Rien ne vaut un peu de vin pour accompagner un repas. Je préfère le vin rouge. Plus fruité en bouche. La couleur me rappelle les vignes, le raisin et Bacchus. Loin des orgies dionysiaques et des danses effrénées des ménades, je suis dans la cuisine en train de préparer des croques-monsieur. Un classique de la gastronomie. Une recette très simple : deux tranches de pain de mie, une tranche de jambon de paris et du fromage. Du bon fromage et non, l'industriel. J'ai une préférence pour l'emmental. Du gruyère ferait très bien l'affaire. Faîtes chauffer la poêle en y mettant un peu de beurre (c'est pour le croustillant, le beurre apportera un peu de saveur au pain). On fait un sandwich avec les différents ingrédients à disposition qu'on délicatement dans la poêle bien chaude. Pas trop fort le feu, sinon le pain risque de cramer. Dorez légèrement le pain. Il faut que le fromage fonde un peu et que le jambon soit cuit à point. Préparez une assiette garnie de salade verte, accompagnée de tomates coupées en tranche. Et voilà le tour est joué. Vous obtenez alors une joli présentation. Maintenant, le croque-monsieur. Je vois qu'il est bien doré de deux côtés. C'est prêt. Il ne manque plus qu'à le disposer sur l'assiette. Vous obtenez alors un délicieux croque-monsieur. Je me retourne, je souris à la candidate qui vient d'entrer. Je lui montre le croque-monsieur et lui demande par politesse : - T'en veux ? J'en ferai un deuxième au pire. La politesse exige qu'on partage son mets avec autrui. Comme j'ai été extrêmement bien éduqué, je lui en propose sans arrières-pensées. Elle a le droit de refuser. Je ne lui en tiendrais pas rigueur.

Il était l'heure de dîner. Oui, déjà. Son estomac était réglé comme une horloge (à peu près, hurm). Lorsqu'il sentait qu'on approchait de l'heure d'un repas, il n'hésitait pas à le faire savoir. Bien. Quittant le petit groupe de personnes qui l'entourait, avouant aller en direction de la cuisine en un rire, elle fit le trajet rapidement, comme poussée un peu plus par cette faim qui grandissait et grandissait. Son estomac était incorrigible. Elle voudrait sauter un repas qu'elle ne pourrait tout simplement pas. Peu importe. Poussant la porte, elle eut l'agréable surprise de voir que la cuisine était loin d'être bondée. Et pour cause, se trouvait là un seul candidat. Impossible ! Les autres devaient être cachés quelque part. Ou alors, ils n'étaient que deux à vouloir dîner à cette heure-ci. Ce qui était étrange. Et n'importait pas tellement, certes. C'était même des questionnements totalement inutiles. Si bien qu'elle se contenta de sourire à son tour tout en s'approchant de l’îlot central, sur lequel elle s'accouda lorsque l'monsieur fut pris d'un élan de générosité, lui proposant ainsi ce qui ressemblait à un croque-monsieur. Son estomac, cet affamé, en salivait presque. « Je ne sais pas. Est-ce que c'est bon ? » Elle aimait bien les questions cons qui pourraient presque passer pour une question piège. À vrai dire, ce n'était qu'une simple plaisanterie. Elle n'oserait pas douter des talents culinaires de son camarade. Elle espérait juste qu'il ne soit pas un type un peu taré avec des pulsions meurtrières et dont le meilleur ami est l’arsenic. Non, quand même, il n'avait pas la tête d'un fou. Quoique, ils n'avaient pas forcément une tête spéciale avec « taré » marqué sur le front en majuscules. Outre cela, elle appréciait sa réponse, oui. Pas de peur qu'il soit effectivement quelque peu dérangé, non, du tout. Uniquement parce qu'elle n'avait pas réellement donné de réponse et qu'ainsi, elle ne profitait pas de sa générosité. Et puis, elle aimait bien rester dans le flou. Oui, c'était amusant de ne pas donner une réponse précise. Pourquoi tout devrait être soit blanc, soit noir, après tout hein, hurm.

Je suis d'humeur joueuse, ce soir. Je ne sais pas. C'est peut-être le trop-plein de neige commence à me rendre dingue. C'est le soir, l'heure du dîner. Peu de candidats sont dans la cuisine. Faire des plats me détend toujours. Surtout pour assouvir des besoins primaires comme la faim. Cette faim qui vous tiraille, qui vous empêche de dormir parfois, qui vous maintient en haleine. Je fais mon croque-monsieur tranquillement dans mon coin pendant qu'une candidate fait son entrée. La politesse veut que j'en lui propose avant de me restaurer à mon tour. - Je ne sais pas. Est-ce que c'est bon ? J'avoue que sa question m'a un peu pris de court. Mais j'ai plus d'un tour dans mon sac. Je suis malin et limite sournois. Je ne vais pas la forcer. Il faut se montrer gentilhomme tout de même. Je baisse les yeux. Mon regard s'assombrit. Je boude un peu. Je hausse finalement les épaules. - T'as raison. Il n'est peut-être pas si bon que ça mon croque-monsieur. Je vais le jeter. Je me dirige vers la poubelle en portant le plat dans main. Je suis sur le point de m’exécuter quand le regard horrifié de la belle me rappelle à l'ordre. Je réprime un sourire mutin. - Attends. Non, c'est pas bien de gaspiller. Pas bien du tout., dis-je d'un ton faussement réprobateur. Je ris et reviens vers elle. Je m'approche d'elle doucement en agitant l'assiette sous son nez. - T'es sûre que t'en veux pas ? Sens-moi cet arôme délicat de fromage. Et le jambon, tu devrais goûter le jambon. Un délice. Un jambon parisien, en plus. Oui, très fier d'être parisien. - Allez, goûte pour me faire plaisir. Je la supplie presque du regard. Je me mets en avant un peu ma lèvre inférieure pour me donner un côté plus attendrissant. J'ai conscience d'en faire trop. C'est mon côté théâtral qui veut ça. J'assume, oui j'assume ma connerie tout à fait. Je n'ai jamais raté un seul croque-monsieur de ma vie. Je serai déçu de voir que mes talents de cuisiniers se sont affaiblis. Je jure que ce croque-monsieur est une véritable merveille en bouche. Je suis prêt à le jurer sur la Torah, s'il le faut.

Elle n'avait jamais voulu sous-entendre que le plat préparé par son camarade était mauvais. Non, vraiment, elle n'avait pas souhaité une telle chose, tout comme elle ne voulait pas qu'il mette le tout à la poubelle parce qu'elle avait posé une simple question. Ah, non, non, non, elle ne faisait que blaguer. Une minute, papillon ! C'est qu'il était déjà parti en direction de la poubelle, ce fou. Elle ne savait pas que son humour était si mauvais que ça. Ou bien même que son influence était si grande que cela. Toutefois (et heureusement), après avoir jeté un coup d’œil vers elle, il décida d'abandonner cette mission. Elle ne savait pas ce qu'elle avait de si convaincant sur le visage mais exactement : gaspiller, c'était mal ! Surtout en sachant qu'Emmeline pourrait très bien manger ce met sans le moindre souci. Un sourire satisfait s’incrusta sur son visage en le voyant rebrousser chemin. Bien. Sourire en coin, elle écouta son plaidoyer, elle s'exécuta lorsqu'il lui suggéra de sentir cette douce odeur de fromage, baissa les yeux en direction de cette tranche de jambon lorsque l'attention porta sur cette dernière. Oui, c'est exact, cela avait l'air appétissant, elle ne pourrait dire le contraire. « Si tu insistes. » souffla-t-elle alors, rendant les armes. Pas plus difficile que cela à convaincre, non. Du moins, pas en ce moment ou sur ce sujet. Son estomac grondait, lui criait de profiter de l'offre avant qu'elle ne lui passe sous le nez, alors elle n'allait pas faire sa difficile. Le croque-monsieur dans les mains, une fausse lueur critique dans le regard, elle prit une première bouchée, fit semblant de juger la chose. Toujours dans son mutisme, elle croqua une deuxième fois avant de rendre son verdict, retrouvant un air plus joueur. « Tu as raison, c'est bon. Tu devrais goûter aussi, je me sens coupable de profiter de ça toute seule. » Voyez comme elle était partageuse, n'est-ce pas. Là-dessus elle tendit les bras afin d'approcher la chose des lèvres de son camarade. Et puis, voyons le bon côté des choses, si ce croque-monsieur était empoisonné, ils périraient tous les deux. Sauf si, comme par hasard, il préférait s'abstenir. Non, promis, elle n'était pas si méfiante que cela. Sinon, vous pensez bien qu'elle aurait résister à la tentation afin de préserver sa vie, haha. Même si un homme qui cuisine et qui, ensuite, vous offre gentiment le repas préparé était une chose assez louche, nous sommes d'accord.

Elle se méfie peut-être de mes intentions. J'ai fait tout un cinéma pour qu'elle accepte de croquer un bout de mon délicieux croque-monsieur. Je ne sais même pas pourquoi j'insiste, d'ailleurs. J'ai envie de l'embêter, de la taquiner. Je vois qu'elle est tombée dans le panneau. Je suis contre le gaspillage. Tout ceci n'était qu'une mise en scène, bien sûre. Il ne faut pas oublier que j'ai la dalle et que je me suis cassé le cul à faire un croque-monsieur. Ce n'est pas rien. Après tout ce cinéma, j'ai atteint mon objectif. Elle va enfin goûter à mon croque-monsieur. C'est le 14 juillet avant l'heure. J'entends déjà les feux d'artifice. - Si tu insistes. Je la regarde manger un morceau de ce divin plat. Elle prends son temps pour le savourer. Puis vient la deuxième bouchée. Je la fixe intensément en attendant le verdict avec impatience. Je parais décontracté à l'extérieur, mais en fait j'angoisse un peu. J'ai peur qu'elle n'aime pas. Et là, mon orgueil serait profondément blessé. J'attends, j'attends, j'attends. Un véritable supplice. Je n'ai les prouesses techniques d'un grand chef étoilé, mais je me démerde plutôt bien. Je ne rate jamais mes plats. C'est une sorte de fierté en soi. Son visage s'illumine. Mission accomplie. Elle me dit : - Tu as raison, c'est bon. Tu devrais goûter aussi, je me sens coupable de profiter de ça toute seule. Soulagé, je soupire. Je lui souris, satisfait de moi-même en la voyant approcher le croque-monsieur de ma bouche. Je prends un bout. Putain ... Que c'est divin. Non, je ne suis pas du tout en train de me lancer des fleurs. Le goût est juste exquis. Je reprends une autre bouchée. Je souris de nouveau à la jeune femme. Elle a l'air affamée. Je vais sans doute en préparer un autre. - Moi, c'est Hyram. Oui, je trouve toujours le moyen de me glisser mon prénom au cas où. J'ai envie de connaître le sien. Elle me paraît tout à a fait sympathique. - J'espère que tu n'as pas cru un instant que j'allais t'empoisonner hein ?, demandai-je d'un ton faussement suspicieux. Est-ce si surprenant qu'un homme puisse correctement faire à manger ?

Elle aurait été bête de passer à côté de ça, elle voulait bien l'admettre. Ce croque-monsieur était bon. Elle n'était pas habituée à en manger, pour tout dire. En général, elle évitait tout ce qui pouvait se manger directement avec les doigts. Parce que. Voilà. Cela dit, là, elle voulait bien en manger plus souvent s'ils étaient faits de la main d'Hyram. Puisque, oui, elle avait appris son prénom au passage. Il était donc réel ? Eh bien. Une espèce en voie de disparition, sans doute. Ne lui en voulez pas, ce n'était pas souvent qu'elle croisait un jeune homme qui passe derrière les fourneaux et qui ne fait pas tout cramer ! De là où elle venait et aussi sexiste cela pouvait avoir l'air, elle avait bien plus l'habitude de voir les hommes aux affaires et les dames à la maison. Quand il n'y avait pas de domestiques dans les parages, ça va de soit. Ce qui n'arrivait pas souvent non plus. Hm... bref ? Ouais . « Emmy. » se présenta-t-elle à son tour, agrémentant le tout d'un léger sourire. Sans qu'elle n'eut le temps de repartir dans un monologue, Hyram lui posa une question. Waouh, sa surprise avait été si décelable que cela ? Oups. Cela dit, ne perdant pas la face, elle haussa les sourcils, afficha un air aussi amusé que faussement surpris. « Moi ? Pff, jamais. C'est vraiment pas mon genre, tu sais. Je suis même tout l'inverse. Je ne me pose jamais de questions quand un homme cuisine, bien qui plus est, et qu'il décide de gentiment me nourrir du plat qu'il vient de concocter. Non, tu sais, je ne suis pas du tout méfiante. Jamais ! » Elle en faisait trop ? Peut-être un tout petit peu, dans ce cas. Il faut dire que ces quelques phrases, bien que dites sur un ton léger, laissaient entendre une certaine raillerie. Envers elle-même, bien entendu. Oui, elle se moquait de sa petite personne et alors ? Elle avait le droit, non ? Bien sûr que si. Elle faisait toujours tout ce qu'elle voulait, qu'on vous dit. « Et donc, ça t'arrive souvent de cuisiner si généreusement pour les autres ? » Elle demandait ça comme ça hein, sans aucune arrière pensée. Comprenez qu'elle n'allait pas faire de lui son cuisiner attitré. Non, vraiment pas. Disons qu'elle allait essayer hein. Pour sa défense, elle n'était pas un cordon bleu. Et en plus de ça, sa vilaine colocataire n'aimait pas quand Emmeline s'approchait d'une casserole. Pas qu'elle cuisinait mal, non, du tout, loin de là, c'était juste Hannah, sa colocataire, qui était un peu folle et qui poussait toujours Emmy en dehors de la cuisine. Même elle, elle ne comprenait pas pourquoi. HURM.