happy - le 7 avril à 3h25

TITI

Fin du prime. Joanès est éliminé, je ne comprends pas, tout comme je ne comprends pas sa nomination depuis quatre semaines. C'est inconcevable pour moi. Bref, je perds encore quelqu'un que j'aimais bien, malheureusement, un de plus. Je me retire du plateau le plus vite possible, avant d'aller fumer une clope pendant que tout le monde dort. Après deux ou trois clopes, je finis par rejoindre la salle de bain qui est encore allumée, bizarrement. Je vois Titi posé dans un miroir. « Tu veux des mouchoirs ? » je demande à Titi alors que je la vois le visage gonflé et les yeux rouges, franchement, elle a vraiment pris cher lors du prime. Il est clair que je n'aurais pas aimé être à sa place, la pauvre. « Faut pas lui en vouloir, elle est très conne mais c'est pas de sa faute » je lui souffle alors en parlant de Jasmine qui a été très con sur le coup, enfin, comme d'habitude j'ai envie de dire, mais bon, il faut que la petite blonde passe au dessus. C'est dans les gènes de Jasmine d'être aussi cruelle, elle ne peut pas lutter, quoi qu'elle en dise, personnellement, je ne crois pas à son changement, elle ne peut se racheter une conduite, c'est trop tard. Mais ... Et puis on dit bien que faute avouée, faute à demie pardonnée ? Non, ça aussi c'est une belle connerie, en tout cas, je ne sais pas trop quoi dire pour réconforter Titi. Je suis un iceberg, ce n'est pas dans ma nature de faire cela, habituellement, c'est moi qui fait pleurer les autres, en général. Du coup, je vais peut-être fermer ma gueule, pour éviter de m'enfoncer et cela sera mieux pour tout le monde. Je recule de quelques pas pour me cogner contre un lavabo et je pose mes fesses dessus en croisant mes bras sur ma poitrine.

Elle se tourne. Elle pensait avoir un minimum de tranquillité, juste un seul instant dans la salle de bain, après tout ça. Juste le temps de se démaquiller. Elle n'a le courage de rien, pas même d'enlever ses vêtements de prime, alors elle essaye de prendre soin de sa peau, à défaut de pouvoir se changer les idées autrement. Mais la présence de Krisjana de la dérange pas, au contraire. Elle ne s'attendait à la voir dans ce rôle. Elle est gentille, enfin Titi trouve qu'elle est gentille, mais elle ne la voyait pas dans le rôle de la copine qui propose justement des mouchoirs. « Non... C'est gentil... Merci... » Qu'elle lâche doucement, ayant déjà tout son stock à côté d'elle. Elle a même dû exploser le budget record de mouchoirs, toutes anciennes saisons confondus. À elle toute seule, parce qu'elle ne parle pas de Jasmine elle-même. Parce que même sous la colère, elle a bien vu qu'elle aurait eut envie de pleurer, la starlette. Elle trouve qu'elle a quand même été un peu dure avec elle. En venir au point à lui dire qu'elle la déteste. C'est beaucoup pour la blonde. Oui, elle pense ça, alors qu'elle est encore en colère d'avoir été bernée. Oui, elle pense qu'elle a été trop dure avec Jasmine, mais comparée à ce que la jeune femme même à fait, ce n'est rien. Pourtant, elle ne la traitera pas de conne, comme Krisjana le fait. Oh que non. Dans sa manière de voir les choses, c'est elle l'imbécile et non l'inverse. Après tout, qui n'est pas tenté de faire marcher Titi ? Qui croit tout ce qu'on dit ? « C'est pas elle qui est conne. C'est moi. J'suis qu'une imbécile... » Qu'elle lâche, ne pleurant plus, mais affichant cette moue dégoûtée d'elle-même. Elle sait que si ses proches avaient été là, ils l'auraient engueulée elle. Pour avoir pu croire une fille comme Jasmine. Il n’y a que Titi pour la croire en même temps. Et puis ce n’est pas que Jasmine. C’est un peu Maxence. Mais Krisjana ne se focalise que sur la première… Comme elle a commencé, Titi ne peut pas s’empêcher de se confier à elle. Sincèrement. « On m’a déjà dit que j’étais conne comme mes pieds ! Moi j’ai jamais compris ce que ça voulait dire parce que c’était pas possible pour moi… » Qu’elle dit en plissant ses sourcils, en se mordillant les lèvres. « Mais ça, c’était avant comme dirait la pub pour les lunettes, parce que je ressens ce que c’est que d’être bête comme des pieds… Et ça fait beaucoup de mal… » Elle lutte pour ne pas pleurer à nouveau et être exaspérante pour la brune. « Toi aussi de toute manière, tu dois me trouver conne ! » Tant qu’à faire, elle est bien prête à le savoir maintenant…

Bien que certaines personnes en doutent, parfois, il m'arrive d'avoir des élans d'humanité, de compassion sur les autres. Compassion que je cache en général, je ne voudrais pas briser ma réputation de connasse égoïste, j'y tiens. Mais bon face au minois dévasté de Titi, je ne peux pas m'empêcher de tâter son humeur. Franchement, autant vous dire qu'elle a une sale gueule, j'imagine qu'elle ne doit pas être au top de sa forme. Elle me contredit. « Je crois qu'on ne t'a pas fourni avec le bon mode d'emploi toi, t'es pas sensée aller dans son sens » je lui souffle alors, simplement. Elle est pas sensée approuver les actes de Jasmine. J'crois qu'elle se rend pas compte qu'elle est entrain de ruiner tous les efforts que je mets en oeuvre pour la réconforter. Elle est apparemment bête comme ses pieds, j'ai pas tout saisi à sa phrase, je mets cela sur le compte de l'émotion. Elle me dit que je dois la trouver conne. J'hausse simplement les épaules, on ne peut pas dire qu'elle soit brillamment intelligente comme moi, évidemment, mais sinon, elle n'est pas plus conne qu'une autre. Elle est surtout enfantine, c'est tout. J'comprends pas trop son besoin de se dénigrer, les autres s'en occupent déjà alors pourquoi s'enfoncer volontairement. C'est très curieux. Je l'observe avec attention lorsque je me rends compte qu'elle attend toujours ma réponse, merde, c'est vrai. « Je pense pas que conne fasse partie de tes adjectifs principaux, je dirais que tu es malheureusement très gentille » je commence alors. Si elle était comme moi, elle ne se ferait pas couillonner, qu'on se le dise, la preuve, Jasmine n'a jamais essayé de devenir mon amie, j'ai même l'heureuse impression qu'elle m'évite en ce moment. Mais cela n'engage que moi. Du coup, elle reste quand même l'une des proies les plus faciles de cette maison, soyons honnêtes, les gens l'ont très vite cerné. « Alors ceux qui le veulent, en profitent » je conclus simplement. En même temps, il faut de tout pour faire un monde, non ?

Titi fronce les sourcils. Elle ne comprend pas ce que Krisjana veut dire par aller dans son sens, dans le sens de Jasmine elle comprend, mais elle n’insiste pas. Pour elle, elle est effectivement imbécile. Qui aurait vraiment pu croire que Jasmine pouvait s’intéresser un peu à elle, juste un petit peu ? Et ne parlons même pas de Dior, qui doit bien en rire, de chez elle. Tout le monde aurait soupçonné quoique ce soit, un aussi gros mensonge comme celui-ci. Elle se trouve tellement nulle, bête, stupide, la plus crétine des crétines. Elle se taperait bien la tête contre le mur pour voir si son cerveau se remettrait bien en place. Pour ça, il faudrait peut-être qu’elle ait un cerveau, non ? En tout cas, Krisjana ne semble pas d’accord avec elle. Ou en tout cas, elle ne semble pas la trouver si conne. « Pourtant on me le dit assez souvent… » Ouai, elle en entend souvent des « oh mais quelle conne ! » Quasiment à chaque fois qu’elle fait quelque chose. Enfin pas ici, elle trouve qu’ici ils sont assez sympa sur ça. Enfin jusqu’à ce soir on va dire. Elle entend beaucoup dire qu’elle est aussi écervelée, mais elle ne sait pas ce que ça veut dire. En tout cas, elle est un peu dans le flou. Pour être gentille, c’est malheureux ? « Pourquoi malheureusement ? Pour moi être très gentille c’est quelque chose de bien quand même, non ? » Qu’elle dit en fronçant légèrement ses sourcils, avec une moue d’incompréhension. C’est vrai, elle entend parfois dire que ce n’est pas bien d’être trop gentille, mais elle, elle ne le voit pas de cette manière. Elle préfère être gentille, que méchante, c’est tout bonnement normal, non ? « Ils en profitent parce que je suis trop gentille ? Le problème c’est que j’ai plus envie qu’on profite de moi, mais en même temps j’ai pas envie de devenir méchante pour ça… » Rien que pour ça, non. Au pire, elle serait assez bête de préférer être profité que de devenir quelqu’un d’autre. « Toi, je certaine et sûre qu’on profite jamais de toi, mais comment tu fais… » Qu’elle lui demande d’une petite voix. Krisjana n’est pas la plus sympa du nid, il faut être honnête, mais elle n’est pas si méchante que ça. Si ?

Apparemment elle a souvent entendu qu'elle était conne. Et alors ? J'arque un sourcil, où est le problème ? On s'en fout de ce que les autres pensent, au final. « Faut pas croire tout ce qu'on te dit, c'est aussi simple que cela » je réponds rapidement d'une voix badine. « Normalement oui, mais après quand il y a de l'abus, cela peut se retourner contre toi » je lui explique cela, qu'on se le dise, je ne parle pas par expérience personnelle, non, par définition je suis le contraire de la fille gentille et qui se laisse marcher dessus. Mais j'ai observé pas mal de personnes de mon entourage qui étaient dans le même cas que Titi, et au final, elles se faisaient bouffer, pas dans le premier sens du terme. Parce qu'elles étaient trop douces, elles n'osaient pas répondre, se défendre face aux autres, bref, je ne comprends pas. Elle ne veut plus qu'on profite d'elle, mais toujours rester gentille. Je crois que je n'ai jamais autant utilisé cet adjectif de ma vie. J'esquisse un léger rictus avant de prendre la peine de lui répondre. « Quel di-l-e-m-m-e » je laisse entendre d'une voix fatiguée car j'ai l'impression que pour Titi le monde est soit blanc, ou soit noir, il n'y a aucun juste milieu, aucune nuance, le gris n'existe apparemment chez elle. C'est déplorable. « Tu peux juste te montrer plus ferme et plus décidée, ou alors, bien t'entourer» je siffle en douceur car avoir Dior et Jasmine dans son carnet d'adresse, je crois et j'en suis persuadée même, qu'elle peut faire beaucoup mieux. Elle ajoute qu'on ne profite jamais de moi, en effet, pour une fois, elle tape dans le juste et me demande comment je fais. J'esquisse un vague mouvement de la main. « Je ne suis pas un exemple à suivre » je confie alors en haussant les épaules, Titi a besoin que les autres l'apprécient, moi, aucunement. Je crois que c'est l'une de nos plus grandes différences.

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