J'ai hâte que la soirée se termine. Je me sens mal à l'aise parmi toutes ces personnes. J'ai tendance à m'effacer lorsqu'un trop grand nombre de personnes se trouve autour de moi. Ils me mettent mal à l'aise, j'ai constamment l'impression que dix paires d'yeux sont en train de me juger et de m'exécuter. Je ne sais pas trop où me mettre, ni quoi faire. J'aurais tendance à vouloir me ruer vers mon lit et attendre que le groupe se disperse. Je suis d'autant plus mal à l'aise que je ne connais personne, je me sens défaillir quand je pense qu'il va falloir que j'apprenne à reconnaître chaque personne, retenir tous les prénoms. Je n'aime pas cette éventualité. Je m'y étais pourtant préparée, mais une fois devant le fait accompli je ne suis plus où donner de la tête. Je n'ai pas envie de me dégonfler, mais je me sentirais presque découragée. Alors je suis soulagée lorsque le prime se termine et que nous pouvons enfin regagner nos chambres. Ainsi je dois partager mon lit avec mon partenaire, Enoch, je n'avais pas songé à cette éventualité. Je me sens gênée, je n'ai jamais partagé mon lit avec qui que ce soit. Je ne sais pas si lui est aussi mal à l'aise que je le suis. J'imagine qu'il a déjà eu en avoir l'occasion plusieurs fois dans sa vie. Enfin je ne saurais trop en juger. Je me contente de faire des suppositions, qui sont peut-être erronées. Pour l'heure il est la seule personne à qui j'ai adressé la parole, la seule personne sur laquelle je peux mettre un nom sur un visage. Et quelque part je suis rassurée de ne pas débuter mon aventure complètement seule, même s'il n'est pas dit que je m'entende bien avec lui, je me contente de l'espérer. J'ai eu le temps d'enfiler mon pyjama lorsqu'il me demande si je veux dormir à droit ou à gauche. Je n'ai pas pris le temps d'y réfléchir, simplement parce que je m'en moque bien. J'ai toujours dormi au milieu de mon lit, seule. Sa prochaine réplique me fait sourire. « Non c'est bon, je t'autorise à dormir sur le lit, mais c'est bien parce que je suis gentille. » J'essaie simplement de le mettre en confiance mais je m'y prends mal, je suis maladroite. J'espère qu'il ne m'en tiendra pas rigueur. « Prends le côté que tu veux ça m'est égal. » Oui je ne suis pas difficile, n'importe quel côté me conviendra, je saurai m'y habituer. Je ne me glisse pas sous les couvertures, j'attends qu'il me donne sa réponse. Je préfère qu'il choisisse. « Sinon que peux-tu me dire sur toi ? » J'essaie d'engager la conversation, je ne sais pas si je m'y prends bien. Je ne sais pas tellement ce que je suis censée lui dire. J'aurais peut-être pu lui poser une question plus précise, mais j'ai besoin de m'habituer à sa voix. « Enfin tu n'es pas obligé de me répondre. Ou peut-être que tu veux dormir tout simplement. » Oui il n'a pas peut-être pas envie de me parler de lui, ou de me parler tout court. Je n'en sais rien, j'ai envie de le mettre en confiance, mais j'ai pleinement conscience de m'y prendre comme un manche.

Je ne suis pas réellement à l'aise avec le fait de devoir partager mon lit. Sûrement parce que c'est tout nouveau pour moi. J'avais toujours imaginé que le jour où cela arriverait, ce serait parce que j'aurais enfin trouvé quelqu'un qui voudrait de moi. Sauf que cela faisait bien longtemps que je m'étais faite à l'idée que mon lit resterait désespérément vide toute ma vie. Maintenant j'allais devoir partager mon lit avec un inconnu et ça me mettait mal à l'aise, mais je croyais ne pas être la seule à l'être. Pour autant je devais avouer que j'étais contente de l'avoir comme partenaire. Quelque part, ce n'est pas tellement lui qui me met mal à l'aise mais simplement la situation. Lui tend plutôt à me mettre en confiance. Il a cette présence rassurante. Et j'essaie de faire de même, de le mettre en confiance, mais je ne suis pas certaine d'y parvenir. En tout cas il est clair qu'il est hors de question qu'il dorme par terre, il peut dormir de n'importe quel côté, ce n'est pas un problème pour moi. Finalement il choisit le côté gauche, et alors qu'il me tourne le dos, je remarque quelques cicatrices dont je n'ose pas demander la provenance. Peut-être plus tard, quand on se connaîtra un peu mieux, je ne veux pas le mettre mal à l'aise. Je ne me formalise pas du tout fait qu'il dorme torse nu, il pourrait bien dormir nu qu'honnêtement cela n'aurait aucune importance pour moi. Je sais qu'il est tard, et qu'il a très probablement envie de dormir, mais je lui demande ce qu'il peut me dire sur lui. J'ai envie d'en apprendre un peu plus sur lui, de m'accoutumer à sa voix aussi. Il se présente brièvement, je ne sais pas si sa vie est aussi peu passionnante que la mienne ou s'il n'aime pas parler de lui. « C'est comment l'Ecosse ? » je lui demande simplement. J'ai toujours eu envie d'y aller, sans franchir le pas. Puis il me demande ce qu'il devrait savoir pour moi. Je vois qu'il continue à sourire, ça me pousse à lui parler, à lui sourire aussi. Il s'allonge, mon regard rencontre le sien. Il a vraiment de beaux yeux. Je soulève les couvertures, et m'allonge à mon tour. « Je suis garagiste et j'habite à Kilkenny en Irlande. Je ne sais pas quoi te dire d'autre, ma vie n'est pas très intéressante. » Non pas vraiment, j'en arrive même à envier la sienne. Le silence, la campagne, tout ça ça me semble bien mieux.

J'avais hâte de quitter le prime pour retrouver un peu de calme. Je n'ai jamais été très à l'aise parmi la foule. Je me suis toujours sentie de trop, mal à l'aise. Je suis contente de retrouver la chambre et une certaine accalmie. Tout le monde n'a pas encore rejoint la chambre, préférant peut-être faire la fête. Je n'en sais trop rien. Je préfère être ici et puis j'apprends un peu plus à connaître mon partenaire. Je suis mieux ici rien qu'avec lui, parce que je connais pas les autres, et parce qu'il me met à confiance. Je ne saurais dire pourquoi, parce qu'il a une présence rassurante. Parce qu'il ne parle pas beaucoup comme moi, et qu'il ne me force pas à le faire. Je n'aime pas tellement parler de moi, et puis je me sens déboussolée ce soir. Là, allongée sur le matelas, mon regard se perd dans le sien et j'essaie m'habituer au bleu de ses yeux. C'est assez important, surtout tant que la lumière est allumée. Le matelas est confortable aussi, beaucoup plus que le mien. Je me dis que je devrais peut-être songer à changer le mien, mais je trouve que c'est une dépense d'argent inutile. Mais j'ai pas le temps d'y penser, et puis au final je m'en moque bien. Il me parle de l'Ecosse, comme je le lui ai demandé. Et sa description me fait sourire, il a l'air plus détendu. Il aime son pays, ça se voit. « J'aimerais bien y aller un jour. » C'est tout ce que je suis capable de lui dire. J'espère qu'il ne le prendra pas mal, je ne pense pas. J'ai été très intéressée par ce qu'il m'a dit, mais je ne suis pas capable de le montrer. Comme j'ai beaucoup de mal à parler de moi, à me présenter convenablement. C'est court, peut-être un peu trop. Il a raison on n'est pas très bavard tous les deux. Il sourit toujours, ça a tendance à me rassurer. « Qui sait, peut-être que c'est pour ça qu'ils nous ont mis ensemble. » Oh j'en doute, je ne cherche pas vraiment à comprendre la raison pour laquelle nous sommes partenaires. Ça n'a pas vraiment d'importance. « Pour l'argent principalement. Je suis plutôt avare dans mon genre, mais je ne me fais pas d'idée je sais que je ne resterai pas assez longtemps pour en gagner. Et puis disons que j'aimerais briser la monotonie de ma vie, voir quelque chose d'autre. M'amuser un peu. Et toi ? » J'ai assez parlé pour le coup, ce qui me fait sourire. Je ne parle pas beaucoup de moi pourtant, mais ce n'est pas vraiment personnel pour le coup. Je continue à le scruter, et avant qu'il ne me réponde j'ai une question à lui poser. « Tu gardes toujours ta barbe ? » Je ne sais pas s'il comprendra ma question, peut-être que non. Mais j'ai besoin de connaître la réponse, c'est plutôt important pour moi.

Je me demande si tous les primes seront aussi bruyants, si je me sentirai perdue à chaque fois, tout du moins le temps que je resterai ici. Je n'ai pas apprécié me savoir entourée d'autant d'inconnus le temps d'une soirée. Je n'ai pas aimé tout le bruit présent. Sans doute parce que je ne me sens pas à l'aise parmi la foule. Je me trouve bien mieux ici avec comme simple présence celle de mon partenaire. Sa présence est bien plus apaisante que celles des autres candidats restés encore sur la fausse plage. Je me détends peu à peu, j'ose lui parler un peu de moi. Rien de bien intéressant, je ne parle pas énormément, mais j'estime que c'est déjà un bon début. Lui aussi a l'air plus détendu, il parle plus, et affiche ce sourire qui tend à me rassurer. Quant à ma présence dans le jeu, je lui explique. Je parle un peu plus cette fois, peut-être parce que je me sens moins intimidée. Au fond, je crois que tout ce que je veux c'est voir quelque chose de différent que ce que je connais. Ce à quoi il ajoute que l'on se complète. Je ris légèrement. Je hoche la tête lorsqu'il me répond, je comprends parfaitement ce qu'il veut dire. « Peut-être que ce qu'il te manque c'est un matelas comme celui-là. Je me demande comment j'ai fait pour m'en passer pendant des années. » Je souris, je ne suis pas particulièrement drôle je le sais bien. J'espère qu'il ne m'en voudra pas, j'essaie un trait d'humour, mais je crois que c'est parfaitement raté. Je me sens presque rougir, mais j'essaie d'oublier ce que je viens de dire. J'ai besoin de savoir s'il garde sa barbe tout le temps, ou s'il a l'intention de la raser dans les jours à venir. Je ne sais pas s'il va comprendre, sinon tant pis, il pensera juste que je suis étrange. Mais je crois qu'il a compris. Je ris à sa remarque, je me suis beaucoup plus détendue qu'au départ. « Oh si je tro,uve qu'elle te va très bien. » je continue toujours de sourire, même si je suis persuadée qu'il n'aura pas compris pourquoi j'ai dit ça. C'est supposé être une blague. S'il ne comprend pas, je lui expliquerai un jour quand j'aurai la possibilité de le faire. Il se fait tard, mes yeux commencent à fatiguer, je n'ai pas l'habitude de me coucher si tard. « Je continuerais bien à parler avec toi, mais ce n'est plus de mon âge de se coucher aussi tard. » J'espère qu'il ne le prendra pas mal, et puis je commence à me faire vieille aussi. Je crains simplement de ne plus tenir trop longtemps les yeux ouverts.