+Adnan

Dés que j'ai su qu'aujourd'hui, c'était l'anniversaire de Adnan, l'inspiration m'était arrivé d'un seul coup. Je me suis isolé toute l'après-midi sans me préoccuper de la suite, sans savoir ce que je ferais de mon cadeau. Je ne sais pas quoi faire, j'ai ruminé toute la journée, fais les quatre cent pas, changer d'avis au moins mille fois... c'est le bordel, littéralement. Son anniversaire est bientôt terminé, plus que quelques minutes et je suis toujours partagé entre garder mes distances ou... ou lui reparler de nouveau. Je sais ce que j'ai dis, que je garderais mes distances jusqu'à qu'il revienne... mais c'est plus dur que ce que je croyais. Alors dans ces dernières minutes avant qu'un nouveau jour commence, je le cherche désespérément dans la maison. Il faut que je le trouve et d'un côté, je me dis que ce serait plus simple que je ne le trouve pas. Qu'il soit en balade à l'extérieur ou endormi dans son lit. Je pousse la porte de la buanderie, et je tombe nez à nez avec lui. Je reste un instant interdit. C'est con parce que je le cherchais, alors je devrais pas être surpris de l'avoir trouvé. Mais je me sens bête tout d'un coup, maintenant qu'il est en face de moi, avec ma feuille cartonnée A4 dans la main. « B-bon anniversaire... Cadeau...» Mon coeur s'excite alors que je lui donne le dessin en tentant d'être un peu nonchalant. Le cadran sur le mur de la buanderie annonce qu'il est 23H57, ou peut-être 58. Je suis content, d'avoir pu lui souhaiter son anniversaire. « Merci pour l'immunité.. » J'en profite pour lui dire, même si je l'avais déjà remercié. Je ne l'avais pas fais de vive voix alors je me rattrape comme je peux.

Une pomme. C'est fou tout ce que l'on peut faire avec une pomme. J'adorais les pommes, moi. Je sais, tout le monde s'en fiche, et si je le racontais à haute voix, Akela se ferait un plaisir de passer cet instant dans la rubrique "on s'en fout" à laquelle j'avais d'ailleurs échappé jusqu'ici. A croire que l'on ne s'en foutait pas tant que ça, hm. Mais oui, si j'étais venu dans cette buanderie, c'était bel et bien pour aller chercher une pomme. J'avais dans l'espoir de faire de la sculpture. Evidemment, je mangerai les morceaux en trop, je n'étais pas un de ceux qui gaspillaient la nourriture, et ce même si je ne mangeais pas beaucoup. Ça se mangeait sans faim, une pomme. Mais il me la fallait bien rouge. Vous savez, comme celles que l'on retrouve dans Blanche Neige. Ou la pomme d'Adam et Eve aussi, elle était rouge également. M'étirant quelque peu, j'arrivais donc dans la cuisine pour me munir d'un couteau, puisqu'il était évident que je n'allais pas creuser dans le fruit avec les doigts... ou avec les dents. J'avais pensé à la cuillère l'espace d'une seconde, mais non, c'était trop compliqué, et j'allais probablement devoir forcer. Je voulais quelque chose qui pourrait me détendre. Oh je ne savais pas encore quelle expression j'allais pouvoir lui donner, à mon bonhomme. Parce que oui, il s'agirait d'un bonhomme, je venais de le décider là, tout de suite ! Poussant la porte de la buanderie, mes prunelles parcouraient les différentes pommes à disposition. Il y en avait des vertes, des oranges. Les rouges se cachaient tout au fond, comme si elles m'avaient entendu arriver. Mais je n'étais pas dupe, j'avais un oeil de lynx et elles ne m'échapperaient pas. C'était au moment où je m'apprêtais enfin à attraper ma proie que la porte s'ouvrit. Aaron, sa silhouette presque parfaite se découpant sur le palier. Il bégaya, j'eu l'impression que les rôles s'inversaient. Il était là pour me souhaiter un bon anniversaire, avant de me tendre un magnifique dessin. Mes prunelles le dévorèrent littéralement, crachant probablement mille étoiles à la seconde. « C'est magnifique Aaron. » vraiment. Il avait du prendre du temps pour le faire. J'étais touché, d'autant plus que je ne l'avais jusqu'ici jamais vu dessiné. En plus d'être un musicien, il était donc peintre. Enfin, je le savais, mais maintenant, j'en avais la preuve en mains. En parlant de mains, voilà que je remarquais que j'étais encore armé de mon couteau. Un peu bêtement, je m'excusais comme je le pouvais. « Ce-C'est pas pour te planter, t'en fais pas. » D'accord, je devais avoir l'air particulièrement stupide pour le coup. Pas plus que d'habitude, en y repensant. Déposant mon arme, sans pour autant avoir eu le temps de faire un victime, mes doigts se saisirent avec délicatesse de la feuille qu'il me tendant, tandis qu'il me remerciait pour l'immunité. « C'est normal... » Je savais qu'il risquait d'être nominé, et je ne voulais tout simplement pas le voir quitter le jeu aussi tôt. Qu'ils pensent ce qu'ils veulent, moi j'avais encore besoin de lui ici. « J'espère qu'il ne t'a pas trop pris de temps. » dis-je en continuant d'observer le dessin, un peu impressionné. « Je ne voudrais pas que tu te sois embêté pour moi... » Ou peut-être que si, en réalité. Oui, quelque chose me dit que je serais tout de même plutôt flatté. Mais impossible de l'avouer à haute voix, non, non.

Faut toujours qu'il ait ses étoiles dans les yeux, ceux qui me font juste fondre. Et c'est pire quand il dit que c'est magnifique. Il a juste à prononcer quelques mots pour me redonner de l'espoir, balayer les doutes que j'avais sur mon talent. Juste avec ça, il plante l'idée de persister dans le monde de l'art alors que j'avais pourtant bien écarté cette idée, m'étant fait une raison depuis le début de l'aventure. C'est fou comme ses mots peuvent avoir un impact sur moi, comme il arrive à me remettre en question. « Si ça te plais... Tu m'as inspiré. » C'est bien le principal à mes yeux. Mon dessin était un coeur à la base. Oui, c'est complètement niais mais les deux oiseaux forment un coeur. Ils sont entourés de leur aura, de couleurs diamétralement opposées. Elles ont beau tenter de se mélanger sans y parvenir, ils ont beau se tourner le dos comme s'ils n'étaient pas faits l'un pour l'autre, les regards ne trompent pas. Ils ne peuvent se résigner à se quitter des yeux, à se dire adieu. Comme je lui ai dis, il m'a inspiré. C'est un peu tout ce que je ressens pour Adnan. Je sais qu'on n'est pas fait l'un pour l'autre, que tout le porte à croire, j'ai du mal à m'y résoudre. « Ce-C'est pas pour te planter, t'en fais pas. » Je lâche un léger rire en regardant la pointe du couteau qui pointe dans ma direction. Il finit par prendre la feuille tandis que je le remerciais pour l'immunité. « C'est normal... » Je sais pas si c'est normal au contraire. Je ne suis même pas sur qu'il ait fait le bon choix, parce que du coup, je suis revenu vers lui, parce que je l'ai interprété comme un pardon, comme un retour à la normale. « J'avais pas du tout envie de prendre mes distances tu sais... » Je me doute qu'il a du le sentir que je l'avais naturellement laissé tranquille mais je voulais pas qu'il croit que ça m'avait rien fait, que j'avais vécu cette semaine sereinement sans lui. « J'espère qu'il ne t'a pas trop pris de temps. » J'ai envie de dire : quand on aime on ne compte pas, mais ce serait légèrement déplacé hm. « Je ne voudrais pas que tu te sois embêté pour moi... » Et là j'ai envie de dire qu'il le vaut bien, qu'on 's'embête' pour lui mais je garde ses pensées pour moi aussi. « En fait, j'ai pas vu les heures défilées parce que je prenais du plaisir à le faire. Tout ce à quoi je pensais, c'était te faire un beau cadeau. » Ce n'est pas des bobards, ce n'est pas des choses dites pour le reconquérir non, j'avais abandonné cette idée parce que je m'étais rendu compte que tous ses gens qui le mettaient en garde sur moi avaient raison. Adnan est fait pour moi, j'en suis sur, mais moi je ne suis pas fait pour lui. « On peut rester proche comme avant, comme des amis, sans ambiguïté ? » C'est pas ce que je veux, mais c'est le mieux pour lui. J'ouvre mes bras, histoire qu'il s'y engouffre pour faire un câlin de réconciliation s'il accepte.

Contrairement à ce que j'aurais pensé, je n'étais pas particulièrement mal à l'aise du fait qu'Aaron soit là, juste à côté de moi. J'aurais pensé l'être plus que ça oui. Peut-être était-ce tout simplement parce que je n'avais rien à me reprocher, et que je savais que lui non plus n'était pas forcément responsable de ce qui était arrivé. Il l'était, évidemment, personne ne pouvait le nier, mais je crois qu'il n'en avait pas vraiment eu conscience. Du moins, il ne l'avait pas réalisé avant qu'il ne soit trop tard. Trop tard pour quoi ? Je n'en savais rien. Je ne savais plus rien. Je crois que le mieux était d'arrêter de me poser cette question parce que je savais pertinemment que la réponse serait compliquée à trouver. J'avais mal au coeur. Mais pas pour moi, non, étrangement, j'avais mal au coeur pour lui. Car j'avais bien conscience de tous les efforts qu'il faisait, et que c'était bien au dessus de moi que de le repousser continuellement. Je n'étais même plus certain d'en avoir envie. Nous ne nous étions pas vu de toute la semaine passée, et je devais bien avouer que son absence m'avait pesé au quotidien. J'aimais le savoir là, pas trop loin. C'était égoïste de ma part, oui, peut-être. Je n'en avais pas conscience. D'après le jeune homme, je l'avais inspiré. Mes joues s'étaient presque automatiquement rosies tandis que mon regard avait fui le sien pour tenter de cacher cette soudaine gêne. Je n'étais pourtant pas inspirant comme garçon, non, je n'en avais pas l'habitude. Et puis voilà qu'il me remerciait de l'avoir immunisé. En toute honnêteté, je n'aurais jamais pensé faire autrement. Evidemment, j'avais hésité avec Sacha, mais je m'étais dit que si il y avait bien quelqu'un à qui je devais la donner, c'était Aaron. Qu'importe ce que les gens redisent là dessus, dans mon coeur, je savais que j'avais fait le bon choix. Le choix qui me correspondait le mieux. Il reprit la parole en me disant qu'il n'avait pas du tout envie de prendre ses distances, et mes prunelles remontèrent jusqu'aux siennes. Je ne savais pas quoi lui répondre, puisque j'avais plutôt eu l'impression que c'était moi qui avait pris des distances par rapport à lui, et non l'inverse. « Je ne t'ai pas trop laissé le choix... » murmurais-je, presque inaudible. J'en avais conscience, oui, que c'était bel et bien de ma faute. Et j'avais également conscience que cet éloignement n'avait pas forcément tassé les choses, non. En tout cas, j'espérais qu'il ne s'était pas trop donné pour moi, mais c'était apparemment le cas puisqu'il avait précisé "des heures". Instinctivement, un sourire était venu se loger sur mes lèvres, j'avais eu beau tenté de le retenir, rien n'y faisait. « C'est le plus beau. » Oui, le plus beau des cadeaux. Même les quarante cinq mille euros d'Andreja ne valaient rien à côté de celui ci. Parce que je savais qu'il l'avait fait avec son coeur, et non pas par dépit. Et puis, voilà que le beau brun me demanda si nous pouvions rester proches comme avant, sans ambiguïté. Je devais bien avouer être quelque peu surpris, moi qui m'attendait à ce qu'il m'en demande plus. Mais sans trop réfléchir, voilà que mes bras s'étaient enroulés autour de sa taille tandis que je venais me loger tout contre lui, déposant un léger baiser sur son épaule. « Quoi que les autres te disent Aaron, je ne suis pas la solution de facilité. » Non, ça n'était probablement pas avec moi qu'il serait heureux. Alors peut-être avait-il encore une chance de l'être avec quelqu'un d'autre ? Ma voix se voulait pourtant douce, oui, je ne voulais pas le forcer à quoi que ce soit. « Je ne risque que de te décevoir par la suite... » ça n'était pas quelque chose qu'il voulait entendre, je le savais, mais c'était probablement mieux qu'il le sache maintenant. Je n'avais pas envie de lui mentir. J'en serais de toute façon incapable.

« Je ne t'ai pas trop laissé le choix... » C'est vrai que Adnan s'était éloigné de moi naturellement, mais je n'avais pas tenté quoique ce soit pour me rapprocher de lui suite au prime, parce que je pensais que c'était le plus juste à faire et je voulais juste lui dire qu'il m'avait manqué tout simplement, que cette semaine à le voir sans lui parler n'a pas été de gaité de cœur. « C'est le plus beau. » Il a beau me l'avoir déjà dit, ou plutôt me l'avoir fait comprendre, je m'en lasse pas. Ce n'est pas de la vanité, ce n'est pas pour flatter mon égo non. Ça le serait pour une autre personne mais là c'est Adnan. Si j'aime l'entendre, c'est parce que j'aime ressentir que je lui fais plaisir. Il vient se loger dans mes bras et je suis partagé. Parce que ça veut dire qu'il accepte qu'on redevienne proche en oubliant cette gêne passée, mais d'un autre côté, j'ai envie de plus que de l'amitié au fond de moi, même si je tente tant bien que mal d'abandonner cette idée. « Quoi que les autres te disent Aaron, je ne suis pas la solution de facilité. » Je fronce les sourcils, je ne comprends pas ce qu'il veut dire par-là. D'un côté je commence à avoir l'habitude, que Adnan se dénigre et comme d'habitude, je ne le crois pas. Je passe ma main dans ses cheveux tendrement, mes doigts caressant son crâne alors que je pose un doux baiser sur son front. J'ai bien le droit de faire ça sans ambiguïté non ? « Je ne risque que de te décevoir par la suite... » Il inverse les rôles. C'est en adéquation avec ce que je cherche à vouloir, puisque je tente de rester seulement amis avec lui, alors le fait qu'il ne croit pas en lui, ça devrait pas me poser de problème... Mais ça me rend malade en fait, qu'il se sous-estime, qu'il ne se rend pas compte la chance que j'aurais si je l'avais en amoureux. Oui, en amoureux hm.  « J'ai beau cherché, vraiment... Je ne vois pas comment tu pourrais me décevoir. » Je m'avance surement mais en cet instant précis, je le pense. Tout ce que je sais de lui actuellement ne me déçoit pas en tout cas. « La personne que tu aimeras, elle aura de la chance et j'espère que tu la trouveras vite ! » Enfin, pas trop vite non plus... Parce que j'aurais du mal à y assister, à le voir amoureux d'une autre personne sans être jaloux.