Elle ouvre les yeux Pia et c'est comme si une enclume venait de s'échouer sur son crâne. Elle pousse un grognement plaintif, gémit lorsqu'elle se retourne pour enfoncer sa tête sous son oreiller. Il n'y a pas de lumière mais elle a mal aux yeux quand même. Sa langue est pâteuse, elle a du mal à bailler, l'impression qu'à chaque mouvement sa tête va exploser. Quelle heure est-il ? Elle manque de s'évanouir, au moins, en tournant le cou pour regarder le réveil. Onze heure. Onze heure seulement ? Elle retournerait bien dormir, Pia. Pour trois jours au moins. Mais elle a beau fermer les paupières de toutes ses forces, siffler Morphée pour qu'il vienne la reprendre, elle n'y arrive pas. Au bout d'une demi-heure elle finit par se lever. Son corps entier n'est que douleur, elle doute de pouvoir réussir à marcher. Elle se traîne lamentablement jusqu'à la cuisine, manquant de se laisser tomber pour pleurnicher dans son coin, prête à cracher sur le premier candidat qui osera lui adresser la parole. Elle ouvre la porte dans un effort qui lui paraît surhumain avant de grimper péniblement sur un des tabourets de la cuisine, laissant sa tête retomber entre ses mains. Elle tourne la tête lorsqu'elle entend un tiroir claquer, prête à rugir en direction du coupable mais rien que ce geste lui arrache une grimace de damné. Elle est condamnée, Pia, c'est sûr. Dieu existe, finalement, et il la punit pour tous ses pêchés. C'était qu'un petit excès, monsieur le juge. Rien de plus. Elle pose son regard rougi sur Jessica. « Fais-moi un café je t'en supplie. » D'ordinaire elle ne s'abaisserait pas au niveau de supplier la brune, surtout qu'elle a quand même un peu en travers de la gorge son tout nouvel accès à la love room avec Andreja, mais il n'est plus question d'honneur ou quoi que ce soit. Elle a plus que jamais besoin de sa dose d'arabicca.

En me réveillant ce matin, j'ai coupé court à un très beau rêve dont je ne connaîtrais sans doute jamais la fin. C'est vraiment dommage, ça avait l'air bien. Je ne sais même pas ce qui m'a sorti de cette rêverie, je ne devais plus avoir sommeil, et dès que j'ai repris pleinement conscience, la monde des rêves s'est évanoui. C'est trop dommage, surtout que me lever tôt signifie que je vais m'ennuyer plus longtemps aujourd'hui. Mais tant pis, je doute parvenir à retrouver le sommeil alors je me lève, j'avale mes cachets avec un verre de jus d'orange, puis je me fais un café, j'englouti deux ou trois madeleines puis je remonte, laissant ma vaisselle en plan pour aller prendre ma douche. Je choisis mes vêtements un peu au hasard, je ne mets pas longtemps à terminer ma toilette puis je vais faire mon lit en sachant pertinemment que c'est inutile puisque je vais le défaire ce soir en allant me coucher mais ça m'occupe au moins un petit moment. Quand j'ai fini je cherche autre chose à faire et je me rappelle de mon verre, ma tasse vide et mes couverts sales. Je redescends donc à la cuisine pour m'en occuper. Je crois qu'on a un lave-vaisselle mais je préfère le faire moi-même, parce que ça m'occupe, encore une fois. Enfin, ça n'aura pas duré bien longtemps, dix minutes plus tard je range ma petite cuillère dans le tiroir avant d'apercevoir Pia accoudée là. Elle a pas l'air d'excellente humeur. « Salut. » Je tente tout de même, dans un sourire alors qu'elle me supplie déjà de lui faire un café. Je fronce légèrement les sourcils mais ne pose pas de questions, pour l'instant du moins. « Heu... D'accord. » Je me contente de répondre en m'activant autour de la machine, sortant capsule, tasse et cuillère que je viens tout juste de nettoyer et de ranger. N'empêche qu'elle a de la chance, Pia, que je sois quelqu'un de trop gentil, je sais pas si elle s'en rend compte, hein. Quand son café est près je le dépose devant elle. « Voilà, m'dame. Et une fois que tu l'auras bu, tu pourras me raconter ce qui t'est arrivé, hm. » Je dis en m'installant en face d'elle, m'accoudant à mon tour sur le bar. Ouais, parce que je suis pas débile, je vois bien qu'elle a la tête dans le cul et y a sans doute une raison. Mais bon, peut-être qu'elle s'en souvient pas, ou qu'elle a honte, et puis on n’est pas les meilleures amies du monde alors je comprendrais qu'elle veuille pas en parler avec moi. Enfin, ce serait la moindre des choses quand même, je viens de lui faire un café c'est pas rien, donc je m'estime en droit de savoir. Mais bon, je vais pas la forcer non plus, si elle veut pas tant pis, j'en mourais pas.

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