anabel x adie

Il fallait s’occuper l’esprit à tout prix sinon, les idées noires refaisaient surfaces, les peurs, les angoisses, tout ce qui pouvait avoir attrait à un moment souvenir ou à une peur de l’avenir. Adie était une pro pour ça depuis quelques semaines déjà maintenant. Elle se demandait même si cela pouvait avoir un lien avec sa grossesse parce que mine de rien, ça fait réfléchir ça, non ? Et puis les jeunes enfants ont bien des terreurs nocturnes, ce genre de choses, alors il était probable qu’en tant que femme enceinte, elle soit sujette à des sentiments et des émotions un peu plus exacerbés. Après la cuisine, le parc ou la plage, Adie avait donc jeté son dévolu sur la salle de musique. Elle savait que là, en plus des instruments, elle pouvait y trouver des crayons à dessin ainsi que des carnets à dessin suite à sa première visite en compagnie de Loxias. Et depuis quelques jours maintenant, elle pensait à des parures dans sa tête, inspirées également par Loxias et son post sur la dame du lac. On était en Irlande, berceau de légendes, et l’évocation de cette mythologie par le tatoué en plus du lac l’avait inspiré. Adie s’était donc rendue dans la salle de musique et après avoir finalement trouvé un carnet vierge, elle s’assit en tailleur sur l’un des canapés, dos à la porte, et commença à dessiner.

Il était beaucoup trop tard pour rester encore un peu au lit, mais beaucoup trop tôt pour investir la cuisine afin de manger un petit quelque chose qui me ferait patienter jusqu’au repas du soir. Bref, il fallait absolument que je trouve de quoi m’occuper, sinon, je me donnais cette impression d’être une lionne en cage prête à bondir sur tout, ou sur n’importe quoi. Du moment que ça m’occupait un moment, je n’allais pas faire ma difficile. Un peu au hasard, j’ouvris la porte de la salle de musique, alors que je sortais tout juste de la douche – ce qui expliquait les cheveux mouillés qui tombaient sur mes épaules. De dos, je remarquais qu’une de mes camarades s’y trouvait : bingo! Je n’aurai pas à chercher bien longtemps. Me basant uniquement sur sa crinière brune et sa silhouette, je crus comprendre qu’il s’agissait d’Adie. Et je ne m’étais pas trompé, lorsque mes pas s’avancèrent la pièce. Je posais un coup d’œil par-dessus son épaule pour regarder ce qu’elle faisait – oh, sale petite indiscrète que j’étais – et ne pu m’empêcher de commenter, grillant ainsi mon entrée dans le lieu. « C’est joli. » Alors là, si elle ne m’avait toujours pas repéré, c’était chose faite désormais. Je contournais le sofa, puis venait me poser sur celui-ci, au côté de la jeune femme. « Tu n’as pas de objection à ce que je te tienne compagnie un peu, dit? » la questionnais-je, alors qu’elle avait toujours les yeux lever de sur son calepin à dessin.

Adie avait eu sa révélation sur le tard. A l'école, elle était bonne mais sans plus et puis, ses voyages avaient fini de l'éloigner de la fac mais pas de ses envies. C'est peut-être grâce à tout ça d'ailleurs que la jeune femme avait décidé de se lancer dans les bijoux. Plus compliqué que la couture, plus créatif aussi, elle aimait le défi et la liberté que cette profession lui procurait. Le problème venait de l'argent cependant, comme toujours. Elle avait bien fait un stage dans une maison italienne renommée mais à la sortie de l'école, elle avait voulu rester libre pour pouvoir continuer de créer plutôt que de devenir une paire de mains parmi d'autres dans une grande maison sans réelle âme. Donc forcément, elle devait en assumer les conséquences c'est à dire les contrats rares, le manque de budget parfois, les délais très très serrés... Une vie dont elle avait tout de même pris le pli et qu'elle appréciait. Surtout que c'était parfois intéressant de travailler en free-lance, pour des collections de créateurs ou même parfois, une seule soirée. Tout était éphémère mais les bijoux, eux, restaient. Quelque part, dans leurs écrins ou sur le corps d'une belle femme. Ça lui manquait donc de ne pas dessiner, de ne pas créer surtout qu'elle avait des tas d'idées grâce aux gens, aux situations, aux paysages. Cette fois-ci, c'était le lac, ce bleu, ce vert autour, ce fouillis. Occupée à régler les proportions d'une branche de la parure, Adie n'entendit pas qu'on entrait dans la pièce et ce n'est que lorsqu'Anabel prit la parole qu'elle la vit. Elle sourit à son compliment même si en général, elle n'aimait pas trop qu'on voit ses esquisses primaires. « Merci mais c'est encore brouillon, j'ai complètement raté les proportions. » Il fallait vraiment qu'elle se remette au travail... « Non pas du tout ! Tout juste réveillée ? » lui demande-t-elle en référence à ses cheveux encore mouillés.