@leandro
J'ai commencé à mettre un peu mon plan de survie à l'oeuvre, je l'ai perfectionné avec les bonnes et souvent très mauvaises expériences. Ce qui me rebute le plus est le manque d'hygiène et les fringues sales puisqu'évidemment, nous n'avons qu'une seule tenue, il ne faut pas non plus trop en demander à la production tout de même. Alors un jour, je nettoie le haut et l'autre, le short, pour éviter de me retrouver totalement à poil le temps que cela sèche. Heureusement que cela ne met pas non plus une éternité. Je me dirige vers le lac d'une démarche élégante lorsque mes pupilles inquisitrices tombent sur un jeune homme qui lave son tee-shirt, ou alors il fait très bien semblant. J'aligne quelques pas dans sa direction, me posant à un mètre de lui, les mains délicatement posées sur les hanches alors que je reporte toute ma précieuse attention sur lui. « C'est tellement beau un homme qui fait sa lessive » je fais mine de m'extasier en esquissant simplement un sourire un peu narquois. Je plaisante, dans mon monde, même les filles ne font pas la lessive, parce qu'on est habillé de paillettes et qu'on sent la rose, pour faire un topo. J'ai bien envie de faire un peu d'exploitation humaine. Enfin, qui ne tente rien n'a rien. « Je te sens bien parti, tu ne veux pas faire la mienne par la même occasion ?» je lui demande alors en battant légèrement les cils pour retirer mon fin débardeur et je lui tends. Que les caméras ne s'affolent pas, je me retrouve simplement en soutien gorge, j'ai une dignité et une famille à honorer.

Voilà quelques jours qu’on est là. Je commence à me sentir plus à l’aise qu’au début. Pas que vivre à l’air libre en pleine nature me pose un problème. C’est plus vivre en communauté, avec tous ces gens inconnus. Et sous l’œil des caméras. Je n’arrive pas encore à faire totalement abstraction d’elles. J’espère qu’avec le temps, j’y parviendrais. Enfin si j’en ai l’occasion parce pour avoir le temps de s’y habituer, encore faut il que je sois sélectionné dimanche. Et là rien n’est moins sur. On ne peut pas dire que jusqu’à présent j’ai fais quoi que ce soit d’exceptionnel. Ou digne de retenir l’attention. Et probablement que ça n’arrivera pas, parce que je suis un garçon assez discret. Qui ne cherche pas à attirer l’attention sur soit. Alors que dans un jeu comme celui là…C’est assez primordial. Sinon comment exister ? Comment réussir à se faire remarquer auprès du téléspectateur ?  Peut être devrais je tenter des choses pour essayer d’augmenter mes chances d’être pris…Mais non, je ne suis pas comme ça. Je compte rester moi-même. Si on doit me prendre, et bien ça sera pour ma vraie personnalité, et non un rôle que je me serais donné. En attendant ce matin, j’ai décidé de passer par la case lac, afin de laver mes affaires. Enfin que mon tshirt, parce que sinon je vais me retrouver sans rien, et ensuite attendre que ça sèche. C’est vraiment la misère de n’avoir qu’une seule tenue. Alors je suis là, les pieds dans l’eau, torse nu, a frotter mon tshirt avec le savon. C’est alors que j’entends une voix derrière moi. Je me retourne, pour faire face à une jeune femme. « Oserais tu dire qu’on ne la fais pas souvent ? » Mais oui mais oui. C’est alors que sans gênes, elle retire son débardeur, pour me le tendre. Se retrouvant par la même occasion en soutien gorges. Je n’ai jamais vu autant de jolies filles se déshabiller en ma présence. J’hésite. Je serais tout à fait du genre à accepter, et lui laver son haut. Parce que ça ne me dérange pas. Tant que je suis dans mon élan… Puis je suis gentil. Et serviable. Seulement… C’est le début du jeu…J’ai pas envie de donner l’image du type trop gentil…Ni passer pour un larbin. Il ne faudrait pas que je pense à ça, à la perception des autres à l’extérieur, mais c’est plus fort que moi. « Bien tenté, mais tu devras te la coltiner toute seule. Puis c’est tout aussi beau une femme qui fait la lessive. » que je réplique dans un sourire. « Je veux bien te prêter mon savon, c’est tout ce que je peux faire. » Voilà, il ne faut pas m’en demander plus. « Milah, c'est ça ? »

Je pourrais presque admirer le spectacle mais on pourrait me faire des réflexions après, il suffit d'un rien pour que la populace s'offusque et ne s'affole, cela en est presque effrayant. Sa remarque m'arrache un léger sourire moqueur.  «Moi, je n'ai rien dit » je souligne mais la façon dont il interprète ma remarque est très révélatrice non ? Elle veut tout dire. Je lui propose avec une certaine délicatesse de s'occuper de mon linge, puisque je vois qu'il est tout à fait capable de ne pas bousiller mon débardeur. Je le trouve compétent en la matière et cela m'éviterait de plonger mes doigts dans la couleur suspecte de ce lac. Il veut bien me prêter son savon, je pense que je dois applaudir son effort colossale. « Aucune galanterie » je déplore quand même en ronronnant tel un chaton en manque d'attention et d'affection. « J'ai des crevasses au niveau des mains et le savon m'irrite » j'argumente parce que j'estime que la partie n'est jamais perdue. Je lui tends mes mains de princesse à l'épiderme réellement abîmé parce que je n'ai pas l'habitude d'évoluer dans de telles conditions drastiques. Je suis partie pour essayer de le faire culpabiliser. « Cela te prendrait cinq minutes, à peine » je conclus quand même. On ne peut même plus demander un service sans que cela soit mal pris ou autre. « Je trouve que l'Humanité devient de plus en plus égoïste » je le regarde alors comme si ce constat me semblait assez alarmant, évidemment, ce n'est que lui que je vise. Il tente de mettre un prénom sur mon minois. « Absolument pas » je déclare simplement en plaçant sévèrement mes mains sur mes hanches. « Je ne préfère même pas savoir avec qui tu me confonds, dans tous les cas, ce n'est pas valorisant pour ma personne » je conclus rapidement d'une voix blanche. « C'est Maha, et toi ? » je lui demande, un simple sourire s'installant sur mon visage de poupée temporairement contrariée.

Elle n’a rien dit. Ouais ouais, mais elle l’a pensé très fort. Et puis dans le fond, ce n’est pas faux. Il faut l’avouer que les hommes sont quand même beaucoup moins impliquée que les femmes dans les tâches ménagères. Souvent. Mais je ne me considère pas comme faisant parti de cette catégorie de personnes. Je ne suis pas du genre à rechigner face à une tâche ménagère. Je fais la vaisselle, le ménage, la lessive, le repassage… Bon d’accord, je suis célibataire, donc certaines mauvaises langues diront que je n’ai pas le choix. Mais bon même en couple je prônerais l’égalité. Puis ça ne me dérange pas de toute façon. Je ne vois pas ça comme des corvées horribles. On a vu pire dans la vie tout de même. Alors si j’étais d’une extrême gentillesse – ce que je suis en vrai – et bien je laverais le débardeur de mademoiselle. Elle essaye même de faire appel à ma culpabilité. Ses justifications sont quand même assez bancales. Pourtant je suis tenté de l’aider. Mais non non, il faut que tu luttes contre ta nature Leandro. Laisse-la avec sa propre lessive. Ne passe pas pour le faible de service. Tu peux le faire. « Non non tu ne m’auras pas. Je pense que t’arriveras à t’en sortir toute seule, ça devrait aller. » Je ne m’en fais pas trop pour elle. C’est alors que je pense bien faire en ayant retenu son prénom et que…pas du tout. Elle ne s’appelle pas Milah. Merde alors. Je me sens con. Et un peu honteux quand même. « Je n’étais pas si loin quand même… » Que je tente d’argumenter pour me défendre. Maha, Milah, c’est quand même très proche. Et puis regardez, elle ne connait pas le mien de prénom, donc bon. « Leandro. » Pour ma part. « Tu sais quoi ? Pour pardonner mon offense, je vais le laver ce débardeur…Allez donne. » Et voilà, et voilà. Je suis faible. Mon propre Tshirt étant fini de laver, je l’essore et le met sur mon épaule. Puis je récupère son linge, que je commence à nettoyer. « Mais ne crois pas que ça va devenir une habitude. »