Je reviens à peine de la piscine, ça m’a fait le plus grand bien, mais il faut maintenant que je passe à la douche, détestant la sensation de chlore collée partout sur moi après un séjour dans la piscine. Je passe donc par le dressing, histoire de me trouver des fringues propres. Je sais déjà ce que je veux mettre, mon pantalon de jogging, vu que j’aimerais être à l’aise. J’entre donc dans le dressing et je vois Jorah déjà présent. Je réponds à son sourire. Je compte pas m’éterniser ici, donc je vais pas entamer une conversation. Du moins … c’est ce que je pensais avant de ne pas trouver mon jogging. Je commence à farfouiller mes affaires, mais rien, il n’y est pas. J’entreprends de fouiller le tas de fringues qui traîne par terre, jusqu’à ce que la voix de Jorah me perturbe dans mes fouilles archéologiques. Comment ça je me donne des grands airs ? « Quoi ? C’est parce que je t’ai pas dit salut ? » Je le savais pas aussi susceptible. Et son regard qui me soutient m’aide pas vraiment à comprendre pourquoi il m’a dit ça. Finalement, il esquisse un sourire. Ok, je comprends plus rien. Heureusement, j’ai le droit à une explication. Donc ainsi c’est un jeu entre lui et sa demi-sœur. Ben, chaque s’amuse comme il peut, hein. « D’accord… je vois. » Pas vraiment, en fait. La question qu’il me pose me laisse encore plus perplexe que l’explication. « Euh… » Je me vois mal jouer le rôle de sa demi-sœur pour la journée, hm. Il m’explique ensuite qu’il ne faut pas toucher au physique, ni aux mères. Bon. « Bon, d’accord, je serais ta demi-sœur pour la journée. » C’est bien parce que c’est lui. Et que je n’ai rien de mieux à faire, aussi. « Elle avait quel âge ta demi-sœur quand vous faisiez ça ? Histoire que je me mette dans la peau du personnage, tu vois. » Et bien oui, autant jouer le jeu à fond. J’ai pas de frères et sœurs, donc niveau dispute je m’y connais pas vraiment, mais je vais improviser avec mon magnifique talent d’actrice.

Je suis très surprise quand Jorah me lance sa remarque. Je le connais peu, mais je ne le connais pas comme ça, sous cet angle. Il me semblait être un gentil garçon jusqu’ici, pas difficile et très sympathique. Ce qui est le cas, en fait, puisqu’il m’explique la situation. Je veux bien jouer sa demi-sœur pour la journée, je crois que ça lui fera plaisir, et moi ça m’occupera, alors c’est parfait, tout le monde est content, que demander de plus. Je lui demande ensuite l’âge de sa demi-sœur au moment où ils jouaient à ce jeu, histoire que je prépare mon rôle. Quand je fais quelque chose, je le fais à fond, voyez-vous. Elle avait seize ans, donc et ses réflexions ne volaient pas haut. « Je vois. » Que je dis en me frottant le menton, comme si je suis en pleine réflexion quant au rôle que je dois jouer. C’est que je suis une actrice, moi, je fais pas les choses à moitié, voyons. Je n’ai qu’à me souvenir comment j’étais à seize ans, et l’affaire est dans le sac. J’étais une vraie chieuse, en plus, à seize ans, je devrais donc pas avoir trop de peine à m’immerger dans le rôle. Mais je n’ai pas trop la pression. « J’espère être à la hauteur. » Que je dis, avant de me préparer à dire adieu à Rowan la presque trentaine, et dire bonjour à … je ne sais pas son prénom, l’adolescente de seize ans qui fout la misère à son demi-frère, mais juste pour emmerder les parents, donc. Je craque mes doigts, je fais bouger ma tête, je sautille sur place, comme un boxeur avant un combat. Et Jorah lance les hostilités. Wow. Outch. Violent. C’est vraiment comme ça qu’on se parle entre frères et sœurs, même pour rire ? Ceci dit, la remarque ne vole pas haut. S’attaquer à ce gros défaut de ma personnalité, c’est bien trop facile. « Ah parce que tu es capable de beaucoup plus que moi, monsieur je sais tout ? Cite moi une seule chose où tu te débrouilles, que je rigole un coup ! Et désolée mon grand, mais tu peux dire au revoir à tes t-shirts, faut quand même que quelqu’un t’aide de ce côté-là, parce qu’on dirait un paysan péruvien ! » Je dis, en haussant le ton. Je sais pas si j’assure, mais je dois dire que c’est sympa comme activité. « Et puis qu’on y est, tu peux pas arrêter de prendre toujours les gens de haut ? À ce que je sache t’es rien, t’es le niveau zéro de la vie sur terre ! » Bon, réplique piquée dans un film, mais peut-être que sa demi-sœur avait de bonnes références, hein.

Je dois reconnaître que l’activité que me propose Jorah est surprenante, mais pas inintéressante. Disons que j’ai rien d’autre à faire, alors si je peux lui rendre service, c’est de bon cœur. Et je doute que je puisse jouer à un tel jeu tous les jours, alors c’est l’idéal pour moi qui m’ennuie très vite des activités qu’on a ici puisque ce sont toujours les mêmes au bout d’un moment. Ainsi, pour la prochaine demi-journée, j’ai seize ans et je suis une demi-sœur dont la répartie ne vole pas très haut. Je me demande d’ailleurs bien quel âge Jorah avait lors de ses échanges, je mise sur pas plus que la vingtaine. Jorah lance les hostilités ; il touche d’ailleurs un point sensible. Je croyais que cette histoire était du passé. Bon, certes, surtout de mon côté, en fait. Mais quand même, me balancer ça en pleine figure alors que je me suis excusée et surtout que je ne veux que personne ne soit au courant de ma maladresse, c’est méchant, non mais. Faut que je trouve une répartie digne de ce nom. J’attaque, et Jorah ne se fait pas prier pour répondre, c’est qu’il s’accroche le fourbe. Saleté de demi-frère. « Ah oui, tu crois vraiment que tu sais ranger ? » Je râle, tandis que je ramasse le premier t-shirt masculin qui me vient à portée de main, à quelques centimètres de mon tas de fringues. Je ne sais pas à qui il appartient, mais il fera l’affaire. « Parce que j’appelle pas ça ranger ! » Je lui lance le t-shirt à la figure. « Si t’es même pas capable de faire correctement ce que tu me reproches de faire mal, c’est un peu l’hôpital qui se fout de la charité ! » Ah oui, vraiment, même si le t-shirt ne lui appartient certainement pas. « Ah, on s’attaque à mon maquillage maintenant ? On parle de ta coiffure qui t’a été inspirée par un balais à brosses ou … ? » Bon, d’accord, on avait dit pas le physique, et j’enfreins légèrement les règles. Mais s’il s’attaque à mon maquillage, je peux bien m’attaquer à sa coiffure, hm ? J’imagine que c’est ce que sa demi-sœur aurait fait. Sa dernière remarque manque de me faire sourire. C’est faible, Jorah, je m’attendais à mieux. « Je suis une reine, tout le monde le sait, et les reines ne traînent pas avec les pouilleux, alors sois gentil et écarte-toi de mon chemin. » Je le balaie vaguement de la main. « Je ne peux pas respirer la même oxygène que toi, mon dieu, j’ai déjà l’impression d’étouffer. » Que je dis tandis que je mime un éventail avec mes mains, comme pour m’aider à avoir de l’air.

Titi marche dans les couloirs sans but, parce qu’elle s’ennuie, mais vraiment beaucoup. Elle s’ennuie un peu alors parfois elle va s’allonger sur son lit. Ce qu’elle comptait faire, lorsqu’elle passa à côté du dressing. Normal quoi, mais elle entendit des voix s’échapper de cette pièce. La blonde, curieuse comme elle est, s’approche de l’entrée du dressing sans se montrer pour écouter. Et c’est pas joli-joli ce qui se passe là-dedans. Elle ouvre même grand sa bouche, tellement elle est choquée par ce qu’elle entend. C’est quand même violent, enfin elle, elle trouve. Elle n’arrive pas à reconnaître les voix, mais ce sont des mots violents qui sont échangé. À coups de « tu n’es rien » et de « je suis une reine » ou de « curé », un truc comme ça. C’est vraiment choquant. Elle n’aime pas entendre ça, la blonde, parce qu’elle trouve ça vulgaire, bête et méchant. Comment on peut se dire ce genre de chose, alors que tout ce passe bien dans le nid entier. Du coup, elle est dans un grand dilemme, parce qu’elle aurait pu laisser tout couler, mais elle déteste entendre pleins de gens s’engueuler. Du coup après une demi-seconde pendant laquelle elle avait vraiment pensée s’en aller, elle débarque finalement dans le dressing. Elle ne peut pas laisser passer ça. Sourcils froncé. « Oh ! Ca va pas bientôt finir ces méchancetés ! » Qu’elle dit, les mains sur les hanches et la mine déçue. C’est Rowan et Jorah, et de ce qu’elle en sait, ils ne sont pas méchants à la base, alors pourquoi ils se disent ça ? « Pourquoi vous vous dîtes tout ça ! À quoi ça vous amène ! La méchanceté c’est pas su-per gentil ! » Elle bouge sa tête de droite à gauche. « Il faut enterrer la vache de la guerre et vous faire un gros câlin ! C’est dingue ça… » Qu’elle finit par dire en tournant les talons et partant de la pièce. Elle aime pas ça, quand des gens se disputent et elle n’hésitera pas à revenir s’ils ne se calment pas.

Ah oui, c’est petit de m’attaquer sur ma maladresse, c’est facile, c’est du pain béni, je suis pas d’accord. J’ai rien pour l’attaquer si ce n’est son anorexie présumée, mais on a dit pas le physique, et je respecte les règles du jeu, voyez. Je lui balance le premier t-shirt qui me vient sous la main, en prenant soin qu’il soit quand même adapté pour un homme, lui lançant une pique sur son rangement. Il joue le jeu à fond aussi, et accepte que ce t-shirt soit le sien pendant une fraction de secondes. « Tu sais très bien que de nous deux, je suis celle qui passe le plus de temps ici ! » Bah oui, c’est bien connu, une adolescente passe des heures à passer en revue ses fringues. « C’est plutôt toi qui te pointe au mauvais moment, du coup ! Et puis franchement, avec tes trois t-shirts et tes deux pantalons, t’as pas vraiment besoin de faire du rangement, va plutôt t’enfermer dans la salle de bain comme tu sais si bien le faire plutôt que de pourrir mon espace vital. » Et c’est bien connu, les adolescent quant à eux prennent beaucoup de temps pour se ‘’laver’’. Je critique ensuite sa coupe de cheveux, mais bien parce que je suis dans le rôle de la demi-sœur, parce qu’en temps normal je la trouve plutôt sympa, sa coupe, à Jorah. Ce dernier flanche d’ailleurs, esquissant un sourire. Soit dans ton rôle, Jorah, voyons. « Que veux-tu, tu me donnes tellement envie de quitter cette terre au plus vite que je suis à tes côtés, qu’il vaut mieux que je puisse me foutre le feu à tout moment, tu vois. » Que je dis en croisant les bras et en levant les yeux au ciel. « D’ailleurs, j’ai renversé des miettes de pain ce midi, sois gentil et va faire ton boulot. » Il sèche ensuite quant à savoir ce que je suis vraiment, je l’aide en m’autoproclamant reine, et une reine qui ne traîne pas avec les pouilleux s’il vous plait. « Pourtant tu corresponds plutôt bien au religieux ; t’es puceau, t’es coincé, t’es chiant et la seule fois où on s’intéresse vraiment à toi c’est quand tu parles des autres. » En fait je suis pas si un curé est puceau ou pas, mais bon, ça vole pas haut quoi. Je mime ensuite l’étouffement parce que je partage le même air que lui. J’essaie de ne pas sourire quand il fait son petit numéro après avoir balancé l’effroyable vérité concernant ‘’ma’’ médiocrité. « Oh, moi je suis médiocre ? Et que dire d’un type qui s’attaque à une fille, alors même que c’est sacré, hm ? » Normalement on touche pas aux plus petits que ce soit et aux filles, non ? À peine ai-je répondu qu’une silhouette fait son apparition dans le dressing. En l’occurrence, Titi, qui affiche une mine choquée. Je lui jette un regard furieux, étant encore dans le personnage, regard qui disparait à mesure qu’elle parle. Je l’écoute jusqu’au bout, tentant difficilement de ne pas éclater de rire. Vraiment, c’est pas ‘’su-per gentil’’ ce qu’on se dit avec Jorah, mais faut connaître le contexte, aussi. Je dis rien, me fait discrète, comme si je me faisais engueuler par un des parents. À peine a-t-elle détourné les talons que je fais le signe pause avec mes mains et éclate de rire. Faudrait donc qu’on enterre ‘’la vache de la guerre’’. Hm, ça va me faire rire longtemps ça. Une fois ce petit fou rire passé, je reprends mon sérieux.  « Si ma médiocrité est une source inépuisable, alors ta connerie l’est tout autant. » Je grimace légèrement et je laisse échapper un soupir d’énervement.

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