"J'ai une confession à te faire ... Je fais de la musculation, en vrai". Ça, c'était le genre de phrases que je sortais souvent aux minettes, et, à en juger par mes expériences passées, elle fonctionnait du tonnerre. Néanmoins, il ne s'agissait pas là uniquement d'une supercherie pour séduire, non : une part de vérité se cachait au sein de cette phrase. Il était donc vrai qu'un entrainement physique quotidien, ou, à la rigueur, hebdomadaire, m'était nécessaire pour garder la ligne ... Rester en bonne santé et tout ça, là. La muscu, la course à pied, les abdos ... Autant dire que je préférais pratiquer le genre d'activités qui rapportait, une fois l'ordalie surmontée. Physiquement, notamment ; comme ça, on se disait que nos efforts étaient récompensés, et qu'ils n'étaient pas si difficiles que cela. Et on est prêt à recommencer, car, honnêtement, quel homme digne de ce nom ne rêverait pas d'avoir des muscles et ne sauterait pas sur l'occasion si celle-ci se présentait à lui ? Pas moi, en tous les cas. Hop, on soulève les haltères, et on ne boit qu'après l'entrainement, pas avant, ni pendant, pour ne pas déstabiliser son organisme. Tel un chameau, je buvais rarement, mais, lorsque cela m'arrivait, je refaisais le plein. Aujourd'hui, cependant ... J'avais envie de m'excercer sur un panier ; le panier de basket, par exemple. N'y avait-il pas un terrain de basket, sur le plateau ? À moins qu'il ne s'agisse d'un terrain de foot ... En tous les cas, il me fallait taper dans un balon. Je passai donc devant la salle de fitness sans y rentrer, me dirigeant vers le terrain de basket. L'envie de m'entraîner avec quelqu'un d'autre était forte, néanmoins, je doutais qu'une autre personne ait eu le courage de se lever aussi tôt dans le but de s'exercer. Et pourtant ... Une tête exotique surmontée de cheveux bouclées apparut devant mes yeux.

- Eh beh. fis-je amusé. Me permets-tu de te rejoindre ?

Je ne faisais pas souvent du basketball, malheureusement ; j'avais plus souvent fait du soccer et de la natation, dans ma jeunesse. Les deux sports dans lesquels j'excellais. Néanmoins, j'avais des bases solides en basketball qui, à défaut de faire de moi un adversaire de taille face à un professionnel, me permettait toutefois d'effectuer des matchs amicaux en offrant un minimum d'opposition intéressante. Le garçon sursaute ; je crois que j'ai dû l'effrayer. Oops. Ce n'était pas dans mes intentions, réellement. Je ne vis pas pour effrayer les autres, je vous le promets. Lui, je ne connais pas son nom ... Enfin, je l'ai oublié, plutôt, étant donné qu'on nous avait annoncé les noms dès le premier prime. Je ne savais même plus avec qui il était, c'est pour dire ... De là où je suis, il m'a l'air grand ... Plus grand que la norme. Mais pas super musclé, non ; pas encore, du moins. Il était jeune, je pense ... Plus jeune que moi. Son corps ne s'était pas encore développé en corps d'homme. Moi aussi, à dix-huit ans, j'étais comme lui. Des années ... On dirait qu'une vie s'est écoulée entre ma jeunesse et maintenant. Parce que je ne me considère plus jeune dorénavant, comme vous deviez l'avoir remarqué. Il me répond à une question que j'aurais lui poser, éventuellement, mais que je n'étais pas sur le point de lui demander non plus. Bon, au moins, ça c'était fait. Même si j''etais surpris que sa touffe soit "moins lourde qu'elle en ait l'air" ; lorsqu'on voyait des gens aussi frisés que lui courrir, on avait l'impression qu'il leur fallait des efforts additionnels pour garder tous leurs cheveux sur leur tête ... En tous les cas, je n'avais pas l'habitude, non, vraiment pas. En Grèce, les gens avaient les cheveux ondulés, parfois ... Ce n'était pas pareil. Des cheveux noir olive qui complimentaient le teint porceleine des plus délicates filles du pays. Mais je n'étais pas en Grèce ; cela faisait même six ans que je n'y avais pas mis les pieds. Promis, j'y retournerais après l'émission, si j'en ai l'occasion. Athènes me manquait tellement ... C'est alors que l'autre mec accepte ma demande. Il veut bien qu'on "joue" ensemble. On disait bien "jouer" au basket, ou il y avait carrément un verbe ? "Basketballer", ça sonnait bizarre, quand même ... Je réfléchis trop, visiblement, puisqu'il me lance le ballon et que je manque de le rater ; je le rattrape, cependant, de justesse, un sourire enjoué aux lèvres.

- Tu ne m'auras pas aussi facilement. continuais-je, avant de dribbler un peu et de lancer le ballon dans le panier, sans vraiment espérer qu'il y rentre, mais heureux de voir que c'est le résultat survenu. Je rattrape alors le ballon lorsqu'il me propose de faire des tirs au panier et, hôchant de la tête, je recule un peu, avant de viser et de lancer la balle. Elle touche le panneau de bois, elle tourne sur l'anneau de métal, puis, elle retombe dehors, comme si de rien n'était. J'avais visiblement mal calculé mon coup ; sinon, elle serait rentrée ... Mais ce n'était pas grave en soit. Je ne m'étais jamais proclammé professionel. Je lui lance alors la balle avant de lui parler.

- Au fait, tu t'appelles comment ? parce que ça ne serait pas non plus une mauvaise idée, d'apprendre à se connaître.

Au lycée, y'avait des types qui passaient leurs journées à jouer en équipe, au basketball - une équipe composée d'une seule personne. Que je pouvais détester ces types. Ils passaient leurs temps à croire, avec arrogance, qu'ils étaient les meilleurs joueurs qui aient jamais posé pieds sur cette Terre et qu'aucun de leur coéquipiers, à l'exception d'un ou de deux d'entre eux, ne pouvait faire le poids face à l'équipe adverse. En partie dû à ma grande taille, néanmoins, j'avais réussi à m'assurer plusieurs passes par match, ce qui expliquait le pourquoi du comment de la précision avec laquelle je visais aujourd'hui. L'autre me dit alors son nom. Sigvard. Il s'appelle Sigvard.

- C'est intéressant, comme nom ; ça vient d'où ? lui demandais-je alors avant de lui annoncer le mien : Cosmas, un léger sourire aux lèvres. Il lance le ballon, et manque de le faire marquer. C'est dommage, c'était un beau tir, pourtant ; c'est alors qu'il se met à rire, proclamant qu'il était meilleur à ce sport dans ses souvenirs. J'haussai alors des épaules, sâchant que même les professionnels rataient leurs tirs, de temps à autre. L'aptitude n'était pas tout ; il y avait toujours une part de destin, dans tout ça.

- Je pense que tu te débrouilles assez bien, pourtant. lui dis-je alors sur un ton qui se voulait rassurant, Il me repasse le ballon et s'asseoit ; j'en conclus qu'il veut que je continue seul, un moment. Je tire, une fois ; le ballon rentre. Une deuxième, il rentre aussi. Une troisième fois, il ne rentre pas. Je soupire en souriant alors, me résignant à le rejoindre, là, par terre. Il me demande alors d'où je viens.

- De Grèce et d'Irlande. réponse plus facile que celle que j'avais tenté de sortir aux autres candidats, assurément. Toi ?

Un nom suédois ... Ça me fait sourire, malgré moi. Probablement parce que de tous les pays avec lesquels ils pourrait être associé, la Suède était probablement au pied de la liste. Enfouïe, loin, tout au fond, bien au fond ... Il refuse néanmoins mon compliment avant de m'en renvoyer un autre, deux fois plus flatteur et, malheureusement, faussé. Non parce que ce n'était pas que je n'aurais pas aimé être Michael Jordan dans une autre vie. C'est juste que je suis loin d'avoir son niveau, quoi. Je esouris donc faiblement à mon "ami" de terrain, ne sâchant que trop peu quoi répondre à cette sympathique intervention de sa part. Je m'asseois à ses côtés après avoir râté mon panier. Si j'ai de l'humilité quant à mes aptitudes, je préfère tout de même faire bonne figure face aux inconnus, histoire de dégager une aura de confiance en moi forte ... Certains me voyaient ainsi comme un homme sain, tandis que d'autres en profitaient pour me qualifier d'imbu de moi même. Je trouvais les deux appelations exagérées. J'aimais simplement faire bonne figure. Ce n'était pas un crime, à ce que je sâche.

- Argentin et cubain ? répétais-je alors à moi même, silencieusement, en hôchant de la tête. Il venait d'endroits intéressants, ce garçon, tiens. Sigvard me demande alors qui j'ai eu comme partenaire, et je lui souris, parce que je dois avouer que j'aurais pu avoir pire, comme binôme assigné. Mais non. Elle était cool et sympa, cette fille. Je ne dis qu'un seul mot, par contre. Je n'aimais pas faire des phrases inutiles, moi.

- Ismène. Tu la connais ? Je me demandais alors qui c'était la sienne, de partenaire. Je lui demanderais bien une fois qu'il m'aura répondu, tiens.