La température est si instable que j’ignore, malgré les prédictions de Miss Météo, quel temps il fera demain. Pour le moment, du moins, la température est douce, agréable, et je ressens un urgent besoin de prendre l’air. Entre ces quatre murs, le sentiment d’enfermement est palpable. Dehors, au moins, l’effet est moins saisissant. Le balcon m’accueille en silence et je me pose tout prêt de la rambarde, observant le monde à mes pieds. Visiblement, d’autres ont eu cette même idée. Un homme s’invite sur la balustrade, et s’il ne porte pas attention dans un premier temps, cette affirmation se fausse en l’espace de quelques secondes quand nos regards s’entrecroisent, alors que je balaie l’espace de mes yeux verts. Impossible qu’il ne m’aborde pas, désormais. C’est une habitude dans le coin de ne pas laisser en paix les âmes en quête de solitude. Tel que je l’avais prédis, il se poste à mes côtés et m’aborde. « Dis-moi ma jolie, t’aurais du feu ? » Je n’ai peut-être pas la tête d’une grande consommatrice de tabac, mais il est possible que j’ai en ma possession un briquet qui pourrait lui être utile. Je suis seulement lente à me décider entre le lui tendre et le laisser souffrir de son manque de nicotine. Trop tard. « Au pire, c’est pas grave. Je vais juste me contenter d’un bon bol d’air frais. » Et dans des gestes posés, entreprends de remettre là où il l’a prit cette cigarette qui reposait quelques secondes auparavant sur le bout de ses lèvres. Le temps qu’il termine, ma main se faufile jusqu’à ma poche, et j’en sors une petite chose métallique, un briquet ayant appartenu à mon père, le seul objet que je conserve encore de lui. Je fais miroiter l’objet devant lui, le tenant à bout de doigts. « Je doute que ta superbe résolution de prendre un ‘bol d’air frais’ résiste à son attrait. » C’est comme mettre sous le nez d’un chien une gâterie. Terriblement frustrant pour la petite bête. J’ai joue un peu avec lui, mais ça m’amuse, que voulez-vous. « Hyram. » Sa main tendue entre nous m’invite à faire de même et me présenter à mon tour. J’ai plus ou moins envie de me prêter à ses convenances récurrentes. Je me contente donc d’hocher la tête en énonçant, haut et fort, mon prénom, de cette voix pimenté à l’accent germanique de mon pays. « Brynja. » Je ne suis pas friande des contacts humains, et aussi insignifiant que cela peut paraître, serrer la main d’un parfait inconnu fait partie de ces gestes que je trouve trop familier, trop personnel.