connor.

Il est tard, peut-être bien que pour certains, c’est l’heure d’aller au lit, mais pour ma part, je n’ai aucunement sommeil. Mes yeux, grands ouverts, ne sont pas prêts de se fermer. Et mon corps ne ressent aucune lassitude. Visiblement, je suis en forme pour veiller tard. Enfilant une tenue approprié, à savoir un maillot, et attrapant au passage une serviette et mon iPod, je file en direction de la piscine, vide à cette heure. Je doute que quiconque ait envie d’y venir faire trempette en plein cœur de la nuit. Je fais un rapide arrêt au cellier, agrippant la première bouteille de boisson qui me tombe sous la main – du rhum, j’crois bien – avant de me diriger vers le sous-sol, et plus particulièrement vers le bassin d’eau chaude qu’elle recèle. Sur place, je me débarrasse vite fait de ma serviette en la déposant sur un transat, appuie sur la touche Play de mon lecteur puis monte le volume à fond, avant de le mettre en sureté. La musique s’élève dans la pièce, mais pas assez pour éveiller tout le château. Non, c’est amplement suffisant pour que je puisse l’entendre sans déranger tous le monde. J’ouvre la bouteille, en bois une longue gorgée, puis vais m’installer sur le rebord de la piscine. Je n’ai l’intention de me tremper toute entière, mais le contact de l’eau est si réconfortant que je m’y glisse finalement en entier. Boisson et baignade ne font pas toujours bon ménage, mais je saurai bien faire attention. Je suis une grande fille, non ?

Je n'ai pas fermé l'oeil depuis ? Depuis quand déjà ? Plusieurs jours c'est certain, j'ai les yeux quelque peu rougis par la fatigue pourtant je ne l'éprouve pas. Je me sens bien, si on occulte le douleur que me procure l'absence de Sixtine ainsi que la culpabilité qui me ronge face à son départ arbitraire. Chaque minutes, de chaque journée, elle hante mon esprit. Tout le temps, en permanence, elle ne me laisse aucun répit. J'ai envie de calme, et de tranquillité, le spa étant occupé comme la plupart des pièces du nid, je décide de jeter mon dévolu sur la piscine. Ne dit-on pas que l'eau apaise les esprits ? Je ne compte pas me baigner alors je reste en jeans et en tee-shirt, le bruit devrait me suffire. J'entends de la musique, merde. Pourtant, je pousse tout de même la porte, avec un peu de chance, si c'est Siomha, je pourrais me défouler. J'entre, et remarque Evey, au bord de la piscine, une bouteille d'alcool à la main; pourquoi pas. J'avance lorsqu'elle s'aventure dans l'eau. Je m'approche doucement, l'observe en silence et m'empare de la bouteille. « Tu vas te noyer si tu continue ! » Non pas que je m'en soucis tant que cela, de toute façon, j'suis pas en tenue pour la sauver, et j'ai laissé mon costume de super-héros au vestiaire. Sans me préoccuper de savoir si la bouteille m'appartient, je bois une gorgée, et m'installe sur le transat sans la lâcher. « La musique est nulle ! » Je m'autorise un nouveau commentaire, d'une voix étonnement neutre.

Pas moyen d’être seule un moment dans cette baraque, il y a toujours quelqu’un pour venir vous gâcher votre moment de tranquillité. Cette fois-ci, c’est Connor qui s’introduit là où se trouve la piscine, là où je me trouve aussi. Il a clairement l’air de manquer de sommeil ou il a fumé un truc pas trop légal, j’hésite entre les deux solutions. Ces yeux rouges, de toute façon, le trahissent. Ayant abandonné ma bouteille au bord du bassin, je me suis glissée dans l’eau sans trop accorder d’importance au nouvel arrivant, jusqu’à ce qu’il s’approche du rebord de s’empare de mon rhum. « Tu vas te noyer si tu continues ! » qu’il me lance, et je lui jette un regard mécontent. « J’aurais partagé si tu me l’avais demandé, tu sais. » fis-je, ironique. Même si je proteste, il ne me la rendra pas à moins que je sorte d’ici pour aller la chercher moi-même. Pas dans mes intentions présentes, mais ça viendra surement. Je le vois s’éloigner et aller s’installer sur l’un des transats. « La musique est nulle ! » Je lève les yeux au ciel. Grincheux, le monsieur. « T’es un grand garçon, changes là si elle te plait pas. » Ou fiche-le camp! Remarque, même si je le lui dis, il ne le fera pas. À quoi bon gaspiller de la salive pour ça. Je me laisse lentement glissé dans l’eau, m’enfonçant jusqu’aux épaules, laissant mes bras flottés à mes côtés. Je fais du surplace, n’ayant pas de réelle intention de nager.

Visiblement ma petite remarque qui n'avait rien de mauvaise, ne semblait pas plaire à Evey qui me lance un regard noir. Oui bah écoute si tu as envie de te suicider tu attendras que je me sois tiré ma belle hein ! Je le pense mais ne le dis pas, je me contente de la regarder, en fourrant la bouteille dans ma bouche. C'est clairement pas ce que j'aurais choisis pour me défoncer la tronche le rhum, mais ça se laisse boire. J'en bois d'ailleurs une bonne lampée. « J'avais pas envie de courir le risque ! » J'hausse les épaules, et après pourquoi je la croirais ? De toute évidence, nos rapports n'ont jusque là, jamais été très amicaux alors à quoi bon. J'fais un commentaire sur la musique, et étrangement j'pensais qu'elle allait s'énerver mas même pas. La bouteille dans la mains droite, j'attrape l'objet du délit, parcours la playlist. Je grimace, de la merde. Enfin plutôt j'connais rien du tout. « Et sinon t'as des trucs connus ? Quelque chose de ien quoi ! » C'est naze, j'ai envie d'écouter un bon U2, ah oui, ce serait cool. One, pour me mettre le moral encore plus bas qu'il ne l'est déjà. Ou alors une musique qui remue bien. Mais rien, que dalle. Je soupire, et repose le truc. Buvant de plus belle. « Si t'as soif dépêche toi, y'en aura bientôt plus. » J'suis sympa quand même, je la préviens.

« J’avais pas envie de courir le risque ! » Dis plutôt que t’avais pas envie de demander, sale impoli. M’enfin, je garde ça pour moi, j’ai pas envie de me l’ouvrir et de me faire chier, surtout qu’il a pas l’air commode, le Connor. Mauvaise mine, mauvaise attitude. Les deux vont de pairs, on dirait. Grincheux comme il est, il se permet même de critiquer mes goûts musicaux, ce qui me fait lever les yeux au ciel. À voir la grimace qui s’affiche sur son visage, il a pas l’air tellement convaincu par ma playlist. Wow, j’imagine sans mal les nullités qu’il doit avoir dans le sien. « Et sinon t’as des trucs connus ? Quelque chose de bien quoi ! » Bien sûr que j’ai des trucs bien, toutes les chansons sur ce lecteur le sont. Mais ça ne semble pas plaire à monsieur l’acariâtre. Il s’enfile une, puis deux gorgées de rhum. Mon regard se rive sur la bouteille, dont le contenu descend bien vite. « Si t’as soif dépêche toi, y’en aura bientôt plus. » J’ai compris, pas la peine de le crier sur tous les toits. Me glissant hors de la piscine par le rebord de celle-ci, je vais à sa rencontre et lui arrache la bouteille des mains, y prenant une longue gorgée. Deux ou trois autres comme ça, et on aura passé au travers. « Merci de m’en avoir laissé. » fis-je, mi sarcastique. De ma main libre, que j’ai préalablement séché sur ma serviette, je prends mon iPod et fait défiler la liste musical. « Hum… Anberlin, Muse, Three Days Grace, Coldplay, Eminem… y’a un truc qui te plait dans le lot? » Je ne sais même pas pourquoi je lui demande. Comme si je me souciais vraiment de ce qui lui ferait plaisir. Même pas.