Belle journée. Très belle journée. Une journée qui sait me rappeler les étés joyeux de ma jeunesse, en Angleterre, à chasser les papillons dans le jardin, les oiseaux chantonnant dans mes oreilles. Oui, mais non, je n'aurais jamais fait ça de ma vie. En fait, mes étés, en Angleterre, je l'ai passé plus à l'écart, avec ma bande de potes à rouler des bédos' dans une prairie. Arf, quelle époque. Nostalgique, j'étais posé, confortablement, sur le muret de la fontaine, une clope au bec. J'inspectais les environs, sans pour autant m'y intéresser. A vrai dire, j'me faisais plutôt chier. J'observais les autres candidats, un peu plus loin, chahutant les uns avec les autres. Quelle bande de singes loufoques ceux la... Finalement je me lève, fais quelques pas, doucement, en continuant de tirer sur ma clope. Je dois passer pour un loup solitaire quand même. Mais j'aime pas me mêler. Pas aux abrutis en tout cas. Je choisis mes amis. Je continue d'avancer quand je vois une jeune femme un peu plus loin. Discrètement, je me permets de la reluquer brièvement. Pas moche. Vraiment. Bon, finalement, je vais donner un sens à ma journée. Je jette ma cigarette dans l'herbe ; je nique l'écologie, de toute manière je suis persuadée qu'il y a des gens payés pour nettoyer la merde qu'on laisse derrière nous, ici. Puis m'en vais vers la jeune femme. « Salut » l'interpelai-je. Je lui adresse un sourire chaleureux. « J'pense pas encore avoir eu l'occasion de me présenter. » Ouais, pas spécialement original, mais que voulez-vous, il faut bien commencer par quelque chose. « Joanès » terminai-je.

Quel engouement. Sa joie m’anéantis, son accueil me fait rêver. Quelle douceur. Quelle subtilité. Une réponse en trois mots, ou sinon : ‘vas te faire foutre’. Soit. Je comprends vite. Mais ce n’est pas un air méprisant qui m’arrêtera, tout au contraire, je relève le défi. En effet, la jeune femme venait à peine se présenter à moi, me répondant d’un air nonchalant. Un peu le genre de nana qui te remballe fièrement, même quand tu l’abordes sans la moindre arrière pensé –certes, ce n’était pas mon cas. J’imaginais déjà qu’elle allait aussitôt se faire la malle, mais même pas. Au contraire. Elle s’approche, tire sur mon t-shirt, pour faire apparaître à son regard curieux l’intégralité du tatouage situé sur mon buste. Ah ouais, quand même. Elle ne se gêne pas. Son approche me surprend un peu mais je ne peux m’empêcher de sourire. J’admire le culot. Elle me demande des explications, l’intérêt de ce tatouage. Mouais. J’ai envie de dire, ça ne la regarde pas, mais j’suis poli. « Ca représente une certaine période de ma vie » Je me gratte la tête rapidement. Oui, il représente une période de ma vie. Une période spécifique, qui est aussi gravée sur ma peau que dans ma mémoire. Mais j’lui en dirais pas davantage. « J’en ai pleins d’autres, mais ils ne se montrent qu’à l’abri des regards » j’enchaine, sur un brin d’humour. On ne sait jamais, si ça peut l'intéresser, c'est avec grand plaisir que je lui ferais découvrir toutes les subtilités de mon corps. Mon ton se fait presque enjôleur tandis que je me permets d’afficher un fier sourire. Par la même occasion, ça me permet de passer le sujet. Je n’aime pas parler de ça, ça doit se remarquer d’ailleurs. Tant pis. J’ajoute : « Mais maintenant que t’as vu, à ton tour, qu’est-ce qu’il y a voir chez toi ? » Véridique : d’où elle se permet de me désaper sans rien m’offrir en retour ?

Elle répond favorablement à ma proposition. Il n’y a personne ici, dit-elle. Certainement qu’il y a personne. Si on oublie les candidats, les caméras, et surtout ce voyeur pervers de Cupidon. Soit. Dans ce cas, c’est vrai, il n’y a personne. Mais dans le cas présent… Bref. Je me sens épier, en long, en large. Elle m’observe, cherche le moindre tracé, dessin sur ma peau. Elle va être servi… Elle retient mon menton captif, l’immobilise entre ses doigts. J’ai l’impression d’être sa marionnette. Voir son corps devenir un tel centre d’intérêt est flatteur mais gênant à la fois. Finalement, elle va même jusqu’à m’enlever mon t-shirt. J’ai pas le temps de réagir que je suis déjà torse nu. Je la voyais déjà m’enlever mon pantalon d’ici 2 min. Putain. Elle ne manque vraiment de culot, et clairement, ça m’impressionne. « Sinon, tu peux aussi me foutre à poils, te gêne pas… » lui dis-je sarcastiquement. Ouais, j’lui rappelle juste que je lui ai pas donné l’autorisation de me déshabiller. Mais bon, ça m’étonnerait qu’’elle en tienne compte. Mon torse est à la merci de son regard, avide de réponse. Je me sens comme mis à nu. Elle ne s’en rend peut-être pas compte, mais elle a toute ma vie devant ses yeux, là. Il n’y a pas un tatouage qui est là sans raison. Tous renvoient à mon passé, mon présent, mon avenir. Tous mes secrets. Toute ma vie est là. Il suffit juste de pouvoir les décrypter. « J’en ai aussi un sur le pénis, si tu veux voir de plus près… » ajoutai-je, railleur. C’est faux, mais bon… faut bien que j’puisse en tirer quelque chose. D’ailleurs, quand je réclame l’égalité, en lui demandant qu’elle me montre aussi quelque chose, elle répond qu’il n’y a rien d’intéressant. Qu’elle me croit, pas besoin qu’elle ait des tatouages pour que je trouve son corps intéressant. « Tu m’as enlevé mon t-shirt, je t’enlève le tiens. Donnant – donnant » lançai-je en m’approchant d’elle. De plus, elle même l’a dit, il n’y a personne ici... Mes doigts s’accroches sur le bas de son t-shirt, jouent légèrement avec, sans pour autant la lui en défaire. Non, je ne vais pas la violer non plus ; j’suis un mec sage et patient.