L'objectif du jour consistait à défaire ses valises et à installer ses vêtements dans l'armoire qu'elle s'était réservée. Jusqu'ici, elle n'avait trouvé ni le temps, ni la véritable envie de prendre ses deux énormes valises pour ranger le tout, replier si besoin ou placer telle chose sur un cintre. Forcément, il y avait bien plus intéressant à faire. Mais ses vêtements comptant un minimum pour elle, elle décida que c'était le moment parfait pour s'y mettre.
Montant les marches, elle retrouva son partenaire du jeu. Du moins, ancien partenaire du jeu puisque les couples n'étaient pas définitifs. Lennon – puisque tel était son prénom, elle s'en souvenait très bien – était lui aussi dans cet escalier à faire un je-ne-sais-quoi qui ne l'intéressait, bien évidemment, pas. Moment parfait pour discuter, n'est-ce pas ? Coincer quelqu'un tout seul dans les premiers jours, ce n'était pas la chose la plus simple du monde. Si bien qu'elle en profita pour s'approprier le garçon durant quelques minutes. « C'est étrange, ta tête me dit quelque chose. » dit-elle sur un ton qui tombait faussement dans la complicité. « Lennon, Lennon, Lennon... Je suppose que tes parents ont bon goût. » Inutile de préciser quel groupe de musique, connu mondialement, elle adorait écouter et quel artiste homme elle admirait.

Pour Lennon, sans grande surprise !

Il avait oublié son prénom ? Tant mieux, elle s'en fichait qu'on se souvienne d'elle ou non dans cette maison. Bien que cela venait sûrement du fait qu'ils étaient dans l'hôtel depuis deux jours et que cette courte période se révélait incroyablement occupante, au vu de l'installation qui se faisait un peu mieux chaque jour. « Effectivement, je suis italienne. J'ai la nationalité irlandaise maintenant, mais je n'en reste pas moins italienne. Et je m'appelle Catalina. » expliqua-t-elle sur un ton neutre. Il n'allait très certainement pas retenir son prénom – que voulez-vous, tout le monde ne pouvait pas avoir la mémoire de Cat' – mais ça valait toujours le coup de se présenter. « Je devrais probablement te demander comment tu trouves l'hôtel et les candidats et comment se passe tes premiers jours ici... » suggéra-t-elle après quelques minutes, laissant sa phrase en suspens. C'était les questions banales que tout le monde se posait. Cela n'allait pas être d'une grande utilité, savoir s'il se plaisait ici ou non lui passait au dessus. « A ton avis, quelle est la pire chose que quelqu'un pourrait faire dans ce jeu ? » le questionna-t-elle alors, espérant avoir une réponse intéressante de sa part.

Cela pouvait paraître étonnant, mais passer inaperçue ne dérangeait pas Catalina. C'était parfois une bonne chose, puisque cela voulait dire que les gens n'étaient pas assez méfiants et cela laissait bien plus de manœuvres que si les yeux étaient braqués sur elle. Dans l'ombre, elle pouvait tout faire sans que qui que ce soit le remarque. Elle aimait cette possibilité. Il pouvait oublier son prénom, elle ne lui en tiendrait pas rigueur.
Puis, il répondit à sa question. Ne pas jouer le jeu ? Effectivement, cela sonnait comme l'une des pires choses que quelqu'un pourrait faire. Mais pour Cat', ce n'était pas une question de respect envers les autres postulants au titre de « candidat de Fake Lover », c'était pour d'autres raisons qu'elle préférait garder sous silence pour ne pas influencer sa « réputation ». « La pire chose...Trop jouer le jeu. Il faut jouer, j'en suis bien consciente, mais pas aller trop loin et blesser quelqu'un trop violemment. En jouant avec les sentiments par exemple. » Elle avait beau paraître incroyablement sincère, elle ne l'était pas.

« L'émission se base sur les sentiments, oui. Est-ce pour autant une nécessité de jouer avec ? » lui demanda-t-elle en retour. Il y avait de grandes choses pour que les trois quarts des candidats jouent tous avec les sentiments, sans les prendre au sérieux, tout comme elle n'hésiterait pas à le faire pour arriver à ses fins. C'était sûrement ce qui ferait de l'audience à l'extérieur, malgré tout, elle avait le besoin de contredire ce qu'il disait, ne serait-ce que pour réussir à le faire réagir. « Et toi, tu en serais capable ? Ce n'est pas jouer, c'est être sans cœur. » annonça-t-elle gentiment. Elle fit une courte pause, ne le quittant pas des yeux pour observer chaque de ses réactions, voir ce qu'il avait à dire à ce sujet. Après quelques secondes, elle ajouta enfin : « Si tout le monde est venu là pour tirer son coup et blesser des gens qui n'ont rien demandé à personne, c'est que je ne comprends vraiment pas ce qui se passe ici. Les jeunes d'aujourd'hui ne savent visiblement plus aimer. Ça en serait presque triste. » Après tout, c'était pas totalement faux.

Eh bien, elle savait maintenant dans quelle catégorie jouait Lennon. Visiblement prêt à tout pour gagner. Elle tâcherait de s'en souvenir. « Certes. Mais certains égocentriques pourraient vite devenir sans cœur, à force de ne voir que leur petite personne. » dit-elle à son tour, en paraissant toujours aussi détachée, presque indifférente à cette conversation. Elle ne trouvait pas ça faux, ce qu'elle venait de dire. Ça ne s'appliquait pas à tous les cas, bien sûr, mais des égocentriques sans-cœurs, ça devait sûrement pouvoir se trouver. Peu importe.

Après les dernières paroles du jeune homme, Catalina comprit une chose. Soit il avait été blessé par l'amour auparavant, soit il avait vu les ravages que pouvaient faire l'amour, soit il avait une image bien désastreuse du monde. « Bien sûr que je suis capable d'aimer. » commença-t-elle en levant les yeux au ciel. « Tout le monde en est capable. Les gens ont juste trop peur de ce sentiment pour se lancer. Ils ont peur de la douleur que ça pourrait impliquer, c'est tout. Ça a beau pouvoir faire mal parfois, ne me dis pas que quand tu le vis, ce n'est pas merveilleux, parce que c'est pas vrai. L'amour, ça peut être beau et ça peut être vrai. Il faut juste apprendre à surmonter la peine, une fois que ce sentiment a disparu. » Elle aussi, elle avait eu des relations foireuses. Mais elle savait quand même que ce qu'elle avait vécu n'avait pas été si mal. Si les jeunes ne voyaient plus que le mauvais côté des choses, ils n'allaient jamais survivre à cette chose horrible qu'était la vie.