J'enfile mon maillot de bain avant de sortir, parce qu'à un horaire pareil, je vais évidemment cramer ma peau toujours -presque aussi- laiteuse, même après deux mois de soleil, alors autant bien cramer. J'avance d'un pas trainant, mais au lieu de me diriger vers la plage, je change d'avis pour la crique, je n'y suis jamais allée en plus, on se demande ce que je fous sérieusement de mes journées. Je croise Jasmine qui me demande de venir, je sais, elle m'adore. Je suis devenue son idole, en même temps, pour tout vous dire, je la comprends, moi aussi, à sa place, je serais impressionnée par une nana comme moi. En tout cas, je note tout de même son petit ton autoritaire, bravo, ça s'arrange pas, elle prend la confiance avec moi, la gueuse. « Oui, chef ! » je grogne alors quand madame se met à parler à l'impératif, retrouvant par moment son petit côté tyran, il faudrait lui dire que ça ne lui va pas. Je descends avec précaution l'échelle avant d'aller rapidement la rejoindre. « Tu te sens seule ? » je ne peux pas m'empêcher de lui demander en croisant son regard pendant un instant. Je parle d'Esteban, c'était sensé être son plus gros soutien dans l'aventure et il s'éteint de plus en plus, j'imagine qu'il doit se remettre en question, ou alors remettre en question sa participation au jeu pour ne plus vouloir se mêler aux autres. Franchement, je crois qu'à sa place, si Jorah venait à disparaître petit à petit, je le vivrais assez mal et je lui en voudrais. En plus tout le monde est là, à dire qu'Esteban est le petit protégé, que c'est injuste, alors qu'elle est juste à côté, je trouve cela un peu délicat. « Et au fait, merci de ne pas avoir répondu » je lui souffle en parlant d'Ulysse qui s'étonnait de son choix pour mon sauvetage en demi finale, elle n'avait pas voulu attiser la chose et lui avait plus ou moins dis de se taire, j'appréciais, vraiment. Il a de la chance que je ne sois pas susceptible, je vous le dis.

Elle ne voit pas de quoi je parle. Blague. « Menteuse » je lance en la regardant, en roulant des billes. Je me rends compte que j'arrive à capter maintenant lorsque Jasmine n'est pas sincère, je dois avouer que c'est assez pratique. Elle finit par me confier que si, un peu, elle se sent un peu seule. « Il doit avoir une bonne raison, ne t'inquiète pas » je souffle alors en haussant les épaules, c'est obligé, il ne faut pas se faire de soucis. Parce qu'on abandonne pas trop une nana qu'on est sensé aimé pour n'importe quoi, non ? Ou c'est moi qui idéalise totalement la chose, franchement, ça ne m'étonnerait pas non plus. Je lui parle du prime, la réponse de Jasmine fait naître un sourire narquois sur mes lèvres. C'est vrai leur petit groupe, ça me rassure parce que je ne suis pas la seule à l'avoir remarqué,j'avais simplement l'impression d'être un peu parano sur les bords quand j'avais parlé de meute à Amy, mais non. « J'ai l'impression qu'ils sont entrain de creuser leur tombe en restant tout le temps ensemble » je ne peux pas m'empêcher de lui faire partager en lui lançant un bref regard de biais qui voulait tout dire, bien sûr, je m'en fous, mais bon, c'est con de se limiter à quatre personnes alors qu'on est bien plus de dix quoi. Elle me demande ce que je lui ai fais. J'affiche un air presque outré, comment peut-elle penser cela de moi, voyons ! Elle me connait ! « Que dalle » je lui réponds. « On échange dix mots par semaine, et il croit tout connaitre de moi, il s'invente une vie, surtout, si tu veux mon avis » je résume alors, du coup, il se permet de juger, et c'est surtout lassant. C'est comme si le mec s'imaginait tout savoir au bout de deux contacts et encore, là, je suis large. «En même temps, il a douze dans sa tête, à cet âge, on se fait souvent des films, ça explique tout » je balance parce que dans ma tête, ça reste assez plausible, non ? Et puis à 12 ans, tu en fais des caisses, alors, ça colle plutôt bien au personnage, je trouve. «En plus contrairement à toi, il n'a rien subi » je souligne en arquant les sourcils, c'est vrai. Il fut un temps où Jasmine avait été pour moi une bonne victime, à la limite, elle, ça serait légitime qu'elle réagisse aussi mal à ma présence, mais Ulysse, je ne lui parle jamais, je m'en fous de lui et de sa victime, il n'a aucun intérêt à mes yeux, et il le sait, donc qu'il arrête de faire sa vie. Ou même le mec outré lorsqu'on me choisit.