ft. laoise

Je m’étais presque enfuie au pas de course du prime. Parce que je ne désirais pas rester là, et voir les autres pleurer le départ de ce cher Ezéquiel qui ne méritait pas tout cet amour qu’on lui portait. À mes yeux, ça restait même… incompréhensible. Les paroles de Laoise m’avaient vivement rappelé sur terre, après l’annonce de sa nomination, qui en avait surpris plus d’un, dont moi la première, même si c’était ce que j’avais espéré depuis le début. Alors pourquoi avais-je un espèce de sentiment de panique au cœur, et pour ma respiration se faisait plus haletante que d’ordinaire? Je crois que toute cette tension, cette crainte de le savoir dans les parages, venaient de se dissiper d’un seul coup, et clairement, je ne le supportais pas très bien. Mon corps tremblait, alors que je marchais, m’enfonçant dans le parc jusqu’à un petit banc ou je m’échouais finalement, calant mon visage dans le creux de mes mains, mes bras accoudés sur mes genoux. Il fallait que je me ressaisisse, là, ça n’avait plus aucun sens. Des bruits de pas sur le gravier, non loin, attirèrent mon attention. La silhouette passa à proximité de moi, sans me voir puisque j’étais dans l’ombre, mais moi, je la reconnu. « Laoise… » soufflais-je à son attention, me levant pour tenter de la rattraper.

Je la vis se retourner en entendant le son de ma voix, et pourtant… pourtant, elle continua sur sa route, comme s’il n’en avait été rien. Comme si je n’avais été qu’une ombre sur son passage, une illusion de ses oreilles, et de ses yeux aussi. Volontairement, elle m’avait ignorée, et je m’inquiétais du pourquoi de cette attitude… D’accord, elle semblait ne pas être d’humeur, et je me souvins de son air au prime. Qui n’annonçait, entre vous et moi, rien de bon. Et pourtant, pourtant… je continuais de marcher derrière elle, alors que ses pas la menaient plus loin de moi. Il fallut même à un moment que j’accélère le pas pour réussir à arriver à sa hauteur, posant une main délicate sur son bras, comme pour tenter de la ralentir. « Hey… mais qu’est-ce que tu as… » m’inquiétais-je en m’adressant à elle. Nous n’avions pas eu le temps de discuter, elle et moi, depuis leur incursion dans le spa où je m’étais trouvé en fâcheuse position avec Keelan. Était-ce ce qui expliquait son attitude avec moi? Je ne comprenais d’ailleurs pas ce soudain revers à mon égard, et cette remarque qu’elle m’avait lancée. Où était passé la Laoise que j’avais connu, que j’appréciais… « Laoise, s’il te plait. » lui fit-je, cherchant à soit l’arrêter dans sa course, soit au moins obtenir une réponse de sa part. Soudain, mon petit soucis de fin de prime me paraissait bien loin.

Non, je n’allais pas lâcher l’affaire aussi rapidement, oh non. En vrai, je m’inquiétais pour Laoise, sincèrement. Je détestais que qui que ce soit dans cette état, mais plus particulièrement les gens dont j’étais proche. Et Laoise, dans ce nid, cette aventure, en faisait partie. Considérer ça comme de l’acharnement, mais tant que je n’aurais pas obtenu une réponse de sa part, je n’allais pas la laisser comme ça, toute seule, avec ces problèmes, ces soucis, ou tout ce qui pouvait bien la rendre ainsi. J’étais à sa hauteur, lui demandant ce qu’il n’allait pas, lorsqu’elle daigna enfin me répondre. « Ne me parle pas, d'accord ? Laisse-moi tranquille. » Non, ça n’allait pas. Pas du tout. Je lui attrapais le bras à nouveau, la forçant à s’arrêter, pour de bon cette fois. Ce n’était pas un geste brusque, mais il suffit à la faire pivoter de sa voie, et je sentis son regard noir se poser sur moi, mécontent. Je lui réponds d'une voix douce, ne souhaitant pas le brusquer d'avantage. « Je n’ai pas l’intention de te laisser tranquille avant que tu ne m’expliques pourquoi tu es comme ça… » Elle n’allait pas aimer, je m’en doutais très bien. Mais je n’y pouvais rien, si je m’inquiétais vraiment pour elle. « Tu… tu m’en veux ? » ne puis-je l’empêcher de lui demander. Et pas besoin de spécifier ce dont je faisais allusion... Il n'y avait qu'un sujet de discorde possible entre nous, ce que je ne m'expliquais toujours pas.

Visiblement, je n’étais pas LA personne que Laoise désirait voir, cette nuit, mais en fait… je me demandais s’il y avait seulement quelqu’un de qualifier pour cette difficile tâche. Elle n’était pas d’humeur, cela se ressentait dans toutes les fibres de son corps, de par son attitude, sa façon de réagir, ses propos aussi… Je n’étais pas aveugle. Ma présence à ces côtés, en ce moment, la dérangeait. Mais je ne pouvais m’en empêcher. Je n’aimais pas la voir ainsi. Et s’il fallait… que quelqu’un se sacrifie pour faire face à la tempête, alors je préférais encore me sacrifier que de laisser cette tâche à un autre. Mon geste de la retenir, de l’attraper doucement par le bras pour la forcer à me faire face, j’aurai pu le deviner aisément qu’il ne lui plaisait pas. Je l’avais presque senti se crisper sous mes doigts. « Pourquoi je suis comme ça ? C'est-à-dire ? Pourquoi j'en ai marre de toutes ces conneries ? » Avais-je vraiment besoin de lui décrire la façon dont elle était, depuis quelques jours, cette attitude brusque, farouche, distante, qui contrastait en tout avec la jeune femme que nous avions connu jusque là. Non. Je crois qu’elle avait compris ce dont je parlais. « Ces conneries ? Tu… tu en marres du jeu ? De nous… ? C’est ça ? » Je ne voyais pas autre chose. D’ailleurs, je ne comprenais pas pourquoi, ce soudain changement d’humeur survenait… Était-ce seulement à cause de ce qu’elle avait surpris, la semaine dernière… Avais-je été… l’élément déclencheur de son malheur? Aucune réponse de la part de la jeune femme, qui garda un visage fermé, presque froid. Que devais-je en déduire? Qu’en embrassant Keelan, qu’en ayant eu… du désir pour lui, je l’avais… blessée? Mais pourquoi ? « Je… je suis désolée, tu sais… si je t’ai fais quoique ce soit. » Encore une fois, je me sentais presque obligée de capitulée, de me sentir coupable pour quelque chose qui, à mes yeux, n’avaient aucun sens. Mais au point où j’en étais, je souhaitais seulement rétablir un semblant de relation avec la candidate dont j’étais le plus près dans le nid. De là à savoir si c’était possible…