Le nid était immense. Non pas parce que c’était un ancien château restoré de toute part, mais parce qu’on trouvait des pièces aussi improbables les une que les autres. Kon n’a pas regardé les saisons précédentes du jeu, et ne s’attend pas à reconnaître une seules des pièces lorsqu’il y rentre, mais il aime ça. Se balader, découvrir, apprécier l’idée qu’il allait vivre dans un palace pour quelques temps. C’est toujours mieux que dans un appartement en centre-ville, non? Il continua de visiter la bâtisse et cette fois, entra dans une pièce aux couleurs chatoyantes. Du vert, du orange, des couleurs qui donnent la forme. De plus, tous les instruments présents laissaient clairement pensé à une salle de musique. Kon y pénétra, et tomba sur une candidate assise non loin de là.

__Est-ce que j'interromps quelque chose? demanda Kon en s’avançant vers elle.

Il n’avait pas eu le plaisir d’être présenté.

De taille moyenne, la peau chocolat et les cheveux sombres, la jeune femme était joli. Son visage lui revenait rapidement en tête mais impossible d’y mettre un nom. Pourtant, il avait partagé un déjeuner ce matin même avec elle. Kon se rapprocha d’elle alors qu’elle lui répondait qu’elle ne savait guère gérer un instrument de musique. Ensuite, elle n’attendit pas une minute de plus pour se présenter. Neela. Joli prénom. Kon se pencha vers elle pour lui claquer une bise sur ses deux joues.

__Disons que comme nous serons amenés à nous revoir chaque jour, embrassons nous, affirma l’irlandais, un sourire malicieux se dessinant sur ses lèvres. Gamin, ma mère a insisté pour que je prenne des cours de piano. Mon professeur était plutôt traumatisant, du style tyrannique exigeant a donner des coups de règle sur le bout des doigts. Bref, je sais jouer deux ou trois morceaux, ceux qui m'ont valu le plus de coup de latte !

Un rire lui echappa au souvenir de ce vieil homme aigri. Tout ça pour que sa mère soit fier de dire que son fils chéri savait jouer d’un instrument. Inutile de dire que Kon a peu retouché un clavier depuis cette époque.

__Oh, et je suis Kon.

Surprenante demoiselle. Visiblement nerveuse et maladroite dans ses paroles, elle restait néanmoins aimable et rigolote. Kon se moqua presque d’elle lorsqu’elle s’embrouilla. Il pensa au nombre de morts douloureuses qu’il avait offert à son professeur à chaque fois qu’il recevait un coup de règle, et se dit qu’il n’avait pas songé aux rats. Bien sûr, à cette époque, il n’était qu’un adolescent un peu rebelle qui n’avait rien a faire de savoir jouer ‘Au clair de la lune’ au piano. Pff, il pensait même qu’il pouvait même pas se vanter de ça auprès des filles. Ce qui les faisaient rêver, c’était la guitare. Enfin voila.

__En fait, j’avais pas le choix. Ma mère aussi est un tyran dans son genre , affirma le trentenaire en rigolant.

C'était une boutade bien sûr. Quand bien même sa mère s'est montrée intransigeante pour les leçons de piano et la moyenne de mathématiques à remontrer en secondaire, elle restait la personne la plus importante dans le coeur de Kon. Parler d'elle lui fit demander comment elle allait. Et il se mordit la lèvre à l'idée de sa réaction quand elle verrait ces images dans la télé. Il chassa cette éventualité de son esprit.

__Si tu veux, je t'apprends une mélodie. Ca sera toujours un plus avec le triangle.

Kon rigola à l'entousiame de Neela à l'idée d'apprendre une chanson au piano. Les deux habitants s'installèrent derrière le clavier brillant jamais encore utilisé. D'abord, il frolla les touches, cherchant dans sa mémoire comment commencer sans se tromper, et lorsqu'il joua la mélodie, les notes lui revinrent facilement. Neela semblait fascinée par la dextérité de Kon, et lui même s'étonna de ne pas faire de fautes. Il acheva vite le morceau en souriant comme un gamin. Comme quoi il n'avait pas perdu la main.

__Tu crois? Faudrait y penser à ça ! plaisanta l'irlandais. Allez, à ton tour.

Il prit délicatement la main de Neela et la posa sur deux touches en particulier. Puis, il appuya sur ses doigts pour lui montrer quelles touches actionner et quand pour obtenir la mélodie.

__Alors, pourquoi Fake Lover?

Egoïste? Non, certainement pas. Kon lui même sait combien il est devenu cher de vivre de nos jours. Il se souvenait encore de son père qui se cassait le dos à l'usine pour ramener de l'argent à la maison. La moitié servait aux courses, à l'entretien de la maison, à faire plaisir à ses proches... et l'autre moitié, il le mettait de côté pour préparer les prochaines vacances, ou s'acheter une nouvelle voiture. Maintenant, Kon peut à peine faire cela, et l'argent qu'il mettait de côté, c'était pour les études de ses mômes. Donc il comprenait la jeune femme. Il comprenait qu'on pouvait être capable de participer à ce genre de jeux pour s'offrir une vie plus belle : chacun à le droit au bonheur.

__C'est tout à ton honneur de t'occuper de ta famille.

Il sourit quand elle tenta de reprendre les quelques notes qu'il lui avait enseigné, un peu lentement bien sur, mais sans en oublier une seule ce qui impressionna Kon. Lui, il avait mis deux semaines pour retenir une série de dix notes, à l'époque.

__Pour rien en particulier, j'peux répondre l'argent parce que oui, ça me plairait d'en avoir autant qu'il en propose mais je n'ai pas la prétention de me dire que je vais gagner. Mais j'espère quand même hein, expliqua le trentenaire en plaisantant. J'avais juste envie de changer. Je m'enlisais dans un train-train quotidien réellement effrayant. Quand j'étais jeune, c'était pas ça mes rêves.

Ouais, c'était pas la vie dont il rêvait. Attention, il adore ce qu'il a, ses proches, il aimait son boulot, mais c'était juste pas... ça.