l'air dans son élément, quand il ne s'agissait que d'un mensonge. « Il te cause toujours des ennuis ? » avait finalement repris le barbu d'une voix calme, estimant qu'il n'y avait pas nécessité à préciser le fond de sa pensée pour qu'elle saisisse à quoi il faisait référence.

Imma n’admet pas l’idée de s’être isolée, pourtant en soir elle s’en moque un peu, c’est qu’elle est comme ça. Elle l’avait dit durant le casting, elle est plutôt timide. Timide et discrète, qui aime de temps à autre être seule volontairement. Mais elle ne veut pas non plus être considérée comme une solitaire finie qui veut toujours fuir la sociabilité, qui ne veut pas se mêler aux autres. C’est peut-être même ce qu’elle a toujours cherché à faire : se fondre dans la masse. En Namibie, c’est difficile. Et puis elle l’est un tout petit peu, sociable, mais à sa manière. Cela vient avec le  temps. Elle baisse sa tête une première fois, ses lèvres bougeant légèrement en sourire lorsqu’il dit avoir faim. Elle avait bien compris qu’il avait faim, il n’aurait pas été là autrement. Il n’aurait certainement pas pris un fruit non plus si tel était le cas. Et puis il est aussi venu se cacher. Enfin il ne dit pas que ça. Ce qu’il dit est assez étonnant – tout du moins ça l’étonne - elle n’a rien d’une courageuse. Elle en vient même à être au bord des larmes lorsque l’on s’exclame trop directement à elle, avec trop de familiarité, la désarmant totalement. Alors oui le fait d’être venu dans le jeu, de vouloir y participer en soit est une preuve de courage de sa part, ou un coup de folie, mais elle n’est pourtant pas prête à faire les tonnes de choses que l’on demande très souvent aux candidats. Elle ne va pas changer du jour au lendemain et ce n’est pas le courage qui la caractérise le mieux. Elle mordille doucement sa lèvre inférieure, soufflant légèrement. Elle ne sait que dire à ça, alors elle hausse les épaules, ses pupilles brunes posées sur lui. Lui, il la met légèrement mal à l’aise, mais pas tant parce qu’il en impose que parce qu’il est un homme tout simplement. Elle n’a quasiment pas de contact avec les hommes, elle ne sait jamais trop quoi leur dire. Pire qu’avec les filles, mais elle a des copines. Pensant à ça, se tortillant les doigts, elle écoute sa question ne comprenant pas un traitre mot de ce qu’il lui dit. Pas sur le fond tout du moins. Elle fronce doucement ses sourcils. « Qui ça ? » Lâche-t-elle dans un premier temps, avant de comprendre de quelle personne il pouvait s’agir. Il parle peut-être de l’autre garçon. Elle n’en sait trop rien en fait, elle part de ce principe-là. « Non. » Il ne lui a causé aucun ennui, vraiment. « Son attitude. J’ai un peu du mal. » Mais en vrai ce constat est faisable pour quelques personnes ici, en fait pour tous ceux qui parle fort et un peu agressivement. Les extraverties comme l’on pourrait les appeler. « Pourquoi toi tu veux te cacher ? » Qu’elle lui demande du bout des lèvres.