Vingt-et-une heures, lendemain du prime. Je m’éveille comme un charme après avoir subi une confrontation matinale avec Anabel, ayant dormi toute la journée en compagnie de mon traversin. J’ai avalé quelques médicaments et un grand verre d’eau qui m’évitent un mal de crâne indésirable, et en réalité je me sens aussi fraîche qu’une fleur. Commence pour moi ce lundi 4 juin, aussi je m’étire en baillant avant d’aller me brosser les dents. J’enfile ensuite un short en jean ainsi qu’un haut à dos nu blanc, glissant mes pieds dans des sandales marron d’été tout en ouvrant la porte qui mène vers l’extérieur. Je suis prête à affronter cette fin de journée comme un tout nouveau jour, inspirant profondément tandis qu’une poussière s’incruste dans mes narines, me faisant éternuer. Saleté. Je trottine jusqu’aux écuries que je me suis promis de visiter cette semaine, croisant les diverses fontaines qui m'aspergent de quelques gouttes d'eau, le sourire aux lèvres. Lorsque j'arrive enfin à destination, je découvre un décor fidèle, visiblement ils se sont contentés de vider les lieux tout en gardant le reste authentique. Je parcours les box, émerveillée, une lueur attendrie au fond des iris tandis que j’imagine une grande jument blanche tachetée de gris me tendre son museau. « Bonjour ma toute belle. » Je salue mon amie imaginaire en tendant la main, caressant le vide comme toute bonne patiente d’un hôpital psychiatrique qui se respecte. Je reste un instant à contempler le mur qui me fait face, puis m’éloigne vers une selle posée sur une poutre sur laquelle je grimpe assez facilement en m’accrochant à un autre box. Je dois être à deux mètres de hauteur, perchée sur mon faux cheval en ordonnant comme une idiote. « Allez, au galop, au galop ! » Et je m’accroche à l’objet, tendant le poing vers le haut tandis que mes fesses glissent dangereusement pour donner du rythme à ma monture inexistante. La selle chavire sur le côté, m’emportant avec elle, me laissant m’écraser dans le foin. « Aïe. » Je ne suis plus qu’une étoile de mer paralysée, une mèche rebelle me traversant le visage sans que j’ai la force de la repousser, mêlée à un morceau de paille qui me chatouille le nez. J’en suis certaine désormais, la production cherche à m’éliminer.

Il était tard mais Sochanna s'en moquait. Elle avait besoin de marcher, de se vider un peu l'esprit, ce qu'elle avait tenté de faire toute la journée. De sombres pensées avaient établies leurs quartiers dans son esprit. Elle avait désespérément besoin de penser à autre chose. Elle avait emportée avec elle une bouteille de vin largement entamé, espérant anesthésier ses démons quelques heures. Oui, Sochanna boirait ce soir. Rien qu'un verre ou deux. Son "petit déjeuner nocturne" avec Sami, arrosé d'un verre de vin avait eu l'air de fonctionner ce matin, elle était arrivée à dormir quelques heures. Boire l'aiderait peut être à ne pas songer à "l'autre solution" qui sommeillait tranquillement dans la poche intérieure d'une de ses valises. Non, elle serait plus forte que cela. Ses pas la conduire aux anciennes écuries. Elle avait entre-temps ingurgitée quelques gorgées de vin, rien qui ne suffirait à la rendre pompette, elle s'était copieusement servie dans les restes au cours de l'après-midi pour tenir le choc de plusieurs verres. En entendant des voix dans l'écurie elle songea à rebrousser chemin mais elle avait déjà explorée la plus part des pièces du château. Elle supporterait un intrus plutôt que les vingt et quelques qui se trouvaient actuellement dans le château. Elle s'adossa au chambrant des portes de l'écurie et en assistant au spectacle de Swann chevauchant un cheval imaginaire un léger sourire se profila au coin de ses lèvres. La chute de la jeune femme déclencha son rire, léger lui aussi. Elle s'approcha en buvant une nouvelle gorgée de vin. "Dans ton monde à toi les poneys sont invisibles ?" Demanda-t-elle en se juchant à son tour sur la scelle d'une main sure. Ce n'était pas pire que de monter une chamelle. "Tu montes en scelle Cow Girl ?" Ajouta-t-elle en se penchant, tendant la main à la blondinette qui se trouvait le nez dans la paille.

Flûte de zut, la honte. Une candidate a assisté à ma lamentable chute, aussi je reste immobile un long moment dans l’espoir de me fondre dans la paille. Malheureusement mes efforts sont vains puisqu’elle m’interroge sur les poneys invisibles, et je ne peux pas lui répondre autre chose qu’un « On ne se moque pas, l’ennui fait faire des choses bizarres » légèrement honteux. Je souris, écartant les mèches platines qui barrent mon front, me redressant sur les coudes. « Ou alors ce sont les relents d’alcool du prime . . . » Je propose comme seconde solution avec une grimace, presque prête à vomir à cette seule pensée. Je ne veux plus entendre parler de champagne pendant au moins trois semaines. J’observe la demoiselle grimper sur la selle à son tour, visiblement elle désire entrer dans mon monde de beaux chevaux imaginaires. Un sourire s’esquisse sur mes lèvres tandis que j’attrape ses doigts des miens, me hissant derrière elle. Je m’agrippe à sa taille, me collant contre son dos comme si notre chevauchée était particulièrement éprouvante, patientant quelques secondes avant de lancer un « Attention, un indien ! » sonore. Je la préviens au cas où elle ne l’aurait pas aperçu, attrapant un fer à cheval cloué au mur pour le lancer vers l’avant, vers un ennemi invisible. En fait j’aime bien les indiens, mais il me semble bien que les cow-boys –pour la plupart- les traitaient comme des moins que rien. Je souris bêtement, imaginant le vent dans mes cheveux, les muscles du cheval sous mes cuisses, le sable d’un désert d’Amérique sous les sabots de notre monture fantastique. Puis, finalement, j’interroge la demoiselle, comme sorti de nulle part. « Tu n’as jamais eu peur, dans tous ces pays dangereux où tu as pris tes photos ? » J’y pense en m’imaginant ce décor inexistant. J’ai cru entendre dire qu’elle avait plusieurs fois foulé le sol des pays en guerre, et je vois en elle un grand courage.

« On ne se moque pas, l’ennui fait faire des choses bizarres » Sochanna hausse un de ses fameux sourcils magiques dans une expression qui se veut amuser. De toute évidence l'ennui n'était pas la seule responsable de l'attitude de la jeune femme. « Ou alors ce sont les relents d’alcool du prime . . . » Oui ceci expliquait peut être plus cela. Enfin ce n'était pas la blonde qui allait faire la leçon à ... la blonde. Whaa attention à ne pas se perdre. Vous me suivez toujours ? La main de Swann se referma sur la sienne et Sochanna l'aide à remonter en scelle. Sochanna monte en tête et sa fertile imagination, aidée par les quelques gorgées de vin fait le reste. Elle imagine le paysage vallonnée et aride, les moutons de pailles qui roulent sur la plaine poussés par un vent brulant. Tout y est y comprit... « Attention, un indien ! » Sacrebleu, la petite blonde lisait dans les pensées de sa compagne de horse tripe. "Hey attends c'est peut-être le seul mec dans les kilomètres alentour, on aurait pu en faire notre esclave." Bah oui, qui allait allumer le feu maintenant ? La blonde rie et pour fêter cette petite "émotion", descend une gorgée de son fond de bouteille. "Une petite lampée ma petite Billette ?" Propose-t-elle en souriant. « Tu n’as jamais eu peur, dans tous ces pays dangereux où tu as pris tes photos ? » La question prend Sochanna par surprise en plein milieu de son tripe Far West. Une question légitime au vu de son métier, une question qui revient régulièrement depuis trois semaines. "Si j'tais morte de trouille la plus part du temps... Mais c'est ce qui rendait le boulot si passionnant." Accro à l'adrénaline elle avait pourtant payé son tribu au désert de nombreuses fois au cours de ces années de Reporter. "Et toi je suppose que tu es dresseuse de Licorne ?" Bah oui après les cheveux imaginaires la suite logique ce sont les licornes non ? La taquinerie accentue le sourire de Sochanna. Elles chevauchent toujours en plein Far West dans sa tête.

Visiblement j’ai fait une boulette, parce qu’il ne fallait pas tuer l’indien. Zut, le pauvre s’est pris un fer à cheval en pleine tête, pas évident qu’il ait survécu. Il faut dire que le prendre comme esclave me semble assez compliqué vu que nous n’avons qu’une monture et des vivres limités. Déjà que je pensais à l’éliminer en cours de route pour survivre dans le désert . . . Je la vois boire à la bouteille, retenant un haut le cœur, m’écartant légèrement d’elle lorsqu’elle me la tend pour partager. « Uniquement s’il s’agit d’un fond de whisky. » J’affirme bravement, à fond dans mon rôle de cow-boy rustre. J’espère au fond de moi qu’il ne s’agit pas de cette substance, me concentrant sur le paysage imaginaire afin de ne pas dégobiller sur la pauvre jeune femme car je sais à quel point c’est désagréable de servir de poche à vomi. Je décide alors de relancer la conversation sur sa vie réelle, et j’imagine parfaitement qu’elle devait être morte de trouille. Je me demande ce qu’elle a vécu comme expériences difficiles, jusqu’où elle a risqué sa vie. A-t-elle failli mourir ? Plusieurs fois ? A côté, FAKE LOVER doit être une promenade de santé pour elle, et ça je le comprends. Je n’ai cependant pas le temps de rétorquer puisqu’elle me retourne la question, m’arrachant un rire. Des licornes, ça éveille quelques souvenirs . . . Le pauvre Slavin doit avoir du mal à se remettre de notre chasse aux créatures magiques de la veille dans la forêt. Je hausse les épaules, fixant mon regard sur une boule de poussière qui traverse notre chemin, pulvérisée par les sabots. « Oh tu sais, quand on a le talent c’est assez facile en fin de compte. » Je me vante sans ménagement, toujours dans les bottes d’une dure à cuire. « Cela dit je ne te conseille pas de jouer à saute-moutons avec une licorne ! » Je lance un sourire en coin en référence à cette célèbre expression qu’elle connaît peut-être. « Un saloon, ce n’est pas trop tôt j’ai les fesses en feu, tu crois qu’on pourra y trouver des prostituées de qualité ? » Je l’interroge, lâchant sa taille tandis que le cheval ralentit sa course. J’ai beau être un cow-boy, je suis incapable de prononcer le mot ‘pute’.

Qu'il est bon de rire. À coup sûre si un autre candidat avait pénétré dans les écuries en cet instant il aurait probablement pensé qu'outre être en pleine cuite les deux blondes avaient du fumer de la paille pour se retourner les deux neurones qu'on attribue d'ordinaire aux blondes. Swann l'a embarqué dans son mode imaginaire. Un mode où ses soucis et ses idées noires sont bannies. Un monde où elle n'a pas besoin de boire pour se sentir libre. Sochanna sent le vent dans ses cheveux provoqué par leur chevaucher. Elle maintient d'une main sûre sur son crane son stetson imaginaire et donne un coup de talon dans les flancs du cheval pour le faire accélérer. Saloon en vue. D'émotion la blonde lâche la bouteille de blanc dont le contenu est vite absorbé par la paille. "Santé" Lance t-elle au sol avant de se concentrer de nouveau sur leur équipée. "Des filles légères un bon whiskey et un lit bien chaud. De quoi réchauffer le sang de deux vieux bougres comme nous." La blonde force sa voix et l'infléchit en adoptant un accent traînant. "Ola!" Elle claque les rênes sur sa cuisse et tente de faire ralentir l'animal. "On a plus de freins !!!!!" Anachronisme bonjour !

La blonde fait tomber sa bouteille sur le sol, mais cela ne semble pas la chagriner outre mesure. Un si bon vin, quel dommage ! Enfin, si ça se trouve il était aussi délicieux que de l’urine de moineau, ce qui expliquerait qu’elle ne soit pas si attristée par sa perte. Ou alors c’est parce qu’elle est déjà légèrement pompette, peut-être un peu des deux. Je ris devant son ton réjoui à l’idée de passer du bon temps dans un saloon, imaginant le décor de bois, les filles de joie vêtue de robes à frou-frou, les alcools derrière le bar et le tenancier nous observant d’un sale œil. Parce qu’il est indéniable que nous sommes des bandits, des cow-boys gagnant leur vie par des menus larcins tel que le vol de convois ou le chantage, peut-être quelques enlèvements. Je pousse un cri lorsqu’elle prétend avoir perdu le contrôle, tentant d’attraper les rênes sans grand succès, la faisant finalement basculer sur le flanc gauche de l’animal invisible pour la faire s’écraser sur un tas de foin moelleux. De l’autre côté où j’ai moi atterri la première fois, à un endroit bien plus douillet. Je l’observe du haut de mon cheval, riant d’un air mauvais en poursuivant ma route, agitant les rênes pour que ma monture accélère. « Ce fut une bien belle aventure partenaire, mais tu ne m’es plus d’aucune utilité maintenant que j’ai l’or ! » Oui parce que le fruit de notre dernier coup repose dans une sacoche sur les cuisses de l’animal, et là je fuis dans le désert. Et encore, je suis assez généreuse pour la laisser près d’un saloon et non perdu au milieu de nulle part où elle aurait pu périr. Je mets finalement fin à notre petit manège, esquissant un sourire triomphant. « Tu t’es faite avoir comme une bleue. » Je lâche en riant, descendant de la selle.

Dans son agitation pour mimer la vitesse et la perte de contrôle du cheval la blonde a glissé de la scelle, peut être le vin a t-il joué un rôle dans cette perte d’équilibre, quoi qu'il en soit la blonde glissa trop précipitamment de la scelle pour pouvoir se rattraper à quoi que se soit. Elle chuta de l'autre côté de la scelle. Heureusement pour ses os elle s'étala dans un moelleux tas de foin bien confortable. Contrairement à Swann quelques minutes plus tôt. Une chance que savoura la jeune femme en s'installa confortablement dans la paille, les bras croisés derrière sa nuque. C'est alors que sa traîtresse d'associer se mutina. Elle s'éloigna dans le soleil couchant, façon Lucky Luke « Ce fut une bien belle aventure partenaire, mais tu ne m’es plus d’aucune utilité maintenant que j’ai l’or ! » "Traître, voleur !!!" Lance t-elle en se redressant sur les coudes. Des brins de pailles sont accrochés à ses cheveux. « Tu t’es faite avoir comme une bleue. » Lance Swann en descendant de son perchoir. "Je me suis faite avoir par ton air angélique. C'est fourbe ce genre de visage. On te donnerait le bon dieu sans confession." Malicieuse la jeune femme se jette dans les jambes de sa camarade afin que celle-ci la rejoigne dans la paille. "Alors tu fais toujours la maline là ?"

Je me suis à présent débarrasser de mon partenaire encombrant, chevauchant seule à travers le désert américain. Je suis sur le point d’atteindre mon objectif, la caverne d’Ali Baba où j’ai dissimulé tous mes trésors, lorsque ma cheville est tirée vers le bas, me faisant perdre l’équilibre. Mais je . . . tu . . . elle a le droit de faire ça ? Ok. Je me retrouver étendue dans la paille à ses côtés, une brindille entre les lèvres. Je crache subtilement du vent pour m’en débarrasser, m’ébrouant tel un cheval pour retrouver une crinière à peu près convenable en me redressant. « Fourbe demoiselle à la chevelure de feu. J’étais censée être partie très loin avec ma monture ! » Je proteste d’un index furieux. Sauf que là on est dans la vie réelle ma cocotte, et que pendant tout ce temps tu n’as pas bougé d’un iota. Je sens alors comme un liquide visqueux sur ma nuque, et ce n’est qu’en me relevant pour de bon que j’aperçois la bouteille de vin de Sochanna échouée sur le sol, le liquide ayant coulé du haut de la motte de foin jusqu’en bas. Quelle chance, l’origine de cette cascade improvisée s’est trouvée juste sous ma tête, aussi je dois sentir l’alcool à des kilomètres. De quoi me donner des relents. Je m’empare de la bouteille dont il ne doit rester que quatre ou cinq gorgées grand maximum, la tendant vers Sochanna d’un air un tantinet dégouté. « Je crois que ça t’appartient. Tu ne voudrais pas polluer le désert quand même. » Je lui lance un regard en biais, les mains sur les hanches. « Au fait, tu as des idées sur les secrets des petits indiens ? Des vraies pistes je veux dire, parce que le gros qui en fait n'étais pas gros . . . » Je fais remarquer avant de sourire, la taquinant sur son buzz à propos de Santiago.

« Fourbe demoiselle à la chevelure de feu. J’étais censée être partie très loin avec ma monture ! » Le fou rire de la blonde s'accentue, où est-ce qu'on parlait encore à coup de fourbe, morbleu. Elle tapote la tête de la blonde en riant de sa bonne chute. Au moins cette fois elles ont toutes les deux l'air ridicules avec de la paille plein les cheveux et les vêtements. Tiens c'est bizarre les cheveux de la jeune femme sont légèrement humides. Le front de Sochanne se plisse. Est-ce qu'il y aurait des rats dans le coin... Des rats qui auraient fait pipi dans la paille. Beurk... Alors qu'elle s'apprête à bondir sur ses pieds pour échapper aux rats Swann lui tends la bouteille de vin qu'elle a laissé tombé précédemment. Tout s'explique. « Je crois que ça t’appartient. Tu ne voudrais pas polluer le désert quand même. » vient alors la question des secrets. "Punaise j'ai cru qu'un rat avait fait pipi dans tes cheveux. Pour dire vrai je suis sur ta piste, celle de Malo et d'autre mais j'ai du mal à faire le tri entre ce que je ressens, et ce qui pourrait être vrai vous concernant"