J'vais entendu la veille qu'un vieux cimetière trainé dans les environs du château. A côté de la chapelle, des sépultures s'entendaient sur quelques mètres carrés. Surpris par ce genre de lieu dans une émission de télé-réalité, je décidais de m'y rendre. Non sans peur, je parcourais les quelques mètres qui me séparaient de ce lieu surement haut en couleur dans la frayeur et le morbide. Je pris une grande inspiration avant de pénétrer en ce lieu funèbre avec ma canne toujours devant moi. Je marchais lentement. Ce genre de situation me faisait à moitié peur. J'en avais connu des plaisanteries, des gens qui se cachaient pour mieux vous surprendre dans un instant inopportun. Cependant, je n'avais pris là aucune précaution. Naïvement, j'avais cru que rien ne pouvait m'arriver dans l'émission, que j'étais en sécurité ici. Mais lorsque le vent se leva légèrement et qu'un bruit étrange me prit de court, je venais à me demander pourquoi j'avais suivi cette folle envie de découvrir ce vieux cimetière. J'en avais la chair de poule. Un aveugle dans un cimetière, c'était d'un pathétique, surtout que j'étais venu seul. Quel abrutis ! Un autre bruit, venant de derrière moi, m'interpella. Je me retournais, par instinct. Puis le silence parcourut les alentours. J'avalais difficilement ma salive pour reprendre mon chemin et trébucher sur une malheureuse pierre que je n'avais pas senti. Je me retrouvais à terre et plus précisément le cul dans une tombe. Je poussais un cri lorsque je constatais où j'étais.

S'il y avait bien un endroit qu'on ne s'attendait pas à retrouver dans une émission de télé réalité, qui plus est une émission qui aborde l'amour c'était bien un cimetière. Pourtant, cette année la production en avait laissé un pas très loin. N'étant pas très à l'aise dans ce genre d'endroits, je me disais qu'il faudrait peut-être que j'y fasse un tour un jour, par curiosité. J'avais surement été stupide pour y aller alors que la nuit était tombée depuis quelques heures. Me croyant seul je traversais la petite barrière, avançant tranquillement. Tous les éléments du parfait film d'horreur étaient présents, le vent, le froid, le brouillard, les bruits suspects... Moi qui n'était d'ordinaire pas trouillard je me retrouvais à frissonner. Je marchais sur une branche d'une manière lourde puisqu'elle se coupait en deux morceaux. Entendant un bruit venant de derrière cette étrange statue d'angelot, je venais à m'imaginer le pire scénario dans ma tête. Un zombie m'aurait-il entendu ? Merde, j'empêchais Dracula de dormir, si j'avais su j'aurais sacrifié un poulet... Sauf que... Nous n'étions pas dans l'amour est dans le pré, il n'y avait que du poulet déjà traité ici. Abandonnant l'idée de sortir ma gousse d'ail et mes pattes de lapin je m'avançais juste prudemment. Quelque chose craquait à nouveau et j'entendais ensuite un cri. Bon, il était peut-être temps pour moi de devenir souple, de prendre mes jambes à mon cou et de partir en criant comme une mauviette, mais ma curiosité revenait au galop, approchant lentement, prêt à tomber sur un cadavre empalé je me retrouvais devant une tombe ouverte, un candidat à l'intérieur. Je ne le connaissais pas encore. « Est-ce que ça va là dedans ? »

Avoir les fesses dans une tombe n'était pas habituel. Je me demandais même encore comment j'avais pu faire mon coup. La peur, probablement, et la surprise aussi à cause e tous ces bruits étranges. Ça me donnait toujours autant la chair de poule. « Est-ce que ça va là dedans ? » Je tentais de me redresser. En vain. Je me laissais retomber, désespéré par ce qu'il m'était arrivé. « Ça peut aller. Ça me fait juste bizarre de me retrouver à la place d'un mort. » Je réessayais de me relever et je réussi finalement à sortir de ce trou à rat. Cependant, j'en avais perdu mes lunettes de soleil et ma canne. Les ennuis continuaient donc encore. De toutes manières, je les collectionnais ce soir alors autant que tout se fasse maintenant pour que je sois enfin tranquille. Je tâtais alors le sol sous le regard, surement perplexe de ce candidat. Me prenait-il pour un fou ? Probablement. L'étais-je vraiment ? Possible.

M'attardant dans ce cimetière je m'étais fait un film d'une très simple situation, une évidence qui aurait dû me venir à l'esprit, Jason pouvait ranger sa machette ce n'était qu'un simple candidat tout comme moi. Du moins, c'est ce que je croyais. Il essayait de se relever, semblant même désorienter me forçant à me poser quelques questions. Etait-il aveugle ou quelque chose comme ça ? Attendant qu'il se relève et qu'il sorte de cette tombe je faisais volontairement quelques signes qui auraient dû le faire réagir s'il m'avait vu. Je prenais le risque de me taper la honte, mais bon... Ce ne serait pas la première fois de toute manière. Ne désirant pas lui demander s'il était bel et bien aveugle, je supposais qu'il devait entendre cette question toute la journée et je ne voulais pas qu'il s'énerve, je me contentais de regarder si un objet était par terre en remarquant qu'il tâtait le sol. Je marchais quelques mètres pour saisir une paire de lunettes et, un peu plus prêt une espèce de canne que je lui tendais gentiment. « Tiens... Tes lunettes de soleil et ta canne. » Je les lui donnaient, puis, comme un être vivant normal je passais maintenant aux présentations. « Moi c'est Benjamin. »

Quel est on film d'horreur préféré ? En entendant le mot cimetière, j'avais tout de suite eu cette réplique culte en tête. Allez savoir pourquoi. Et tandis que je scrutais le sol à l'aide de mes mains, j'y repensais soudainement. On aurait presque pu se croire d'un film d'horreur. J’espérais tout de même que personne ne m'attendrait lorsque je me relèverais. C'était toujours comme ça dans ce genre de film.Il suffisait de ramasser quelque chose au sol pour que l'horreur se trouve en suite derrière nous. Horrible ! Heureusement que je ne voyais plus. « Tiens... Tes lunettes de soleil et ta canne. » Je me relevais alors facilement et essayait de diriger ma main vers celle de cet homme qui était venu à mon secours. J'y parvins après quelques secondes de recherche. Immédiatement, je replaçais mes lunettes de soleil sur le bout de mon nez. « Moi c'est Benjamin. » « Je suis Lukas. » Lui répondis-je gentillement. « Merci pour ton aide, en tout cas. Sans toi, j'aurais certainement mis beaucoup plus de temps pour les retrouver. » Je lui souris, ne sachant pas quoi dire d'autre. Un nouveau bruit étrange me glaça alors le sang et même si j'avais un pull bien chaud sur le dos, j'avais toujours cette chair de poule qui ne se décidait pas à me laisser tranquille. « Qu'est-ce qui t'as amené ici, Benjamin ? »

J'étais sans doute cinglé pour venir m'aventurer dans le coin, comme ça. Je me doutais bien qu'il ne pouvait rien m'arriver, mais c'était souvent comme ça que tout débutait dans les films d'horreurs. Tout allait pour le mieux, la bande de jeune fait la fête lorsque... OH MY GOD, tout s'enchaine à une vitesse folle, les meurtes ont lieux plus vite que prévu. Au final seul deux personnes parviennent à s'échapper et encore... Il arrive que personne ne s'en sorte. J'avais surement trop vu de films d'horreurs, mais je psychotais pour rien, un bad trip comme les autres, sauf que la drogue n'était pas à l'origine de toutes ces idées pourries. Maintenant debout, face à mon camarade de jeu je m'étais contenté de lui rendre les objets qui semblaient lui appartenir, me présentant par la même occasion. Il se présentait également, Lukas. « Merci pour ton aide, en tout cas. Sans toi, j'aurais certainement mis beaucoup plus de temps pour les retrouver. » Lui souriant, je m'appuyais contre une tombe, je n'étais même plus certain qu'il y avait un seul cadavre sous cette terre. « Je trouve ça tout à fait normal. » Un nouveau bruit retentissait dans l'ensemble du cimetière, je tournais la tête pour voir d'où est-ce que cela provenait. Rien du tout. « Qu'est-ce qui t'as amené ici, Benjamin ? » N'étant pas sûr qu'il parle du cimetière, ou bien de l'aventure je réfléchissais donc à une réponse qui engloberait les deux options. « Un besoin d'aventure... Et toi ? »

De nouveau debout, je constatais que l'ambiance qui se dégageait de ce cimetière était tout aussi lugubre dans cette tombe que là où j'étais actuellement. J'en avais des frissons. Pourquoi foutre un cimetière dans une émission de télé-réalité ? Je ne comprenais toujours pas. Nous n'étions pas dans un film d'horreur pourtant ! A moins qu'il y ait un croque-mort parmi les candidats. C'était une piste à suivre bien que cela soit peu probable. « Un besoin d'aventure... Et toi ? » L'aventure... Je connaissais très bien ce mot. Pour moi, tout était une aventure comme monter les escaliers ou simplement traverser la rue. « La curiosité. J'entendais tout le monde parlait DU cimetière du nid. Je voulais donc moi aussi me procurer quelques frissons... » Lui répondis-je gentillement, avant de me retourner suite à un nouveau bruit étrange. Bien que je ne pouvais voir, dans ce genre de situation, j'avais gardé un certain instinct. « Et je crois que j'en ai eu bien plus que je ne l'aurais imaginé. » Continuais-je d'une voix un peu plus tremblante.

J'avais maintenant la confirmation qu'il était malvoyant, voir totalement aveugle. Il avait peut-être l'habitude d'être dans cette situation, mais il était tout de même désorienté, il lui était impossible de dire le contraire. Compatissant, et me rendant compte que j'avais une chance incroyable d'avoir une vue parfaite, je baissais la tête un instant. Plusieurs bruits retentissaient dans ce gros cimetière, plus l'heure avançait plus j'avais les boules pour être honnête. Même si j'avais toujours été fan de ce genre de plans, des événements paranormaux ce soir je m'étais décidé à être raisonnable. « La curiosité. J'entendais tout le monde parlait DU cimetière du nid. Je voulais donc moi aussi me procurer quelques frissons... » Hochant la tête, je regardais autour de moi. Ces bruits n'étaient vraiment pas rassurants, j'étais peut-être en train de me faire des films, mais la production était suffisamment déjantée pour engager un homme qui passerait ses journées à nous faire peur. « Toi aussi ? Je me suis demandé pourquoi il y avait un cimetière, et puis finalement… Je me suis dit que c’était peut-être pour se faire flipper, j’ai voulu voir ce que ça donnait. » Lui répondais-je d'une manière sympathique. Si certains pouvaient croire que j'étais un abruti, je me montrais plutôt accueillant, je n'avais rien contre personne. Il ne fallait juste pas me provoquer. « Et je crois que j'en ai eu bien plus que je ne l'aurais imaginé. » Réflechissant une petite minute, j'avais une idée de génie. Fuir cet endroit comme la peste, du moins... Jusqu'à ce qu'il ne fasse jour. « Si tu veux, on retourne à l’entrée ? »

Excellente question: Pourquoi un cimetière ? Je me la posais toujours car la réponse restait encore un mystère. Pourquoi ? La possibilité d'avoir un croque-mort dans le nid m'était venu à l'esprit il y a une ou deux minutes mais cela devait être peu probable. A moins que nous ayons un mort parmi nous avec un secret se résumant à "je suis déjà mort mais par miracle je suis encore en vie". Ouais, non. Trop irréaliste. Je crois que je commence à m'emballer pour rien. « Si tu veux, on retourne à l’entrée ? » Ça, par contre, c'était une excellente idée ! J'acquiesçais d'un signe de tête. « Volontiers, ça m'évitera probablement de saluer d'autres cadavres. » Je repris donc ma route en sens inverse. Cette fois-ci, j'évitais tous les obstacles. Ma canne était d'une grande utilité. Je pouvais ne pas tomber grâce à elle et je pouvais frapper, fouetter le premier mort-vivant que je croiserais. Aveugle mais pas con ! « Nous voilà en sécurité... Enfin, je l'espère... »

Discuter dans un cimetière, qui plus est lorsque la nuit était déjà tombée c'était loin d'être ma tasse de thé. Je m'en rendais compte maintenant et j'espérais qu'il serait partant pour sortir au plus vite, j'avais envie de me dégourdir les jambes par la même occasion. Lui proposant gentiment de se rapprocher de la sortie, j'attendais à présent qu'il me fasse part de son avis sur la question. « Volontiers, ça m'évitera probablement de saluer d'autres cadavres. » Souriant, je le laissais passer devant, le suivant de prêt au cas où. Oui, même si je me promettais toujours de ne pas avoir de pitié pour un handicapé, pas parce que j'étais méchant. Parce qu'il fallait des personnes comme moi, qui permettent aux personnes toujours sous estimées d'être elles-mêmes. Il atteignait la sortie en un seul morceau. « Je tiens à saluer ta performance, même pas un petit bisous aux cadavres du coin. » Le taquinais-je en entendant un nouveau craquement venant cette fois-ci de derrière nous. Il y avait quelqu'un ici, j'en étais sûr. « Nous voilà en sécurité... Enfin, je l'espère... » Me retournant vers lui je hochais la tête, me rappelant qu'il était aveugle. Quel con j'étais. « Oui et puis... Si une bande de zombies débarquent, je te laisse faire l’appât pendant que je frappe ceux qui seront vers moi avec ta canne. »