J'ai affreusement faim, ce matin. Je ne sais pas l'heure qu'il est lorsque je m'extirpe difficilement des draps, les yeux encore embués, la tête encore ailleurs. Mon visage porte les marques de mon oreiller. Je les frotte avec violence, ils piquent et je ne fait qu'accentuer ce maux. C'est un réflex idiot que nous avons tous, je crois. Les yeux piquent, nous les frottons, ils piquent d'autant plus, nous les frottons encore. C'est idiot. Et cette pensée, qui me traverse l'esprit tandis que j'avance dans les allées de l'épicerie est toute aussi idiote. J'attrape un paquet de céréales, mes préférés. Ces petits trucs en forme de cookies, bien sucrés. J'attrape également du lait, de cacao – parce que je suis encore un enfant, je me nourris exclusivement de la cacaoté – et je crois que c'est tout. Je m'apprête à quitter le lieu et me diriger à la cantine pour ingurgité le paquet (ou presque) de céréales quand mes yeux se posent sur un mec.. bandé. Je le reconnais directement. Des mecs aux yeux bandés, il n'y en a pas des centaines, dans le nid. C'est Jared qui a écopé de cette peine au prime de dimanche. Un sourire amusé se dessine sur mon visage tandis que je m'approche de lui à pas feutrés. « Tu cherches quelques chose ? » je crois qu'il ne me reconnais pas. Normal en même temps, nous ne nous sommes jamais réellement adressé la parole. « C'est Arès. T'as faim ? » je le bombarde de questions alors qu'il est incapable de voir et ça se ressent. Je crois qu'il cherchais comme moi des céréales et il se retrouve avec un paquet de riz dans la main. Du riz au petit déjeuné, pourquoi pas après tout. C'est peut-être ce que Nicole s'enfile. Je me note de le lui demander, tiens.

Ca fait déjà deux jours entiers que le noir s’est fait et je ne pensais pas que ça aurait été si insupportable à vivre. Je pensais sérieusement pas que la lumière du jour allait autant me manquer alors que je déteste, justement, vivre à l’intérieur. J’suis con sur ce coup mais je me suis consolé sur la guitare de l’auberge l’autre jour. Je me dis que des deux maux j’ai choisis le moindre – pour moi ça l’est -. « Tu cherches quelques chose ? » J’entends une voix masculine que je n’identifie pas, je tourne la tête en direction de la voix – reflexe stupide – et réponds. « Ahem, oui, un truc mangeable quoi. » Je passe une main dans ma nuque alors que l’autre tiens un paquet de ce que je pense être des céréales même si ça me semble bien lourd pour être ça. « C'est Arès. T'as faim ? » Arès… Ah oui ! Celui qui nous a tous condamné à dormir dehors. Hm. « Bah je dois bien avouer que oui. » Non mais ça me saoule en fait, de dépendre des autres. J’ai toujours recherché ma liberté moi, mon indépendance et maintenant je me retrouve a avoir besoin de demander de l’aide. « Si tu pouvais juste me dire ce que j’ai en mains ? Parce que ça me parait un peu lourd pour être des céréales en fait… » Un petit sourire contrit apparait sur mon visage, je suis bien content d’être tombé sur lui n’empêche.

J'ai pas particulièrement envie de l'aider. Ma sensibilité me perdra. J'ai vu ses regards lourds de sous-entendus au prime. Mais je ne dis rien. Je me retiens. Au fond, il me fait pitié. Je n'ai aucune raison de le laisser porter un paquet de riz plutôt que de céréales, au fond. Je m'arme de patience, j'affiche un grand sourire bien qu'il ne le voit pas. Je conçois assez facilement que son handicape pour la semaine peut être exaspérant. Que devoir dépendre de tout le monde et ne plus pouvoir se faire confiance est déstabilisant. « En fait, c'est du riz que tu as dans la main. » je lui prends des mains et repose le paquet dans le rayon avant de lui refourguer mon paquet de céréales. Je suis prêteur en plus. Vraiment, je me surprends. Je pourrais lui refourguer.. je sais pas. Un truc dégueulasse et le laisser manger.« Viens on va déjeuner un peu plus loin. » puis c'est sans condition. Il est obligé de me faire confiance de toute manière et ça me plaît, en un sens. Je le laisse me suivre en empoignant son bras et je l'amène jusqu'au comptoir où est posé la fausse/ancienne caisse enregistreuse. J'attrape le paquet de céréales, je l'ouvre et je le lui mets sous la main afin qu'il puisse en piocher. Et puis, j'ai une idée. Stupide mais j'aimerais bien qu'il accepte. On peut passer le temps à une vitesse folle avec cette idée. « Tu connais le jeu du Kimgoût ? Je te fais goûter des trucs et tu devines ce que c'est. » Allez quoi, ça peut être sympa. Je le supplie du regard tout en sachant qu'il ne me voit même pas. Mais bon, je fais comme je peux, il n'a cas m'imaginer.

Je sais pas trop ce que je pense d’Ares, il est pas méchant comme type mais j’ai juste pas apprécié le fait que lui et Elliot puisse dormir au chaud pendant que tous les autres sont obligé de se chopper la crève. Ok, sans ça, ça aurait été Raphaël et Elliot qui se seraient chopés la creve mais 2 personnes c’est bien moindre, non ? Peut être qu’il a peur de Raphaël aussi ? Je ne comprends pas tellement ce qu’il se passe entre eux tous alors autant ne pas m’en mêler hein, j’ai juste compris qu’il y avait une sacré histoire de coup de foudre (qui aurait cru que ça existait, hein) mais encore une fois, c’est pas mes affaires et là tout de suite j’apprécie l’aide que le candidat m’offre. « En fait, c'est du riz que tu as dans la main. » Ah ? Il me prend le paquet et m’en fourre un autre dans les mains. Plus léger. « Ah ? Merci. » Je réponds alors, avec un sourire. « Viens on va déjeuner un peu plus loin. » ajoute-t-il en me prenant le bras, je le suis jusqu'à ce que je sais où, je sens un comptoir sous mes doigts et pose le paquet de céréales dessus. Il le prend et l’ouvre avant de le remettre près de moi, je souris pour le remercier silencieusement et commence à grignoter quelques céréales. « Tu connais le jeu du Kimgoût ? Je te fais goûter des trucs et tu devines ce que c'est. » Je fronce les sourcils derrière mon bandeau mais, hm, il ne le voit pas forcément. Je suis un peu sceptique, parce que j’peux pas lui rendre la pareille y’a que moi qui suis le cobaye dans l’histoire. « Hmm… Je suis allergique aux noisettes, amandes et autres fruits secs. » C’est pas vrai, j’aime juste pas ça, mais vraiment pas, surtout les noix. Je comprends pas comment on peu aimer ça.

Et puis finalement, je me prends au jeu. Parce que nous n'avons pas droit à des aveugles et des muets tous les jours dans Fake Lover. Et si je peux en jouer, ça m'arrange. Ca change de nos discussions redondantes et puis, ça va me permettre de faire des tests culinaires sur Jared. Je le regarde piocher dans ses céréales, un par un et je suis pris de pitié pour lui. Je souris. Je ne me moque pas, non, j'aimerais bien m'y voir, à sa place. Puis finalement, je me dis que je serais peut-être bien mieux à sa place qu'à la mienne. Qu'il comprenne mon choix une fois pour toute. J'ai envie de lui demander s'il a un problème avec moi mais ce sont d'autres mots qui sortent de ma bouche. Je propose de lui faire goûter ce qui me tombe sous la main afin qu'il ne devine ce que c'est et il me répond qu'il n'aime pas les fruits secs, ni les noix. « Tout sauf ça, alors ? » je rétorque un brin amusé avant de le laisser quelques secondes tout seul avec ses céréales pour aller chercher quelques provisions. Je commence soft. J'attrape une cuillère et je pioche dans la confiture aux myrtilles. « Ouvre la bouche, » j'ai failli rajouté bébé mais je me retiens et je lui enfile la cuillère dans la bouche avec douceur, quand même. Son expression me fait sourire. « Tu viens d'où Jared ? » Je demande pour faire la conversation et parce qu'au fond, ça m'intéresse. Je m'intéresse à chacun des candidats présent dans l'aventure et même si Jared m'a laissé un goût amer lors du prime, il n'en reste pas moins intéressant à mes yeux alors..

« Tout sauf ça, alors ? » étant donné que je viens de lui balancer le mensonge que je suis allergique et que, j’espère, qu’il l’a cru. Oui, tout sauf ça. Je hoche la tête sans répondre car j’ai des céréales dans la bouche (et qu’on ne parle pas la bouche ouverte, ma mère m’aura au moins appris un truc) et je l’entends s’éloigner, je ne mange plus de céréales vu qu’il va me donner la béquée. « Ouvre la bouche. » Bien chef, j’ouvre la bouche et je sens une cuiller y entrer, je referme, je goute, j’avale et je souris. « Confiture de fruits rouges ? » Lequel ? J’en sais rien, voilà, je suis pas expert à ce point hein. « Tu viens d'où Jared ? » « Des Etats-Unis. Enfin c’est là que j’ai vécu la plus grande partie de ma vie, le reste n’a été que voyages. Dernièrement j’étais en Irlande. Et toi ? » Je demande, parce que même si son choix au prime ne m’a pas plu ce n’est pas pour ça que je ne l’aime d’office pas, je ne le connais pas après tout, j’ai juste une petite tendance à me braquer de temps à autre, surtout que ce prime était déjà en soit plutôt stressant.