+ sacha

J’ai bu. J’ai beaucoup trop bu. Tout ça c’est à cause de Andreja. Enfin… Je pense que j’aurai bu même s’il n’avait pas été là. Mais là c’était en sa présence, alors je pouvais toujours tout lui mettre sur le dos, même si j’avais clairement été plus que consentant pour descendre autant d’alcool. Peut-être était-ce parce que je n’avais pas bu depuis un mois que je supportais aussi mal la boisson, ou juste parce que j’avais abusé sur la quantité. Je n’en savais rien. À vrai dire, je n’arrivais même plus à réfléchir en cet instant. Ni à marcher, même. Je titube, je me cogne partout, et je me vois obligé de raser les  murs pour m’appuyer contre ses derniers afin de ne pas tomber par terre. Et je ne sais par quel miracle, j’arrive dans une des chambres. Et je me laisse tomber maladroitement dans le lit où Sacha est en train de dormir à point fermé. «  Sachaaaaaaaa » je chuchote. Enfin, dans ma tête je pense que je chuchote, mais en réalité je parle super fort. «  Réveille-tooooooi » je continue alors que mes doigts glissent sur ses côtes pour lui faire des chatouilles. Boh, ça se voyait à peine que j’avais un coup dans le nez, n’est-ce pas ?

J’étais tranquillement allongé sur le lit où j’ai passé beaucoup de nuits durant mon aventure quant d’un seul coup, une présence m’arrache de mon sommeil. « Gné ?! »  J’essaye inconsciemment de me persuader que ce n’est rien et que je peux continuer à pioncer mais non, impossible. J’ouvre les yeux et je me rends compte que Lou est là, tout simplet et prêt à me réveiller. « Mais qu’est-ce tu fais ? Arrête ! » Je rigole à moitié à cause des chatouilles qu’il m’inflige et ce, même si il vient de m’extirper du sommeil. Puis son état m’amuse aussi. Il a l’air d’avoir un peu trop picolé et je vais pas lui faire la morale ou quoi que ce soit. Au contraire, il fait ce qu’il veut et s’il avait envie de se foutre une mine alors que grand bien lui fasse ! Je vais plus en rire qu’autre chose. « Toi tu vas voir de quel bois je me chauffe ! » J’agrippe soudainement le candidat avant de le renverser et de me retrouver sur lui le bloquant contre le lit. Je le fixe ensuite quelques secondes d’un air de dire qu’il fait moins le malin là. Puis, mes lèvres viennent couvrir son cou de baisers avant de descendre un peu plus bas sur son torse et parcourir des recoins inattendus et surement plus sensibles. J’imagine que ça va le faire frissonner puisqu’il ne peut se défendre et c’est le but. Me venger de ses chatouilles. « Tu voulais me dire quelque chose ? » Je reprends un air plus sérieux car si ça se trouve il voulait me parler de quelque chose d’important genre les finalistes ou pire la révélation des secrets. J’espère que le mien ne lui a pas fait peur. J’en suis pas particulièrement fier.

Ce n’est pas pour rien, si j’ai bu. C’est pour oublier. Oublier ce que j’ai pu dire lors du prime, oublier que j’ai avoué la mort de ma petite fille. Que je n’avais jamais eu de petite fille, tout simplement. Je n’avais même pas eu l’occasion de la prendre dans mes bras, pas une fois. Et c’était assez dur à admettre, même trois ans après. Surtout trois ans après, alors que j’avais passé trois ans à lui inventer une vie, un visage, un sourire, une voix, des histoires… Trois ans à faire croire à tout le monde son existence, tout simplement. Alors oui, pour oublier ça le temps d’une soirée, j’avais bu. Beaucoup trop bu. Mes idées n’étaient plus claires, ni ma vision d’ailleurs. J’ai la tête qui tourne, je ne contrôle plus mes gestes, ni mes paroles, et je me retrouve dans le lit de Sacha à tenter de le réveiller. Je continue mes chatouilles même s’il me dit d’arrêter, tout simplement parce que j’ai aucune envie d’arrêter. Autant dire que j’ai un comportement de gamin lorsque je suis saoul, mais qu’importe. Mais je m’arrête alors qu’il m’agrippe, se retrouvant au dessus de moi, alors que je me mets à rire, amusé par la situation. Je n’ai même pas la force de me défendre et le laisse faire, me contentant de me tortiller un peu dans tous les sens alors que je sens ses lèvres sur ma peau, mon corps entier frissonnant à son contact. «  Sachaaaa, t’as pas le droooit. » Je geins d’un air enfantin, comme si ça pourrait le stopper. Mais non. Est-ce que j’avais quelque chose à lui dire ? Je ne sais pas, je ne sais plus. Je me contente de me relever un peu, ma main se retrouvant à l’arrière de son crâne rasé pour l’embrasser longuement et passionnément. Oui j’ai beau être bourré, l’embrasser ne me pose aucun problème.  C’était de sa faute après tout, il n’avait qu’à laisser ses lèvres se promener sur mon torse comme ça. «  J’ai chaud. » Ça sort tout seul, alors que mes lèvres quittent les siennes. «  J’ai faim. » je rajoute. comme tout le monde avec un coup dans le nez, je dis tout ce qui me passe par la tête. «  J’ai la tête qui tourne… » Je ferme les yeux, comme si cette sensation pourrait s’arrêter, mais ce n’est pas le cas. J’enfouis alors mon visage dans le cou de Sacha, comme si ça pourrait me protéger de tout ça. «  Je me sens pas bien. » De une à cause de tout l’alcool que j’avais ingurgité, mais aussi à cause de mon secret que j’avais avoué à tout le monde. Et bien qu’on puisse penser que ça m’aurait enlevé un poids des épaules, ça n’avait fait que rajouter un poids sur le coeur.

Maintenant, puisque je suis réveillé, autant profiter un peu de Lou. Ou de ses lèvres plutôt. Voire son corps. Je ne sais pas. Je laisse guider mes pulsions sans trop réfléchir. De toute façon, il est un peu tard pour penser à quoi que ce soit. Je laisse donc mes lèvres s’aventurer un peu partout sur le torse et dans le cou du bellâtre avant que celui-ci ne se décide à s’emparer de celles-ci pour m’offrir un baiser langoureux et passionné. J’y prends évidemment goût et ce, même si je sais que le garçon n’est pas tout à fait dans son état normal. De toute façon, je n’ai pas besoin de ça pour qu’il m’embrasse de la sorte. Quoi qu’il est un peut-être un peu plus entreprenant que d’habitude. Je sais pas. Il voulait me dire quelque chose au fait ? Hm… non, pas vraiment. Juste qu’il a chaud, qu’il a faim, la tête qui tourne. Ouais, rien d’affolant jusqu’à ce qu’il confesse ne pas se sentir bien. Là, je panique un peu et je me dis qu’il va gerber. Bon, je l’aime mais il y a des limites, j’ai pas envie qu’il me peinture mon corps dénudé en vert. Pris d’un réflexe, je le redresse et attrape ma bouteille d’eau posé à côté du lit. « Tiens. Bois. »  Je lui laisse pas le choix vu que j’ai déjà débouchonné la bouteille et que je la tends vers ses lèvres. « C’est l’alcool ou.. ? » Je sais que je m’aventure sur un terrain périlleux mais en même temps je dois lui poser cette question. Je m’inquiète pour lui mine de rien. Je le montre pas forcément mais je le surveille depuis la révélation de son secret. J’essaye de me mettre à sa place et je me dis que ça doit vraiment être difficile d’avouer toute cette supercherie ainsi si prenante. « Tu sais que tu peux tout me dire ? » J’agrippe son menton pour que son regard croise le mien avant de déposer un simple bisous sur ses lèvres. « Je suis là. » Je sous-entends que je le soutiendrai quoi qu’il en soit. « Si t’as envie de vomir, je peux te porter jusqu’au lit d’Ohana. » Comme d’habitude, j’essaye de détendre la situation presque involontairement en plaisantant.

Je savais que je me sentirais mal après avoir avoué mon secret, mais pas autant. C’était un peu comme si tout ce que j’avais construit ces trois dernières années s’effondrait autour de moi. Même si je savais que je n’avais pas de fille, dire à tout le monde qu’elle était bien réelle avait fini par déteindre sur moi, et j’avais moi même fini par y croire, en quelque sorte. Je me disais que j’avais une petite de trois ans, qui m’attendait sagement en Espagne avec sa mère hystérique. Mais ce n’était pas le cas, et c’était bien pour ça que je me sentais mal. Et autant dire que l’alcool n’arrangeait rien à ça. Sacha me fait boire et je me laisse faire. J’ai un peu l’impression d’être un gamin et je ne suis pas sûr d’aimer cette sensation mais je n’ai pas vraiment le choix, vu mon état. «  Les deux. » Je lui réponds alors qu’il me demande la raison pour laquelle je me sens pas bien. Mais je crois que c’est plus à cause de mon secret plutôt que de l’alcool, mais si ce facteur joue pas mal sur mon état. Et je hoche la tête lorsqu’il me dit qu’il est là, et que je peux tout lui dire. Je le sais, mais le fait qu’il le confirme me rassure indéniablement. Mais ça ne va pas pour autant délier ma langue. Je crois que j’en ai assez dit pour la soirée au sujet de ma fille, et en parler ne ferait que remuer le couteau dans la plaie. «  Merci. » je souffle, ma main venant caresser sa joue alors que je lui offre un sourire. Merci d’être là, et de ne pas avoir fui en apprenant pour mon secret. Et voilà que je ris un peu trop fort alors que Sacha me parle du lit d’Ohana. Rien que d’imaginer la scène de Sacha me portant jusqu’à son lit et moi lui vomir dessus me tord de rire. «  Ça va aller merci. » je dis en essayant d’arrêter de rire. Je n’ai pas envie de vomir, et puis si c’est le cas je connais la direction des toilettes de toute manière. À la place, j’attrape Sacha pour le tirer jusqu’à moi, m’allongeant avec lui sur le lit. Je me serre contre lui, passant mon bras autour de sa taille et entourant une de mes jambes autour des siennes histoire d’être sûr qu’il ne s’échappera pas. J'étais mieux comme ça, près de lui. Ça allait déjà un petit peu mieux. «  Ils te manquent ? » je lui demande plus sérieusement, ne pouvant m’en empêcher, alors que mon regard se plante dans le sien. Je parle de ces deux mecs avec qui il était, je pense qu’il comprendra de toute manière.

C’est vrai que dévoiler un secret aussi lourd et qui va changer ta vie ou du moins tes relations avec ton entourage c’est vraiment difficile à assumer. Mais d’un autre côté, ça va lui enlever un poids à Lou de ne plus avoir à mentir à tout le monde et je pense qu’il pourra enfin faire son deuil et tourner la page. Du moins, je l’espère. En attendant, il a le droit de décompresser avec de l’alcool. Il n’a pas de problème d’addiction avec ça et je ne pense pas qu’il en aura un jour donc je ne m’inquiète pas. Je me contente juste de prendre soin de lui pour qu’il se sente mieux et qu’il décuve plus facilement. « Ah. » Je trouve rien de mieux à dire. Malheureusement, j’ai pas de recette miracle à lui proposer pour qu’il aille mieux. Il devra se contenter de ma simple présence et de mon réconfort. C’est déjà pas mal. Il peut me parler s’il en ressent le besoin et ce, à tout moment. Là, il n’en a pas envie et je le comprends parfaitement. Ça m’aurait même étonné qu’il se confie maintenant. Il a l’air d’être sur le point de gerber. Peut-être que je devrai prendre des précautions ? Hm… non. Il m’assure que ça ira. M’en voilà rassuré. Il s’emmitoufle ensuite entre mes bras et mes jambes. Son contact n’est que bénéfique. Je ne peux m’empêcher de déposer un baiser en haut de son torse. Le silence s’instaure un moment jusqu’à ce qu’il le brise. Mes paupières qui s’étaient refermés s’entrouvrent brusquement. « Qui ça ? » En fait, je vois très bien de quoi il veut parler et je me reprends assez vite ne lui laissant pas le temps de préciser de quoi ou plutôt de qui il parlait. « Nooon. » Je fronce les yeux presque perturbé face à cette question tout en hochant légèrement la tête. « Ils font plus parti de ma vie. Je veux dire… j’ai tourné la page. » Bien entendu, y’a des moments où il peut m’arriver de repenser aux instants de pur bonheur que j’ai pu avoir avec mes deux amants mais c’est simplement dû au fait que cette histoire sortait du commun et que d’un côté, cet anormalité était excitante. « Tu… tu me prends pour un cinglé ? D’avoir pu aimer deux hommes en même temps ? » Mon regard vient se confronter aux siens afin de savoir ce que le jeune homme en pense. Son avis m’importe, oui.