J’finis mon p’tit déjeuné en compagnie d’un petit groupe de candidats appartenant à la même vague de levée que la mienne. Oui, il faut savoir que les couchers comme les levées se faisaient par vague. Ce n’est jamais tous en même temps. Imaginez le bordel. Une vraie fourmilière quand on est tous debout. Enfin, ce système servait à épurer et alléger le train de vie de tout un chacun. D’autant que, comme ça, ça permet de ne pas attendre mille ans entre la douche et la cuisine par exemple. Bien que le château soit grand, y’a pas à dire hein. Mais bon. J’sais pas à qui le tour niveau vaisselle alors j’préfère m’occuper de mes couverts, les essuie et les replace dans les placards. Ca ne me dérange pas vraiment. J’aime pas être assistée de toute façon. J’pars du principe que j’ai deux bras, deux mains, deux jambes, bref tout le matériel nécessaire pour bouger mon cxl au lieu d’attendre que ça tombe de ciel. J’décoche un sourire aux habitants encore présent dans la cuisine avant de quitter la pièce. Aussitôt j’me remets à arpenter les longs couloirs pompeux et luxueux du château avant d’arriver devant la porte d’une pièce qui m’est encore inconnue. J’arque un sourcil durant une demi-seconde avant de franchir l’entrée. C’est alors que je suis accueillie chaleureusement par une musique qui ne m’est pas inconnue bien au contraire. Je souris. Elle me rappelle des souvenirs. Je m’avance un peu plus dans la pièce, mes prunelles émeraude découvrent la salle et finissent par se poser sur une silhouette féminine allongée à même le sol. Inconsciemment, je me mets à fredonner la mélodie puis quelques paroles me reviennent. « ♫…could you hear them howling, could you breathe inside your well-known plastic bag… ♫ » je chantonne doucement. Je ne voulais pas la déranger, cependant mon arrivée n’est pas passée inaperçue puisque son regard finit par se poser sur moi. J’esquisse alors un sourire. « Désolé, je ne voulais pas te déranger » je fais alors, une moue désolée au visage.

Une mine étonnée passe sur mon visage. Une demi-seconde à peine. En effet, la jeune femme connait mon prénom. Et, j’avoue que cela m’étonne mais me fait aussi grandement plaisir. C’est, en fait, la première que je croise qui a un tant soit peu de mémoire parmi ceux que je ne connais pas encore. Ou qui a juste fait attention à ma présence. Mais surtout qui ne me balance pas ouvertement à la gueule qu’elle ne me connait pas ou ne se rappelle absolument pas de moi. Bref, ca fait toujours plaisir quoi. « Et toi tu es Sive, je sais ! » je fais enthousiaste en enclenchant un pas vers elle, un large sourire aux lèvres. J’ai une mémoire remarquable c’est tout, mais il n’y a rien de magique ou d’exceptionnel à cela. La mémoire, ca se travaille, c’est tout. Puis, vu les études que j’ai entrepris, mieux vaut pour moi d’avoir une grande mémoire. Soit. Et, je suis d’autant plus rassurée lorsque celle-ci me dit que je ne la dérange aucunement. Tant mieux. « Je trouve aussi » j’approuve. « Surtout lorsque les gouts semblent similaires » je surenchéris en levant légèrement les bras, paumes vers le plafond pour désigner la morceau qui raisonne dans la pièce, répondant par le même regard complice qu’elle affichait. Je m’avance d’autant plus. « Oh non, non, laisse, j’aime beaucoup cette chanson, elle me rappelle beaucoup de chose » je dis, un sourire rayonnant aux lèvres. « Toute façon, je serais incapable de me souvenir de quoique ce soit au niveau du jeu au piano. Sauf, au triangle, là y’a moyen. » je plaisante, laissant mon rire cristallin interférer avec la mélodie en marche, avant de prendre place, non loin d’elle, sur un coussin au sol. « Et toi ? Tu joues d'un instrument ? » je demande, curieuse, mes prunelles balayent la pièce, appréciant le large choix d'instrument mis à disposition.

La jolie jeune femme échappe un rire qui m’arrache un sourire. Elle part ensuite sur une réflexions concernant l’instrument qu’est le triangle. « Figure toi qu’entre deux pensées inutiles dans ma vie, j’ai mené cette réflexion là sans jamais l’aboutir. Enfin sans jamais trouver aucune utilité au triangle. Comme pour le guiro aussi ou les claves. Même combat quoi » je surenchéris, hausse les épaules et ris. Ce doit être des instruments pensés exclusivement pour l’utilisation en classe de maternelle. Histoire de divertir les gosses. Ou alors, au collège, pour apprendre à des ados abrutis que n’importe quoi pourvu que cela fait du bruit peut faire office d’instrument. Bref. Après quoi, alors que je lui demande si celle-ci est musicienne, sa réaction se lit sur son visage, et j’ai ma réponse. J’esquisse un sourire. Et, grimace aussi pour lui faire comprendre, essayer du moins, qu’on doit être dans le même cas alors. Je ne peux m’empêcher d’éclater de rire à sa réponse lorsqu’elle évoque « J’ai du bon tabac » « Dommage, j’en connais les paroles, j’aurais pu t’accompagner. » je plaisante, un sourire aux lèvres. « Tu devrais essayer: au clair de la lune » je commente en prenant un air sérieux, quelques secondes du moins, puis lui souris. Franchement, je préfère en rire qu’en pleurer. Crédo. Par ailleurs, je lui lance un regard compréhensif. Sive dit alors avoir une idée. Intriguée, j’arque un sourcil. Curieuse, je souris. Impatiente, je lui dis d’attendre, et file chercher mon bien dans le dressing. Au pas de course. Je reviens rapidement et lui tend l’Ipod. « Ne me dis pas que tu as en tête un genre de blind test ? » je fais alors malicieuse, en plantant mes prunelles inquisitrices dans les siennes. Comme si j’allais avoir les réponses dans le fond de ses iris. Oui, quand je m'impatiente, je me mets à livrer toutes sortes d'hypothèse afin qu'on me dise la chose. Le travail à l'usure, que ca s'appelle.