Assise à même le sol, je feuilletais un livre sans réellement le lire. On vient me trouver en m'annonçant que la rousse me cherche, c'est ce qui me décide au final à bouger mes fesses et à me lever. Je cache le livre dans un coin, pour éviter qu'il ne me file sous le nez, parce que mine de rien, il avait l'air pas mal, enfin d'après les brides de phrases que j'ai daigné lire. Je sors de la bibliothèque, mon nouveau sanctuaire avant de chercher Mads. Mais je ne la trouve pas, je réalise mon erreur, si on est toutes les deux en mouvement, on arrivera pas à se capter. J'arrête de bouger et je me mets dans un coin, à la vue dans même. J'en profite même pour m'allumer une cigarette en l'attendant. Maddie finit par le tomber dessus, m'attrappe sans ménagement avant de m'ordonner silencieusement de la suivre. Ce que je fais puisse que je n'ai pas vraiment le choix. Tractée par la rousse, j'aligne rapidement mes pas. Elle m'emmène dans son dortoir. On s'installe sur son lit, à Corto et à elle. Elle lance le drap au dessus de nous, d'un geste vif et précis, je suis des yeux la courbe du tissu avant qu'il ne retombe. « Raconte » Je m'assois en tailleur, confortablement, le drap sur nos têtes formait une tente de fortune. « Il était pas d'accord avec moi. » Je lâche en fronçant les sourcils, je pince mes lèvres en une moue contrariée. Je suis totalement sérieuse, malheureusement. J'estime qu'il avait tord, moi j'étais dans le bon, tout naturellement. Mais cela, ça doit être ma vision un tantinet erronée de la situation. J'aimais avoir raison, j'aime encore plus lorsque l'on se range de mon côté, c'est un grand défaut, je sais ... mais ce n'est pas pour autant que j'essaie de m'améliorer. Cette seule phrase montre à Mads le confit intérieur qui m'anime. Perdue, paumée entre mon orgueil et mon incompréhension face à sa réaction au prime. J'ai envie de dire face à leurs réactions au prime, mais il n'y a que pour lui que cela me touche. Cela n'a aucun sens en fait. « Du coup, il a une sorte de malaise maintenant. » J'explique avant de joindre mes mains et de river mon regard dessus. Finalement je relève la tête et plante mon regard dans celui de Maddie.

J'ai peur de parler trop forte et d'être entendue. J'imagine que le drap va en attirer plus d'un, c'est logique. Mais peu importe, je range cette idée dans une partie de mon cerveau, j'essaie d'oublier. Mads reste silencieuse, me laissant la place et l'espace dont j'ai besoin pour m'exprimer. Je me permets de ne rien dire pendant quelques dizaines de secondes, avant de commencer pour répondre à la rousse. Elle me relance. Oui, j'avais complétement oublié de lui préciser l'essentiel du problème, du mini conflit qui nous opposait, lui et moi. « Concernant sa faiblesse, sa peine face à une certaine personne. » Je lui annonce, presque durement, car oui, pour moi, il fait preuve de faiblesse. J'avais sur le coup, l'impression qu'il suivait l'avis général des bonnes âmes du jeu. Je ne préfère même pas citer la personne, mon ton en dit déjà long sur ce que je pense, je suis sûre et certaine que Mads arrivera à me déchiffrer. La citer, c'est déjà lui donner plus d'importance qu'elle ne le mérite. Je me contente d'observer mes mains, cachant volontairement mon regard troublé et confus à la rouquine. Je sens son regard qui pèse sur moi, mais cela ne change en rien mon attitude. J'ai l'impression de trop parler, je n'ai pas tellement envie qu'elle analyse, juste qu'elle écoute. Parce que j'ai beau être assez renfermée, enfin, c'est ce que j'estime, il y a un moment où j'ai juste besoin d'être écoutée. C'est simple. Je continue de contempler mes doigts qui se referment sur rien, sur le vide, machinalement, juste pour bouger. Finalement, la main de Maddie apparait dans mon champs de vision et ses doigts se nouent autour des miens. C'est à ce moment précis que je relève la tête en sa direction. « Ne fais pas ça. » Je la supplie, j'ai l'impression d'être face à ma psy, alors que ce n'est absolument pas le cas. Maddie continue. « Non, évidemment. » Je lâche, c'est tellement évident que ... Elle me demande de poursuivre, mais l'histoire s'arrête là puisse que lui et moi, on ne s'est pas adressé la parole. « L'histoire n'a pas de suite. .» J'annonce en chuchotant avant de vriller mes iris bleues aux siennes. Je suis bloquée.

Je referme ma prise sur sa main, je ne saurais expliquer mais ce contact me rassure, parce oui, j'ai besoin d'avoir un contact, de temps en temps, mais j'attends qu'on vienne vers moi au lieu d'aller vers les autres, cela n'a vraiment aucun sens, je sais. Ma main d'ordinaire glaciale commence à se réchauffer grâce à Mads. Je retiens tout de même le coup du psy, ça me dérange, ça fait impersonnel, ça me fait tiquer et je le lui fais remarquer. Je n'avais pas envie de m'adresser à un semblant de psy qui se contenterait de me lâcher des 'hm hm' à chaque phrase, en me laissant dans le flou total, je veux m'adresser à Maddie. Elle s'excuse et j'hoche la tête en silence. Je continue à m'expliquer sans être sûre qu'elle saisisse bien la chose, mais peu importe. Je termine mon récit qui se résume à deux pauvres et malheureuses phrases. Je relève ma tête et capte une lueur vive dans les prunelles de Mads, j'aimerai être dans sa tête, pour entendre ses pensées face à tout cela. Mon histoire n'a pas de fin, pas encore. Maddie m'explique que c'est à moi de la finir. « Je sais. » Je souffle, presque lassée. Je sais tout ça. « Je crois que je vais la laisser en suspend, j'écrirai la suite si l'inspiration me revient. » Je réponds alors en regardant nos mains emmêlées. Traduction: Oui, je crois que je serai capable de laisser pourrir la situation, de ne rien faire pour l'arranger, de ne rien faire pour l'empirer jusqu'à qu'il soit trop tard. Que cela ne soit plus récupérable, je pourrais surement dire que j'y suis pour rien, au fond, que ce n'est pas ma faute. A près tout, je ne le connais que depuis deux semaines à peine, je n'ai pas le droit d'être touchée ou même affectée par cela, c'est tellement futile, et débile. J'essaie mais j'y arrive pas. Je passe ma main libre sur mon visage, cachant mes yeux un instant profitant de ce court laps de temps pour fermer mes paupières et inspirer profondément avant de revenir à la réalité, avec Mads. On fait quoi maintenant ?

Mads me contredit, sans pour autant me contrarier. J'écoute ce qu'elle a à me dire, trouver l'inspiration, la forcer. C'est plus facile à dire qu'à faire. Je ne sais pas encore comment agir. Une part de moi veut l'écouter, l'autre n'ose tout simplement pas. Je suis tiraillée. « Tu as raison. » Je lui réponds alors tandis que j'observe les cercles imaginaires qu'elle trace sur ma peau. L'un de ses bras viennent contre mes épaules, je me laisse aller contre elle pendant quelques secondes avant de me reprendre. Je m'écarte d'elle et je lui adresse un sourire reconnaissant. Je soustrais ma main à la sienne, échappant au controle de son pouce avant de lui jeter un regard. « On a trop trainé. » Je lui souffle avant de mordiller ma lèvre inférieur et de le reculer de quelques centimètres supplémentaires. Je lui demande silencieuse en la regardant si elle est prête, mimant les mots avec ma bouche sans pour autant qu'ils ne jaillissent à voix haute. Elle hoche la tête. Mes doigts s'emparent du bout des doigts avant d'un geste vif le faire passer au dessus de nos têtes, dans le sens inverse cette fois, nous dévoilant aux yeux des autres. Je déplie mes jambes avant de m'extraire du lit. La pièce est vide de toute autre présence, heureusement. Je lui tends la main. « Viens, je vais traquer l'inspiration. » Je lui annonce dans un vague sourire, traduction, je risque de l'écouter et de faire ce qu'elle me conseille. Je saisis ses doigts avant de la tirer pour qu'elle sorte du lit, je l'entraine en dehors de la pièce, laissant dernière nous le lit défait comme seule trace de notre passage.

sujet terminé.