krisjana

Je crois que je suis encore fiévreux. Ou complètement gelé à cause des médicaments avec lesquels je me gave. C’était certain que d’enfermer des gens ensemble, ça nous fait partager des microbes… Et voilà ce qui arrive. On est sur le dos durant plusieurs jours. Mais le pire, c’est d’être malade par une telle chaleur. Ce n’est pas la première fois que ça m’arrive, puisque bon, ça fait énormément de temps que je n’ai pas connu un hiver comme l’hiver québécois. Mais là au moins, la température justifie la grippe qu’on attrape. Alors qu’ici… Bah à Hawaii, on ne devrait jamais être malade. Ça devrait être une règle. Ouais, clairement, ça ne devrait pas exister. Surtout en voyant ma tête dans le miroir. Je ne suis pas à mon meilleur, non vraiment pas.  Le teint tout blême, les yeux et le nez rouges,  je passe la main dans ma barbe. Je ressemble à un vieux clochard. Je ne suis pas franchement soucieux de mon apparence, mais là je viens de franchir une certaine limite du raisonnable. Je dois faire peur aux enfants devant leur écran de télévision. En fait, j’espère qu’aucun parent ne laisse leur enfant regarder cette émission. Avec toutes les scènes de cul… Ce n’est pas pour toute âge. J’attrape la tondeuse à cheveux, avec une soudaine idée en tête. Je ne garantie pas que c’est la meilleure idée du siècle par contre.  Je suis sur le point de l’allumer lorsque je vois une candidate arriver derrière moi, ce dernier se reflétant dans le miroir. On ne peut pas dire que c’est la candidate dont je suis le plus proche, mais elle peut toujours m’être utile. Sauf que je ne suis pas certain qu’elle soit du genre à accepter de rendre service. « Krisjana justement, je crois que t’es la femme  qu’il me faut. » J’ai un doute là-dessus, mais c’est elle qui a franchis la porte la première, alors je vais faire avec. Je lui lance un sourire un sourire pseudo charmeur qui doit paraitre assez pathétique avec la tronche de malade que je me traine. Il faut bien avouer que ma phrase peut légèrement porter à confusion sur mes intentions. Je me retourne pour lui faire face, balançant la petite tondeuse devant ses yeux. «  C’est aujourd’hui que tu vas me montrer si tu es agile avec tes mains. » Ok, faut que j'arrête avec les phrases douteuses. « T’as déjà utilisé ça ?» Je demande, en faisant référence à l’objet que je tiens dans mes mains.  Alors, elle va m’aider ?

Je passe simplement dans la salle de bain pour chercher ma serviette mais je crois que c'était une mauvaise idée car j'ai Benjamin qui m'interpelle, je suis tentée de faire comme si je n'avais rien entendu mais il se fait insistant. J'aligne quelques pas curieux dans sa direction ? Je suis la femme de la situation. Je pousse un long soupir avant de rouler des billes pour l'observer, que me veut-il ? « Ou pas » je glisse donc, je ne veux pas qu'il me foute la pression avec son petit regard de malade imaginaire. Tant qu'il n'est pas à l'article de la mort, je ne le considère pas encore avec pitié. Il ne faut pas abuser non plus, sans déconner ! Il me tend sa tondeuse en me demandant si je sais la manier, quelle question. J'hoche simplement la tête, silencieuse en attendant une suite qui ne vient pas. Alors je propose. « Tu veux que je te rase à prison break, c'est ça ? » je l'interroge alors en arquant un sourcil avant de tenter un regard dans sa direction. Parce que ça me tente bien, là, en plus il a tellement une sale mine que je suis sûre que si je commençais, il aurait du mal à m'arrêter. « Je pourrais même te faire des petits dessins sur les côtés » je précise alors d'une voix morne en tapotant son crâne, juste au dessus de ses oreilles. Il parait que cela se fait. « Les autres t'ont dis que t'as vraiment une sale gueule ? » je lui demande alors en fronçant les sourcils. Donc vu qu'il a un allure de merde, peu importe la coupe que je pourrais bien lui faire, ça ne pourra que l'arranger, franchement ! « Essaie juste de ne pas crever maintenant, alors que je suis près de toi » je lui demande alors d'une voix ferme, qu'il ne me tousse pas à la gueule aussi, sinon je le fous sous l'eau froide et je planque les fringues et les serviettes, je vous jure, j'en suis tellement capable. Bon il me répond ou il compte s'évanouir tout de suite.

Quoi, Krisjana n’est pas la femme que j’attendais, la femme de la situation comme je viens de le prétendre ? C’est ce qu’elle a l’air de penser. Non mais moi je n’attendais qu’elle, en fait. Ou pas, comme elle le dit. « Tu veux que je te rase à prison break, c'est ça ? » À quoi ? Je ne suis pas certain de comprendre à quoi elle fait référence pour le coup. « Prison Break ? » Je suis prêt à gager qu’il s’agit d’un film ou quelque chose dans ce genre là. Je la regarde au travers du miroir, alors qu’elle est toujours derrière moi. « Je pourrais même te faire des petits dessins sur les côtés » Je décale ma tête alors qu’elle vient toucher cette dernière, grimaçant légèrement. « J’étais sur le point de te dire que tu pouvais faire tout ce dont tu avais envie, mais sais-tu, je vais retenir mes paroles. » Ouais parce que bon, je ne m’imagine pas vraiment avec des designs de douchbag sur les côtés de la tête. « Les autres t'ont dis que t'as vraiment une sale gueule ? » Je fronce les sourcils, jetant un coup d’œil à mon reflet. Une sale gueule, c’est certainement ce que j’ai en ce moment, il n’y a pas de doute. Mais ce n’est pas parce que d’autres candidats m’ont fait un commentaire à ce propos. « Pas besoin des autres pour le remarquer. Mais non, je me dis qu’une petite coupe ne pourrait pas me faire du mal. » Faudrait peut-être que je me coupe la barbe aussi, mais rendu là, j’ai vraiment peur de ressembler à un gamin de douze ans. Alors on verra bien. « Essaie juste de ne pas crever maintenant, alors que je suis près de toi » Cette fille est tellement d’agréable compagnie. Je soupire, bien que son commentaire m’amuse tout de même un peu. Surement parce que je sais qu’elle est sérieuse. Enfin, en quelque sorte. « Promis, je vais me tenir sage. Mais t’es mieux de bien me faire ça, sinon, je ne serai pas responsable de mes réactions d’après. » C’est un avertissement. « En fait, tu crois que ça va bien me faire, les cheveux rasés ? » je demande avant qu’elle ne mette l’engin en marche. Elle doit bien s’en foutre, de quoi je vais avoir l’air après ça. Mais elle pourrait au moins donner son avis.

« Quoi, tu ne connais pas ?» Non mais apparemment, ça fait partie des choses que je devrais savoir dans ma vie, vu sa question. C’est si incroyable que ça de ne pas connaitre ce qui se passe dans la culture populaire de nos jours. « Hm… Non. Ça fait de moi un inculte ? Je vis sans télévision, ordinateur et tout depuis maintenant dix ans. » Et ça n’a jamais créé un manque chez moi, qu’elle se rassure. Je trouve tout ça totalement futile. Mais revenons au sujet principal, c’est à dire ma tête et le fait que dans quelques minutes je vais me retrouver sans un poil sur le coco. « Tu crois que je vais te laisser brimer ma créativité ?» Sa créativité, oh pardon, la demoiselle est sérieuse d’un coup. Non mais elle croit vraiment que je vais lui laisser faire n’importe avec ma tête. « De toute façon, je m'en tamponne de ta permission en fait, c'est moi le boss» D’un coup, je commence tranquillement à regretter de lui avoir demandé ce service. J’ai peur de voir quel sera le résultat. « Bah le boss, il est mieux de faire du bon boulot et de ne pas me faire ressembler à un clown de cirque. » je dis, avec une pointe de menace dans la voix, bien que je lui offre mon plus beau, et sarcastique, sourire. Parce que bon, le but de toute ça, c’est de rafraichir mon look, qui a dépérie encore plus durant les derniers jours, avec cette mauvaise grippe. « Tu n'as pas tord, quelques semaines supplémentaires et tu deviendrais comme le père Fouras, avec option sdf aussi » Sa remarque me tire un sourire, alors que pour une fois, je comprend la référence qu’elle me fait. « Je ne suis pas vraiment doué en énigme, je n’aurais pas fait un bon père Fouras. » Je secoue la tête, remarquant l’air qu’elle affiche. « Quoi ? Ça je connais. On avait une version québécoise de Fort Boyard. » Il y a de cela plusieurs années, mais je m’en souviens bien. On regardait ça en famille même. C’était une sorte de classique, dans le temps. Et le moment fatidique arrive, alors que je suis pris d’un léger doute. Je tiens à savoir si ça me fera bien, les cheveux rasés, avant de ne plus pouvoir revenir en arrière. « Franchement aucune idée, au pire, si c'est loupé, ça repousse » C’est sur que vu comme ça, elle a plutôt raison. « C’est sur… Mais loupe pas. » Non, non, je ne lui met aucune raison. Et alors qu’elle met en marche l’appareil, je me retourne, préférant ne pas remarquer le massacre qu’elle est entrain de me faire. Je vois mes cheveux tomber sur le sol, et je dois avouer que ça m’amuse un peu finalement. Et elle a raison, ce n’est que des cheveux. Rien de dramatique, en fait. Plusieurs minutes s’écroulent et je n’ose pas bouger, voyant une Krisjana concentrée, qui semble même s’appliquer à la tâche. Et c’est fini. « Alors ? » Qu’elle dise quelque chose.

Krisjana semble se foutre complètement de mon mode de vie avant d’arriver dans ce jeu. Tant mieux, je ne comptais pas non plus m’étendre sur le sujet, je ne faisais qu’un commentaire face à sa remarque. « Déjà le matériau de base n'est pas top, aussi. Je ne peux pas non plus faire des miracles ! » Elle est entrain d’insinuer que je suis laid ? Elle a du culot celle-là. Je sais que tout les goûts sont dans la nature, mais tout de même, je ne suis pas désagréable à regarder, non ? Ok, ça fait un peu prétentieux. Et c’est vrai que je ne suis pas à mon meilleur ces derniers jours. « Outch… Tu me fais tellement mal à l’égo là. » Je ne crois pas que je vais réussir à m’en remettre. Une si jolie fille qui me dit que je ne suis pas vraiment beau. C’est horrible comme commentaire. « T'inquiète pas, maintenant ce ne sera plus Père Fouras mais La Boule que tu vas pouvoir faire» Elle est en feu la demoiselle. Ça me fait sourire tout de même, la comparaison est presque semblable, mais oui. « De mieux en mieux. T’en as encore d’autres du genre en stock ? » Parce que si ça continue, elle va me sortir toutes les façons de me faire comprendre à quel point je ne suis pas avantagé par la nature. Mais maintenant qu’elle a la tondeuse en main, je viendrais presque à regretter de lui avoir demandé un tel service. Puisque bon, qu’est-ce qui me dit qu’elle ne va pas me détruire le crâne au grand complet. Je préfère ne pas voir ce qu’elle fait, et donc, j’aurai la surprise lorsque c’est terminé. Ce qui prend beaucoup moins de temps que je ne l’aurais pensé. « Avant, c'était Ben, maintenant, tu es potable ! On peut dire que je t'ai considérablement embelli » Je me tourne pour admirer les dégâts, passant la paume de ma main sur mon crâne fraîchement rasé. « Tu veux plutôt dire : avant c’était Ben et maintenant c’est Magnifique Ben. » Un sourire satisfait sur les lèvres, m’emparant de la tondeuse qu’elle vient de déposer. « C’est ton tour maintenant ! Tu veux être rasé sur un côté, ou la boule complètement à zéro ? » je demande, mettant en marche l’engin, la regardant amusé. Quoi, c’était pas ça le plan ? Elle me rase les cheveux et j’en fais de même avec elle après ?