LAMINE.

Clope à la main, j'attends de terminer pour aller me changer et me mettre en tenue de combat. J'ai besoin de bouger, d'évacuer, de transformer mon énergie en quelques choses de positif pour une fois. Je monte prestement pour rejoindre le dressing enfilant à toute vitesse un leggings et un débardeur. J'attrape au vol mon Ipod pour choisir la playlist adaptée pour commencer à courir. Je me rends jusqu'au terrain de sport, et je fais de longs tours en passant par les extérieurs pour y revenir. Je dois y être depuis une demi-heure lorsque je fais une pause. Je vois Lamine débarquer sur le terrain de sport, j'ai envie de lui dire qu'il s'est trompé, je ne le vois pas du tout faire du sport, franchement, pas très crédible. Et puis il faut bien avouer qu'il alimente son cliché du gars flemmard, je crois que cela lui va d'être perçu ainsi. Je retire rapidement mes écouteurs et coupe ma musique. Je tente de retrouver un souffle à peu près correct, calmant ma respiration anarchique. Mes opales se promènent un instant sur lui. « صباح الخير » je le salue calmement en arabe, de ma langue maternelle, ma voix tout de suite plus mélodieuse lorsque je m'exprime dans une langue où je peux jouer sur toutes les nuances. « C'est dommage que tu ne le parles pas couramment » je déplore sincèrement en haussant les épaules, cela fait trois semaines que je dois me contenter de l'anglais sans broncher, je regrette. « Au fait j'dois prendre comment le ... » je commence alors en vrillant mes prunelles tout de suite plus réactives aux siennes. « "j'suis quand même pas désespéré" » je le cite alors en imitant vaguement sa voix pour lui rappeler ce que ce sont ses paroles. Oui, grâce à la rubrique d'Akela, on est un peu au courant de tout, c'est génial. J'ai pu avoir connaissance de sa réplique dans la salle de bain avec les filles.

Le sport, si c'est pas le truc que Lamine déteste le plus au monde, c'est au moins dans son top trois. Il est aussi sportif que certains sont utiles à l'aventure ici, voilà, ça vous donne une petite idée de son niveau. Quand il était gosse il faisait pas partie de ceux qui misaient tout sur l'eps parce qu'ils étaient sûrs au moins de décrocher une bête de moyenne dans cette matière-là, non... Lamine, c'était le grand traumatisé des cours de sport, celui qui courrait tout derrière, quand il se donnait la peine de faire acte de présence car faut avouer que le prof avait quand même pas souvent l'honneur de le voir dans ses cours. Quand il prend le temps d'y réfléchir, il se rend compte que les rares cours qui parvenaient à peu près à l'intéresser étaient la technologie et l'informatique, le premier pour les soudures bien sûr que Lamine adorait faire, le second pour une raison encore plus évidente sans doute. Tout ça pour dire que la dernière fois qu'il s'est vraiment dépensé dans sa vie - les primes de fake lover, il parait que ça compte pas - bah... ça remonte à vachement loin, quoi. Et c'est bizarre, parce que dernièrement il a un peu tendance à s'inquiéter du fait qu'il pourrait prendre du bide ici. C'est d'autant plus incohérent comme crainte que chez lui, il ne sort jamais de sa chambre, il est le plus inactif de tous les jeunes de Mortroux et c'est pas pour ça que la graisse s'installe. Lamine prend rarement du poids il faut bien le dire, mais avec ce qu'ils bouffent ici, qui sait, ça pourrait bien lui tomber dessus. Il se soucie pas de l'image qu'il renvoie aux autres, par contre, ça le ferait pas du tout kiffer d'avoir soudainement des bourrelets et une bedaine d'alcoolique, hein. Alors il a pris une grande décision ce matin, et c'est étonnant qu'il n'est pas renoncé cinq minutes plus tard - oui, Lamine va tenter de faire un peu de sport aujourd'hui, et il faut bien insister sur le terme "tenter" car c'est pas du tout dit qu'après tout ce temps il tienne plus de trois minutes. Surtout que ce qu'il prévoie de faire, c'est courir, c'est donc impossible qu'il ne souffre pas dans ces conditions, mais il le sait, et s'y est préparé. Paré de son plus beau jogging à bandes, il se rend sur le terrain de sport où il a la surprise d'être accueilli par Maha. Celle-ci le salue en arabe, et lui rappelle tout à fait subtilement que lui ne maitrise pas du tout cette langue. « bah, si un jour t'as du temps à tuer, tu peux toujours me donner quelques cours. » il propose comme ça, même s'il doute que l'idée ravisse Maha. Lui il aimerait bien approfondir ses connaissances bien trop faibles pour l'heure de cette langue, si ce n'est pas ici, eh bien alors ce sera dehors, plus tard. Maha revient ensuite sur ce qu'il a confié à deux candidates la semaine passée dans le casino. Sa remarque a le don de le faire sourire, il pensait que l'intéressée ne relèverait pas ses propos, alors qu'elle est capable de les citer au mot près. « et le prix d'interprétation revient à... Maha ! » oui bon, elle l'imite tellement bien en même temps qu'elle en mériterait bien un là, franchement. Ah, c'est vrai, à la base c'était une question son truc. « j'aurais sorti la même chose au sujet de n'importe quelle autre fille, tu sais. » expose-t-il calmement. Il n'a aucune intention d'embrouiller sa camarade, ce qu'il dit est vrai, ce jour-là on l'a questionné sur ses rapports avec Maha et il a clarifié les choses, disons, à sa manière. « j'suis pas désespéré, dans le sens où je vais pas céder aux avances de la première fille qui passe quoi. et ce, en admettant que les tiennes étaient réelles la dernière fois alors qu'on sait très bien toi et moi que c'était pas le cas. » ça va, tout le monde l'a compris, c'était un jeu visant à faire chier le blond et elle s'est servie de lui comme elle aurait pu se servir de tout mec qui se serait trouvé dans cette salle de bain avec eux ce jour-là. Ce serait con de le prendre mal en tout cas, c'est ce qu'il tente de lui faire comprendre. « je pensais pas que ces quelques mots te feraient réagir, honnêtement. » il reprend, son regard rencontrant une nouvelle fois celui de sa camarade. À vrai dire Lamine pensait que sa camarade s'en foutait royalement de tout ce qui pouvait sortir de sa bouche, et plus généralement qu'elle s'en foutait de lui, en fait. Et il continue de le penser même si ça l'étonne qu'elle soit revenue là-dessus.

Lamine me propose de lui donner des cours. J'hoche simplement de la tête, pourquoi pas, tiens. « On n'a que cela à faire ici » je concède alors en haussant les épaules. J'ai du temps à revendre et je pourrais presque me sentir utile. « Je ne comprends pas, ton père ne te parle jamais arabe ? » je lui demande en arquant mes sourcils. Je ne sais pas, mais c'est important, c'est son patrimoine, son histoire, non ? Je crois que je suis excessivement attachée à ma culture. C'est surement pour cela que je préfère lorsqu'on s'adresse à moi en arabe, comme mon père, et ma mère en hébreux. Parfois c'est d'un ridicule, on se croit dans un séjour linguistique lorsque je suis de passage chez eux. Je finis lui demander un léger éclaircissement sur une réponse qu'il avait eu la semaine dernière. « Je suis déjà en compétition pour un Oscar, c'est normal » je lance avec une fausse prétention lorsqu'il salue ma performance. Oui, cela nécessite un certain talent de l'imiter tout de même. Aller. Les sourcils presque froncés, j'écoute avec une certaine attention son explication. J'esquisse un léger sourire satisfait. « Ah je préfère, je pensais que tu avais lâché cela dans le sens: même si c'était la dernière fille sur Terre, jamais » je lui dis, en lui livrant ma propre interprétation. Cela peut paraître con mais j'ai plus l'habitude à ce qu'on me balance des sous-entendus négatifs où les insultes sont à peines voilées. J'imagine que c'est aussi pour cela que je suis d'un naturel un peu méfiant avec ce que les gens peuvent sortir. J'accuse un recul à peine perceptible lorsqu'il renchérit. « Parce que je dois tout laisser passer ? » je demande calmement en arquant un sourcil, en posant un regard vaguement interrogateur. « Ce n'est pas parce que généralement je ne réagis pas que je ne le prends pas mal » je l'informe simplement parce que c'est vrai. Mais il est vrai que si je les écoutais tous, j'irai me pendre tant la vision qu'ils ont de moi est négative. Regardez lorsqu'il m'a dit que j'étais une chaudasse, je n'ai même pas relevé, pareil avec Istvan. Surtout on va dire que j'ai l'habitude de l'entendre. Je manque un peu de logique mais les choses moindres me font plus réagir, enfin, cela dépend aussi de leur auteur. « Et sinon, tu comptes réellement faire du sport ou comment ça se passe ? » je demande parce que ce n'est pas tous les jours qu'on voit Lamine ici, cela mériterait presque des applaudissements tant cela me semble incroyable.

À sa grande surprise, il semble obtenir l'accord de Maha pour lui dispenser des cours de langue arabe. Il a proposé ça sans penser une seconde que sa camarade accepterait, ou en tout cas pas aussi vite. Oui, à la limite il se voyait insister un peu quoi, ça ne l'aurait pas étonné du tout si Maha s'était montrée sceptique mais non, elle dit n'avoir que ça à faire. C'est vrai qu'on s'ennuie vite ici, tout ce qui peut occuper est bon à prendre mais quand même, elle va supporter d'avoir Lamine comme élève ? non parce que c'est pas un cas facile, hein, il en a traumatisé des tas avant elle. « j'espère te laisser un meilleur souvenir qu'à mes profs au lycée. » la légende raconte que lorsque Lamine ne daignait pas se rendre à leurs cours, certains effectuaient une danse de la joie. C'était loin d'être le meilleur élément de la classe, et en plus il était un peu turbulent donc forcément, il avait pas beaucoup de fans du côté du corps professoral. Maha lui demande s'il arrive que son père lui parle arabe, ce dernier étant algérien. « ma mère le laisse pas beaucoup parler arabe à la maison, mais... de toute façon je leur parle plus trop à l'un et à l'autre. » il reconnaît dans un bref haussement d'épaules. Il a pourtant été question à un moment donné que son père l'initie sérieusement à la langue, mais ça ne s'est jamais fait. Et comme il l'a dit c'est certainement pas aujourd'hui que son père lui apprendrait quoi que ce soit, leurs rapports sont pas assez bons pour ça. Maha tient à revenir sur des propos tenus par le français la semaine passée, elle a pas l'air de les avoir très bien pris alors Lamine est un peu contraint de s'expliquer. Elle semble soulagée lorsqu'il lui fait savoir qu'il aurait dit la même chose à propos de n'importe quelle autre fille du nid, ce qui est vrai, il n'est simplement pas là pour tringler qui que ce soit. « si t'étais vraiment la toute dernière fille sur terre, ouais j'crois qu'il y aurait moyen là. » ça va, il la taquine elle est quand même pas repoussante et il n'irait pas uniquement vers elle dans ces conditions-là, bien sûr. C'est terrible d'ailleurs de dire à une fille qu'on envisagerait quelque chose avec elle que si vraiment il n'y avait aucun autre recours que celui-ci. En tout cas il s'attendait pas à ce que Maha réagisse à ces quelques mots débités presque en l'air l'autre jour, mais d'après l'intéressée ce n'est pas parce qu'elle reste impassible généralement qu'elle ne le prend pas mal. « ça t'a quand même pas vexée, si ? » il la questionne avec étonnement, car c'était pas du tout le but. Quand il a la volonté de blesser et provoquer les gens, de toute façon Lamine dit les choses en face même s'il a en principe très peu de temps à perdre dans les conflits. « tu sais tout n'est pas diffusé pendant les primes, alors si ça se trouve j'ai déjà dit des trucs cent fois pires sur toi... » bon il rigole à moitié en disant ça, c'est pas très sérieux. Il passe pas son temps à clasher Maha dans le dos de celle-ci, non, c'est évident et par ailleurs il n'a pas le souvenir d'avoir été particulièrement vache en parlant d'elle - à part ce jour-là, oui, si vraiment il faut considérer ça comme une vacherie. S'il compte faire du sport ? ah oui mince, c'est vrai que c'est pour ça qu'il est venu à la base, il avait déjà oublié dites donc. « euh... je pensais courir un peu, ouais. oh bah, on peut courir ensemble non ? » c'est à se demander s'il ne s'est pas pris pour Usain Bolt, car il a l'air d'oublier son niveau et le rythme qu'il ne devrait pas réussir à tenir plus de deux minutes au vu de son manque d'endurance. Trop tard, l'idée vient d'être soumise à sa camarade mais il commence déjà à regretter d'avoir ouvert sa bouche, là.

Lamine semble laisser entendre qu'il pourrait être difficile à supporter, le contraire m'aurait étonné à vrai dire. « Je pense que je serai bien moins patiente » j'annonce facilement parce que j'ai un petit côté dictatrice qu'il me serait impossible à nier. « Je vais tout de temps te parler en arabe à partir de maintenant » je décide parce que c'est la seule manière d'apprendre, bon, je pense que le dialogue risque d'être plutôt difficile entre nous mais bon, il faut faire des sacrifices. Lamine pousse une réflexion qui m'arrache un léger soupir, qu'il est bête parfois. J'esquisse un vague sourire narquois sur le bout des lèvres parce que je vais essayer de bien le prendre. « Enfin tu aurais pas le choix, il faudrait assurer le maintien de l'espèce humaine » je laisse entendre en roulant des billes. Vous voyez comme je pense aux autres finalement, je ne suis pas si égoïste que cela, je pense au Monde tout entier. « Je ne pense pas que tu le vivrais bien d'être responsable de la fin de l'humanité » j'ironise alors en empruntant mon petit air de madame je-sais-tout. Le candidat me demande si je suis blessée. « Si, profondément » je mens alors en posant une main sur ma poitrine pour mimer une certaine douleur parce que c'est vrai. Je souffre tellement, il devrait bien trouver un moyen de s'excuser, j'y vois un moyen de le mettre à mon service, il faut bien profiter de toutes les situations un peu. J'écoute d'une oreille assez distraite Lamine. « Je te ferai tout regretter » je papillonne de ma voix faussement sucrée en le regardant d'un air qui se veut angélique. A vrai dire, il est de nature publique que je suis une peste non, je me dois d'honorer ce statut. Je lui demande s'il comptait réellement courir parce qu'on ne va pas se mentir mais Lamine n'est pas le plus sportif du Nid, sans vouloir le vexer bien sûr, je suis simple réaliste. « Je suis pas sûre que tu tiennes le rythme mais aller » je me moque gentiment en lui faisant un geste pour commencer à se mettre en route parce que cela risque d'être un superbe spectacle, à mon avis. « Tu me fais pas une crise d'asthme ? » je lui demande quand même parce que y a pas de ventoline et je ne serai pas trop m'occuper de lui, très sérieusement.

Maha lui dit qu'en gros elle n'est pas réputée pour être patiente - non, sans blague ! Ca il l'a compris dès le départ, souvenez-vous de son insistance pour que Lamine se lance et escalade le portail lors de la semaine des abysses, elle avait pas du tout envie d'attendre après lui ce jour-là et voulait le voir à l'oeuvre immédiatement. De son côté Lamine a rendu ses profs fous au temps du lycée, ils n'en pouvaient plus de l'élève qu'il était et comme niveau maturité il a absolument pas évolué depuis, ça risque vraiment d'être drôle à voir ces cours de langue arabe. « en fait, quand je suis intéressé j'arrive à être calme et studieux, alors à toi de faire en sorte que tes cours ne soient pas chiants à mourir. » car c'était bien tout le problème de ses profs, ils étaient franchement barbants dans leur genre et Lamine décrochait très vite. Au bout d'un quart d'heure, il était déjà entrain de bavarder ou de lancer des trucs à travers la classe. « bon, c'est aussi une question d'autorité j'crois. » il ajoute, car un bon prof est un prof qui sait se faire respecter avant tout, n'est-ce pas. Maha, qui semble de nature assez autoritaire, ne devrait normalement pas avoir trop de mal à s'imposer. Mais Lamine, lui, il a un vrai problème avec l'autorité justement, donc ça ne va pas être simple à priori cette affaire. Maha lui annonce qu'à partir de maintenant, elle ne lui parlera plus qu'en arabe. « euh t'es sûre ? on va pas aller loin avec le peu de mots que je connais... » Lamine doit savoir dire trois ou quatre trucs en arabe, et encore, les grands basiques quoi. Si Maha tient vraiment à ce que leurs échanges ne se fassent plus qu'en arabe, comment dire, la communication va être compliquée au début ça ne fait aucun doute. Quand il aura un peu de pratique grâce à ses cours, ça devrait être déjà plus envisageable. Lamine taquine sa camarade qui décidément ne brille pas par son humour, il déconnait roh, il faut qu'il agite une pancarte pour signaler quand il n'est pas sérieux ? « n'empêche, on dit ça mais je suis sûr que nos gosses seraient pas dégueulasses. » c'est la réflexion qu'il se fait sur le moment, il songe au fameux maintien de l'humanité qu'ils assureraient ensemble et inévitablement, à leur descendance. Elle est palestinienne, il est algérien d'origine, dans sa tête le mélange donne quelque chose de plutôt sympa. Leur discussion part loin quand même, ils sont juste en train de parler des enfants qu'ils auraient ensemble, tout est normal. Maha se prétend profondément vexée par ses propos, mais il n'y croit pas, c'est mort elle n'a aucun avenir dans la comédie la demoiselle. Elle promet d'ailleurs de tout lui faire regretter, et là bizarrement, il a déjà un peu plus envie de la croire. Elle a l'air très sournoise comme fille, le genre qui n'oublie pas facilement, non plus. « il me tarde de voir ça. » laisse-t-il entendre, en le pensant vraiment puisque ça manque tellement de joueurs dans le coin, pour une fois que quelqu'un lui assure qu'il se vengera, ça fait presque plaisir quoi. Il attend donc cela avec impatience, peu importe la nature de sa vengeance, il acceptera tout en principe. Et là, Lamine le con est de retour. Proposer à Maha de courir ensemble, et pourquoi pas se pendre directement à un panier de basket, aussi ? Elle-même doute du fait qu'il puisse tenir le rythme, ça doit être écrit sur sa tronche que le sport et lui, ça fait douze. « je pense que je risque plus la perte de connaissance si je force trop, mais bon, t'as pas prévu de me faire courir un marathon de toute façon hein ? » il essaye de se rassurer, car vu que c'est lui qui a proposé cette association il va bien être obligé de suivre Maha. Pourvu qu'elle ne se lance pas dans une course de plusieurs kilomètres, il ne survivra jamais à ça. Ils s'élancent alors, et Lamine est de suite surpris par le rythme que tente de lui imposer Maha, pour un début, il trouve que c'est un peu ambitieux. « eh doucement ! on démarre à peine, et je suis pas du tout échauffé ! » il la sent mal cette course, si le rythme reste celui-ci dans dix minutes c'est sûr Maha le distance et lui il s'effondre à bout de souffle. Il en appelle clairement à l'indulgence de sa camarade, là.

Bizarrement je n'ai pas de mal à imaginer Lamine en gros relou de la classe, au dernier rang bien évidemment, souvent absent aussi. « C'est toujours de la faute des autres quoi ? » je me moque alors en arquant un sourcil avant de le regarder, parce que c'est un peu l'excuse qu'on sort tous pour se dédouaner. « Tu ne supportes pas qu'on te dise quoi faire ? » je l'interroge en songeant que c'est vraiment un ado encore Lamine ou comment ça se passe. Enfin, je ne sais pas s'il dit ça parce qu'il sait justement que je peux avoir des côtés autoritaires parfois, c'est vrai, on ne va pas se mentir. « Même un cas aussi désespéré que toi ne va pas me faire baisser les bras, t'inquiète » je lui réponds alors quand même. Aller, je vais bien réussir un jour à le dompter, surement. Je suis sensée arriver à l’intéresser, aller, je lui causerai jeu vidéo en arabe au pire. « Bon bah laisse moi quelques jours pour peaufiner ma méthode d'apprentissage alors » je lui balance parce qu'il va falloir trouver un truc assez imaginatif pour le captiver et pour pas qu'il nous fasse son blasé de la vie, évidemment. Lamine me précise bien qu'on ne risque pas d'aller très loin si on se parle que dans notre langue maternelle, enfin, la mienne. « Le dialogue a toujours été difficile entre nous depuis le début, ça ne changera pas vraiment » j'ironise alors en étirant un sourire sur mon délicat minois. On reparle de ce qu'il avait balancé à Shay et Saloir, évidemment, je suis au courant de tout, ou presque. La remarque de Lamine m'arrache un léger rire, on se calme mon gars. Même si c'est vrai, ça fera un joli mélange arabe, il n'y a pas à dire. « Bah normal, la beauté et l'intelligence de leur mère » je commence railleuse en esquissant une moue narquoise avant de lui glisser un regard pour faire comme si je le dévisageais longuement. « Et leur reste de leur père » je lance en feignant un air assez perplexe comme si je peinais à lui peiner des qualités. Aller, je déconne, qu'il ne se vexe pas. Je précise à Lamine qu'il a intérêt à n'avoir rien dit d'autre sur ma délicieuse personne puisque je suis rancunière, très. « Tu t'ennuies à ce point pour souhaiter que je te pourrisse la vie ? » je lui demande sans retenir un autre sourire parce que les gens aiment quand ça bouge mais il ne faut pas être maso à ce point là non plus. Je propose qu'on se mette enfin au sport, parce qu'il est venu initialement pour cela et non pas pour faire la causette comme maintenant. Je préfère quand même préparer mentalement Lamine avant que l'on commence. « Franchement t'abuses » je lâche simplement en roulant des yeux. « Je note quand même l'effort parce que tout le monde allait commencer à penser que tu te négliges » je souffle alors narquoise parce qu'il est de nature publique que Lamine n'est pas un grand sportif. On ne va pas se mentir. Notre rythme ne convient pas à Lamine, encore une fois, je ne suis pas surprise. « D'accord, passe devant, comme cela, si tu nous fais le fragile, je te rattrape » je lui dis en esquissant une petite révérence insolente pour le faire passer devant.