C'est peut-être ma dernière fois ici. La fin approche et j'en profite pour parcourir une dernière fois les lieux pour les imprégner dans ma mémoire. J'en garderai un bon souvenir de cette aventure, mais maintenant il est de temps de rentrer. Je suis pressé de retourner à l'extérieur et de reprendre ma vie là où je l'ai laissée. Plus déterminé que jamais à savourer chaque instant de bonheur sur Terre. Je déambule ça et là, les mains dans les poches. Il fait nuit, mais il n'est pas si tard que cela. Vingt-deux heures seulement. J'arrive près de la tour de verre que je considère un peu comme ma forteresse de solitude. Je monte les marches une à une, à mon rythme, en prenant mon temps surtout. Je suis tout haut. Je marche vers les télescopes. C'est ici que je venais pour méditer, pour réfléchir. Ce lieu m'a toujours apaisé. J'aperçois Jaileen dans son coin, perdue dans ses pensées. Je m'approche d'elle et viens me mettre à côté d'elle. Je l'observe longuement. Je lui demande d'un air inquiet. - Ça va toi ? Je lui caresse les cheveux avec tendresse, puis lui souris doucement. Elle n'a pas l'air dans son assiette depuis quelque chose. Je vois que quelque chose la chagrine. J'ignore ce qui s'est passé la semaine dernière ou cette semaine. Elle a l'air perdue. - On dirait que quelque chose te tracasse ? Je n'arrive pas mettre le doigt dessus, surtout qu'il manque quelques données à l'équation. J'ai raté pas mal de choses, apparemment. Serait-ce à propos de ... Cosmas ?

Jaileen n’aimait pas vraiment la hauteur. Elle avait le vertige facilement. C’était peut-être pour ça qu’elle n’allait que très rarement au sommet de la tour de verre. Pour ne pas faire une crise d’angoisse là-bas. Si c’était le cas, personne ne pourrait venir à son secours. C’était bien trop haut. Bien trop loin. Pourtant aujourd’hui la demoiselle avait envie de braver les interdits et attention les yeux, en pleine nuit. Elle montait les marches à une vitesse folle. Arrivant tout en haut, elle inspirait puis expirait fortement comme pour s’oxygéner le cerveau, les poumons. Le vent venait lui caresser le visage. Pour le moment tout allait bien. Tout allait bien jusqu’à ce qu’elle se décide à regarder par-dessus la rambarde. Elle n’aurait pas dû. Sa tête se mettait à tourner. Elle avait soudainement envie de vomir. Mais pourquoi était-elle aussi curieuse ? Sans un mot, sans un cri voilà qu’elle venait s’asseoir dans un coin, sur le sol. Elle ne savait pas combien de temps elle restait là. Une heure. Peut-être même deux. Des bruits de pas se faisaient entendre. Elle levait brièvement la tête pour apercevoir un silhouette masculine. Une silhouette qui ne tardait pas à s’approcher d’elle, à s’installer à ses côtés. Enoch. Elle savait que c’était lui, mais elle ne disait rien. C’était lui le premier à prendre la parole. - Ça va toi ? La réponse ne tardait pas. Jaileen hochait la tête de haut en bas pour affirmer qu’elle allait bien. Elle mentait. Cela se voyait à des kilomètres à la ronde. « Et toi ? » soufflait-elle par politesse. Il venait lui caresser les cheveux avec une certaine tendresse tout en lui souriant. Il devait bien voir que quelque chose n’allait pas ce soir. - On dirait que quelque chose te tracasse ? Il devinait tout, à chaque fois. Jaileen haussait les épaules. « Je crois que c’est la fin de l’aventure qui me rends comme ça. » Ou pas. Elle mentait, enfin un petit peu seulement, encore une fois.

Je suis venu ici pour contempler la vue. Je n'aurai jamais pensé trouver un aussi paysage que celui que j'ai sous les yeux. Je venais souvent dans cette tour pour regarder le soleil se coucher. Un magnifique spectacle à regarder. J'arrive sur le toit. Je vois Jaileen, assise parterre dans son coin. Je ne l'ai pas vue de la semaine. Rien qu'en voyant son visage, je sais qu'elle ne se sent pas bien. Je m'approche d'elle en silence. Je lui demande si ça va. Elle se contente de hocher la tête. Son visage me dit le contraire. Elle a l'air triste. Je n'aime pas la voir comme ça. Je lui réponds d'une voix douce :  - Bien, bien. Je mets mes mains dans les poches. Je soupire quand elle me confie que c'est la fin de l'aventure qui la rends comme ça. Elle ment, je le sens. Je viens m'asseoir à côté d'elle, j'entoure ses épaules de mon bras et je la rapproche de moi. Je la serre contre moi. - Tu veux en parler ? , lui murmurai-je. Je sais que ce n'est pas facile pour elle en ce moment. Elle se sent sans doute exclue, mais en vérité elle n'est pas si seule que ça. Je veux lui apporter mon soutien. - Je t'écoute. De toute façon, je ne compte pas partir d'ici tant qu'elle ne m'aurait pas parlé.

Jaileen n’avait eu l’occasion de venir que très rarement au sommet de cette tour de verre. Elle ne l’aimait pas trop. Premièrement parce qu’elle avait le vertige. Deuxièmement parce qu’elle lui rappelait des personnes qu’elle avait eu l’occasion de rencontrer dans le jeu. Lena. Valeri. La blondinette avait partagé plusieurs moments ici, en la compagnie de ces deux personnes qu’elle aimait beaucoup et qui, aujourd’hui, ne voulait très certainement plus entendre parler d’elle. Pourtant, ici, c’était peut-être le seul endroit où elle se sentait tranquille. Il n’y avait personne pour l’enquiquiner. Enfin c’était ce qu’elle pensait. Enoch venait à sa rencontre et il voyait tout de suite que quelque chose n’allait pas. Il la questionnait, mais elle ne disait rien. Elle préférait lui faire croire que tout allait pour le mieux. Elle n’avait pas envie de l’embêter avec ses soucis. - Bien, bien. Surtout que pour lui tout allait pour le mieux. Elle lui adressait un sourire alors que lui venait prendre place à ses côtés, passant un bras autour de ses épaules pour la rapprocher de lui, pour la serrer contre lui. - Tu veux en parler ? Jaileen secouait la tête de gauche à droite. Non elle ne voulait pas en parler. Elle ne voulait pas le déranger. - Je t'écoute. Elle restait muette avant de finalement pousser un soupir et de se blottir dans ses bras. « J’ai l’impression que plus personne ne m’aime. » Oui, oui à ce point.