Le prime était enfin terminé. Riche en émotion. Et pas des positives. Autant dire ce qu'il était, un prime très merdique. Les questions de Cupidon avaient été des plus indiscrètes, et surtout avaient fait ressortir quelques vérités, que j'aurais préféré garder secrètes. Ou tout du moins, pas le partager avec le nid au complet. Il y avait des choses qui ne regardaient que nous. Genre, tout le monde n'avait pas besoin de connaître ma vie sexuelle. Je la partageais déjà avec le public derrière leurs écrans, c'était largement suffisant. Et puis il y avait aussi cette histoire avec Irène...Sa révélation m'avait quelque peu ébranlé. Et pas que le changement de sexe d'ailleurs. Son histoire au complet, l'attentat terroriste, tout ce qu'elle avait dû traverser...Ce qui avait fait ressortir quelques souvenirs douloureux. Alors oui, soirée merdique. Sans compter le fait que j'avais dû décevoir quelques personnes au sein du château. Mais il y avait surtout une personne qui comptait. Anabel. J'avais bien remarqué comment elle avait évité de croiser mon regard durant tout le prime. Rajouter à cela le fait qu'elle semblait plutôt du côté de Finnick... Je craignais que notre relation en prenne un léger coup. Voilà pourquoi je désirais lui parler. Pour mettre les choses à plat, et m'assurer qu'il n y avait aucuns problèmes entre nous. Je l'aperçus se diriger vers la chambre secrète, je pris donc le même chemin. Poli, je frappais à la porte avant d'entrer. Je l'entrouvis pour lui demander.  « Anabel ? On peut parler ? »

Je m’étais presque sauvée du prime… en fait, non, c’était justement ça. Sauf que je l’avais fait en toute discrétion, attendant le bon moment pour partir sans trop faire d’histoires, alors que les autres candidats saluaient les sortants, dont je n’étais pas tellement proche. Ce qui ne risquait donc pas d’offusquer qui que ce soit. Ce qui m’avait décidé à prendre la direction de la chambre secrète? Je ne sais pas. Peut-être le fait qu’un nombre limité de personnes y avaient accès. Peut-être aussi parce qu’à cette heure, les trois cent trente-trois marches risquaient d’en décourager plus d’un. Moi, pas. Même si elles me faisaient horreur. Sans même prendre la peine de passer par le cellier pour me changer, je grimpais les escaliers en vitesse, ne captant pas que derrière moi, des pas me suivaient, et ce, depuis le moment où j’avais quitté le plateau. Peu m’importait, en fait. Je n’avais envie de voir personne, en ce moment, je voulais être seule avec moi-même, et maudire le moment où j’avais décidé de participer à cette stupide émission de téléréalité. Arriver tout en haut de la tour, je poussais la porte et la refermait derrière moi. C’est tout près de la fenêtre que je vins me poser, m’installant en son bord, l’entrouvrant pour observer le parc dans la nuit, et profiter de l’air frais de l’extérieur. Je n’étais là que depuis quelques secondes quand des coups discrets se firent entendre sur la porte. Lentement, je détournais la tête vers le nouveau venu, non surprise d’y trouver Keelan. « Anabel ? On peut parler ? » En seule guise de réponse, je me contentais d’hausser les épaules, puis laissait à nouveau mon regard vogué vers la noirceur du paysage nocturne. S’il voulait parler, qu’il le fasse… mais je n’avais pas vraiment envie de l’écouter.

Les trois cent marches et quelques pour venir jusqu'ici, n'allaient pas me décourager de la suivre. Probablement qu'elle venait chercher en ce lieu un peu de tranquillité, ne désirant voir personne. Et moi je débarquais, pour venir l'emmerder. Peut être aurait il était préférable d'attendre demain. Mais j'avais envie d'éclaircir notre relation maintenant, et pas laisser traîner les choses. Je n'aimais pas l'idée que je puisse la décevoir. Ou peut être s'en fichait elle royalement, je me faisais des films, mais j'en doutais. Sinon, pourquoi en entrant, comme seule réponse, eus je le droit à un haussement d'épaule désintéressé ? Alors qu'habituellement elle était relativement contente de me voir. A l'évidence là, ma présence n'était pas la bienvenue. Ça commençait bien. J'imagine que je devrais déjà m'estimer heureux qu'elle ne me demande pas de la laisser tranquille. Elle reporta son regard dehors, m'ignorant royalement. Ce n'était pas tout, mais que lui dire ? Je n'y avais pas vraiment pensé, en fait. J'aurais préféré qu'elle me parle, plutôt qu'elle fasse comme si je n'étais même pas là. « A l'évidence mon comportement te pose un problème. » Non sans blagues. « J'aurais préféré que tu ne l’apprennes pas ainsi. » Peut être aurais je dû lui dire. Parce qu'on se confiait beaucoup de choses. « Anabel, s'il te plaît. Tu peux me regarder ? » Je n'aimais pas tellement causer à son dos, figurez vous. Visiblement le paysage semblait bien plus intéressant que ma personne. La dernière chose que je désirais, c'était me prendre la tête avec elle.

Ce n’était pas sans raison que j’avais décidé de m’isoler, suite au prime. Au moins, dans cette chambre, il y avait peu de chance qu’on vienne me déranger, vu le nombre restreint de personnes y ayant accès. Et pourtant, il ne fallait pas moins de quelques minutes pour que ma solitude soit délogée par l’arrivée d’un candidat, peut-être le dernier que j’avais envie de voir, à cet instant précis. Keelan, bien sûr. Qui d’autres ? Visiblement, il voulait me parler, que l’on se parle. Hm, d’accord. Quoique, je n’avais pas vraiment l’intention de dire quelque chose. Je n’en avais pas l’envie, plus précisément. Un simple haussement d’épaules accueillit sa requête. Cela aurait du lui faire comprendre qu’il valait pour lui de partir, mais il devait être obstiné, car il choisit plutôt de rester. « A l'évidence mon comportement te pose un problème. » Oh, mais quel petit génie! Où allait-il chercher cette merveilleuse idée? Dans ma façon d’être et d’agir avec lui, fort probablement. « J'aurais préféré que tu ne l’apprennes pas ainsi. » Bien sûr, quoi de mieux qu’une question en plein prime pour me mettre au courant d’un fait aussi énorme que celui-là. Moi, j’avais su prendre sur ma personne pour lui avouer mon histoire avec Andreas, parce que j’avais de l’estime pour lui et que je jugeais qu’il méritait de l’apprendre avant que la production s’en charge. Mais bon, je ne devais pas vraiment compter aux yeux de Keelan pour qu’il ne daigne même pas en faire de même. « Anabel, s'il te plaît. Tu peux me regarder ? » À contre-cœur, ma tête se détourna du paysage nocturne. Pour autant, même si je tournais mon regard vers Keelan, je ne le regardais pas directement, fixant un point, située quelque part au dessus de son épaule. C’était tout comme. « Et pour Irène, tu comptais me le dire un jour aussi ? Désolé de te le dire, mais c'est trop tard, je suis déjà au courant. » On pouvait toujours compter sur mon cher partenaire pour ce genre de détails croustillants, n'est-ce pas. Parce qu’il n’était pas question que de Tweedy. En fait, je n’en avais même pas auprès de ces deux candidates, mais c’est plutôt le comportement de Keelan à mon égard qui me blessait le plus. Et qui me décevait.

Anabel finit enfin par se retourner, pour me faire face. Sauf qu'elle évitait le contact direct avec moi. Bon, c'était mieux que rien. Y avait déjà du progrès entre ça, et parler à son dos, c'était déjà mieux. « Et pour Irène, tu comptais me le dire un jour aussi ? Trop tard, je suis déjà au courant. » Touché. Bon...la situation était pire que je ne l'aurais cru. Si maintenant Irène venait se rajouter à l'équation. Bien sur qu'elle l'aurait apprit un jour ou l'autre. Tout ce savait dans ce château. Quel naif de croire qu'elle passerait à côté de cette information. Dire que j'avais réussi à tenir 3 ans sans la moindre relation sexuelle, et que là, en l'espace de deux semaines, j'avais couché avec deux femmes, trois, si on avait pas été interrompu. Sérieusement, que m'arrivait il ? Peut être était ce ces trois ans d'abstinence qui me montaient à la tête. Je mettrais plutôt ça sur le compte de l'enfermement.  « Je... » Ah ouais, tu faisais pas le fier là mon coco. « Je voulais te le dire mais...Je ne voulais pas que tu penses que je m'étais servi de toi, que ce qu'il s'était passé entre nous c'était juste...Enfin, je suis désolé. Je n'ai pas d'excuses, je sais. » Si je lui avais dis plus tôt, on en serait peut être pas là. Alors qu'elle, elle me l'avait avoué pour Andréas. Même si à ce moment là, la situation était complètement différente. Quelques jours auparavant, nous n'avions pas été sur le point de coucher ensemble. Je poussai un soupire, et m'assis sur le lit, tête basse.  « J'ai l'impression de faire n'importe quoi ces derniers temps. Cela ne me ressemble tellement pas. »

Croyait-il vraiment que je n’aurais jamais appris pour cette histoire entre lui et Irène ? Que cette petite soirée arrosée avec Tweedy resterait aussi un secret, alors qu’ici, les murs ont des oreilles, et des yeux aussi. Surtout des yeux. Des caméras tournent vingt-quatre heures du vingt-quatre, et nous avons accès à tout ce qu’elles peuvent retransmettre. La suite ne vous surprend donc pas, j’imagine. Qu’Andreas s’amuse à foutre la merde en me racontant l’épisode Irène non plus. Oh, lui, tant qu’il pouvait cracher son venin, il ne faisait, un point c’est tout. « Je... » Qu’as-tu à dire pour ta défense, Keelan? « Je voulais te le dire mais...Je ne voulais pas que tu penses que je m'étais servi de toi, que ce qu'il s'était passé entre nous c'était juste...Enfin, je suis désolé. Je n'ai pas d'excuses, je sais. » « Non, tu n’as aucune excuse. » Je n’étais même pas frustrée contre lui, juste atrocement déçu, mais ça, combien de fois me l’étais-je dit. Étrangement, j’étais calme, parce que par je ne sais quel miracle, je réussissais à me contenir. Je ne sais pas si ça durerait. « Tu m’as dit, ce jour-là, que tu me désirais… et si j’ai répondu à tes avances, c’est que c’était aussi mon cas. » Je le spécifiais, tiens, parce que peut-être que mes gestes n’avaient pas été assez explicites. « Mais voilà comme il ne s'est rien passé, au final… tu es allée foutre en l’air trois ans d’abstinence, après la mort de ta femme, avec Irène qui saute sur tout ce qui à une queue dans le château ! » Ce n’était pas tant pour moi que ça me faisait de la peine, mais plutôt pour lui. Parce que cette première fois après cette longue attente aurait dû se dérouler avec quelqu’un qui en valait la peine. Que ce moi, ou une autre, je précise. Mais pas cette femme qui avait des mœurs légères et qui aimait batifoler à droite et à gauche. Il méritait tellement mieux que ça. « Comment veux-tu que je le prenne, Keelan ? Surtout que tu as mis tellement d’effort à me le cacher. Aurais-tu eu honte ? Ou c’est que je ne comptais pas assez à tes yeux pour que tu te montres un tant soit peu honnête envers moi ? » Et je ne mettais même pas Tweedy dans la balance. Pas encore. Je l’entendis soupirer, suivi de quelques pas. Puis, se fut le silence, qu'un court instant, cependant. « J'ai l'impression de faire n'importe quoi ces derniers temps. Cela ne me ressemble tellement pas. » Je n’ajoutais rien. Il n’avait pas besoin que je le blâme plus qu’il ne se blâmait déjà lui-même. Ce n’était en rien nécessaire, dans ces circonstances.

« Non, tu n’as aucune excuse. » Oui bon je le savais hein, pas besoin de le répéter merci.« Tu m’as dit, ce jour-là, que tu me désirais… et si j’ai répondu à tes avances, c’est que c’était aussi mon cas. » Par contre j'avais comme l'impression que l'envie lui était plus que passé. Ça se trouve je devais lui inspirer du dégoût que du désir maintenant. « Mais voilà comme il ne s'est rien passé, au final… tu es allée foutre en l’air trois ans d’abstinence, après la mort de ta femme, avec Irène qui saute sur tout ce qui à une queue dans le château ! » Non pourquoi elle évoquait ma femme ? Elle n'avait pas le droit !  « Je t'interdis de parler d'elle, c'est...non. » Non, on n'en parlais pas, merci !  « Et tu te trompes. Ce qu'il s'est passé entre nous, ou plutôt le fait que justement il ne se soit rien passé, n'a rien avoir avec Irène... Je veux dire, même si on avait été au bout, il est probable que j'aurais fini par coucher avec Irène. » Hm attendez là, j'essayais de lui démontrer qu'elle n'était pas juste une fille de passage avec qui je voulais assouvir mes pulsions, et enfin sortir de mon abstinence. Et que par défaut je me serais rabattu sur Irène. Sauf qu'en fait, pas sur que mon explication était mieux. Je m'enfonçais peut être encore plus d'ailleurs là. Mais bon ça restait la vérité, et n'était ce pas ce qu'elle désirait ? « Comment veux-tu que je le prenne, Keelan ? Surtout que tu as mis tellement d’effort à me le cacher. Aurais-tu eu honte ? Ou c’est que je ne comptais pas assez à tes yeux pour que tu te montres un tant soit peu honnête envers moi ? » Bien sur qu'elle avait tous les droits de le prendre mal. Là je vous avouerais, que je ne savais même plus pourquoi je ne lui avais rien dit. M'enfin je n'avais pas non plus fait un paquet d'effort pour lui cacher. Je n'en avais pas parlé, tout simplement, faisant comme si de rien n'était.  « Je ne sais pas...C'est sur que je ne suis pas très fier... » Mais c'était pas tant le fait d'avoir couché avec elle, mais plutôt de la manière. Dans la cuisine, sur comptoir, exposé à la vue de tout le monde. Grand dieu, heureusement que la rubrique Sixtine avait disparu depuis quelques temps. Vous vous imaginez s'ils avaient diffusés les images en plein prime ?  « Mais tu comptes à mes yeux. Je tiens à toi, et peut être que justement je ne t'ai rien dit, parce que je ne voulais pas te décevoir...Que tu me regardes, comme tu le fais à l'instant présent. » Je me fichais pas mal de l'opinion de la majorité des candidats, mais pas d'Anabel. Et ça me faisait mal de savoir que je l'avais ainsi déçu. Mais il n y avait pas que ça. Si je l'avais déçu elle, que devrait il en être de mes proches ? De mes parents ? Mes soeurs ?

« Je t'interdis de parler d'elle, c'est...non. » Je n’avais aucun droit de parler de sa femme, il avait raison sur ce point, mais en cherchant à lui connaître le fond de ma pensée, les mots étaient tout simplement sortis sans que j’en mesure la moindre ampleur. Maintenant, il était trop tard pour reculer. Il n’en servait même rien que je m’excuse – ça n’était même pas appropriée. Et puis, j’avais compris le message, je ne m’y reprendrai pas une deuxième fois à aborder ce sujet. J’évitais bien de parler de mon fiancé, alors je crois être bien placé pour comprendre ça. « Et tu te trompes. Ce qu'il s'est passé entre nous, ou plutôt le fait que justement il ne se soit rien passé, n'a rien avoir avec Irène... Je veux dire, même si on avait été au bout, il est probable que j'aurais fini par coucher avec Irène. » S’il voulait faire amende honorable avec ces propos, en toute franchise, il venait tout simplement de se tirer dans le pied, avant cette réplique. Ce que j’en comprenais? Oh, et bien, que je compte ou pas à ses yeux, que nous ayons fait ou non ce qui aurait dû être fait dans la salle de spa, et bien, Irène serait passé dans sa couche. Je devais le prendre comment? Je n’en étais pas tellement certaine, mais mes yeux, après s’être agrandit de stupeur, finirent par se détourner et fixer un autre point dans la salle, la tête de lit, par exemple, ou la lampe sur l’une des tables de nuit. Je voulais de l’honnêteté de sa part, d’accord, mais au final, étais-je vraiment prête à tout entendre? Bonne question. Enfin, peut-être était-il seulement trop tard pour ça, pour réparer le tord que ces évènements passés sous silence avait fait. « Je ne sais pas...C'est sur que je ne suis pas très fier... » Qu’il est des remords, au final, ça m’importait peu. Ce qui me dérangeait, c’est que j’avais moi-même su marcher sur mon orgueil pour lui avouer tout ce qui s’était passé avec Andreas, et lui… lui, rien du tout. Il s’était contenter de ne rien dire, d’éviter tout sujet épineux, et si je n’avais pas eu charmant informateur, et si, au prime, il n’avait jamais été question de Tweedy et Finnick, je ne l’aurais jamais appris. Oh, surement en sortant d’ici, j’aurai eu droit à un beau résumé dans les journaux à potins… C’est ça qu’il voulait? Vraiment? « Mais tu comptes à mes yeux. Je tiens à toi, et peut être que justement je ne t'ai rien dit, parce que je ne voulais pas te décevoir...Que tu me regardes, comme tu le fais à l'instant présent. » Il comptait aussi à mes yeux, et clairement, je tenais tout autant à lui, c’était justement pour ça que j’étais dans cet état. Parce que sa personne m’importait, plus que celle d’une grande majorité de candidats dans ce Nid. « C’est parce que tu as agis de la sorte que tu m’as déçue, en ne me disant rien, en jouant la carte de l’innocence. J’ai l’impression que tu t’es joué de moi. J’avais… confiance en toi. » Au passé, oui, car cette confiance s’en voyait largement effritée par toute cette histoire. « Je me fiche bien d’avec que tu aies pu coucher. Et j’aurai peut-être mal réagis en apprenant pour Irène… comme tu l’as fait quand je t’ai dis pour Andreas. Mais tu préférais que je l’apprenne… comme ça? Au hasard d’un prime? Ou par la bouche de connard qui n’a rien de mieux à faire de son temps que d’aller s’enfermer dans la salle de vidéo-surveillance? » Facilement reconnaissable, ce cher Andreas. Et toujours aussi serviable. « C’est ça que tu voulais ? Vraiment ? Alors je ne dois pas tant compter à tes yeux que tu le prétends. »

Hm parfois je me disais, que je ferais peut être mieux de me taire. Désireux d'arranger les choses, semblerait il que je les aggravais avec mes propos. Je le vis bien à la réaction d'Anabel. Bien joué Keelan, bien joué. Peut être devrais je quitter cette chambre maintenant, avant que ça ne soit encore pire. Seulement je ne pouvais pas laisser les choses ainsi entre nous... Il fallait que j'essaye. « C’est parce que tu as agis de la sorte que tu m’as déçue, en ne me disant rien, en jouant la carte de l’innocence. J’ai l’impression que tu t’es joué de moi. J’avais… confiance en toi. » C'était fou comme la conjugaison d'un simple verbe pouvait tout changer. Oui ça faisait de l'entendre dire que j'avais perdu sa confiance.  « Mais tu peux toujours avoir confiance en moi. Je suis toujours le même. » Et comment pouvait elle penser que je m'étais joué d'elle ? [...]Mais tu préférais que je l’apprenne… comme ça? Au hasard d’un prime? Ou par la bouche de connard qui n’a rien de mieux à faire de son temps que d’aller s’enfermer dans la salle de vidéo-surveillance? C’est ça que tu voulais ? Vraiment ? Alors je ne dois pas tant compter à tes yeux que tu le prétends. » Je comprenais tout à fait sa déception. La situation aurait été inversé, j'aurais sûrement réagi pareil. Mais voilà, c'était moi le fautif là, et ça risquait d'être très compliqué de m'en sortir. « Non bien sur que non, ce n'était pas ce que je voulais... Je voulais...Je ne sais pas ce que je voulais à vrai dire. Je suis désolé, vraiment. » Que dire de plus ? Je n'avais aucunes excuses. « Mais ne remets pas en doute l'attachement que j'ai pour toi. T'es celle que j'apprécie le plus ici... » Qu'elle n'en doutait pas.  « Je ne veux pas perdre ce qu'on a. Dis moi ce que je peux faire pour arranger les choses. Je ferais tout ce que tu veux. » J'avais déjà perdu toute ma belle complicité avec Laoise, j'avais chuté dans son estime, et maintenant voilà que c'était au tour d'Anabel.

Cette conversation n’allait nulle part. Plus Keelan parlait, et plus il s’enfonçait dans des explications, qui, au final, ne servaient qu’à amplifier le sentiment de déception que j’avais à son égard. J’avais cru, à tord, que la confiance que je lui portais était réciproque, et je n’avais aucunement hésité à lui confier tout et rien sur ma vie, sur mon aventure, sur mes sentiments en général. J’avais même été prête à partager avec lui un moment d’intimité… Pour qu’on en arrive aujourd’hui à ça? Cela ne devrait pas l’étonner, alors, que je m’en trouve troublée, dérangée même. « Mais tu peux toujours avoir confiance en moi. Je suis toujours le même. » Vraiment ? Malheureusement, il n’avait rien fait qui puisse me prouver qu’il avait raison. Je me sentais… je ne sais, trahi, en quelque sorte. Et pourtant, Keelan et moi, nous ne nous devions rien. Rien du tout. Alors pourquoi étions-nous en train d’avoir cette conversation? Pourquoi cet évènement, anodin en d’autres circonstances, nous apparaissait comme un obstacle à l’amitié que nous partagions depuis le début? Je ne sais pas. Mais je n’étais plus capable de regarder Keelan de la même façon. Je peinais même à l’observer, tout simplement. « Non bien sûr que non, ce n'était pas ce que je voulais... Je voulais...Je ne sais pas ce que je voulais à vrai dire. Je suis désolé, vraiment. » Je penchais la tête un moment, fixant mes mains, posées sur mes genoux, avec lesquelles je jouais nerveusement depuis le début, y ajoutant parfois un bout de ma robe. « Mais ne remets pas en doute l'attachement que j'ai pour toi. T'es celle que j'apprécie le plus ici... Je ne veux pas perdre ce qu'on a. Dis moi ce que je peux faire pour arranger les choses. Je ferais tout ce que tu veux. » Pour la première fois, depuis le début de notre entretien, je relevais la tête vers lui, et plongeait mon regard dans le sien. On racontait que ce n’était que dans le regard de l’autre qu’on pouvait y lire la vérité. Et en agissant de la sorte, peut-être que je cherchais a vérifié qu’il disait vrai. Ce n’était pas tant que je ne voulais pas le croire… mais je doutais. Terriblement. Et un être blessé est toujours plus craintif à accorder sa confiance à nouveau. « Je… je ne sais pas, Keelan. Je ne sais pas... » fus-je cependant forcé de répondre. Rien ne pourrait effacer les traces laissées par toute cette histoire. Le temps pourrait surement atténuer leurs souvenirs. Mais ma tête n’oublierait jamais. Cependant… j’étais lasse. Je détestais me prendre la tête pour des histoires aussi insipides que celle-là. Je me résignais donc à me lever de mon repère pour m’avancer dans la chambre, puis finalement aller poser au côté de Keelan, sur le lit, ma tête allant naturellement se poser, comme elle l’avait fait plusieurs fois auparavant, sur son épaule.