KING OF LIMBS
STARRING ENOCH AND OLIVER

Je me demande comment ça passe là-bas en Ecosse. Je sais que mon chien est entre de bonnes mains. Il manque, ce vieux bougre. J'espère qu'il ne fait pas trop de bêtise. Avec Tante Abigail, cela ne risque pas. Cela fait déjà un moins qu'on est ici. Le temps passe trop vite. On ne s'en rends pas tellement compte. On est complètement coupé du monde. On ne sait pas ce qui se passe en dehors de ses murs. Le mal du pays se fait sentir de temps en temps. C'est par vague souvent. Parfois, un rien me rappelle mon chez-moi alors que là-bas, je n'ai pas de proches qui m'attendent. Il ne me reste pas grand chose sur mon île. J'y ai vécu depuis longtemps, mais je n'ai pas réussi à renouer avec les autres membres de ma famille. A part tante Abigail, sinon les autres m'ignorent royalement. Tant mieux. C'est réciproque en tout cas. Je marche, je marche et je marche, perdu dans mes pensées. J'arrive non loin du saloon. J'y fais un tour. Des vieux souvenirs remontent à la surface. Je me balade dans la salle en admirant le décor. Je contourne le bar pour arriver derrière le comptoir. Quelqu'un fait son entrée. Je reconnais les traits de Oliver. Je lui fais signe d'approcher avec le sourire. - Je te sers une bière ? Je n'ai pas eu l’occasion de m'entretenir avec le jeune homme. On n'a fait que de se croiser au final, sans prendre réellement de converser. Ce soir, c'est l'occasion.

Je m’ennuie un peu, et le sommeil, ce si bon compagnon d’ordinaire, me fuit comme la peste. Résultat, je n’ai rien de mieux à faire que de me balader ici et là dans le nid, cherchant quelque chose à faire de ma peau, ou encore mieux, quelqu’un pour me tenir compagnie. Mon pénible m’amène à me rendre au saloon, où, sur place, je rencontre Enoch qui s’est installé derrière le bar. Il me sourit, m’invitant à le rejoindre, et je lui rends la pareille. « Je te sers une bière ? » qu’il me propose tout bonnement, et j’acquiesce. « Oui, merci, ce n’est pas de refus. » Après tout, n’est-ce pas ce que j’ai recherché, quelques instants auparavant : de la compagnie et de quoi m’occuper. Prendre un verre avec Enoch me semble être une bonne façon de meubler mon temps. Je m’installe donc sur l’un des tabourets et attends sagement que l’homme me serve. « Si ce n’est pas indiscret de demander… ça semble sérieux, entre toi et Avalon, non? » lâchais-je en guise de réflexion envers mon camarade. J’avais bien sûr remarqué les rapprochements entre ces deux partenaires, comme le reste du Nid d’ailleurs. Mon côté curieux, cependant, n’était pas complètement rassasié et il cherchait à en savoir plus, toutefois pas au détriment de mes camarades. Je n’allais pas m’acharner si ne souhaitait pas en parler.

J'aime l'atmosphère qui se dégage de ce saloon. Cela me rappelle les après-midi passés au pub avec les copains. Ils me manquent un peu, ces bougres. J'espère qu'ils surveillent bien mon atelier en mon absence. J'ai décidé de me poser dans ce saloon, en buvant mon bière pour passer le temps. Il est à peine dix heures du soir qu'un candidat fait son entrée dans la pièce. Je lui souris et lui propose de la bière. Il accepte. Je m'empresse de sortir deux chopes. On dirait des chopes authentiques du Far West. Une bonne bière pression pour Oliver. - Tiens, une bière bien fraîche. Je prends ma chope dans la main et vient trinquer en sa santé. Je lui souris chaleureusement. Là, il me parle de Avalon et moi. De notre relation, pour être plus exact. Il est au courant de ce qui se passe entre elle et moi. Tout le monde le sait. Ils ont vu les images, ils ne sont pas aveugles. Un peu gêné, je réponds : - Je ne sais pas ... Je pense que oui. Une réponse un tantinet vague, je sais. Je ne préfère pas définir notre relation tout de suite. - On apprend à se découvrir pour le moment. Je ne veux rien précipiter. J'ai l'impression que c'est aller très vite. Je ne l'ai pas vu venir. Je ne l'ai réalisé que récemment. - Et toi ? Il n'y a pas une fille qui te plaît ici ? Il est joli garçon, cuisinier en plus. Il a tout pour lui. La jeunesse, le charme, le talent.

Je n’allais tout de même pas refuser une bière alors que c’était proposé aussi gentiment. Et puis, j’avais envie de me poser là et de passer un petit moment en compagnie d’Enoch. C’était bien mieux que de continuer à errer sur le territoire qu’occupait le Nid sans direction particulière. « Tiens, une bière bien fraîche. » Je le remercie d’un signe de tête et trinque avec lui avant de prendre une gorgée du breuvage rafraichissant.  J’aborde un sujet, peut-être, délicat en décidant de parler d’Avalon et de lui-même, mais ne connaissant pas vraiment le protagoniste qui me fait face, je n’ai aucun autre sujet de conversation qui me vient en tête. Je me fis souvent à mon instinct, de toute façon, pour ce genre de chose. Il se fait discret dans sa réponse. « Je ne sais pas… Je pense que oui. » Il faut dire que c’est un peu précipité de qualifier la chose de sérieux après si peu de temps, mais ici, le temps à une toute autre signification. Il passe à une vitesse folle, et pourtant. « On apprend à se découvrir pour le moment. Je ne veux rien précipiter. » Je ne peux m’empêcher d’acquiescer à sa dernière remarque. « Tu fais bien, ce serait idiot de tout gâcher en voulant aller trop vite. » Surtout qu’ici, en un rien de temps, tout pouvait changer. On était jamais à l’abri. « Et toi ? Il n’y a pas une fille qui te plaît ici ? » Cette question me surprend un tantinet. Il faut dire que je suis assez discret sur ce genre de chose, parlant très peu de mes histoires de cœur, même à mes proches amis. « Elles me plaisent toute d’une certaine façon, elles ont toutes quelque chose que j’adore… mais non, il n’y en a pas une qui me plait, comme tu l’entends. » J’ignore même si l’inverse est probable. Je n’ai pas cette impression, et ce n’est pas ce que je recherche non plus. Je m’entends bien avec la majorité des demoiselles dans cette aventure, et je suis gentil et attentionné avec elle, parce qu’on m’a élevé de la sorte. Grandir avec une mère monoparentale, ça nous forge un certain caractère, et certaines habitudes de vie. J’ai grand respect envers les femmes rien que pour ça. À cause de ma mère adorée et adorable.

La bière chez moi, on ne l'a sert ni trop fraîche, ni trop tiède. Pile poil à la bonne température. Je nous en sers dans des chopes que je pose devant Oliver qui je trinque avant de boire une première gorgée pour me désaltérer. Pas mauvaise, cette bière. Je savoure breuvage pendant notre discussion qui commence par un sujet auquel je ne m'attendais pas. La relation entre Avalon et moi. Je suis sérieux dans mes intentions à son égard. De là, à qualifier notre relation, c'est encore un peu tôt. Je ne veux pas trop entrer dans les détails. J'estime que cela regarde que ma partenaire et moi. Je comprends la curiosité de mon camarade ici présent. Je ne voudrais pas tout précipiter avec elle. Oliver approuve et dit que j'ai raison de prendre mon temps. Je m'intéresse maintenant à lui. Et lui, il n'y a pas une fille qui lui plait en particulier ? Elles lui plaisent toutes. Elles ont toutes quelque chose de particulier. Je hoche la tête. Je vois ce qu'il veut dire. Elles sont toutes plus jolies les unes que les autres. De quoi en perdre la tête parfois. Je n'ai jamais côtoyé autant de femmes de ma vie. Au départ, ce n'était pas aisé. Maintenant, je m'y suis fait. - Et chez toi, il n'y a pas quelqu'un auquel tu tiens ? Par cette question, cela ne concerne pas que les femmes ou les anciennes conquêtes, mais aussi les proches. Je suis peut-être un peu trop indiscret. C'est pour alimenter la discussion. Je peux arrêter, si cela le gêne d'en parler. Il peut me le dire franchement.

Je fais un peu ma fouine en questionnant Enoch sur sa relation avec Avalon, mais je ne peux pas m’en empêcher. Ce genre de relations, qui se développent à la vitesse grand V dans une émission de télé-réalité, ça m’a toujours intrigué. Je ne comprends pas comment on peut ainsi succomber aux charmes d’une parfaite inconnue et prétendre en être amoureux après seulement quelques semaines, alors que l’on connait si peu de cette personne, et que les chances de se revoir, en sortant de cet aventure-là, sont minces. Sauf si le sort est favorable. Je ne critique pas la chose, mais je constate, tout simplement. Et je réalise que tout ça, c’est loin d’être pour moi. Bien heureux que Cupidon ne m’est pas tiré l’une de ces flèches, sur ce coup. Mon camarade me questionne sur les demoiselles de l’aventure, me demandant si l’une d’elle m’a tapé dans l’œil. Malheureusement, impossible de lui fournir une réponse puisqu’aucune, à mes yeux, ne se démarquent. Ce n’est pas tant que je ne les apprécie pas, mais je ne suis clairement pas venu pour jouer à ce petit jeu-là. « Et chez toi, il n’y a pas quelqu’un auquel tu tiens? » qu’il me demande, et je laisse entrevoir un petit sourire au coin de mes lèvres. « La seule femme de ma vie qui importe, c’est ma mère. » laissa-je entendre. « Elle m’a élevée seule, en l’absence de mon père… et nous sommes très proches, depuis toujours. C’est ma meilleure amie et ma confidente. » J’entretiens vraiment une belle relation avec ma mère, je n’ai vraiment rien à envier aux autres à ce sujet. Je me considère même chanceux d’être si près d’elle. Ça compense le vide laissé par mon géniteur – je ne sais pas pourquoi je me sens encore obligé de l’appeler mon père, alors qu’il a si peu joué ce rôle dans ma vie. « Puis, il y a Yann, mon meilleur ami d’enfance, et mon partenaire d’affaire. C’est un peu comme mon frère, à la vie à mort, quoi. » Ils sont ma seule et unique famille, et les personnes auxquelles je tiens le plus au monde. « Et toi, il y a quelqu’un qui te manque, là, dehors? » que je lui demande à son tour, avant de prendre une gorgée de mon verre.

Je comprends qu'on puisse concevoir qu'une relation au sein de ce genre d'émission ne sera pas durable à la sortie. Cela semble précipité. Tout va vite ici. Nous vivons reclus, les uns sur les autres. Les affinités se créent, s'intensifient de semaine en semaine. Nos émotions sont exacerbées. Des attirances voient le jour sans qu'on puisse les contrôler. Mon idylle avec Avalon est naissant. Nous allons à notre rythme. Je ne veux coller aucune étiquette pour l'instant. J'attends d'être sûre, mais je vois notre rapprochement comme une évidence. On n'est proche et ce, depuis le début de l'aventure. Je parle avec Oliver de nos proches. Il parle de sa mère avec qui il est très proche. Je lui envie sa relation avec sa mère. Je commente : - Tu as de la chance d'avoir encore ta mère à tes côtés. Moi, la mienne je l'ai perdue il y a longtemps. Elle manque chaque jour. Elle est en paix, là où elle est. Une lueur de nostalgie brille dans mes yeux tandis que mon interlocuteur mentionne son meilleur ami et associé. Il est entouré de gens de confiance. C'est bien. Il me retourne la question. Je réponds, un petit sourire aux lèvres. - Mon chien Mordechai. Mon fidèle compagnon depuis cinq ans. Il me suit partout où je vais. Un chien bien dressé et affectueux. Il est très autonome. Sa présence me rassure. - Ma tante Abigail et ma nièce Saoirse. Elles n'habitent pas très loin de chez moi. Elles sont les seuls proches qui me restent. La musique de Cupidon retentit. Je grimace. Il sait choisir son moment, lui. C'est l'heure du baiser.  - Désolé d'avance. J'approche mon visage du visage et je dépose mes lèvres sur les siennes. Je ne fais que de les effleurer. Je me retire tout de suite. Je lui souris, gêné puis ris légèrement. Ce n'est qu'un baiser. Il n'y a pas mort d'homme.