Mado était une jeune femme incroyablement rancunière. Lorsqu'on lui faisait une crasse, lorsqu'on la trahissait ou lorsqu'on s'en prenait à ceux qu'elle aimait, inévitablement, elle rentrait dans une phase de rancune intense dont il était relativement peu probable qu'elle sorte avant quelques années. Estimant que chaque crime méritait châtiment, elle ne graciait que bien rarement ceux qui trouvaient le moyen de la décevoir. La semaine passée, elle avait pour autant accordé son pardon à Bob, qui s'était platement excusé de l'avoir giflé en plein prime, et qui lui était apparu sous un jour différent, beaucoup plus flatteur, ce qui avait donné un tournant inattendu mais tout à fait plaisant à leur relation, mais aussi à leur partenariat. A ce jour, elle avait comme qui dirait pris Bob sous son aile, sachant qu'il n'avait pas eu un passé facile et qu'il manquait cruellement de confiance en lui, mais aussi d'estime pour sa personne. Il l'avait touchée. Il l'avait émue, même. Alors elle avait décidé de lui accorder la chance qu'il méritait, partant du principe qu'il valait de toute manière mieux qu'ils se soutiennent plutôt qu'ils essayent de se tirer dans les pattes à la première occasion. Elle ne voulait pas que l'on s'en prenne à Bob. Pourtant, quelqu'un se l'était permis. Et ce quelqu'un, c'était Mickey. Mickey qui avait déjà tenu de durs propos au sujet du partenaire de Mado, et que celle-ci n'avait pas apprécié. Mais le pire de tout, c'est qu'il s'était permis de nominer d'office un jeune homme dont le seul tort avait été de l'embêter un tantinet. Clairement, elle trouvait cette action démesurée, et elle ne cautionnait absolument cette façon de faire. Alors elle se tenait là, dans le jardin, face à Mickey qui, naturellement, se trouvait être en train de lire. Nombreuses étaient les choses qu'elle voudrait lui dire, mais si elle se lançait là dedans, elle sortirait de ses gonds, comme lors du prime, et ça n'était peut être pas l'idéal à cet instant. Alors elle se contenta d'approcher, jusqu'à se poser à ses cotés. « Si je nuis à ce livre, tu me nomineras d'office également ? » demanda-t-elle, amère et pleine de ressentiment. Elle ne comprenait toujours pas pourquoi il était allé jusque là. Quoi qu'ait fait Bob, c'était à ses yeux injustifié. « Ce qui me dégoûte le plus dans tout ça, c'est d'avoir maintenant l'impression d'avoir perdu mon temps en essayant de te faire comprendre que Bob n'était pas un mauvais bougre. Toi, tu devais savoir depuis le début du prime que tu le nominerais, alors que j'espérais sincèrement arranger les choses entre vous. » Soupirant, elle lui adressa un regard teinté d'incompréhension. Pourquoi opter pour la facilité en nominant Bob, alors qu'il aurait pu lui laisser une chance, comme Mado l'avait fait ? « C'est la manière la plus injuste de se retrouver en danger, Mickey » reprit-elle, désabusée. Il ne comprenait pas que ça n'était pas juste. Et elle, elle tenait à ce que les choses le soient, justement.

Non, ça ne passait pas. Rien à faire, Mado ne digérait pas cette improbable décision. C'était à ses yeux une putain d'injustice, et en cela, elle était bien incapable de passer outre. Peut être manquait-elle un tantinet d'objectivité, dans la mesure où cela touchait à Bob, son partenaire, mais le fait est que l'injustice, dans sa globalité, l'avait toujours atrocement répugnée. Pour autant, il est certain que cette nomination d'office la contrariait particulièrement. En soi, elle se foutait éperdument des problèmes qu'il pouvait y avoir entre Mickey et son partenaire, de la possible gravité de ces derniers. Ce qu'elle savait simplement, c'est que rien ne semblait justifier un pareil traitement. Être nominé d'office, bon sang, c'était être soumis à un risque non négligeable d'être éliminé, et si elle n'était clairement pas du genre à contester une nomination qui avait lieu dans les règles, il était certain que cette nomination-ci lui apparaissait comme étant incroyablement injuste. Est-ce que Mickey pouvait comprendre qu'il y avait des façons de régler des problèmes, et que ça n'était pas en se laissant aller à un acte d'une telle facilité qu'il arrangerait les choses avec Bob ? Mais peut être partait-il simplement du principe que rien n'était à arranger ? Mado, elle, était parvenue à laisser une chance à Bob, et pour le moment, il semblait largement la mériter. Mickey était-il donc incapable de laisser de coté son amertume pour agir de façon mature et réfléchie ? Visiblement, oui. En cela, son attitude était éperdument décevante. Surtout que bon, tout ça pour un livre, hein. Il était peut être passionné de Littérature, mais ça n'était pas une raison pour agir d'une telle manière simplement parce que quelqu'un avait eu le malheur de le taquiner avec sa passion en jouant avec ses nerfs. La réponse de Mickey ne put en tout cas que la faire soupirer. Ah bah oui, si il se lançait dans ce genre de répliques, ça allait vachement faire avancer les choses, c'est clair. Ne répondant pas, car jugeant que ça n'en valait simplement pas la peine pour le coup, elle se concentra sur la suite. Ce qui la contrariait effectivement le plus, c'était d'avoir passé une partie du prime à essayer de défendre Bob aux yeux de Mickey, pour lui faire entendre raison et l'inciter à ne pas rester amer à son égard, pour qu'au final il dégaine la carte de la nomination d'office et bafoue tous les efforts qu'elle avait fait durant la soirée. Clairement, ça la faisait chier. Il n'était décidément respectueux à l'égard de personne, ce Mickey. « Ne prends pas cet air suffisant avec moi, Mickey. Ça ne te grandit pas. » Il reconnaissait en tout cas avoir décidé du sort de Bob bien avant son intervention. Ah bah voilà, c'était maintenant clair, il n'était qu'un connard, hm. « On ne devrait pas mettre ce genre de privilèges entre les mains d'individus tels que toi. Parce que pour le coup, j'estime que c'est de l'abus de pouvoir. » Non, elle ne pesait pas ses mots. Elle avait toujours eu un coté révolutionnaire dans le sang, c'est tout. Et clairement, si la Production mettait en jeu ce genre d'avantages pour qu'il y ait ce genre d'abus, alors elle estimait que c'était bien dommage, oui. Il ne manquerait plus que tout le monde se nomine à tout va, à la moindre petite querelle. N'importe quoi. Donc oui, elle trouvait ça nul. Et injuste, surtout. On pouvait bien dire qu'elle prenait les choses trop à cœur, le fait est qu'elle tenait à l'idée de justice, tout simplement. « Je critique principalement le fond, moins la forme. Je sais bien qu'il est probable qu'il rentre dimanche soir. Ce que je condamne, c'est le simple fait qu'il risque sa place pour de telles conneries. Si ce que tu voulais c'était lui adresser un avertissement, je pense qu'il y avait d'autres façons de procéder. » Soupirant à nouveau, elle se surprit à faire preuve de beaucoup plus de calme que dimanche soir. « Réponds-moi honnêtement. Tu aurais aimé que l'on te nomine d'office à cause d'une petite altercation ? » Le scrutant de ses yeux verts, elle attendait sincèrement de lui qu'il finisse par reconnaitre que personne n'aurait aimé connaitre une si injuste nomination. Pas même lui.

A cet instant précis, Mado n'était pas certaine de savoir ce qui était le plus insupportable chez Mickey : qu'il se prenne pour Dieu le père et saisisse la première occasion qui lui était donné de prendre une dangereuse décision pour jouer au con, ou qu'il fasse présentement preuve d'une arrogance que la jeune femme avait bien du mal à tolérer ? Il lui apparaissait à cet instant précis comme quelqu'un d'incroyablement antipathique, ce qui était dommage, étant donné qu'elle avait longtemps cru qu'ils étaient quelques peu semblables, ou en tout cas détenteurs d'un certain nombre de points communs. D'ailleurs, c'était aussi pour cela qu'elle s'était plutôt accommodée de sa compagnie, en début de prime dernier, parce qu'elle était partie du principe qu'ils pouvaient faire de leurs personnalités atypiques mais semblables sur quelques points une sorte de force. Mais là, elle ne pouvait plus du tout penser de la même manière, car Mickey l'avait déçue. Atrocement déçue. Il s'était montré petit joueur, déloyal, et elle ne supportait pas ce type d'attitudes. Et puis il pouvait bien prendre ce petit air supérieur, clairement, ça n'arrangeait pas son cas et il n'apparaissait que plus détestable encore aux yeux de sa camarade, chose qui devait pour autant ne pas du tout lui importer, elle s'en doutait. En tous les cas, il était certain que Mado ne tolérait pas le fait que l'on ait mis un tel pouvoir entre les mains d'un type comme Mickey, visiblement du genre à confondre le jeu avec ses soucis personnels. Donc oui, elle avait tendance à voir cela comme une sorte d'abus de pouvoir, ce que son camarade ne sembla pas franchement comprendre. « J'estime que la Production ne devrait pas mettre ce genre de pouvoirs en jeu d'une telle manière, c'est beaucoup trop accessible, et si tout le monde agissait comme toi, en nominant d'office les candidats avec lesquels le courant n'est pas passé, et bien le jeu ne ressemblerait plus à rien. Si tu avais nominé quelqu'un de complètement passif, ou que tu avais au moins eu une raison valable concernant Bob, je n'aurais probablement rien dit. Mais là, c'est tout bonnement ridicule. Donc je maintiens, à mes yeux, et puisque ça me parait toujours aussi injustifié, c'est de l'abus de pouvoir, oui. » Oh et au pire, elle n'était pas là pour lui faire entendre raison, puisque de toute manière, elle savait maintenant qu'il ne servait à rien de s'emmerder à tenter de lui faire intégrer quelque chose. La dernière fois, elle avait perdu de son temps en essayant de défendre Bob, alors disons que ça lui avait quelques peu servi de leçon. « Admettons que Bob ait été capricieux et arrogant à ton égard, je ne trouve toujours pas que ça justifie une nomination d'office. Mason a été tout aussi insupportable vis à vis de moi au début du jeu, pour autant, je n'ai pas la moindre intention de le nominer si je venais à avoir ce pouvoir un jour. Il ne faut pas tout confondre. » Car c'était bien beau d'avancer qu'il avait laissé une chance à Bob, qu'il l'avait prévenu ... Mais pas sûr que le partenaire de Mado ait véritablement considéré le fait qu'une nomination d'office pourrait lui tomber dessus pour si peu. Après tout, c'était démesuré, et illogique. « Non, je regrette, je suis presque certaine que personne n'agirait de cette manière, ni à ton égard, ni à l'égard de qui que ce soit ici. Ou alors je n'ai simplement rien à faire ici, ce que je commence d'ailleurs à me dire. » Bien sûr que non, personne n'irait nominer Mickey d'office, bien qu'il soit maniaque et chiant dans son genre. N'importe quoi. « Encore une fois, si on devait nominer d'office ceux qu'on ne porte pas dans notre cœur, ce serait l'anarchie la plus complète. Et j'aurais du monde à nominer, personnellement. Sauf que je ne joue pas de cette manière. » Ainsi donc, que les candidats avec lesquels elle n'était pas franchement en bon terme se rassurent : si elle atteignait prochainement la première place du top des candidats, elle ne saurait nominer d'office qui que ce soit pour si peu. « Que Bob ait craché, dessiné ou même chié sur ton précieux bouquin, non, sa nomination n'a rien de légitime. A t'entendre, on croirait qu'il a assassiné ta grand mère, franchement, c'est absurde ... » On pouvait dire qu'elle prenait les choses particulièrement à cœur, mais Mickey, lui, était franchement excessif dans son genre.

Quoi que Mickey en dise, il n'en était pas moins certain que sa décision était injuste. Oh oui, vraiment injuste. Car nul comportement - ou presque - ne saurait amener à une nomination d'office, il fallait rester logique. Et Mado connaissait désormais suffisamment Bob pour savoir qu'il n'avait du chercher qu'à déconner, à embêter quelques peu son camarade, mais certainement pas à lui faire un véritable tort. Franchement, elle avait eu le temps de changer de regard sur lui, et avait bien compris que son humour parfois douteux était surtout une arme, une sorte de bouclier qu'il utilisait pour se protéger des autres, parfois même de sa propre personne. Elle trouvait donc particulièrement regrettable que Mickey n'ait pas cherché à voir plus loin que l'attitude probablement désinvolte de leur camarade, et qu'il ait opté pour la facilité en nominant celui-ci d'office. Elle n'arrivait tout bonnement pas à s'y faire, non. Et le pire, c'était probablement de se rendre compte qu'en plus de n'être pas du tout prêt à admettre avoir été un peu loin dans sa façon de faire, Mickey était surtout incroyablement fier de lui. Alors quoi, si c'était à refaire, il referait exactement la même chose ? C'était une question qu'elle ne prendrait même pas la peine de lui poser, étant donné qu'elle était presque certaine que la réponse tendrait vers le positif. Et il n'y aurait rien d'étonnant à cela, puisqu'il lui apparaissait présentement comme un jeune homme incroyablement têtu, borné, et à qui il serait décidément bien vain d'essayer de faire entendre raison. Pourtant, une partie d'elle, la plus diplomate sans doute, tentait tant bien que mal de lui faire comprendre qu'il y avait des manières de faire, et qu'il n'avait assurément pas opté pour la meilleure si son but était d'avertir Bob et lui faire payer son audace. Franchement, si tout le monde se mettait à nominer les personnes avec lesquelles ils ne s'entendaient pas, le jeu prendrait rapidement une tournure dramatique. Mado, elle, pourrait par exemple nominer Mason si l'occasion lui était donnée, ou Carmen, avec qui le courant peinait encore quelques peu à passer, ou Everleigh, puisque certaines personnes semblaient s'entendre pour prétendre qu'une rivalité certaine les opposait. Sans oublier Myles, ou même Enora, qu'elle connaissait peu mais qui ne lui avaient pas fait une très bonne impression, de base. Donc oui, elle aussi était susceptible d'avoir des connaissances à nominer d'office, tôt ou tard, mais elle ne le ferait pas. Parce que ça n'était absolument pas une solution à des problèmes d'ordre sociables et qu'elle ne voulait absolument pas tomber dans ce genre de facilité. Pour en revenir à Bob, Mickey se risqua à le comparer à Mason, et la description qu'il fit ensuite du partenaire de Mado ne put légitimement que faire soupirer la jeune femme. Clairement, elle ne comprenait pas pourquoi il s'entêtait à penser que l'attitude de Bob, aussi insupportable ait-il été, méritait pareille sanction. « Mais tu n'es personne, Mickey, pour traiter les autres d'imbéciles. Qu'est-ce que tu crois ? Que le fait d'avoir fait des études supérieures, qu'elles soient au nombre de quatre ou bien au nombre de trente-six, te donne le droit de juger les autres, de les rabaisser ? Alors quoi, si quelqu'un a le malheur de blaguer, ou que ses sujets de conversation te paraissent futiles, tu estimes être en droit de le traiter d'imbécile, puis de mettre sa place en danger ? Non, ça ne marche pas comme ça. Et tu es probablement le seul ici à avoir eu le melon avant même d'avoir intégré l'aventure. Qu'est-ce que ça sera au moment où tu en sortiras, hein. » Parce que clairement, il prenait de grands airs et se permettait d'insulter tous les malheureux qui n'avaient, selon lui, ni assez d'intérêt, ni assez de conversation. Non mais franchement, il se croyait mieux que tout le monde, lui ? Qu'est-ce que ça pouvait bien foutre aux autres qu'il soit diplômé d'on ne sait quelle connerie d'université ? Est-ce qu'il en était plus malin pour autant ? Assurément pas. Dans la vie, il était pourtant beaucoup plus utile d'être malin que d'être prétendument brillant. Et pour le coup, elle se souvenait d'une conversation qu'elle avait eu avec Nadan, au sujet des pseudo-intellectuels du nid. Les deux jeunes gens n'avaient cité personne, mais il fut évident que Mickey avait été la source de leur discussion. Tous deux s'étaient alors entendu pour avancer que le savoir, finalement, rendait plus con qu'autre chose. Il semblerait que Mickey soit ici disposé à leur donner raison, hm. Une chose était en tout cas certaine, si Mado devait un jour user d'un quelconque pouvoir de nomination d'office, ce serait uniquement pour punir un acte qui nuisait véritablement au jeu, ou une passivité telle qu'elle ne verrait d'autre choix que de la sanctionner. Mais jamais, ô grand jamais, elle ne mettrait qui que ce soit en danger à cause d'une querelle d'ordre personnel. « Toi, tu mélanges vraiment tout. » Car ses soucis avec Bob ne regardaient qu'eux, et qu'en le nominant, les choses prenaient un aspect public, et très malvenu. Il n'aurait décidément pas du le nominer, que ce soit d'un point de vue logique, moral ou fair-play. Mais nul doute qu'aucun de ces mots ne lui parlaient, de base. Hm. Il disait maintenant avoir des questions, et la première fut celle à laquelle elle s'était naturellement attendue. Après un soupire, elle tâcha donc d'y répondre. « Je pars du principe que le dialogue reste le meilleur moyen de régler un problème. Et je suppose effectivement qu'une partie de moi espère toujours te faire entendre raison, te faire comprendre que ta décision est des plus injustes. Oh, je sais bien que ça revient à s'adresser à un mur, mais pour Bob, j'ai véritablement envie d'aller jusqu'au bout dans mon argumentaire. Que ça t'intéresse ou pas, en soi, je n'en ai rien à foutre. Si ça rentre par une oreille et que ça ressort par l'autre, c'est bien dommage. Et dans ces cas-là, je crois pouvoir dire, qu'en ce qui me concerne, ton étroitesse d'esprit ne cesse de m'étonner, homme. » Oui, le sexisme pouvait marcher dans les deux sens. Comme c'est étonnant.

Sept ans, donc. Oh, intéressant. Ou pas. Non, à vrai dire, ça n'avait ici pas la moindre importance. Que ce soit aux yeux de Mado ou à ceux de toute personne qui, logiquement, se foutrait pas mal du temps qu'avaient duré les études de Mickey ici présent, non, ça n'importait absolument pas. Pourquoi Mickey se sentait-il obligé de préciser ce détail ? Se croyait-il donc supérieur parce qu'il avait suivi des études dans une université probablement très bien cotée et hors de prix ? Pensait-il que cela faisait de lui quelqu'un de respectable, qui gagnait à être connu ? Son prétendu savoir n'intéressait finalement que lui. Et ça n'était pas ce qui lui donnait de l'intérêt. Il gagnait davantage à tenir de grandes conversations qu'à tenter d'y introduire maintes preuves de sa si brillante intelligence, c'était certain. Du coup, Mado le trouvait assez désespérant dans son genre. Elle, tout ce qu'elle voulait, c'est tenter de percevoir ses qualités, et tout ce qu'il s'employait justement à faire, c'est se montrer déplaisant, voire détestable. Oh vraiment, elle n'en avait rien à foutre qu'il ait étudié tant de temps, qu'il ait lu tel livre, qu'il ait rencontré tel auteur célèbre ... Si c'était pour avoir à faire à quelqu'un de médisant et visiblement persuadé de valoir mieux que les autres, franchement, ça n'en valait pas la peine. Elle était venue lui parler de Bob, pour tenter probablement de lui faire entendre raison, de lui faire reconnaitre toute l'injustice de sa décision, et voilà qu'elle était confrontée à quelqu'un de profondément imbus de lui-même, de nombriliste et simplement capable de rabaisser les autres pour s'élever à une certaine grandeur. Car c'était ça son truc, finalement : leur trouver mille défauts pour apparaitre quant à lui comme une sorte de dieu. Nul doute qu'il avait une infinie estime de lui-même, chose qui échappait quelques peu à sa camarade qui, elle, passait peut être pour une prétentieuse à certaines occasions, mais était bien incapable de s'aimer autant qu'il semblait s'aimer lui. Elle s'était souvent trouvé quelques points en commun avec Mickey, mais le fait est qu'ils étaient aussi aux antipodes l'un de l'autre à bien des niveaux. Peut être était-ce finalement préférable. Mado ne cautionnait en tout cas pas la façon de raisonner de son camarade, hm. Mais ça, il avait du le comprendre les douze premières fois où elle le lui avait fait savoir. « Admettons que Bob soit un idiot. C'est véridique dans certaines situations, j'en ai moi même fait la constatation. Est-ce tu penses que tous les idiots doivent vraiment être punis ? Je trouve ça un peu exagéré. Et je pense que l'intelligence est une notion très subjective, et que tu places la barre un peu trop haut la concernant. Bien sûr que pour toi nous sommes tous des idiots, vu que tu dois partir du principe que personne ne t'arrivera jamais à la cheville. Personne n'est jaloux ni envieux à ton égard, j'en suis certaine. Le truc, c'est qu'on vit tous très bien le fait d'être des imbéciles, vois-tu. Aucun de nous ne fait de complexe d'infériorité, comme tu sembles le penser. Toi par contre, tu fais de ton besoin de te sentir supérieur un complexe, justement. Et réfléchis, sans le moindre idiot en ce bas monde, tu n'aurais plus rien d'intelligent. » Elle n'avait au final aucun mal à entrer dans son jeu, à passer pour la crétine qu'il semblait voir en elle ainsi qu'en chacun de leurs camarades. Puisqu'il était borné, elle pouvait bien lui faciliter un peu la tâche, histoire de rendre les choses moins déplaisantes pour chacun d'eux. De toute manière, elle ne prenait aucune de ses piques personnellement, estimant ne pas être plus bête qu'une autre et n'avoir pas besoin d'avoir fait tant d'années d'études pour valoir quelque chose. Mais grand bien fasse à Mickey de se complaire dans son arrogance, évidemment. Il disait n'être pas désolé de leur balancer sa réussite à la figure, et ça la faisait sourire. Il était un peu pitoyable, en fait. Mais elle ne le lui ferait pas remarquer, parce qu'il était rêveur et idéaliste, et qu'elle respectait ça. Tout simplement. Mais voilà qu'il lui soumit par la suite une nouvelle question, après avoir cherché à savoir pourquoi elle s'entêtait à discuter avec lui, ce à quoi elle venait de répondre mais qui n'avait sans doute pas trouvé grâce à ses yeux. Cette nouvelle question était plus improbable encore que la précédente, et il est vrai que Mado ne put s'empêcher d'en sourire. Visiblement, elle n'était pas la seule à n'avoir pas tout compris, hm. « Je ne fais que défendre quelqu'un que tu as injustement nominé. Évidemment, le fait qu'il s'agisse de mon partenaire me rend plus concernée encore par cette injustice. Mais je n'ai jamais prétendu connaitre parfaitement Bob. Je ne l'apprécie d'ailleurs pas plus que ça. J'estime simplement qu'il n'avait pas à être nominé d'office pour si peu, et je sais que s'il n'en montre rien, il est affecté par ta décision. Je veux montrer que quelqu'un ici ne s'en fiche pas. Donc pour le coup, tu t'es fait quelques idées j'ai l'impression. » Parce que non, elle n'avait jamais prétendu connaitre fort bien son partenaire, bien qu'elle sache quelques détails sur sa vie. Et si leurs rapports s'étaient améliorés, il n'en était pas un ami pour autant. Mais Mickey devait se contenter de poser un regard bien naïf sur leur relation, et ça ne l'étonnait pas. « Je me doute que pour toi, le terme "partenaire" n'a pas le moindre symbolisme et que si quelqu'un nominait d'office Harlow, tu ne prendrais pas la peine de la défendre. Et bien sache que j'ai fini par partir du principe que Bob et moi devions restés unis, et nous soutenir. Nous n'en sommes pas particulièrement proches pour autant, simplement, il me semble normal de lui témoigner du soutien dans ce que j'estime être un abus. » Mais il pouvait toujours s'imaginer une réalité alternée, elle ne l'en empêcherait pas. A noter que les questions de Mickey était assez superficielles. Un comble pour quelqu'un de son niveau intellectuel, hm.