Voilà, je viens de cloper sur la terrasse. J’avais besoin de m’aérer. Trop de monde. Trop de candidats. Trop de bruits. Et puis, j’ai envie de m’amuser un peu maintenant. Je teste toutes les portes pour en trouver une qui me convient. Le salon de détente ira bien je pense. Il y a déjà quelqu’un dedans. Tiens, la brune qui m’a tapé dans l’œil tout à l’heure mais qui a préféré m’abandonner pour mon partenaire. Triste sort. Soit disant, je serai pas accrocheur. J’lui causais même pas à elle pour le buffet. Pas de ma faute si elle a des oreilles supersoniques. Tss. J’la lâcherai pas celle-là de toute façon. Elle dégage quelque chose. Je la regarde sans rien dire se trimballer près des machines à sous. Qu’est-ce qu’elle trafique d’abord ? On dirait qu’elle découvre la vie. Je me racle la gorge pour lui signaler ma présence. « Apparemment on est là pour jouer alors jouons. Je te laisse le choix : billard ou ping-pong. Je gagne, je dors avec toi cette nuit, je perds… non, je perdrai pas, je suis fort à ces jeux-là. » Un sourire narquois orne mon visage tandis que je m’appuie sur la table derrière moi. Naturellement, j’aurai choisi le billard mais le ping-pong ça peut être sympa aussi. Et j’ai besoin de me défouler en plus donc autant bouger un peu. « Je suis sûr que mon partenaire est pas aussi passionnant que moi, allé, avoues. » Il a suffi d’une phrase pour que je me lasse de sa présence. Je l’ai trouvé chiant. Ou alors j’avais trop soif. C’est peut-être ça.

Me voilà pour la deuxième fois face à la brune incendiaire. J’avoue ne pas être déçu de la retrouver. Elle m’a clairement tapé dans l’œil. Mais voilà qu’elle me traite de harceleur alors que je ne fais que lui signaler ma présence. « Honnêtement, j’ai une tête de harceleur ? » Je lève ma frimousse en la dirigeant vers elle puis affiche ensuite mon profil un instant avant de revenir de face. En gros, est-ce qu’elle m’a bien regardé ? Je suis pas un psychopathe. « Et puis, c’est toi qui est venue vers moi au buffet, je te rappelle » La mémoire de la candidate semble flancher. Moi je n’avais rien demandé. Je l’avais juste regardé et aux dernières nouvelles c’est pas interdit d’admirer ce qu’il y a de beau dans ce monde de sauvage. Anyway. Je propose un jeu à la candidate avec des règles allant dans mon intérêt. Si je gagne, je dormirai à ses côtés cette nuit. Si je perds, et bien je ne dormirai pas à ses côtés, tout simplement. Mais non, elle en a décidé autrement. Elle veut faire de moi son esclave personnel. « Deal. » Mon regard perçant la foudroie tandis que la jeune femme se saisit d’une raquette de ping-pong. Bien. Je tâcherai de ne pas perdre. Ma main s’empare de l’autre raquette et mes yeux dérivent sur la belle fraîchement saisie par la candidate. « Qu’est-ce que t’en sais. Tu ne connais rien de moi. » Ouais, je suis de mauvaise foi, j’apprécie pas sa tacle. Pourtant, si c’était moi qui l’avais faite, cela m’aurait fait rire. « Sois belle et tais-toi. » Je garde mon air sérieux et mon ton sec et froid avant d’arborer un sourire moqueur. Je suis persuadé que durant une seconde la demoiselle m’a prise au sérieux. « J’aime pas les cruches. » Autant lui préciser qu’une nana flattant mon égo et étant non-stop à mes pieds, ça ne m’intéresse pas. Je ne suis pas mégalo. Je sais que j’ai du charme mais je le revendique pas. Elle doit confondre. « Allez, joues. » Ouais car je commence à avoir une crampe du poignet à force de tenir la raquette immobile.

Si j’étais gros, vieux, avec une longue barbe et des boutons, y’aurait eu de quoi douter sur mes intentions mais là, honnêtement, je comprends même pas qu’elle puisse associer mon attitude à du harcèlement. C’est pas du tout mon genre. Alors ouais, faut pas se fier aux apparences, je suis d’accord, mais bon, y’a des limites quand même. « Tu veux un bonbon et monter dans ma voiture ? » Le cliché. J’offre un sourire carnassier avant de me mettre à ricaner bêtement. J’aime bien l’humour noir et salace. « Tu mens mal. » Je tente un coup de bluff pour le coup. Je sais pas vraiment ce que la jeune femme pense de moi. Ça me ferait chier d’un côté qu’elle n’ait réellement pas envie d’apprendre à me connaître. La candidate me demande ensuite si elle doit jouer un rôle de fille cruche avec moi insinuant au passage que j’aime les filles faciles. Ce n’est pas vrai. C’est mal me connaître. Et les cruches m’énervent.  « Quelle répartie ! » Je souffle, à la fois amusé, à la fois exaspéré par la jeune femme. En plus de crever, elle voudrait que je me la boucle. Elle est drôle. Ce n’est pas parce que j’ai manqué un service que je compte me laisser faire et perdre. Je ramasse la balle et tente un effet que la jeune femme réussi à contourner. Ça va, elle se débrouille. Je parviens quand même à marquer le point. « On a pas assez flatté ton ego dans ta petite vie pour que t’en viennes à me demander à ce que je t’appelle Ma Déesse durant toute une semaine ? » Ouais, c’est ce qu’elle souhaite. C’est ses conditions du jeu. Autant dire que si je perds, elle pourra toujours courir pour que je la surnomme ainsi. A la limite, dans mon infinité bonté et si j’en ai la fois, je pourrai lui apporter son petit déj’ un jour vers dix heures. Mais rien de plus. Il faut pas pousser mémé dans les orties.

Visiblement, je jacte trop. Ah ouais ?! Je pensais être plutôt concis et précis comme mec. Mais ouais, je l’ouvre souvent. J’aime bien faire chier mon monde. Et puis, si j’suis pas muet, c’est pas anodin, alors il faudra qu’elle fasse avec ma voix Lara. Oui, j’ai décidé de l’appeler comme ça. Son prénom est naze et trop complexe et puis elle me fait penser à Tomb Raider. Puis d’abord, elle ment. Si elle ne voulait pas me connaître, elle se serait déjà cassée. Il y a pleins de pièces donc elle peut très bien m’éviter si je la fais chier. La vérité c’est qu’elle a trop d’ego pour l’admettre. D’ailleurs, visiblement, on ne l’a pas assez flattée dans sa vie. Pourquoi voudrait-elle que je l’appelle « ma déesse » ? Simplement pour me faire chier. « Il m’en faut tellement plus pour me faire chier. » En fait, non, un rien me fait chier. Mais c’est pas l’appellation qui changera quelque chose. De toute façon, elle pourra toujours crever avant que je devienne son esclave. Je m’apprête à servir à nouveau pour gagner un point mais y’a la putain de musique de Cupidon qui se met à sonner dans la pièce. Je dois embrasser Lara. Mouais. J’vais pas en profiter. Ça lui ferait trop plaisir. Mes lèvres se plaquent contre les siennes tandis que la jeune femme m’agrippe par le menton et que ma main se pose sur sa nuque. L’échange buccal dure quelques secondes. Visiblement, je pue la clope. C’est qu’elle est perspicace ! « Et toi t’embrasses comme une fillette. » Ok, j’exagère un peu. Elle m’a pas convaincue en même temps, j’y peux rien. « Tu m’excuseras mais j’ai envie de pisser. » Seul prétexte que j'ai trouvé pour mettre fin au jeu. J'ai ni envie de gagner, ni envie de perdre alors autant y mettre fin maintenant. « A plus Lara. » Je dépose la raquette sur la table puis me casse sans plus attendre. Finalement, je vais quand même aller aux chiottes.