@allen

La soirée a été longue, mais pour Agata cela ressemble aux mondanités auxquelles elle assiste chaque semaine. Elle n’est pas dépaysée ici, pour la fille à papa qu’elle est le luxe fait partie de son quotidien. Elle est heureuse d’avoir enfin pu quitter les abysses, d’être parvenue jusqu’ici. Elle n’aime pas échouer Agata, elle a besoin d’avoir ce sentiment de reconnaissance. Ici on ne parle que d’une émission de télé-réalité, mais quelle image se renverrait-elle d’elle-même, si elle n’était même pas capable de réussir à entrer dans une telle émission. Elle ne le sait pas, et très honnêtement elle préfère ne pas y penser. La soirée touche à sa fin, elle enlève sa robe, ne prêtant pas attention aux caméras, ne comptant plus le nombre de fois où des paparazzis l’ont surpris en maillot à la plage. Ce n’est pas un problème, elle s’habitue à tout. Désormais en pyjama, et assise sur le lit, elle défait ses boucles d’oreille qu’elle vient poser sur sa table de chevet. Table sur laquelle elle a déjà pris soin de poser un livre et ses lunettes de vue. Rapidement elle voit Allen qui entre à son tour dans la chambre. Elle l’aime bien pour le moment, et elle est contente d’avoir un partenaire de bonne compagnie comme lui. Elle repense toutefois à ce qu’il lui a dit tout à l’heure au sujet du lit, et il est vrai qu’elle ne comprend pas tout, même si au final ça ne la regarde pas. « Alors tu as pris ta décision ? Tu dors ici ou sur le canapé ? » Elle ne voit pas où elle pourrait dormir autrement, à moins qu’une candidate accepte de changer de lit avec lui. Elle ne serait pas contre avoir un lit double pour elle toute seule, elle ne va pas le nier, mais ce serait dommage que lui s’oblige à dormir sur le canapé. « C’est quoi cette histoire avec ta femme ? Elle est si jalouse que ça ? » Ou bien quelque chose d’autre lui échappe, mais ça elle ne peut rien en savoir. « Enfin ce ne sont pas mes affaires, alors ne te sens pas obligé de me répondre. Mais ça m’embêterait que tu sois obligé de dormir sur le canapé, ou ailleurs, alors que tu as un lit attitré. Je suis sûre que l’on peut trouver une solution à cela. » Il doit bien y en avoir une non ? Ce serait dommage qu’il se contraigne lui-même à mal dormir.

Si Allen avait appréhendé ce premier prime, il n'avait pas mis bien longtemps à passer une agréable soirée. Sa sélection l'avait rassuré sur un certain nombre de choses, et dieu sait qu'il en avait eu besoin, mais en plus de ça, le canadien avait eu la satisfaction de découvrir que sa partenaire ne serait autre qu'Agata, une jeune femme  sympathique avec qui il était ravi de former un couple, parce qu'à choisir d'être lié à quelqu'un, il aimait autant que ce soit à une personne agréable, avec qui le dialogue serait simple, dénués d'hostilité. Au fil de la discussion qu'ils avaient ainsi partagé sur le prime, le canadien s'était senti obligé de lui préciser qu'il n'était pas certain de pouvoir partager son lit avec elle, mais n'osa pas tellement entrer dans les détails, pensant que ça n'était pas l'endroit pour étaler sa vie conjugale. Ainsi prit-il la direction de leur chambre après qu'il l'ait vu s'y diriger, car maintenant que l'heure du coucher était imminente, il lui devait une réponse quant à la question existentielle qu'il avait soulevé quelques heures plus tôt. Arrivant sur place, il n'eut pas le temps d'articuler le moindre mot qu'elle le questionna la première, ce qui le fit sourire. « Oui, j'ai fait mon choix, je t'en parlerai dans deux petites minutes » qu'il énonça alors, pas pour faire durer le suspense mais parce qu'il aimerait simplement lui expliquer ce qui avait nourri ses hésitations. Et justement, Agata l'interrogea au sujet de sa femme, et plus que jamais de petites précisions semblaient nécessaires. « Ma femme n'est pas jalouse, non, elle est même très certainement à mille lieux de s'intéresser à ce que je fais et avec qui. » On pouvait aisément deviner que ça n'était pas une chose dont il se réjouissait, car si certains maris aimeraient peut être que leur femme soit moins sur leur dos, lui au contraire donnerait tout pour que la sienne ait peur de le perdre autant que lui avait peur qu'elle sorte de sa vie. « Elle a demandé le divorce. Ça va faire six mois, mais j'ai toujours pas pu me résoudre à signer les papiers. » C'était un détail qu'elle serait certainement l'une des seules à connaître, ici. Un détail dont il ne se vantait pas, c'est vrai, mais surtout par respect pour sa femme, qu'il agaçait bien assez en faisant traîner les choses. « Je me dis qu'elle pourrait s'arranger pour l'obtenir sans que j'ai à le faire, si la production sortait certaines images de leur contexte. C'est pour ça que je voulais éviter de prendre le moindre risque. » Il avait simplement eu peur de ce qu'on pourrait essayer de raconter, de ce que sa femme pourrait interpréter et, au final, de se voir imposer le divorce qu'il essayait à tout prix de retarder. « Mais j'ai réfléchi, et je me suis dit que j'avais pas dormi une semaine dans une tente pour au final me priver de l'occasion de profiter d'un vrai lit » finit-il par reprendre, dans un nouveau sourire, tandis que son expression se décrispa. Il essayait de se sortir toutes ces choses de la tête, parce que ça lui minait bien assez le moral à l'extérieur pour ne pas qu'il se les inflige encore ici. « Et puis, je me dois d'être là pour voir si tu es à la hauteur de ta réputation. » De fille dangereuse, bien sûr. Il lui adressa alors un clin d’œil taquin, décidément plus détendu.

Agata, elle a l’habitude des réceptions qui se terminent tard, des mondanités qui ne terminent jamais. Cette soirée s’est révélée être bien peu différente des soirées de politiciens auxquelles elle assiste constamment. Mais ce soir elle ne rentrera pas chez elle seule, non elle partagera sa chambre avec une dizaine d’autres candidats et son lit avec Allen. Peut-être. Elle ne sait pas encore ce qu’il a décidé de faire. Il est libre de ses propres choix, bien heureusement, elle attend simplement de connaître sa décision. Pour tout dire elle n’a pas tellement compris cette histoire avec sa femme, mais il doit bien avoir ses raisons. Des femmes aussi jalouses elle ne doute pas que cela existe, même s’il ne faut pas se méfier de la frêle Agata. Lorsqu’elle le voit enfin entrer dans la chambre quelques minutes après elle, elle s’enquiert de son choix. Elle trouverait cela dommage qu’il doive dormir sur le canapé, alors qu’il peut avoir un lit confortable après une semaine passée à dormir sous la tente. Il a apparemment fait son choix, ce qu’il lui dit alors, lui parlant de sa femme qui semble ne pas s’intéresser à ce qu’il fait, ce qui lui fait arquer un sourcil. C’est étrange. Elle se tait, attendant qu’il ait fini de parler pour pouvoir émettre un avis, ou tout du moins lui parler sans émettre un jugement. « Oh … Je suis désolée. Tu ne veux pas divorcer toi, c’est cela ? » C’est ce qu’elle croit comprendre étant donné qu’il refuse de signer les papier. Elle se sent quelque peu idiote, ne s’attendant pas à une telle réponse de sa part. « Tu penses qu’elle pourrait changer d’avis ? Enfin, pardon ça ne me regarde pas. Mais si jamais, et je ne sais pas d’où tu viens, probablement du Canada au vu de ton accent, je pourrais te conseiller d’excellents avocats. Les tarifs sont sans doute un peu élevés, mais si je leur demande comme une faveur, ça doit pouvoir s’arranger. » Elle ne peut pas s’empêcher de vouloir aider les autres, même si divorcer ne semble pas être une chose dont il a envie. Elle ne peut se mettre dans sa situation, et elle n’ose pas imaginer ce qu’il doit ressentir face à toute cette situation. Si elle peut faire jouer toutes les relations qu’elle a acquises, et toutes celles que sa famille possède pour aider quelqu’un, elle le fera sans y réfléchir une seule seconde. Elle esquisse un léger sourire lorsqu’il lui dit finalement dormir dans ce lit. « Je pense que tu prends la bonne décision. Il est clair qu’il serait idiot de se priver d’un tel confort après une semaine à dormir à même le sol. » Elle se serait sentie mal de le savoir en train de dormir sur le canapé pour tout dire. Un léger rire s’échappe de ses lèvres lorsqu’il lui dit vouloir voir si elle est à la hauteur de sa réputation. « Fais attention, je pourrais bien t’assommer avec mon livre par mégarde lorsque tu dors. » Elle n’est pas dangereuse Agata, loin de là. Elle vient finalement s’assoir en tailleur sur le lit, et pose ses lunettes sur son nez, ses yeux sont fatigués. « Bon alors, on risque de passer une partie de notre aventure ensemble, qu’elle dure une semaine ou six, j’imagine que c’est l’occasion d’en apprendre plus l’un sur l’autre. Sauf si bien sûr tu veux aller te coucher dès maintenant, ce que je comprendrais totalement. » Il se fait tard, il serait tout à fait légitime que la fatigue le gagne peu à peu.

Il n'avait pas voulu lui en parler sur le prime parce que ça ne lui avait pas semblé être le meilleur moment, mais maintenant qu'ils étaient dans cette chambre, Allen tendait à penser qu'il pouvait bien expliquer à Agata les raisons qui l'avaient poussé à hésiter à dormir avec elle. Elle était sa partenaire, à ce titre elle gagnait le droit de le connaître un peu plus précisément, mais c'était surtout parce qu'il avait évoqué sa femme d'une façon assez évasive qu'il tenait maintenant à ce qu'elle ait les éléments qui lui permettraient peut être de comprendre sa réaction de tout à l'heure. Ainsi en vint-il à évoquer son divorce, ou plutôt la demande qu'avait faite sa femme et qu'il n'avait toujours pas pu se résoudre à accepter. Agata sembla désolée pour lui et la question qu'elle posa au canadien l'amena à se pincer la lèvre, et à hausser les épaules, dans un geste gêné qui semblait vouloir faire diversion sur le reste, sur sa mine attristée notamment. « Si j'acceptais de signer, ça voudrait dire que je me sens prêt à la laisser s'en aller, alors que c'est l'une des trois plus belles choses qui me soient jamais arrivé. » C'était comme renoncer délibérément au bonheur, à l'amour, à tout ce avec quoi il avait vécu pendant près de quinze ans, et qu'il perdrait du jour au lendemain. « Ça voudrait dire que c'est tout simplement fini. » Bien sûr qu'il avait conscience que ses chances de la récupérer un jour étaient infimes, bien sûr qu'il savait que tôt ou tard il la perdrait réellement, mais en attendant il essayait de gagner du temps, car ça l'aidait de se voiler la face. « Je crois qu'elle est décidée, qu'elle veut aller de l'avant et, à plus long terme, probablement refaire sa vie. » Et ça lui faisait mal, bien sûr, d'envisager qu'elle puisse un jour laisser sa chance à un autre homme que lui. Qu'elle puisse penser à refaire un enfant, aussi, parce qu'après tout elle le pouvait encore. « Je suis canadien, oui, de Calgary. Et c'est très gentil, vraiment, mais c'est pas ce que je veux, me cacher derrière un bon avocat pour faire baisser la pension alimentaire ou réclamer la garde de mes enfants. » S'il finissait par accepter le divorce, il ne se lancerait pas dans d'interminables négociations, parce qu'il continuerait quoi qu'il arrive d'admirer sa femme pour l'épouse qu'elle avait été pour lui, et la mère qu'elle était pour leurs enfants. « Tu as déjà vécu ça ? Je veux dire, tu t'es déjà sentie incapable de laisser partir quelqu'un alors que tu savais pertinemment que c'était inéluctable? » Peut être qu'elle était moins dépendante des hommes que lui l'était de sa femme, c'était certainement le nombre d'années qu'ils avaient passé ensemble, et le fait qu'ils se soient rencontré grâce à leur passion commune, qui jouaient dans le mal qu'il avait à accepter la situation. Finalement, le canadien annonça à sa partenaire qu'il dormirait avec elle, et qu'il l'avait en partie décidé parce qu'après une semaine à dormir dans une tente, un bon matelas ne serait pas un luxe. Mais il y avait aussi cette idée selon laquelle elle serait dangereuse et qu'il tenait à vérifier. « "Par mégarde", je suppose que ça veut dire qu'il t'échapperait malencontreusement des mains alors que tu l'aurais placé à tout hasard juste au dessus de ma tête ? » qu'il s'amusa au moment de retirer ses chaussures et de s’asseoir sur le lit. « Non, au contraire, je trouve que c'est une très bonne idée » qu'il répliqua ensuite à la proposition de la brune, qui semblait vouloir qu'ils fassent véritablement connaissance, ce qui lui allait tout à fait. « Qu'est-ce que tu dirais de te qualifier en cinq adjectifs, là, spontanément ? » C'était une façon de la connaître telle qu'elle était vraiment, avant de chercher à savoir d'où elle venait, ce qu'elle faisait dans la vie, et pourquoi elle était ici. Ça l'intéressait de savoir à quel genre de personnalité il avait à faire, et quel regard elle portait sur elle-même.

Elle cherche à comprendre pourquoi il ne veut pas dormir dans le même lit qu’elle, cela un rapport avec sa femme, ce qu’elle peut comprendre, mais pourtant elle est sage Agata, bien loin d’être une croqueuse d’hommes. C’est lorsqu’il lui parle de son divorce qu’elle comprendre. Elle se sent bête d’avoir évoqué le sujet, surtout qu’elle comprend que cela ne doit pas être évident d’en parler, surtout avec quelqu’un qu’il connaît à peine. Elle s’en veut un peu, même si elle tâche de comprendre la situation, il ne semble pas tellement d’accord avec ce divorce, ce qu’il lui confirme. Elle se mord la lèvre lorsqu’il explique ne pas vouloir la laisser partir. Elle est sensible Agata, et une histoire comme celle-ci, ça la touche forcément. Et elle ne veut surtout pas porter de jugement hâtif ou donner des conseils qui seraient malvenus ou inappropriés. « Oui je comprends que ce soit difficile de lâcher prise. Mais parfois c’est aussi ce qu’il y a de mieux pour nous. » C’est un conseil qu’Agata serait incapable d’appliquer à elle-même, mais elle pense réellement ce qu’elle pense. « J’espère vraiment que vous pourrez trouver un terrain d’entente en tout cas, et que tu pourras aller de l’avant toi aussi. C’est le plus important. » Elle le pense sincèrement, les choses pourront peut-être s’arranger entre eux, mais il faut qu’il soit préparé à toutes les éventualités, même si elle est n’est pas là pour juger une situation qu’elle connaît depuis à peine cinq minutes. Elle dit simplement ce qu’elle pense, et espère qu’il pourra s’en sortir. C’est triste de vivre de cette manière. Elle peut l’aider s’il veut, dans une moindre mesure mais elle connaît de bons avocats, de très bons avocats qu’elle pourrait lui conseiller. Sauf qu’il n’en veut pas, ce qu’elle peut comprendre. « Je comprends mais si jamais, ma proposition tiendra toujours. » Elle connaît des gens Agata, beaucoup de gens influents, et souvent ça ne lui sert pas à grand-chose, à part à garnir le prestige de sa famille. Elle réfléchit quelques secondes à la question qu’il vient de lui poser, c’est délicat, il lui faut quelques secondes. « Non pas vraiment. Mais j’ai appris à laisser partir les autres quand il le fallait, je sais qu’à un moment ils partiront dans tous les cas. Je ne suis pas comme toi, je ne peux pas être avec n’importe qui, et je sais que c’est voué à l’échec. A un moment donné, quand la situation devient trop compliquée il faut lâcher prise, se demander ce qui est le mieux pour nous. Si on a tout donné, tout essayé pour que ça fonctionne et que l’on n’obtient pas de résultats, c’est aussi peut-être qu’il faut se faire une raison. Je ne dis pas que c’est ce que tu devrais faire, mais c’est ce que je pense. » Et encore une fois, elle ne prétend pas avoir toutes les variables entre ses mains, mais c’est ce qu’elle lui conseillerait de faire. Si elle défend les autres, c’est aussi un peu son rôle de les conseiller. Enfin, elle imagine qu’il ne veut pas trop s’étendre sur le sujet, mieux vaut poursuivre sur un sujet plus léger, comme le fait qu’elle soit apparemment dangereuse. Ce qu’elle n’est pas, pas plus que maladroite, mais ça peut lui arriver comme tout le monde. « Exactement. Tu sais ces choses-là sont si vites arrivées. » Agata tient régulièrement des livres au dessus de la tête des autres, c’est bien connu. Pour le reste elle se dit que c’est une bonne occasion d’apprendre à se connaître, même si elle connaît désormais un détail important de sa vie. Il lui pose une colle, lui demandant de se décrire en cinq mots. C’est assez compliqué, entre ce qu’elle serait prête à dire et ce qu’elle pense. « Alors, je dirais … Aimable, souriante, influençable, serviable et ... docile. » C’est sans doute une description honnête d’elle, c’est en tout cas comme ça qu’elle se voit. « A ton tour. »

C'est assez naturellement qu'Allen parvenait à se confier à Agata, pourtant dieu sait qu'il n'était pas fier de mettre des battons dans les roues de sa femme dans cette histoire de divorce. Il faisait durer les choses parce qu'il n'arrivait pas à se résoudre à la laisser partir, parce que sa vie d'homme s'était presque exclusivement résumée à ce mariage et parce qu'il ne valait déjà plus grand chose en tant qu'acteur, alors si en plus de ça il finissait définitivement seul, il aurait vite fait de faire don de son corps à la Science. Les paroles d'Agata lui rendaient en tous cas service, car ça l'aidait inconsciemment d'entendre qu'il était parfois préférable de laisser partir ceux qu'on aime, parce que jusqu'ici il s'était souvent répété qu'il atteindrait le fond du gouffre à la seconde où Andrea ne ferait définitivement plus partie de sa vie. « J'ai encore du mal à voir exactement les choses sous cet angle, mais t'as certainement raison » qu'il énonça alors dans un léger sourire, parce qu'il sentait qu'elle avait envie de l'aider, et que c'était agréable, parce qu'il y a un moment qu'on ne lui avait plus voulu autant de bien. Elle lui souhaita de dépasser tout ça et il afficha une esquisse teintée de reconnaissance, plus marquée encore lorsqu'elle lui proposa de le mettre en contact avec des avocats qui sauraient l'aider, parce que même si en l'état il préférait éviter, il se sentait vraiment soutenu. « Merci » qu'il reprit alors, un peu à court de mots il est vrai tant ça pouvait le toucher. « Je suis pas sûr qu'il y en ait beaucoup ici qui auraient été aussi empathiques, surtout après si peu de temps, alors je crois que je suis vraiment bien tombé, ce soir. » Et elle devinerait qu'il voulait parler de leur partenariat, du fait qu'il se retrouve avec quelqu'un comme elle, qui ne le connaissait pas encore très bien mais l'aidait déjà beaucoup plus efficacement que certaines personnes qu'il connaissait mieux. Il chercha alors à savoir si elle s'était déjà évertuée à retenir quelqu'un alors qu'elle savait au fond d'elle que la séparation était inévitable, et il écouta très attentivement sa réponse. « Et on se sent mieux, je suppose, quand on accepte enfin de voir la vérité en face et de renoncer à ce qui nous a longtemps figé dans le passé... » C'est ce qu'il supposait, oui, parce qu'il voyait bien que les six derniers mois avaient été pénibles, que c'était vraisemblablement du au fait qu'il se soit tant accroché à toute cette histoire. « Tu penses que je gâche mes chances de rester son ami en la retenant prisonnière de ce mariage ? » C'est ce qu'il craignait, parce qu'Andrea avait été une amie avant de devenir sa femme, que leur mariage s'était construit sur cette affection initiale et qu'à force de tirer sur la corde, il risquait de tout perdre, d'un seul coup. La discussion fut toutefois un peu plus légère lorsqu'il fut question du livre avec lequel elle pourrait malencontreusement le blesser dans son sommeil. « Oh j'en doute pas, et j'imagine que ça sert à rien que je me  prépare psychologiquement à me faire assommer en pleine nuit, vu que là encore, par le plus grand des hasards, ça pourrait bien me tomber dessus quand je m'y attendrai le moins, non ? » Trêve de plaisanterie, il ne se sentait pas réellement en danger, il n'imaginait pas du tout Agata tout orchestrer de manière à le surprendre un maximum. Mais ça le détendait de plaisanter un peu sur le sujet. Il trouva en tout cas son idée très bonne, ainsi lui demanda-t-il de se décrire en cinq adjectifs, afin d'assimiler la manière dont elle se voyait, les qualités ou défauts qu'elle mettait directement en avant, et si ça correspondait à ce qu'il pensait d'elle jusqu'ici. A sa réponse, il afficha alors un sourire contenté. « Pour ce qui est des deux premiers, j'approuve. Au sujet des trois autres, je demande à voir, mais attention, je décline toute responsabilité s'il s’avère que les deux derniers me donnent quelques idées ... » Dans un nouveau sourire, il lui fit comprendre qu'il plaisantait, parce qu'il ne prévoyait pas de tirer profit de ce qu'elle lui racontait, ça n'était pas son genre. Et justement, ce fut à son tour de se prêter à l'exercice. « Oh, hm, indulgent, passionné, honnête, prévenant, et … obstiné. » Il ignorait si ceux qui le connaissaient lui donneraient raison, c'était juste des termes qui lui paraissaient assez bien choisis de son point de vue. « Mais j'y pense, je t'aurais pas un peu spoilé sur le dernier, par hasard ? » qu'il s'amusa, bien sûr en référence au début de leur conversation, où il avait très probablement donné de lui l'image d'un mari un brin entêté.

Elle ne sait pas tellement comment réagir face à cette situation, elle fait du mieux qu’elle peu. Mais elle est assez touchée par ce qu’il dit. Elle ne sait pas si ses conseils sont très utiles, mais elle essaie, elle essaie de lui dire ce qu’elle pense, ce qu’elle ferait dans une telle situation. Même si elle ne peut pas se mettre à sa place, elle n’a jamais été à sa place. Peut-être devrait-il apprendre à lâcher prise, même si encore une fois elle n’a pris connaissance de la situation que quelques minutes auparavant. « Il te faudra du temps j’imagine. » Il ne le fera pas du jour au lendemain certainement. Mais quelque part elle est contente qu’il se confie à elle, cela veut dire que leur partenariat part du bon pied. Et elle voudrait l’aider, qu’il se sente soutenu ne serait-ce que pendant l’aventure. Elle peut même lui trouver un bon avocat s’il le désire. Elle lui proposerait bien de le défendre elle-même, mais elle ne le pourrait pas et ce n’est pas son domaine. « Il n’y a pas de quoi, c’est normal. » Si pour une fois elle peut se servir de ses relations pour faire le bien autour d’elle, cela lui ferait plus que plaisir. Un large sourire vient s’afficher sur son visage lorsqu’il lui dit être bien tombé, ses joues s’empourprent également légèrement. Elle est facile à flatter Agata, elle est surtout sensible aux compliments. « Je pense tout de même qu’il est difficile de rester de marbre face à une telle histoire. Mais merci ça me fait plaisir, et je te retourne le compliment. » Elle l’apprécie jusque-là, et elle ne pense pas changer d’avis, il a l’air facile à vivre, et c’est exactement ce dont elle a besoin Agata. Quant à savoir si elle a eu un jour du mal à laisser partir quelqu’un, elle ne pourrait répondre par l’affirmative. « Je pense que oui effectivement, tu te sentiras mieux. Mais ça ne fait que six mois, c’est difficile de tirer un trait sur tant d’années. » Ce qui est totalement normal, cela ne se fera pas du jour au lendemain juste parce qu’il voudrait aller mieux et l’oublier, même s’il ne semble pas vouloir l’oublier pour le moment. Sa prochaine question la laisse silencieuse quelques secondes, elle ne sait comment lui répondre sans le blesser. « Oui je le pense. J’espère simplement que ce n’est pas déjà trop tard pour toi. » Elle ne veut pas dire que ça l’est, mais il l’a déjà fait patienter un bon moment. « Je ne sais pas comment elle est, mais s’il est rancunière et qu’elle ne veut pas revenir sur sa décision, c’est possible. » Agata, elle aurait une autre vision des choses, mais elle est empathique, sensible et il est facile de la prendre par les sentiments, simplement elle sait que tout la plupart des gens ne sont pas comme elle. Quittant ce sujet quelques minutes, ils parlent de son côté dangereux, qui n’existe évidemment pas. « Oui c’est quelque chose que je ne peux pas prévoir tu sais, étant donné que ce ne serait pas fait exprès. » Un nouveau sourire vient prendre place sur son visage, bien entendu elle n’a aucunement l’intention de le frapper avec un livre, elle en serait bien incapable. Elle proposait maintenant de mieux apprendre à se connaître l’un l’autre, c’est une étape primordiale pour elle étant donné que tant qu’ils seront encore tous les deux dans le jeu, ils seront liés. Il est pourtant difficile pour elle de se prêter au jeu des adjectifs, elle a peur d’avoir une image bien trop biaisée d’elle, comme tout le monde et n’est pas certaine de savoir qui elle est vraiment en réalité. Un léger rire s’échappe de sa bouche lorsqu’il prononce ces dernières paroles. « Oh je vois, tu veux faire de moi ton esclave personnel. Mais je ne suis pas aussi docile que cela. » Ses lèvres s’étirent à nouveau. Elle n’est docile qu’avec certaines personnes, dans certaines situations, il faut savoir comment s’y prendre avec elle. Quant à la description qu’Allen fait de lui, elle la trouve plutôt vraie, et ce même s’ils ne se connaissent que très peu. Mais il est vrai qu’elle avait cru comprendre qu’il était obstiné. « Si j’avais cru le comprendre. Ta description m’a l’air honnête, même si j’attends de voir si tu es réellement indulgent lorsque tu auras reçu ce fameux livre sur la tête. » Ce qui n’arrivera évidemment pas pourtant.

Si on lui avait dit qu'il en viendrait à se confier sur la fin de son mariage dès le premier soir de l'aventure, il ne l'aurait évidemment pas cru. Mais avec Agata, ça semblait si naturel, parce qu'elle avait ce petit quelque chose qui le mettait à l'aise, et en confiance, et l'incitait à se livrer alors qu'il n'aurait pas nécessairement osé évoquer toutes ces choses dans d'autres circonstances. Sa partenaire semblait penser qu'il serait plus simple pour lui de voir les choses autrement avec le temps et il hocha doucement la tête. « Oui, du temps c'est sûrement ce dont on a besoin dans ces cas-là. » Il n'en savait rien, c'était la première fois qu'il en passait par là. Les filles qu'il avait connu avant Andrea avaient compté différemment, ainsi cesser de les voir n'avait jamais été plus difficile que ça. Il tint en tout cas à remercier Agata d'être à l'écoute, alors qu'ils ne se connaissaient encore que très peu. Il avait le sentiment qu'elle était réellement empathique à ce qu'il vivait, et c'était assurément la preuve que la production lui avait fait un beau cadeau en l'associant à elle. « En tout cas, rassure-toi, j'ai pas prévu de te réserver ça tous les soirs. Parce que même toi ça finirait par te filer le cafard » qu'il reprit sur un ton doucement amusé, préférant qu'elle sache qu'il ne prévoyait pas de lui parler de la façon dont il vivait la séparation avec sa femme tous les soirs. Agata saurait sûrement l'écouter s'il ressentait l'envie de se confier à nouveau, mais il ne voulait pas donner l'impression qu'il attendait de sa partenaire qu'elle fasse office de psy. « En réalité, je pense qu'aujourd'hui c'est assez facile pour moi de te confier tout ça parce qu'on se connaît encore assez peu, mais qu'ensuite j'aurai beaucoup plus de scrupules à t'embêter avec mes histoires. » Il lui sourit, parce que c'était vrai, que s'ils avaient l'occasion de durer assez longtemps dans le jeu, il aurait de moins en moins envie de lui faire perdre son temps. Agata semblait penser qu'il finirait par se sentir mieux s'il arrivait à laisser tout ça derrière lui, mais qu'il pouvait se laisser un peu de temps, car six mois ça restait frais. Le brun se pinça la lèvre et acquiesça silencieusement, pensif. Il ne savait pas s'il pourrait seulement un jour oublier, ou ne serait-ce qu'y penser un peu moins. Son mariage, sa famille, tout ça avait longtemps été au centre de sa vie, et c'était une véritable obsession depuis qu'il avait tout perdu. Il chercha par la suite à savoir si elle pensait que sa femme pourrait accepter de rester son amie, malgré son manque de coopération. « Je sais qu'elle m'en veut et que ça a fini par la rendre amère, mais c'est pas dans sa nature d'être comme ça. Alors j'aime croire qu'elle garde un peu d'affection pour moi malgré tout. » Que même si elle ne voulait plus de lui, qu'elle préférait vivre ailleurs, il resterait quelqu'un de particulier pour elle, comme elle resterait toujours quelqu'un de particulier pour lui. Au sujet du livre en tout cas, il semblerait qu'il n'ait vraiment aucun moyen de savoir quand ça pourrait bien lui tomber dessus, dans tous les sens du terme. Heureusement que cette partie là de leur échange n'avait rien de très sérieux. « C'est vrai que dit comme ça, ça manque pas de logique » qu'il répliqua, l'air de vraiment craindre pour sa sécurité alors qu'en vérité, il n'avait jamais envisager l'idée qu'elle puisse être dangereuse. Agata se décrit en cinq adjectifs et le canadien s'amusa des deux derniers, faignant d'avoir une idée derrière la tête. « Mon esclave, oui, mais pas dans la chambre Agata, évidemment ! » Il agita les mains et adopta un air innocent, mais non sans rire de la situation, parce que ça n'était pas comme s'il y avait eu le moindre risque qu'il cherche à exploiter la situation d'une telle manière. Elle devait avoir remarqué que ça n'était pas trop son genre, quand même. « Ça dépend, tu pourrais tout aussi bien avoir à faire à mon coté passionné » qu'il précisa ensuite, alors que le sens qu'il allait donner à ce mot risquait d'être un brin différent de celui pour lequel il l'avait consciemment inclus à sa propre liste. « Parce que je pourrais me jeter hors du lit en hurlant, le tout avec passion, eh oui. » Il rit de nouveau rien qu'à imaginer cette scène surréaliste. Il n'était certes pas toujours très vaillant, mais il en fallait quand même un peu plus pour le faire paniquer. S'il se prenait un livre sur la tête, disons qu'il était plus probable qu'il mette un moment pour réaliser ce qui lui arrivait.