slavin & adie

Adie avait emmené tellement de fringues dans ses valises que depuis le début de l'aventure elle n'avait été qu'une seule fois dans le cellier pour sa lessive, non pas qu'elle détestait cette activité, juste qu'elle était flemmarde, très très flemmarde. Pourtant, ce n'était pas le temps qui manquait ici et il ne s'agissait pas d'une pièce avec une queue déraisonnable, pas comme pour la douche à certains horaires par exemple. Voyant donc son dressing se vider inexorablement, Adie avait décidé en ce début d'après-midi de se lancer dans la tâche. Après avoir fait son tri, elle avait ramené, avec difficulté, les trois paniers de linge sale dans le cellier et avait commencé à lancer des machines. Sèche-linge, machine, sèche-linge, machine, elle ne s'arrêtait pas. Finalement arrivée au dernier panier, elle s'assit par terre en attendant la fin de la machine et se mit à plier ses sous-vêtements. Personne n'était encore passé la déranger, preuve que la machine à laver n'était pas un haut lieu social de la maison et c'était tant mieux...

La lessive était devenu un rituel, instauré d'abord pour rire, il était devenu une tradition, notre rendez-vous hebdomadaire avec Anabel. On mettait les machines en route et on discutait ensuite de tout et rien, et surtout de rien, devant une petite glace durant le cycle de lavage. Sauf que la semaine dernière nous ne nous étions pas croisé, Ana était assez mal et je n'avais pas envie de l'ennuyer avec une partie de lessive stupide. Sauf que là, ça commençait à devenir particulièrement critique, les fringues me manquaient alors j'étais bien obligé de me rendre dans le cellier sans ma complice de lavage. La panière à la main, pleine à ras-bord, j'étais descendu jusqu'au cellier non sans avoir attrapé une pomme avant d'ouvrir la porte de la petite pièce. Une personne se trouvait face à l'une des machines. Adie. Cette chevelure ébène je pouvais la reconnaître entre mille. « Salut. » Je referme la porte derrière moi et je m'approche de ma partenaire. Je pose le panier sur le sol en constatant que la machine est déjà occupée et ma pomme sur une étagère. Je me place juste derrière elle, accroupi posant mes mains sur ses épaules pour ne pas trébucher, afin de voir ce qu'elle fabrique. « Tu veux que je t'aide ? » Et là je grimace, ses sous-vêtements, bon peut être pas finalement. « Pour autre chose. » J'en viens à jouer avec l'une des mèches de cheveux en attendant sa réponse, alors que mon autre main est toujours posée contre son épaule, parce que j'suis pas super stable. Autant j'sais faire le poirier et marcher sur les mains, autant j'ai du mal à rester en équilibre sur la pointe de mes pieds. Étrange.

Assise en tailleur directement sur le sol du cellier face à sa dernière machine en route, Adie était concentrée sur le pliage de ses petites culottes histoire d'avoir l'esprit occupé et de l'empêcher par la même occasion de divaguer sur différents sujets qu'elle préférait éviter. Elle entend alors la porte s'ouvrir derrière elle et ne prête pas à attention à la présence de cette personne. Après tout, elle est peut-être juste venu chercher un truc à manger et repartira aussi vite ce qui arrangeait la brune. Et puis, une voix. Une voix qu'elle reconnaît aussitôt et qui lui fait ressentir un mélange complexe de sentiments. Déjà parce que depuis plusieurs jours maintenant, Adie prend ses distances. Elle est passé pour une conne et se rend compte petit à petit que ses sentiments à lui risquent de ne pas emprunter la même évolution que les siens alors, elle se protège. Également aussi parce qu'elle a ces questions dans la tête et qu'elle ne veut pas lui en parler à lui, voulant éviter de se reposer sur lui à chaque moment. Et puis aussi à cause de l’événement de la matinée : la prise d'otage d'Evadne dans la salle de musique. Depuis Adie ressent presque de la gêne en présence de son partenaire, comme si tout était de sa faute et franchement, cette situation avec Evadne commence à la fatiguer plus qu'elle n'en a besoin. Elle est pourtant bien obligée de lui répondre parce qu'elle ne l'évite pas vraiment, ce serait impoli et puis, elle ne voudrait pas que tout ça mette un froid entre eux. C'est chiant de dormir avec quelqu'un qui vous fait la gueule. « Salut ! » dit-elle, en essayant d'apporter un peu d'enthousiasme dans sa voix tout en se retournant brièvement. Elle retourne ensuite à son pliage, pas très loquace et après quelques secondes, elle le sent derrière elle, vraisemblablement accroupi, puis il pose ses mains sur ses épaules et lui propose de l'aide. Hum, ouais, mais le faire plier ses culottes, elle ne le sent pas là tout de suite. Heureusement, lui non plus et sentant qu'il est entrain de jouer avec ses cheveux, elle se retourne pour lui répondre. « Autre chose oui pourquoi pas. J'ai bientôt fini avec la machine, tu pourras prendre la place. » Elle lui sourit et retourne à sa tâche, se traitant de tous les noms à l'intérieur tellement elle agit débilement. Mais sait-on jamais, un mot de travers et Slavin pourrait se mettre à détester quelqu'un d'autre, comme ça au hasard. Selon Evadne, Adie a ce super-pouvoir...

Est-ce que je deviens paranoïaque ou est-ce que j'ai bien l'impression de la gêner ? Son salut, bien qu'enthousiaste il ne résonne étrangement dans ma tête. Déjà parce que j'ai l'impression qu'il a traîné à venir. Aussi parce qu'elle continue son activité, et parce que je perçois sa gêne. Pour autant je m'avance, et j'essaye de faire comme si tout ceci était dans ma tête. C'est vrai qu'on a pas parlé du prime, mais je persuadé qu'elle n'y tient pas tant que ça. Je ne sais pas tellement ce que je pourrais lui dire de toute façon, parce que j'sais pas ce que je veux, je ne sais pas si j'suis capable d'être à la hauteur de ses espérances. J'ai toujours cette épée de Damoclès dessus de ma tête. Sans doute celle que je me suis créé involontairement néanmoins, elle est là, et n'est pas disposé à me laisser de répit. Alors, je préfère faire profil bas et prendre du temps. J'ai besoin de temps. Et puis, je m'avance vers elle parce que je me dis que si je ne dis rien, elle ne le fera pas non plus. Cette situation est particulièrement étrange, j'ai l'impression de lui tirer les vers du nez à chaque fois et ça m'agace, j'aime pas ça. J'suis entrain de jouer avec ses cheveux, sans vraiment penser que ça puisse la déranger, pourtant elle se retourne et m'oblige à cesser. Bon très bien, visiblement ce n'était pas la chose à faire. Je suis soudainement déstabilisé et tombe à la renverse. Enfin sur les fesses quoi rien de bien dramatique. Sa réponse me laisse perplexe, elle est froide ou je rêve ? « J'ai l'impression que tu préférerais que je t'aide mais dans une autre pièce. » Ouais parce que j'ai carrément l'impression de gêner. De l'ennuyer en fait. Parce que depuis le prime, on ne peut pas dire qu'on se soit énormément croisé, la nuit éventuellement, mais c'est tout. J'suis toujours là dans son dos, je n'ai pas bougé, je n'ai même pas pris la peine de me relever. « Si tu me disais ce qui te tracasse au lieu de faire comme si tout allait bien ? » Elle peut essayer de prétendre aller bien devant les autres, mais pas devant moi, je pourrais presque me sentir vexé qu'elle s'imagine donner le change en ma présence. Peut être qu'elle ne souhaite pas m'ennuyer avec ses tourments, mais là encore, je trouve ça vexant.

Ok, elle était nulle pour mentir mais en général, elle arrivait encore à se défendre, un peu tout du moins. Sauf que Slavin, lui, avait cette sorte de radar aux mensonges qui la rendait totalement sans défense. Ça devait être un truc de père ça certainement, un truc qu'il acquiert à la naissance de leurs enfants afin de déceler chez eux les premiers signes de mensonge. Et il fallait croire qu'Adie était encore une gosse parce que sur elle, ça marchait du tonnerre. Le problème dans tout ça, c'est qu'elle ne pouvait jamais rien garder pour elle, à un moment, elle devait tout lui dire. Enfin, elle n'y était pas obligée mais elle cédait parce qu'elle avait une volonté assez faible et que c'était plus simple de parler que de se prendre le chou. Surtout avec Slavin. Avec certains, elle s'en foutait mais Slavin, lui, pouvait obtenir quasiment tout ce qu'il voulait d'elle et parfois, elle avait cette légère impression qu'il en profitait. Elle est là donc, ses culottes dans la main, dos à Slavin et après s'être retournée, elle entend comme un bruit sourd. Elle se retourne à nouveau et le cul par terre. Manquerait-il d'équilibre ? Elle sourit alors, un peu amusée, il faut l'avouer. « Désolée ! » Elle ne voulait pas le faire tomber en se retourner, même le fait qu'il joue avec ses cheveux ne la dérangeait pas outre mesure. C'était juste... un peu bizarre. Comme si lorsqu'elle prend de la distance, lui tente de se rapprocher. Cette fichue loi cosmique. Il semble vexé et ce n'était pas le but escompté. Du coup, Adie est un peu gênée, comme d'habitude, elle fait tout de travers. « Excuse moi... je... enfin... je voulais pas te paraître désagréable. » C'est nul mais c'est déjà un début. Il la questionne ensuite et c'était prévisible. Adie aimerait résister, elle aimerait ne rien dire mais elle sait d'avance qu'elle n'y arrivera pas. Elle mentira, il insistera, elle dira non, il décidera de s'en foutre et elle flanchera. Pourtant elle hésite parce que dans ce qui la tracasse, il y a des tas de choses qui pourrait envenimer la situation, comme Evadne par exemple. Elle essaie de formuler des phrases dans sa tête mais rien de bien construit n'en sort alors, elle ouvre la bouche et laisse le flot s'écouler n'importe comment. « Y'a plein de choses qui me tracassent Slavin, cette maison, mon secret, le futur, ma mère que je ne connais pas, ma vraie mère je veux dire, mon vrai père aussi du coup, logique. Et puis, les gens, les regards, moi, toi, tout le monde. Je veux dire, je suis sensée faire quoi moi quand je serais dehors, quand je devrais me débrouiller toute seule comme une idiote, parce que je serais toute seule dehors, faudra que je me débrouille comme une grande et tout, sauf que je ne suis pas grande, je ne serais certainement pas à la hauteur de tout ça, y'aura... trop de choses à gérer tout le temps, partout, et je serais toute seule tu comprends alors comment je suis supposée faire moi, toute seule ... » Le flot continue et Adie répète inlassablement les mêmes mots parce que ce sont eux qui reviennent en permanence dans sa tête depuis des jours comme un murmure. Et pendant ce temps, sans qu'elle s'en rende compte, ses mots sont entrain de torturer bien maladroitement un bout de tissu, une pauvre culotte qui n'a rien demandé.

Visiblement ça la fait marrer de me voir le cul par terre, c'est vrai que déjà j'aime pas être sur la pointe des pieds, mais en plus si elle bouge alors que je me tiens sur elle, c'est sûr que je dégringole. Elle s'excuse, et moi je hausse les épaules, c'est pas si grave. Je ne crois pas m'être pété le coccyx donc j'imagine qu'il n'y a pas mort d'homme. Pourtant j'bouge pas, je reste là, et je l'observe, elle est nerveuse et ça m'agace. Parce que j'ai l'impression d'être de trop, qu'elle envoie chier le reste des candidats d'accord, mais moi ? J'dois le prendre comment ? Elle s'excuse d'ailleurs pour son comportement étrange lorsque je lui demande si je peux l'aider ailleurs, déguerpir en gros. Mon visage se décrispe, je lui souris légèrement gêné à mon tour. « C'est pas grave, c'est juste que... T'es pas obligé de faire semblant avec moi. » Et là je me sens carrément con parce que je suis entrain de m'imaginer des choses alors que peut être qu'elle est contrarié à cause de moi. C'est tout à fait probable aussi, peut être que je n'ai pas réagis comme elle l'aurait souhaité à l'issue du prime, peut être qu'elle aurait voulu que je sois plus loquasse, plus direct ? Je ne sais pas trop, alors je préfère lui demander ce qu'elle a. Je la sens hésitante, mais elle se lance finalement. Dans un discours si désorganisé que j'essaye d'analyser chaque parole pour essayer de comprendre tout ce que je peux. Je ne crois pas que ce soit la solution, j'sais plus, elle semble tellement vulnérable, tellement paniquée que je m'approche d'elle et la prend dans mes bras. « Calme toi, lâche cette pauvre culotte qui n'a rien demandé et écoute moi. » Je pose ma main sur son visage et le tourne délicatement vers le mien, tandis que je la regarde dans les yeux. « C'est normal d'avoir peur, c'est tout à fait normal ma belle. Bien sûr que t'es grande, t'es forte aussi, t'as le courage d'être ici malgré tout, alors bien sûr que ça fait peur, c'est normal. J'ai eu peur moi aussi, totalement pétrifié, mais ça n'a pas duré et ça ne durera pas pour toi non plus. Je t'assure. Et puis... Je peux, je serais là si tu veux, je peux t'aider. Si tu le souhaite... Evidemment. » Et pendant que j'essaye de la rassurer, je lui caresse doucement les cheveux, dans un automatisme presque déconcertant.

Comme d’habitude, Adie se faisait avoir comme une bleue. Face à Slavin, elle était totalement désarmée et ne pouvait s’empêcher de s’en vouloir au fin fond d’elle-même. Parfois, elle en venait même à se demander ce qui se serait passé s’il n’avait pas été son partenaire, si elle avait été avec un autre et que tous les deux, ils n’auraient pas été ‘forcés’ à se connaître rapidement. Ils auraient certainement parlé comme ça et ne connaissant pas son secret, il n’aurait certainement pas été comme ça, pas totalement en tout cas. Elle l’aurait ensuite mis dans la catégorie des mecs dragueurs suite à ses rencontres avec Evadne et London et ne serait pas allé chercher plus loin. Sauf que c’était différent. La production les avait mis ensemble, peut-être pas totalement par hasard et leur relation s’en était trouvé bien plus compliquée que la normale. Sa gentillesse, sa prévenance ne lui donnait plus envie de se taire et de le vexer, si tant est qu’il réagisse ainsi. Il avait pris cette place trop importante pour qu’Adie puisse se passer de lui, comme un pilier dans la maison sur lequel elle savait qu’elle pouvait toujours compter. Lorsqu’il lui signifie qu’elle n’a pas à faire semblant avec lui, les sentiments se mêlent en elle. Elle se sent délivrée en un sens mais aussi coupable, coupable de toujours lui faire le même coup, encore et encore. Elle devait commencer à devenir très chiante et ça, elle ne le souhaitait pas. Pour elle comme pour lui. Il la questionne, elle se lâche et alors qu’elle est encore entrain de parler et de répéter la même chose, il la stoppe. Libérant le pauvre bout de tissu, il s’approche et la prend dans ses bras. Elle ne s’y attendait pas, elle ne le voulait pas non plus parce qu’elle sait ce que ce genre de choses a pour effet sur elle. Son regard se plongeant dans le sien, Adie baisse les yeux, elle ne veut pas l’affronter, elle se sent stupide. Il la rassure et finit par lui dire des mots qu’elle n’arrive pas à interpréter. Que veut-il dire par là ? Doit-elle y voir un rapprochement ou seulement une proposition amicale ? Pour plus de sureté, elle opte pour la seconde option, c’est mieux surtout qu’elle-même n’est pas sûre de savoir si tout ça débouchera réellement sur quelque chose. Elle reste silencieuse et puis, une larme coule sur sa joue, une seule, elle retient les autres. « Je crois que je n’aurais jamais du venir ici en fait. » Elle s’en veut depuis quelques temps, elle s’en veut de cette image qu’elle va donner et du regard des autres. Elle repense alors au propos de Slavin alors qu’il lui caresse les cheveux, un geste qu’elle apprécie même s’il le gène un peu. « Tu as ta famille Slavin, tu n’as pas à t’occuper d’une fille rencontrée à la télé. » Même si ses mots sonnent faux en elle.

J'suis entrain de me dire que tout ça c'est de ma faute, enfin pas tout non, mais je me dis que si je n'avais pas été moi, peut être que les tracas d'Adie auraient été amoindri. Peut être qu'elle n'aurait pas commencé à se poser tout un tas de question, j'en sais rien. Mais je ne peux pas m'empêcher de me sentir légèrement coupable. Néanmoins, j'ai toujours agis en mon âme et conscience, toujours à chaque fois que j'étais avec elle, tout le temps. C'est sans doute pour cette raison que je me suis tenu à carreau depuis cette fameuse nuit, j'en sais rien. A vrai dire, depuis plusieurs jours, j'sais plus trop ce que je suis censé faire, ou dire. C'est tellement le bordel, pourtant, je réagis immédiatement lorsque je vois Adie assise sur le sol, prétextant qu'elle va bien et que tout va pour le mieux. Il est évident que c'est loin d'être le cas. Et je le sais. Ainsi, je me suis précipité vers elle, j'ai cherché à savoir ce qui la tracassait. Et après avoir essayé de démêler ses mots, j'ai voulu la rassurer. Sa détresse était telle que je l'ai prise contre moi. Bien sûr, elle a fuit mon regard, alors je n'ai pas insisté. J'suis pas sûr de l'avoir réellement rassuré, j'suis pas sûr non plus d'avoir employé les bons mots, mais il faut dire qu'on est coincé, même si on pense être seul, il y a toujours ces fichues caméras qui nous observent, qui captent chacun de nos mouvements, chacune de nos paroles et que quoi qu'il arrive, elles pourraient être utilisé contre nous. Alors j'essaye de modérer mes paroles, ce qui les rends sans doute légèrement floues. Et ça m'agace dans une discussion telle que celle-ci. J'voudrais pas la gêner encore plus qu'elle ne doit l'être alors lorsque je me rends compte que je lui caresse les cheveux j'arrête immédiatement, elle est déjà dans mes bras, contre mon torse, j'imagine que c'est déjà trop en ce moment. Mais j'ai beau essayé de m'éloigner, j'ai l'impression que plus elle me repousse, plus je fais en sorte de lui montrer que j'suis là. Elle en vient à tirer un conclusion que je trouve extrême. Je fronce les sourcils. « Pourtant tu es ici, tu as pris cette décision, et si tu l'as prise c'est qu'elle te semblait importante, alors je remets pas ta présence ici, si c'est parce que tu crains le regard des autres. Ou parce que tu es entrain de prendre conscience de certaine chose qui t'effraient, si tu es là c'est sans doute pas pour rien. » Je lui souris, et c'est là que je me rends compte qu'une larme à roulé sur sa joue, elle est encore humide, alors aussitôt je l'essuie. Et puis je ne peux pas m'empêcher de sourire légèrement face à sa remarque. « Autant ce discours aurait sans doute pu satisfaire n'importe quel idiot du nid, autant, moi, bizarrement ça me fait sourire. J'suis sans doute le seul type à croire aux liens indéfectibles qui se tissent ici et à juste titre, puisque je te le propose. Alors tu vas devoir trouver autre chose pour me décourager Adie... » Je souris et j'espère qu'elle a compris que ce joli discours ne me convient pas outre mesure. Et là, une autre pensée me traverse l'esprit et mon sourire s'affadit. « C'est simplement une proposition de toute façon... »

A l'entendre parler, Adie est presque impatiente à l'idée de sortir du jeu. Ainsi, elle pourrait voir sa réaction, comment il se comporterait sans elle dans le nid. Serait-il triste, seul? Ou alors s'en foutrait-il comme de l'an 40 et recommencerait son jeu de séducteur du début? Cette réaction est un peu égoïste et cruelle, Adie s'en rend bien compte mais pendant longtemps, elle avait pensé aux autres dans ses relations amoureuses et malheureusement, elle s'était vite rendue compte que certains n'avaient pas le même comportement envers elle. Sortir lui permettrait alors d'y voir plus clair car ici, à vivre toujours avec les mêmes personnes dans un climat d'éternel recommencement à chaque réveil le matin, les idées finissaient pas être tout sauf limpides et cette torture psychique était fatigante, très fatigante. D'un côté elle était là, avec ses envies et ses désirs et de l'autre, il y avait Slavin en qui elle n'arrivait absolument pas à lire, ses actions étant sans cesse contradictoires. La seule chose qu'elle savait avec certitude, c'est qu'elle pouvait compter sur lui et qu'il l'appréciait, le tout était de savoir s'il l'appréciait selon la même échelle que Sive, Anabel ou encore London. Slavin avait une réflexion assez poussée sur les questions qu'elle se posait, tellement poussée qu'elle même semblait de pas comprendre ce qu'il voulait lui dire, certainement trop perdue pour assimiler tout ça. Adie s'était toujours défendue dans sa vie de ne pas craindre le regard qu'on avait sur elle mais là, dans une telle émission, regardée par des milliers de personnes devant soit la détester, soit l'adorer, elle trouvait ça flippant d'autant plus qu'à sa sortie, elle allait devoir gérer ça, être haïe ou appréciée pour... être passée à la télé. C’était un peu étrange en réalité. Slavin parle et Adie se tait, elle n'a pas franchement grand chose à lui répondre, elle a déjà tout sorti. Il essuie son unique larme et insiste sur sa proposition tout en souriant ce qui redonne un peu d'espoir à Adie, naïvement. Elle lui sourit à son tour et tout à coup, son visage à lui se referme et il semble faire un pas en arrière. Adie ne comprend pas sa réaction et fronce légèrement les yeux. Est-ce qu'il sous-entend ici qu'elle pourrait dire non à sa proposition et que c'est pour cette raison qu'il perd son sourire? Cela signifiant alors qu'il ne voudrait pas qu'elle dise non? Comme d'habitude, deux pas en avant, un en arrière et Adie n'y comprend rien du tout. Surtout qu'au fond, elle n'aurait pas envie de dire non à son offre mais elle doit bien se rendre à l'évidence, Slavin a une famille, deux enfants, il vit à Paris et travaille avec la mère de ses enfants. Adie, elle, vit à Londres, seule avec une vie qui sera bouleversée suite à l'émission. Alors elle n'a pas envie de l'ennuyer jusque là, elle le fait déjà assez dans le jeu. Néanmoins, elle est perdue, plus qu'avant alors elle doit savoir. "Pourquoi tu dis ça? Et pourquoi d'un seul coup ton visage devient dur?" Elle a l'air un peu conne à lui demander ça mais depuis trop longtemps elle a essayé d'interpréter ses paroles toute seule, résultant alors des semaines de doute et de questionnement alors autant aller à l'essentiel à présent. La machine se met alors à biper et distrait Adie pendant un instant.

Cette discussion est étrange, j'ai l'impression que plus je parle, plus je suis sérieux et moins elle ne me prend au sérieux. A croire que je réussi à mieux me faire comprendre que lorsque j'use de parades, j'suis pas sérieux très souvent alors j'imagine que j'ai quelques lacunes. C'est vrai que c'est sûrement déstabilisant, j'suis plus doué pour l'auto-dérision et les allusions salaces que pour essayer de rassurer les autres. Surtout lorsqu'il s'agit d'Adie je suppose. J'ai l'impression qu'on éprouve des difficultés à se comprendre, à être sur la même longueur d'onde. Que nos discussions entraînent plus de questionnement que de résolutions et c'est troublant. Je ne sais plus ce que je suis supposé faire ou dire pour qu'elle comprenne que je me rapproche d'elle. Peut être que si je le lui disais clairement il n'y aurait plus de problèmes, peut être que tout irait pour le mieux. Ou peut être que ça me terrifie de le lui dire, parce que j'suis de moins en moins sûr d'elle. J'ai l'impression que plus j'avance plus elle recule, tout le temps, là encore. Ce que je lui dis est censé déclencher une réaction, quelque chose ? Sauf que rien, non, elle reste silencieuse et du coup je suis entrain de me dire que je m'enflamme pour rien. C'est pour ça que mon visage se durci, que mes traits se tendent et que mon sourire disparaît. Il laisse place à de l'inquiétude, qu'elle ne tarde pas à déceler par ailleurs. Elle m'interroge à ce sujet, et j'suis pas sûr d'avoir envie d'en parler immédiatement. Parce que j'ai l'impression que ça ne fera que causer davantage de questions, de tensions inutiles entre nous. Mais j'vais pas non plus faire comme si de rien était. Surtout pas après ce que je viens de lui dire. Si je lui dis de ne pas faire semblant, si je la pousse à se confier et que moi au contraire, je me terre dans le silence, comment doit-elle le prendre ? Alors du coup je plonge mon regard dans le sien et mais la machine choisi juste cet instant pour bipper, je soupire. J'attends qu'elle s'en charge pour prendre la parole, parce que c'est déjà assez compliqué. J'espère que j'ai réussi à récolter toute son attention cette fois. « Parce que j'suis pas du tout certain que tu en ai envie, de moi, de ça. J'suis plus sûr de rien. » Je soupire parce que c'est loin d'être limpide. « J'ai l'impression qu'on est pas vraiment sur la même longueur d'onde, que plus je m'approche de toi, plus tu recules et tu te renfermes. J'ai l'impression de devoir faire des pieds et des mains pour te prouver que j'tiens à toi. » Cette histoire devient de plus en plus compliqué, et fatigante. Autant pour elle que pour moi. On ne se comprend pas vraiment, on ne fait qu'interpréter les actions de l'autre tout en essayant d'en tirer des conclusions au lieu d'essayer de tout tirer au clair, et c'est plutôt stupide. Alors qu'il serait sans doute plus évident d'en parler. Sauf que ce n'est pas aussi facile, parce que je sais que les sentiments, les sensations sont décuplées ici, elles sont rapide et sûrement légèrement faussée. Je me méfie aussi parce que je sais que j'ai tendance à me faire de fausses idées sur des situations et que je me suis promis de ne plus refaire la même erreur, alors sans doute que je me mets des barrières, mais j'sais aussi que je n'ai pas envie de revivre certaines choses. J'ai pris des décisions, des décisions qui m'ont faite souffrir mais que j'estimais être juste et elle vient tout balayer du revers de la main. C'est déroutant.