Ok je m’avoue vaincu elle a raison, je suis faible c’est pas de ma faute. Elle a dû de toute façon le constater depuis un petit moment tant j’aime ressortir ce détail quand ça m’arrange, j’avais fait le coup à Mylah pour la convaincre de laver mon linge mais ça avait pas marché. Si Maha est une grande prêtresse moi je reste un grand paumé essayant de se racheter une conduite… ou carrément une vie, en fait. Du coup oui, à notre sortie je lui avais demandé de m’accompagner en ayant le pressentiment de ne jamais la revoir après le jeu si ça n’avait pas été le cas. Au final on s’est carrément fait un road-trip aux Etat-Unis donc on peut dire que j’étais carrément à côté de la plaque et encore plus quand on nous voit de retour ici mais ça c’est de sa responsabilité. C’est elle qui m’a supplié, non non je ne mens pas. J’affiche un semblant d’air désabusé, sérieux on dirait une pièce de théâtre. « Ah donc maintenant tu retournes ma bonne foi contre moi. » Ca m’apprendra à céder à ses caprices. Bon j’étais pas contre revenir voir Kira, Adélie ou même Mackenzi mais quand même. Par contre Gigi c’est une toute autre histoire, on a pas lié les mêmes affinités dans ce jeu et apparemment je serais difficile. « Il faut savoir. » J’esquisse un sourire parce que ça vient contredire ce qu’elle a raconté y a deux minutes et ce qui, de toute façon, est archi-faux. Je crois être la personne la moins difficile de tout le lot de candidats que nous étions au démarrage de cette émission. J’ai même pas bronché dans les abysses c’est pour dire. Et je ne dis pas grand-chose non plus concernant son histoire. « C’est généreux de ta part. » J’ajoute dans un sourire moqueur pour le délai qu’elle vient de me donner. J’aime qu’elle ajoute qu’on a le temps car ça m’enlève cette image d’elle s’en allant d’un moment à l’autre pour aller vagabonder à ses missions. Son visage trop près du mien m’incite à l’embrasser dans une évidence toute trouvée. Je n’ai le temps de rien répliquer puisqu’elle vient sceller de nouveau ses lèvres aux miennes. Elle se détache et je l’observe dans son numéro. Bien sûr elle ne veut pas me tenter, ben voyons. Maha est beaucoup trop maline pour agir ingénument, elle sait très bien ce qu’elle fait et je ne suis pas dupe. « Non pas vraiment, j’aime bien ton air de fausse ingénue aussi. » J’esquisse un sourire en demeurant malgré tout proche de son visage avant de lâcher le glas. « T’en fais exprès. » Mon regard défi le sien. Avec cette attitude elle rend le packaging tout mignon et adorable, sauf qu’il y a toujours cette pointe de malice dans son regard. « Mais je maitrise. » Haussant les sourcils, je lève les mains en lui montrant mes paumes pour lui prouver que je ne toucherais plus rien aussi prêt soit-elle de moi et aussi attirant cela soit-il. Même pas ses cheveux, rien, et ça simplement par esprit de contradiction. La seule chose sur laquelle je peux éventuellement poser mes mains sont les portes de l’ascenseur qui commencent vraiment à tarder.

Léo s'offusque alors que je lui rappelais de simples faits Un sourire agaçant de madame je-sais-tout apparaît sur mon visage. « Absolument pas, j'aime bien quand tu cèdes » je ronronne alors, parce que la vie est quand même bien plus simple. C'est assez sympathique que Léo ne soit pas difficile à convaincre quand même, je peux l'emmener partout avec moi, ou presque oui, l'idée est là. Je fronce simplement les sourcils à la remarque suivante de monsieur. « J'ai bien le droit d'être indécise » je grogne simplement parce que je n'aime pas trop que Léo pointe du doigt mon manque de cohérence. On va dire qu'il n'est pas exigeant simplement avec moi, l'idée me plait assez. Je tente de clore en douceur le sujet de mon secret, je lui laisse un peu de temps pour qu'il puisse s'y faire. Ce n'est pas comme s'il avait réellement le choix, hein. « J'en ai conscience, tu as de la chance » je réponds alors avec un sourire ravissant. Je lui offre un certain temps de répit tout de même, je suis la bonté incarnée. Je fais exprès de garder une certaine proximité physique, bien évidemment. Il aime bien mon côté faussement ingénue. C'est noté. Je saurais me souvenir des méthodes à employer avec lui. « Tout un art » je déclare alors en étirant une esquisse de sourire moqueur. J'observe un instant son attitude et je sais très bien que je vais avoir affaire à un Léo plus que buté, quand il s'y met. J'aimerai bien le faire mentir mais je le sens super décidé maintenant, alors je vais capituler. Je bats des cils, lui offrant mon plus regard de biche lorsqu'il m'accuse d'en jouer. « Pardon ? » je fais mine de lui demander de ma voix cristalline avant qu'il m'informe qu'il saura se contrôler.  « Dommage » je me marre en plantant un simple baiser sur sa mâchoire pour me décaler afin de me positionner à ses côtés et pour ne plus squatter totalement son champ de vision en restant en face de monsieur. Je commence à comprendre qu'il finit par s'impatienter, c'est légitime. Enfin, il ne devrait même pas voir le temps passer en ma compagnie, normalement. Je ne comprends pas. « Je crois qu'on va rester ici pour toujours » je soupire mécontente en inspectant la porte de l'ascenseur. Cela fait bien dix minutes non ? Je crois que ma perception du temps est complètement altérée ici. « Ensemble jusqu'à la fin, c'est beau » j'ironise alors en roulant des billes. Je m'attendais quand même à une fin un peu plus glorieuse ou alors héroïque. « Néanmoins tu avoueras que je suis la dernière meilleure compagnie du monde » j'argumente quand même en lui offrant un regard en biais, pour vérifier qu'il ne roule pas des yeux quand je ne fais pas attention. Sans trop de fil rouge, je me permets d’enchaîner. « Et sinon après, tu comptes retourner à Grenoble ? » je lui demande, enfin pour moi, ça reste la campagne cette ville. Après tout, je peux toujours me renseigner ? On a du temps à tuer tous les deux. Il serait peut-être surtout temps que je m'y intéresse, à ses plans.

Je roule rapidement des yeux, un sourire sur les lèvres car Maha est incorrigible. Son goût pour le caprice je le connais déjà, sa satisfaction à me voir plier aussi raison pour laquelle j’aime lui tenir tête. Là en l’occurrence c’est raté. De fière d’elle, elle passe à une expression un peu plus mécontente. Je crois l’avoir un peu froissée. « Oui bien sûr. » j’ajoute pour la narguer en soutenant son regard. Et sinon j’ai un délai de quelques heures pour digérer pour de bon son secret. Ok merci, qu’est-ce que ça serait si elle ne se revendiquait pas autant généreuse. Il parait que j’ai de la chance, le plus chanceux des hommes c’est clair. Surtout là face à ce regard de biche qui me provoque. Je serais tombé volontiers dans le panneau si je m’étais pas convaincu moi-même de résister à son attaque. « Je sais. » C’est dommage, oui, cela dit elle aura pas beaucoup résisté. Ca m’arrache un sourire tandis que mon bras passe autour de ses épaules lorsqu’elle se repositionne. J’expulse un sifflement face à la longévité à laquelle elle nous expose. « C’est long pour toujours, surtout face à des caméras. » Je râle un peu, n’oubliant pas les petites boîtes noires. Retrouver de l’intimité la semaine passée a été un soulagement, c’est pas tant une question d’être pudique ou quoi mais on se sent quand même épié et dans cet ascenseur étroit avec la caméra directement pointée sur nous encore plus. Mes doigts viennent jouer avec ses cheveux, ma résistance n’aura pas duré très longtemps. « On pourrait remplir des tabloïds avec ça. Enfin « beau », y a quand même un moment où l’un devra se nourrir pour survivre quand l’autre sera mourant… ça s’passe toujours comme ça, j’vois pas pourquoi on échapperait à la règle. » Oui c’est dégueulasse mais c’est comme ça que font les grands aventuriers que je sache. Je me sers de mon bras pour la rapprocher de moi, laissant filtrer un rire. Du monde, carrément. « Ca dépend, y a des privilèges à ta somptueuse présence ou pas ? » Je suis sûr que oui, elle va m’en trouver des tonnes. Même sans ça je veux bien lui accorder ce statut, aller. « Logiquement oui, je vois pas où je pourrais aller d’autre. » J’ai théoriquement plus de job puisqu’en étant parti comme un voleur j’imagine que mon patron a pas dû apprécier de voir ma gueule imprimée au tabac-presse du coin. Le logement c’est une ruine que je paie avec ce que j’arrive à sauver comme argent à la fin du mois car même en ayant pas un rond je me débrouille pour envoyer régulièrement quelques fonds à la WWF. Concrètement ce n’est pas une vie de rêve mais ma vie est là-bas, j’ai mes potes et ma famille et ça me va très bien comme ça. Je l’ai déjà dit : je suis pas ambitieux. « Et toi, tu vas aller où ? » Ma tête pivote et s'abaisse vers sa frêle silhouette. Elle sait déjà que je m’inquiète de sa réponse mais j’aimerais qu’elle ait changé depuis la dernière fois, le contexte est différent alors peut-être que la réponse le sera aussi. On a été tellement occupés ces derniers jours que ce sujet est passé à la trappe. Il faut croire que revenir dans ce jeu marque vraiment le début de la fin. « Tu veux toujours retourner en Palestine ? » J'ose espérer que ça faisait partie du mensonge.

Léo provoque parce qu'il sait que je ne supporte pas trop passer pour une fille incohérente je fais juste la moue comme si je faisais la gueule. J'arrête mon petit numéro de fille à moitié insolente la seconde suivante. Son bras me squatte, oui, il a tenu une minute, même pas. « Ce manque de volonté, je rêve » je le raille quand même parce que je suis bien obligée de le souligner. Je lui lance un regard appuyé pour lui rappeler encore sa faiblesse. Par réflexion, j'enroule mes petits bras, machinalement, autour de son torse. J'écoute la réponse de Léo, je fais la moue. «Arrête tu vas me faire culpabiliser de t'avoir fait revenir ici » je siffle alors avec un simple sourire. De le ramener encore sous les yeux des caméras. Mais ce n'est que pour une semaine, ou deux, j'en sais rien. Je ne suis toujours pas sûre que notre retour soit une bonne idée. Et puis ... comme si je pouvais culpabiliser dans ma vie, ce n'est pas si crédible que cela. Je fais remarquer que la production ne semble pas décidé à nous faire sortir de là. Léo se croit dans une version hard de Lost ou comment ça se passe ? Evidemment, je ne voudrai pas le couper dans son délire mais bon ... «Immonde, je passe mon tour » je laisse entendre avant d'afficher une mimique dégoûtée rien que par l'idée. Je ne suis pas une sauvage, je suis sensée être distinguée, à la base. «Et puis tu ne risques pas d'aller très loin avec moi, j'ai la peau sur les os » je lui rappelle alors parce que je suis toute frêle et petite, il ne risque pas de survivre. D'ailleurs, il le sait puisque on peut avoir l'impression que je suis squelettique et c'est le cas. Je finis par dériver sur l'après jeu, le vrai, parce que notre semaine aux USA, c'était plus une autre parenthèse qu'autre chose. C'est bien ce qui me semblait, Léo n'a pas d'autre plan que celui de rentrer chez lui, enfin c'est déjà pas mal. Je ne peux retenir un rictus narquois lorsqu'il me pose sa question. « Déjà je me vois mal retourner sur Paris pour des raisons évidentes » je glisse simplement avant de lui lancer un regard en biais. On ne peut pas dire que j'ai de véritable maison quoi. Super bilan de ma vie. L'une de mes mains caressent sa joue pendant quelques secondes. « Arrête de stresser » je lui dis parce que je crois qu'il guette ma réponse vu ce qu'il m'a dit la dernière fois que j'ai émis cette hypothèse avant notre départ. J'ai compris qu'il ne voulait pas que je retourne en Palestine, parce que c'est dangereux et tout ... Il n'a pas tord. « Je ne sais pas encore » je lui avoue en haussant les épaules parce que c'est la vérité. « Le but était d'en partir et de ne jamais y revenir sauf si la situation s'améliorait » je lui dis et on peut conclure que cela ne s'est pas fait. Je ne préfère pas imaginer la tête qu'afficherait ma famille si je me décide à revenir à Gaza, alors qu'ils ont tout mis en oeuvre pour que je parte. « Je me déciderai au dernier moment» j'annonce parce que je crois que je suis fatiguée de tout prévoir à l'avance, de tout calculer, je crois que j'ai besoin de me laisser porter.

Aucune volonté. C’est pas comme si j’avais promis de ne plus la toucher de la journée donc ça va je m’estime encore loin du cas désespéré. « C’est une question de pratique, tu vois là je suis confort.  » Je me défend sous son regard accusateur en espérant que l’argument « tu ne veux que mon bonheur » fasse son petit effet. « Je me demande si ça te rendrait plus douce, de culpabiliser j’veux dire. » J’adopte mon air faussement songeur même si au fond je serais vraiment curieux de voir ce que ça pourrait donner. Une Maha faisant des pieds et des mains pour se racheter de quelque chose me parait impensable, sûrement parce que j’ai jamais vu mais ça doit exister. Quoi que… ouais, non, sinon elle serait sûrement déjà morte de culpabilité à l’heure actuelle. Maha évoque l’idée de rester ici pour toujours et je nous imagine déjà finir cette possible éternité en crevant de faim. Mon végétarisme me gêne pas dans l’idée de la croquer pour survivre mais ça c’est dans les films que je me fais parce qu’au final à part rogner les os j’vois pas ce que je pourrais en faire de cette gringalette. « T’as raison, autant que je te garde en vie tu me seras plus utile. » Le problème c’est qu’en cas de crise majeure si je mange pas sur Maha je mangerai sur personne car j’ai pas plus de viande qu’elle au final. La mienne en plus elle doit être empoisonnée avec toutes les merdes que j’ai pu prendre… remarque foutu pour foutu c’est pas très grave. Enfin bref le fait est qu’on finira quand même par sortir de cet ascenseur et que la vie continue. J’ai pas prévu de choses folles pour cette suite de vie, je me demande ce qu’il en est de Maha. Ce ne sera pas Paris, c’est noté. J’espère que ce ne sera pas la Palestine non plus pour des raisons évidentes, elle les connait ainsi que mon opinion là-dessus. Je me tais et me contente de la regarder en attendant son verdict. Elle ne sait pas. Je crois comprendre qu’elle n’a jamais vraiment eu l’intention d’y retourner, la conviction qu’elle y avait mis faisait probablement partie du rôle… j’sais pas. J’préfère ne plus penser à ça et éviter de remettre en cause certains de ses faits et gestes au risque de ne plus en voir la fin. « Ca marche. » Je me contente de ça. Elle fait ce qu’elle veut, c’est pas moi qui vais lui demander des comptes. Avec tout ce qu’elle a pu me raconter j’ai cru comprendre qu’elle n’était pas habituée à rester très longtemps au même endroit. Ainsi soit-il mais à choisir j’aimerais un endroit où je serais amené à la revoir. Je lui aurais bien proposé quelque chose si seulement j’avais des plans. Ma main de libre s’élève pour venir rabattre ses cheveux derrière son oreille, finissant la virgule en caressant le bas de son visage je me déplace pour pouvoir venir poser un baiser sur ses lèvres. Elle me manquera. Peut-être un peu trop pour pouvoir m’en passer tout de suite d’ailleurs. Ma main remonte le long de sa nuque, mes doigts se noyant dans sa longue crinière brune. Je me décolle de façon à lui glisser une petite annotation, à titre informatif dira t-on. « Tu sais je suis ouvert à toute proposition, je suis pas sûr de supporter la célébrité à Grenoble. » A vrai dire si j’avais autant de courage que lui, je partirais comme Sayid pour m’occuper de la faune. Pourquoi pas un élevage de perroquets. Je suis d’ailleurs plutôt triste qu’ils aient embarqué Martin sous le départ de Maha mais de toute façon il se serait senti seul sans papa alors j’imagine que c’est mieux comme ça.