Teddy & Tifenn
21 avril à 03h07

Ça arrive à tout le monde d’avoir un petit moment de faiblesse. Tifenn l’a depuis le départ de Joanès. La gamine a bien essayé de remonter la pente, mais l’éloignement des siens la semaine de son anniversaire ne l’a pas aidé. Elle est au plus bas. D’autant plus qu’elle a comme l’impression d’être à l’écart des autres. Plus personne ne semble avoir envie de venir vers elle. C’est comme si elle n’intéresse plus personne ici. Sa chute dans la côte de popularité y est pour beaucoup cette fois. Tifenn doute. Elle n’a pas envie d’abandonner car ce n’est pas pour ça qu’elle est venue, mais elle désespère de ne pas savoir où trouver du réconfort et l’envie de se battre à nouveau. Le prime vient tout juste de se finir qu’elle s’empresse de partir en coulisses. Les larmes aux yeux, elle traverse le plateau sans un regard, sans un mot pour les autres. Dès qu’elle pénètre dans la pièce, la belle éclate en sanglot. Tifenn vient s’appuyer contre l’un des murs et se laisse glisser jusqu’à ce que ses fesses touchent le sol. Toute recroquevillée sur elle-même, l’allemande ne peut s’arrêter de pleurer. Elle a mal un petit peu partout. Surtout au cœur ce soir. Des tas de points d’interrogation se baladent dans son esprit. La porte s’ouvre et avec la pénombre, elle a bien du mal à voir qui fait son entrée dans la pièce. Instinctivement, elle vient passes ses mains sous ses yeux pour essuyer ses larmes. Faudrait pas qu’on la prenne pour une nana qui passe son temps uniquement à pleurer. Elle se redresse aussi, histoire d’avoir un petit peu plus fière allure. Là, en plus de tout ce qui la chagrine déjà, elle a honte d’être dans un état pareil.

Le prime est terminé, autant dire que j’ai pensé ne jamais revoir ces coulisses à tel point que j’avais laissé tout contrôle m’échapper pour pleurer comme un petit enfant qui tente de se retenir en vain. Être face à Jouko, penser que c’était lui ou moi et que par conséquent l’un de nous sortirait forcément avait été la goutte d’eau de trop. Dans tous les cas de figure j’aurais vraiment pris peur en me retrouvant dans les deux derniers puisque je suis bien mieux ici qu’à l’extérieur mais être au coude à coude avec le grand blond avait été d’autant plus pénible. Après les larmichettes de panique mon sourire avait retrouvé le chemin de mes lèvres et en plus d’être heureuse j’étais vraiment soulagée. Profitant de tout le monde, discutant de-ci de-là je fus l’une des dernières à quitter l’endroit et c’est en poussant la porte que je vis une personne toute recroquevillée dans une position typique. « Tifenn ? » Je ne suis pas faite pour réconforter les gens, je n’ai jamais essayé à vrai dire mais je ne me sens pas capable de laisser la candidate seule dans sa tristesse. Une tristesse de sa part que l’on peut tous ressentir ici. Je m’approche à pas de velours et plus la distance se réduit entre elle et moi plus je peux voir ses yeux rougis. Euh… je… je devrais peut-être y aller. Mais non ! Moi j’aimerais qu’on reste et qu’on ne me laisse pas seule. Alors je vais rester, voilà. « Je peux t’apporter un verre d’eau si tu veux, à défaut de réconfort. » Je l’admets, je suis nulle et incompétente pour ça, c’est la faute au manque d’entrainement. « Mais si tu veux parler de quoi que ce soit je peux peut-être m’asseoir ici ? » Je désigne une place à côté d’elle, je ne sais vraiment pas comment me comporter et autant dire que la candidate a de la chance que je ne sois pas dans une période où mon manque de pitié reprend le dessus.

« Tifenn ? » Elle ne connait pas vraiment la voix qui vient de prononcer son prénom, mais elle reconnait très bien le visage de la jeune femme qui s’approche d’elle. Teddy. Les deux brunes n’ont jamais eu vraiment l’occasion de parler alors c’est gênant pour l’allemande de se retrouver en pleur devant une personne qu’elle connait à peine. Elle a vraiment très honte de se montrer dans un état pareil. Elle ne sait même pas ce qu’elle doit dire ou encore faire. Elle n’a pas l’habitude d’avoir du monde autour d’elle lorsqu’elle n’est pas au top de sa forme. En général, Tifenn est toute seule. Toujours toute seule. « Je peux t’apporter un verre d’eau si tu veux, à défaut de réconfort. » Non. Pas besoin d’eau. C’est en secouant sa petite frimousse enfantine que la jeune femme vient répondre qu’elle n’a pas besoin d’un verre d’eau. Elle n’a besoin de rien en fait. Sauf peut-être bien de parler un peu. « Mais si tu veux parler de quoi que ce soit je peux peut-être m’asseoir ici ? » C’est gentil de sa part à Teddy. Un mince sourire vient prendre place sur le visage de Tifenn durant quelques secondes. Deux ou trois, pas plus. Ses mains se joignent et ses doigts jouent ensemble. Elle reste silencieuse un moment. Elle ne bouge pas. Ses lèvres tremblent un peu. Elle a bien envie de parler, mais à chaque fois ses sanglots reviennent plus forts que jamais. Un soupir s’échappe de ses lèvres. On dirait bien qu’elle cherche du courage au fond de son petit corps de crevette. « J-je … crois que je ne sais toujours pas ce que je fais ici. » Enfin, si elle le sait, mais disons qu’elle n’est pas spécialement convaincu que cela marche vraiment. « J’crois que c’est un véritable échec pour moi cette aventure. » Dans le sens où elle est très loin d’arriver à son objectif, oui c’est un échec pour la brunette. Un de plus à ajouter à sa collection. « Je voulais juste montrer à certaines personnes que j’suis capable de vivre comme une jeune femme de mon âge, rien de plus. » Ou alors elle est ici car quelqu’un l’a poussé à être ici. Peut-être bien les deux même. Baissant la tête, Tifenn renifle assez bruyamment tout en essayant de sécher ses larmes. Encore.

Tifenn n’est pas la candidate avec qui j’ai passé le plus de bons moments, tout comme nous n’avons pas d’affection ou d’attache particulière pourtant la voir si triste me serre un peu le cœur car j’étais comme elle il y a quelques minutes, à pleurnicher faiblement. Bêtement je lui propose un verre d’eau afin qu’elle puisse se réapprovisionner car peut-être qu’elle a déjà perdu des litres de larmes avant que je n’arrive. Pour autant elle n’en veut pas, j’en déduis qu’elle ne doit pas être si desséchée que je le pensai. Dans ce genre situation ce don on a le plus besoin c’est de parler ou au contraire de ne rien dire alors ne sachant dans laquelle des deux catégories elle se situe je lui propose mon oreille. Elle ne répond pas pourtant son attitude m’incite à rester car je sens qu’elle va se mettre à parler, et c’est d’ailleurs exactement ce qu’elle fait. « J-je … crois que je ne sais toujours pas ce que je fais ici. » Après tout ce temps il faudrait qu’elle se trouve une motivation tout de même mais je compatis par une petite moue et tandis qu’elle s’efforce de parler je m’assois à ses côtés. « Pourtant tu as un très beau parcours et surtout tu es toujours là. » Son aventure ne s’apparente en rien à un échec. « Je voulais juste montrer à certaines personnes que j’suis capable de vivre comme une jeune femme de mon âge, rien de plus. » Je l’observe bien que l’obscurité mange la moitié de son visage. Je me demande tout à coup quel âge elle a bien que nous ne devons pas être très éloignées l’une de l’autre. « Pourquoi tu veux prouver ça ? C’est évident que tu te débrouilles bien toute seule, ça fait plus d’un mois que tu es enfermée ici. » Je lui parle doucement, compatissant en me montrant empathique, c’est une sensation étrange et à la fois agréable. C’est la première fois que je fais ça ! J’espère que je ne fais pas les choses mal car Tifenn a vraiment l’air très triste et au fond du trou à l’instant même. « Puis tu sais si ces certaines personnes ne l’ont pas compris c’est peut-être qu’elles n’ouvrent pas les yeux, il faut vivre pour soi. » Je lui souris, ne réfléchissant pas à ce que je dis. J’espère que ça aidera Tifenn.

« Pourtant tu as un très beau parcours et surtout tu es toujours là. » Effectivement, elle est toujours là pour la gamine. Pour combien de temps ? Elle n’en sait rien. Elle espère encore pour un bon petit bout de temps, peut-être bien jusqu’à la finale, mais elle essaye de ne pas trop se faire d’illusion. Elle est déjà ici depuis bientôt deux mois et c’est déjà une énorme victoire pour elle qui ne pensait même pas passer les castings. L’allemande ne sait pas si on peut parler de très beau parcours, mais en tout cas elle est plutôt fière de ses premières semaines d’aventure. Un petit peu moins des deux dernières. Un maigre sourire timide s’installe sur son doux visage pâle. « Merci. » qu’elle dit à voix basse tout en osant enfin poser ses pupilles sur sa camarade, Teddy. C’est là qu’elle remarque qu’elle est un petit peu comme elle physiquement. Toutes deux sont brunes et ont un visage auquel on pourrait donner le bon dieu sans confession. Elles n’ont pas l’air bien grande autant l’une que l’autre et semble avoir pratiquement la même morphologie. Elles semblent avoir le même âge aussi. En tout cas, c’est certains qu’il n’y a pas dix ans qui les séparent. Tifenn vient faire part à Teddy de l’une des raisons de sa présence ici. « Pourquoi tu veux prouver ça ? C’est évident que tu te débrouilles bien toute seule, ça fait plus d’un mois que tu es enfermée ici. » Pourquoi veut-elle prouver ça ? C’est une très bonne question à laquelle la brunette n’ose pas répondre pour le moment. Il faudra attendre que sa colocataire reprenne la parole pour la faire réfléchir un petit peu plus. « Puis tu sais si ces certaines personnes ne l’ont pas compris c’est peut-être qu’elles n’ouvrent pas les yeux, il faut vivre pour soi. » Teddy n’a certaine pas tort. Elle a même raison et c’est certains. Tifenn doit arrêter de se soucier du regard des autres et faire ce qu’elle a envie, quand elle en a envie. Pourtant c’est bien plus facile à dire qu’à faire. « Les gens pensent que je ne suis pas … normale. » C’est un peu fort comme mot, mais c’est exactement ce que ses parents lui disent depuis sa plus tendre enfance. « Ils disent ça parce que je suis trop timide. D’après eux je ne pourrais arriver à rien dans la vie car je me laisse marcher sur les pieds et je n’ose pas dire non. » Et tout ça pour une histoire de garçon. C’est dingue quand même. « C’est pour ça que j’ai voulu participer à Fake Lover, mais … mes parents n’approuvent pas vraiment. » Elle fait une grimace et hausse les épaules telle une gamine.

La jolie brune me remercie. J’esquisse un fin sourire, peut-être que la chaleur d’un peu de sympathie l’aidera à se sentir mieux. Assise à ses côtés je penche la tête afin de mieux voir son visage si triste. Elle se préoccupe pour des choses qu’elle a déjà pu prouver à des millions de téléspectateurs, si elle en sortant d’ici elle regarde les images au fil des semaines elle s’apercevra qu’elle a évolué. Je le sais parce que je suis persuadée que ce serait le cas pour chacun de nous, l’enfermement nous amène à penser deux fois plus qu’à l’extérieur. Moi c’est un peu le contraire et c’est justement ça que j’aime ici, il y a toujours quelqu’un à qui parler et ça m’évite d’être seule et de faire trop fonctionner mes méninges. Pour la première fois de ma vie, et je le dois bien à ce jeu téléviser, je réconforte quelqu’un avec sincérité. Je me sens peinée pour elle bien que ses raisons restent incompréhensibles à mes yeux. « Les gens pensent que je ne suis pas … normale. »Là elle capte définitivement toute mon attention. J’hoche la tête, plus intéressée que jamais et piquée dans ma curiosité je souffle un « Pourquoi ? » Si je me sens tant concernée que c’est aussi le cas pour ma personne mais j’aimerais savoir les raisons qui poussent les gens à qualifier Tifenn d’anormale, je voudrais savoir si elles sont aussi valables que les miennes. « Ils disent ça parce que je suis trop timide. D’après eux je ne pourrais arriver à rien dans la vie car je me laisse marcher sur les pieds et je n’ose pas dire non. – Ah. » que je lâche dans une sorte de déception. Il n’y a rien de plus normal que d’être timide. Il est vrai qu’elle l’est beaucoup plus que la normale mais c’est quelque chose qui se guérit. « Il suffit d’oser le dire une fois et tu y prendras goût ! C’est agréable de s’imposer. » Quand j’y pense caractériellement parlant je n’ai presque rien en commun avec la candidate. « C’est pour ça que j’ai voulu participer à Fake Lover, mais … mes parents n’approuvent pas vraiment. » Oh ça… je peux l’imaginer. Très bien même mais il faut qu’elle voit plus loin que sa panique. « Justement tu devrais profiter du fait d’être à l’intérieur et de ne pas avoir à prendre en compte ce qu’ils en pensent ! Si ça te fait du bien et que ça t’aide à t’imposer ils ne pourront qu’être d’accords. »Je parle doucement, compatissant aux tracas de Tifenn. Quelques secondes passent et je me redresse brusquement. « On va faire un exercice ! » Prenant un air plus sérieux typique de la peste qui sommeille en moi, j’observe la candidate d’un regard imposant. « Tifenn va faire ma vaisselle. » Évidemment l'objectif est qu'elle réponde négativement puisque je fais ma vaisselle au fur et à mesure comme une personne éduquée.