De toute évidence, aucune surprise à ce que je sois de tâche de cuisine cette semaine. En fait, je faisais un peu de tout pour tout le monde, depuis le début de la semaine. Ma position de ‘larbin’ du Nid, assurément, y était pour beaucoup. Mais ça ne m’avait pas tant déranger que ça. Au contraire, la semaine m’avait paru passer bien plus rapidement ainsi plutôt que lorsque je me tournais les pousses en cherchant quelque chose à faire de ma peau. Ces moments dans la cuisine restait néanmoins, pour moi, une pause bien mérité, presque un loisir en fait. Aucunement une contrainte. Je m’amusais comme un petit fou en cuisine, et Dieu seul savait le nombre de trucs que j’avais pu improviser ces derniers jours. Heureusement, tout avait semblé plaire à mes camarades, ce qui était une sacré bonne chose. Peut-être que certaines recettes risquaient de se retrouver sur le menu de mon bistrot en sortant d’ici : un peu de nouveauté ne ferait pas de tort au commerce, et puis, mon passage dans l’émission risquant d’attirer une toute nouvelle clientèle, j’avais intérêt à assurer. J’en étais à préparer le repas du midi, complètement obnubilé par ma tâche, lorsque je sentis une présence à mes côtés. La voix qui se fit entendre ensuite confirma que je n’étais plus seul. « Ça sent bon ! Tu fais quoi ? » Sans quitter du regard mes mains qui s’affairaient à couper les derniers légumes – ça aurait pu être dangereux, hein – je lui répondis. « Hmm, quelques petites choses… y’a une partie du dessert au four, du croustillant aux pistaches pour aller avec le sorbet aux fraises qui est déjà au congélateur, sinon je prépare un sauté de légumes pour accompagner des brochettes de bœufs à la coréenne… » Pour moi, cela ne représentait rien de bien compliqué, un repas ordinaire, mais qui devrait satisfaire l’appétit de mes comparses. Il ne servait à rien de se mettre à la grande cuisine qui ne plairait qu’aux fines bouches. « Désolé, je ne me suis pas présenté. Je m’appelle Enoch. » Bien sûr, mes mains sont occupés, et il en a conscience puisqu’il ne me tend pas la sienne. Je lâche un instant mon couteau, m’essuie sur mon tablier, et lui tend alors la mienne, question de se présenter en bonne et due forme. « Oliver, ravi de faire – enfin – ta connaissance. » Il est vrai que nous étions quand même dans le nid depuis quelques semaines, déjà. Hélas, impossible de connaître tout le monde, sauf de vue, bien sûr. Je me remis au boulot, quelques instants après, non sans lui proposer de s’assoir d’un geste de la main. « Tu es un vrai cordon bleu, dis-moi. » fit-il alors que je me réinstallais derrière les fourneaux. J’acquiesçais, une petite pointe de fierté brillant dans mes yeux. J’avais travaillé fort pour être rendu au niveau que j’avais présentement. « Oui, j’en ai même fait mon métier, figure-toi. » Choix que je ne regrettais pas. Que je ne regretterai jamais. « Il y a une bouteille de rouge dans le frigo, tu en veux un verre? » Cuisiner en bonne compagnie et avec un peu d’alcool, c’était toujours un duo de choc.