Le premier prime vécu au sein de la maison n'avait pas laissé un goût mémorable à Lula. Peut être était-elle trop optimiste, mais elle avait pensé que ça serait différent. Avant d'entrer dans Fake Lover, elle s'était imaginé les candidats comme une grande famille soudée, avec un sacré esprit de groupe bon enfant. Du moins au début, avant que les nominations ne deviennent de plus en plus délicates, au gré des affinités. Et pour le moment, c'était loin d'être le cas : pas de crise de fous rires collective, pas de cohésion de groupe. Juste des gens qui conversaient par petits groupes & des piques qui fusaient aussi rapidement que l'éclair et dont la plupart n'étaient pas franchement recherchées. Bref, rien de transcendant. C'est pourquoi Louise était elle aussi restée quelque peu en retrait, sans prendre parti à des joutes verbales aussi immatures qu'inutiles. Oh bien sûr, elle & Cillian avaient été élu meilleur couple pour cette première semaine, et le public l'avait désigné comme sa candidate féminine préférée. Mais ça n'avait pas plus de saveur que ça. La jeune femme avait pour habitude de se la jouer collective : elle aurait donc préféré un réel esprit de groupe à un titre éphémère qui serait redistribué à plus méritante dans sept jours à peine. Bref, la jeune anglaise restait sur une note aigre-douce et espérait sincèrement que l'ambiance se déride enfin, entre tous. Lula n'avait eu que des bonnes impressions des gens pris seul à seul - pour le moment - mais tous ensemble, l'ambiance ne prenait pas. Peut être que la soirée de Lundi soir permettrait à chacun de se laisser aller un peu, et d'apprendre enfin à communiquer sans se tirer dans les pattes. Voilà exactement à quoi la brunette pensait, laissant ses yeux clairs dériver sur la piscine illuminée et placide. Elle ne comprenait pas ceux qui s'énervaient pour rien, au quart de tour. Lula était souvent cynique, sarcastique, railleuse, ironique. Mais c'était toujours pour plaisanter, ou bien tourner une situation en dérision. Elle n'était jamais volontairement méchante, à moins qu'on la blesse profondément. Mais pour se faire, il fallait la connaître, afin de l'atteindre. Le reste du monde pouvait l'humilier, ça ne déclencherait rien de plus chez elle qu'un sourire en coin légèrement blasé. Par contre, elle était capable d'exploser comme peu, si une personne qu'elle estimait, appréciait ou aimait se montrait sous un mauvais jour, qu'on se le dise. Une voix familière troubla son questionnement peu passionnant et Louise fit rapidement volte-face pour tomber nez à nez avec Cillian, qui s'était lui aussi montré discret pendant tout ce prime. Plus que discret d'ailleurs. « Et son Roi qui daigne enfin la rejoindre. » ajouta-elle sur le même ton que son partenaire, affichant un sourire en coin amusé que lui seul pourrait sans doute comprendre. Si elle était la Reine de la soirée, il en était le Roi puisque c'est leur couple, leur association qui avait été récompensé. Et que celle-ci valait déjà beaucoup à ses yeux. Louise avait conscience de s'attacher trop vite, comme à son habitude, mais le temps qu'aucun mot du genre ne franchissait la barrière de ses lèvres, il n'y avait rien de mal à ça, pas vrai ? Elle se sentait proche de Cillian, connectée à lui d'une certaine manière & rien ni personne lui ôter ce sentiment, à part le concerné lui même. Mais il était vrai que le garçon avait tout des rêves de gamines de Louise, plongée toute entière qu'elle était dans des histoires sombres, passionnelles et torturées d'un autre temps, sous la plume brillante d'écrivains d'un autre siècle, bien trop complexes pour son âge normalement. Mais la petite fille en faisait fi et dévorait livre après livre, s'attachant à l'anti-héros, celui qui finissait toujours par tuer par amour, mourir ou bien se donner la mort. Glauque. La réplique de Cillian sur Oskar lui arracha un rictus amusé. Tiens, tiens, tiens, avait-il remarqué leur conversation alors qu'il avait eu l'air particulièrement... ailleurs. Intéressant. Joliment cynique, Lula renchérit de plus belle, tandis que Cillian s'approchait d'elle, sans se départir de son sourire singulier. « Ah oui ? Je n'ai pas fait attention. » assura-t-elle d'un ton si innocent qu'il en était bien évidemment éxagéré, tandis qu'elle renchérissait, déposant ses iris soucieuses sur le visage de nouveau fermé de son partenaire. « Par contre, j'ai remarqué que tu avais l'air absent. Parce que tu n'as vu ni mes regards appuyés, ni mes grands gestes. J'ai même pu déposer un baiser sur ta joue sans que tu t'en formalises, alors j'imagine que c'est un indice significatif. » Son sourire s'élargit tandis que son regard se faisait plus pénétrant, espérant puiser la réponse qu'elle attendait directement au coeur de Cillian. « Ça va ? Tu te fais à ton nouvel environnement ? » Lula se détacha du balcon sur lequel elle était appuyée pour se rapprocher de son partenaire, réduisant considérablement la distance entre eux. Elle haussa avec une désinvolture non feinte les épaules à sa dernière réplique. Certains aimaient plaire, d'autres avaient pour désir celui de déplaire. Lula avait besoin d'aimer très fort. Être aimée en retour était bien évidemment un plus, mais c'était le gouffre sans fond qui enserrait sa poitrine quand elle aimait qui la galvanisait. Et puis... elle recherchait l'affection de personnes physiques qu'elle estimait, pas d'ombres décharnées qui n'avaient ni nom, ni visage. Certains diront qu'elle avait la victoire modeste, d'autres que cela lui passait clairement au dessus. Ils auraient chacun à la fois tort & raison. Il y avait davantage. « Tu n'as pas à me féliciter, je n'ai rien fait de spécial, M. je-suis-arrivé-deuxième. Tu vois, je ne suis pas la seule à te trouver touchant. » Louise esquissa un clin d'oeil sincère & mutin, comme pour atténuer ce qu'elle venait d'affirmer. Elle détestait exprimer ce genre de choses, même si ça n'était qu'un ressenti totalement minimisé par le reste de sa phrase.

Spoiler:

Louise aimait passer du temps avec Cillian. Seule à seul, sans l'effervescence du Nid & les autres candidats en toile de fond. A ses côtés, elle se sentait à la fois étrangement bien, comme si elle était enfin réellement à sa place, tout en étant souvent intimidée par sa proximité avec son partenaire. Intimidée. Que ce mot sonnait bizarrement à ses oreilles. Lula n'était jamais intimidée par qui que ce soit. Jamais. Elle était volubile, expansive, impulsive et avait ce côté tête brûlée qui faisait que rien ni personne ne l'impressionnait. La jeune anglaise disposait de l'aplomb & de l'assurance sans leurs mauvais travers : l'arrogance & la prétention. Néanmoins, elle avait l'impression que Cillian lui faisait découvrir une nouvelle facette de sa personnalité, tout comme elle espérait le rendre un tout petit peu optimiste. C'était déstabilisant et plaisant à la fois. La situation vu de l'extérieur pouvait sembler banale et peut être pas des plus passionnantes pour les telespectateurs qui préféraient sans doute le sexe & les scandales à leurs discussions profondes, mais vu de l'intérieur, c'était poétique. Et presque beau. Mais Louise savait qu'elle s'emballait bien trop vite sans ne jamais le signaler, fort heureusement. Si elle n'avait rien répondu aux deux premières répliques de Cillian, se contentant de l'écouter tout en laissant la brise fouette agréablement son visage angélique, le fait qu'il avoue avoir apprécié son baiser furtif lui offrit un air réjoui qu'elle n'essaya même pas de cacher. Les mots ne franchirent cependant pas la barrière de ses lèvres : elle savait que dans ce contexte là, elle aurait sorti une raillerie quelconque, comme une pirouette pour éviter de s'enfoncer dans une réplique qu'elle risquait de regretter par la suite. Comme Cillian l'avait fait il y a quelques seconds, la jeune anglaise renchérit rapidement à son tour : « Une attitude positive ? Wow, je suis choquée. Aurait-on fait subir un lavage de cerveau à mon partenaire sans que je ne m'en rende compte ? En tout cas, tu m'en vois ravie. C'est la bonne solution. » Comme pour le prouver, la brunette esquissa un sourire franc, qui respirait la joie de vivre, sentiment qui l'animait bien plus souvent que son camarade... Enfin, l'once d'optimisme de Cillian semblait déjà envolée puisqu'il osa penser que les gens avaient eu pitié de lui. Qui dépenserait son crédit en votant pour un candidat qui fait pitié ? De la compassion, peut être. Mais pas de la pitié, qui était un sentiment nocif. Louise leva sans gêne ses yeux au ciel comme pour prouver qu'elle n'était pas du tout d'accord avec la réplique de son partenaire, avant de la réfuter aussi sec. D'un ton catégorique, qui ne permettait aucune contestation. « Non, ce n'est pas de la pitié. La pitié est un sentiment négatif. Peut être leur as-tu fait éprouver de la compassion à ton égard, et c'est aussi gratifiant pour toi : c'est un sentiment drôlement noble. Que tu mérites. » Parlait-elle trop ? Assurément. Les mots semblaient s'étirer hors de ses lèvres plus vite que sa pensée et c'est pourquoi Lula tâcha de détendre l'atmosphère et de repartir sur un ton clairement plus badin, histoire de s'empêcher d'en faire des tonnes involontairement. Le baiser de Cillian lui en offrit d'ailleurs l'opportunité. Le geste la surprit autant qu'il lui plut : venant de son partenaire une esquisse de geste impulsif était un grand pas en avant. Intérieurement touchée par ce qu'elle jugeait être un sérieux effort de la part de son partenaire elle dédramatisa la situation, mutine : « Désolée de te décevoir, mais si tu crois qu'on est quitte avec ton minuscule baiser, tu te fourres le doigt dans l'oeil jusqu'à Saturne. en m'ignorant comme tu l'as fait, tu as au moins bafoué mon honneur et j'exige réparation. Avec quelque chose qui t'éprouveras, bien évidemment, c'est le but. » Louise esquissa un sourire malin et défiant, avant de darder u regard pénétrant dans celui de Cillian et sans appel, retrouvant tout son aplomb naturel : « Serre-moi dans tes bras. » Le défia-t-elle. Pour un garçon si peu enclin aux effusions affectives, c'était un sacré challenge.