La production a voulu miser sur des endroits interactifs, avec de vraies personnes aux commandes de certains lieux, contrairement aux années précédentes. Mais cette idée n’emballe pas réellement Colin. Si la grande roue en était une vraie, et si le tir à la carabine était remplacé par du paintball, par exemple, ce serait différent et tout de suite plus intéressant. Il s’attendait à un vrai parc d’attraction, grand huit et compagnie, et il se retrouve avec une piscine en plastique rempli de canards de la même matière. Grosse éclate. À la rigueur, il y a que le stand de tir à la carabine qui est susceptible de l’intéresser et encore, c’est plus pour l’envie de gagner une peluche qu’il balancera directement à la poubelle que l’intérêt à manier une arme, sachant qu’en vue du pays dans lequel il vit, il n’est pas friand de celles-ci. Ceci dit, l’ennui et la curiosité aidant, il prend le chemin de ce fameux stand de tir et il constate bien vite qu’il n’est pas le seul à avoir eu cette idée puisqu’il tombe sur un candidat dont il ignore encore l’identité. « Euh, ouais mais non, l’tir précis ça me connait, mais pas c’genre là. » Le tir à la carabine, c’est pas le genre de la maison, contrairement à ce que l’on pourrait penser. Son sport a lui, au lycée, c’était le basket, même s’il parait qu’il avait une prédisposition pour le tennis quand il était gamin selon Nancy, ce qui explique la volonté de cette dernière pour qu’il reprenne ce sport au plus vite. « Et si tu poses la question, c’est que t’es craignos, non ? » Question rhétorique. Il connait déjà la réponse. « Mais vas-y, j’t’en prie, j’sens qu’au fond de toi tu crèves d’envie d’essayer. Promis, j’me moque pas. » C’est qu’un demi-mensonge.

Le gars ne comprend pas sa réflexion, mais ça ne l’étonne pas forcément, parfois Colin est le seul à se comprendre, et ça lui va très bien. « Ouais, voilà, on va dire ça. » Il rétorque en poussant un léger soupir. Il n’a aucune envie de s’expliquer sur sa petite vanne, alors il préfère laisser couler. À la réflexion du type, il comprend qu’il ne doit pas être très doué et qu’il se tâte à essayer l’activité. Mais Colin, dans sa grande bonté, essaie de le motiver, promettant de ne pas se moquer. « Naaan, c’est pas mon genre. » Voilà, tout à fait. Le type tire et … se loupe. Ce qui provoque un léger rire de la part de Colin – c’est pas non plus drôle à s’en rouler par terre, hein – qui ne tarde pas à se retourner vers son camarade. « J’suis un bon menteur. » Il précise, en haussant les épaules. Roh, ça va, c’est bon enfant, il s’est foiré, c’est marrant, fin de l’histoire. Colin va pas le persécuter avec ça, c’est pas assez intéressant pour tenir sur la durée. Le type lui pose beaucoup de questions, et Colin répond d’abord par la dernière. « Jer... Colin. » Un jour, il va arrêter de déconner, mais pour ça il faut qu’il soit concentré quand il répond à certaines questions, mais, dans ce cas-là, c’est le ratage de son camarade qui avait toute son attention. « Alors j’t’explique, le principe, c’est de viser la cible, pas les peluches. » Il lance en observant ladite peluche miniature, bien éclatée. Là, il doit avoir compris qu’il s’est foiré. « Meurtrier, elle t’avait rien demandé la pauvre, si ça s’trouve elle avait une famille, des bouches à nourrir… T’as fait des orphelins, Pablito, t’vas devoir vivre avec ça sur la conscience. » Il espère qu’il en est capable, ce n’est pas une petite responsabilité. Toutefois curieux de voir s’il peut faire mieux, l’américain reprend la carabine et se concentre. « Et toi, fais pas l’con. » Il ajoute, à l’intention du cowboy derrière le stand. La cible n’est pas si loin, il est persuadé que le type use d’un stratagème pour les faire louper, ce n’est pas possible autrement. « Bon, peut-être que j’vais avoir envie d’rendre des enfants orphelins aussi, j’sais pas. » Même si dans l’idéal il souhaiterait réussir, mais sait-on jamais peut-être que dans un acte manqué lié à son histoire il serait tenté, ahah. Et après quelques secondes de concentration, il ose pousser la gâchette.