+ @GEKKO

C'était bien l'une des premières nuits où j'avais réussi à aligner plus de six heures de sommeil, ce qui était clairement un record ces temps ci. En effet, cela devait bien faire maintenant deux mois que je ne dormais que sur une oreille, les yeux ouvertes, attendant indéfiniment l'étreinte de morphée qui ne se montrait pourtant jamais. C'était ainsi, je savais que je ne pouvais de toutes manières pas faire mieux, et qu'à moins de prendre des somnifères je n'étais pas de ceux qui auraient un jour un sommeil paisible. Oui, sauf cette nuit là. Lorsque je m'étirais dans mon lit, je remarquais que l'horloge affichait les onze heures, chose tout à fait exceptionnelle pour quelqu'un comme moi qui ne se levait que rarement après neuf heures. Je quittais donc le lit plutôt satisfait, un sourire aux lèvres qui ne les quittait pas même lorsque j'eu terminé ma douche. Oui, cette journée, elle était assurément pour moi. Je partais donc m'habiller, m'étirant un bon coup, trainant une petite demi heure dans la chambre avant de remarquer qu'il était d'ores et déjà midi passé. Je n'avais pas particulièrement faim, mais me disais que si je ne mangeais pas maintenant, je risquais d'avoir du mal à retrouver un rythme normal en fin de soirée. J'allais donc me faire un sandwich avant de me poser sur l'un des bancs. Je saluais Gekko qui s'y trouvait déjà d'un simple hochement de tête avant de finalement prendre la parole, une question bien ancrée. « Dis, qu'est ce qui t'a donné envie d'ouvrir tes propres magasins ? » Je veux dire, il n'avait pas du se dire ça du jour au lendemain non ? Je ne savais pas trop ce que c'était que de gérer de plus ou moins grosses structures, lui et moi n'étant clairement pas du même monde.

Que la nuit soit bonne ou mauvaise ne change rien à l’heure du réveil de notre homme. Même s’il est fatigué de ne pas avoir pu trouver le sommeil, il se lève aux aurores. Une habitude qui ne l’a pas quitté dans le nid. Au japon, même le week-end, il se lève tôt. Il affiche de petits yeux, mais après une bonne douche fraîche il arbore une mine plus radieuse. Enfin, pour lui, sa mine est radieuse. Pour les autres, il tire toujours la tronche et ils ont l’impression de le voir toujours avec une mine grisâtre. C’est sûr qu’il ne respire pas la joie. Il est également toujours aussi prévisible avec son programme journée chronométré. A peine l’heure du midi sonne que notre homme se dirige vers le restaurant afin de déguster son repas. C’est certain que s’il existait une télé-réalité qui le suivrait au quotidien, ça serait une émission bien emmerdante. Ce type n’a rien d’exceptionnel et continue de vivre sa vie en répétant inlassablement les mêmes choses. Il n’y a aucune folie dans son existence et c’est bien triste. Bien que comparé à son quotidien au Japon, ici il a vécu certaines choses inattendues et déconcertantes qui l’ont obligé à sortir un peu de sa coquille. Sagement installé sur une table à manger et pour ne pas changer, il est seul. Du moins, il l’était. Clarke se joint à lui tout en démarrant une conversation. Le candidat se questionne sur Gekko et sur ses motivations quant à l’ouverture des magasins qu’il gère aujourd’hui. Parler de lui, il déteste, mais étant donné que la question vise son travail, il est enclin à répondre. « L’indépendance » Répond-il dans un premier temps. Oui, l’indépendance face à sa famille, son père adoptif qui le voyait déjà reprendre ses activités. Mais Gekko rêvait d’une autre vie et était désireux de s’éloigner un peu de ses proches pour se débrouiller seul. « Et le marché était intéressant à exploiter » Dit-il pour compléter sa réponse. « J’envisage d’ailleurs d’ouvrir un centre commercial » Un projet encore en gestation, mais notre homme d’affaire y pense sérieusement et dès sa sortie du jeu, il compte bien se plonger H24 dans le boulot afin de le concrétiser. « Je ne pense pas t'avoir demandé, ça serait étonnant d'ailleurs si je t'ai déjà questionné dessus, mais tu fais quoi dans la vie ? » Pose-t-il soudainement au candidat. Oui, Gekko s’intéresse aux autres. Du moins il essaie. Après plusieurs semaines de jeu, il est temps.