Cela ne m'arrivait pas souvent mais pour une fois j'avais largement débordé sur mon heure de réveil habituel pour m'octroyer une grasse matinée. Pour ma défense je m'étais couché relativement tard la veille, après je prime j'avais grillé une ou deux clopes avec Mickael avant de descendre rejoindre Danica au jardin ... Nous étions remontés tard en fin de compte, et lorsqu'enfin j'avais retrouvé mon lit, partenaire et chat compris, je n'avais même pas eu besoin du moindre cachet pour m'endormir à peine ma tête posée sur l'oreiller. J'aurais aimé qu'il en soit ainsi tous les soirs et que je n'ai aucun mal à trouver le sommeil de façon générale, mais après tout une petite victoire temporaire valait toujours mieux que pas de victoire du tout. Tout cela pour dire que lorsque j'avais émergé il était pratiquement onze heures, et onze heures et quart bien tassées lorsqu'enfin j'avais trouvé le courage de m'extirper de ma couette. Je crois que je ne m'étais pas réveillé aussi tard depuis cette soirée de nouvel an y'a deux ans ... Bweh, je me souvenais encore de la gueule de bois de ce matin-là, rien que d'y repenser j'avais grimacé. A l'heure où certains se préparaient donc peut-être à manger j'étais descendu à la cuisine pour avaler un petit déjeuner, attendant sagement que midi et demi / une heure arrive pour espérer pouvoir utiliser la salle de bain tranquillement. Je m'étais posé sur la terrasse pour lire un peu, j'avais provisoirement abandonné mon manuel de langue pour lire un roman pioché dans la bibliothèque du nid ; J'avais besoin d'un truc un peu léger à lire, et j'avais trop de mal à me concentrer pour étudier ces derniers jours. Au final il était déjà quatorze heures passées lorsque j'étais sortis de la douche, enfilant un jean et un tee-shirt anthracite avant de prendre la direction du balcon, avec l'intention de fumer une clope ou deux. Lorsque j'étais arrivé j'avais trouvé Nolene déjà là, observant visiblement avec attention le sol en contrebas ... J'espérais qu'elle n'avait pas le vertige, sans quoi ce qu'elle faisait était une très mauvaise idée. « Dis-moi, tu dirais que l’on est à combien de mètres du sol ? » m'avait-elle alors demandé, visiblement préoccupée par la question, lorsqu'elle avait remarquée ma présence et s'était retournée vers moi. Combien ? Difficile à dire, je n'avais jamais pensé à mesurer, ahah. Trève de plaisanterie, la rejoignant jusqu'à la balustrade j'avais jeté un coup d'oeil dubitatif avant de répondre en haussant les épaules « Je ne sais pas, une quinzaine de mètres je dirais. Pourquoi, tu envisages de pousser quelqu'un ? C'est suffisant pour tuer, si c'était le vrai sens de ta question. » Lui avais-je alors répondu d'un ton faussement sérieux, avant de lui sourire. Sourire qui s'était étiré deux fois plus lorsqu'elle avait ajouté presque confuse par le fait d'avoir oublié « Bonjour pardon, j’en oublie mes manières. » Lui adressant un signe de tête en guise de réponse, je l'avais quittée des yeux un instant pour fouiller dans la poche arrière de mon jean à la recherche de mon briquet. Je comptais bien faire attention à ne pas le lâcher celui-ci, j'avais fait tomber le précédent en bas la semaine passée, quand j'étais avec Archie, et lorsque j'avais enfin trouvé le courage de descendre le récupérer il n'était plus là, bien évidemment. Mais à peine le briquet en main j'avais réalisé mon impolitesse, à mon tour « Pardon, ça t'embête si je fume ? » Si elle me disait non je n'en ferais pas un drame, je savais que comme cela pouvait être désagréable de subir la fumée des autres quand on n'était pas soi-même fumeur. Mon père me le répétait assez souvent, et j'avais l'interdiction formelle de fumer quand j'étais chez Sandrine. C'était plus facile de lui faire croire que j'avais arrêté au moins ... Bon, elle finissait toujours par s'en rendre compte, mais enfin. Après avoir à nouveau contemplé le vide quelques instants, voilà que Nolene m'avait finalement demandé « Alors soulagé que ton partenaire soit resté ? » m'arrachant un nouveau sourire. J'aurais difficilement pu faire croire que je n'étais pas satisfait du choix d'Apolline de laisser une chance à Mickael plutôt qu'à Jane. Je n'avais rien contre la jeune femme, mais à choisir je préférais mille fois garder mon partenaire, et après tout le scénario contraire avait été ce que j'avais craint tout le long du prime. « Pas qu'un peu, oui. J'ai pas encore eu l'occasion de croiser Apolline d'ailleurs, faudra que je la remercie ... » J'avais mieux dormi cette nuit que les deux précédentes en tout cas, c'était lié à mon avis. J'espérais simplement ne pas retrouver Mickael sur le banc des nominés dans les semaines à venir maintenant ... Et pas seulement pour lui, mais aussi parce que si les nominations suivaient leur cours normal cela signifierait que je serais nominé aussi.

Je ne m'étais jamais vraiment posé la question de la hauteur, c'était quatre étage c'était tout ce que j'avais retenu, et comme je n'avais pas particulièrement le vertige, pas du tout même, je n'avais pas cherché plus loin. La question en revanche semblait tarauder Nolene au point qu'elle ne décide finalement de me poser la question lorsque j'avais rejoint le balcon à mon tour. Je me disais qu'un immeuble de deux étages faisant plus ou moins sept mètres, le double arrivait à une quinzaine de mètres, mais je n'étais pas un expert après tout, et surtout je n'y avais pas réfléchi. Pourquoi faire d'ailleurs ? Est-ce que la jeune femme avait une raison en particulier de vouloir savoir la taille de cet immeuble, du genre raison potentiellement criminelle et dangereuse ? « Non je voulais simplement m’assurer que le chat retombe sur ses pattes si jamais je venais à le lâcher sans faire exprès. » Criminelle et dangereuse, c'est bien ce que je craignais. Parcourant la courte distance qui me séparait encore de la balustrade je m'y étais accoudé, reposant ensuite mon regard sur la jeune femme pour répondre d'un ton faussement suspicieux « Avant que tu ne te décide, je préfère te prévenir que ce que quiconque fait à mon chat, je lui fais aussi. A toi de voir si tu as envie que je te lâche aussi depuis le haut du balcon, du coup. » Courte pause, après quoi j'avais ajouté d'un ton amusé « Oh tu peux jeter un nouveau coup d’œil en bas, c'est haut je te le confirme. » Bon ça va, je savais bien qu'elle plaisantait. Du moins j'espérais, mais elle ne me semblait pas avoir l'air d'une psychopathe qui torturait des animaux pendant son temps libre ... A moins de - très - bien cacher son jeu. Trêve de plaisanterie, puisque cette question de hauteur semblait vraiment lui courir sur le haricot elle avait même fini par me demander « Sinon tu penses que quelqu’un pourra me donner l’information ? » et j'avais simplement haussé les épaules, parce qu'au fond je n'en savais rien. Si le maçon n'avait pas été éliminé au dernier prime - ouais, le seul truc que j'avais retenu d'Hayden c'était son métier, allez savoir pourquoi - il aurait peut-être pu la renseigner, c'était son rayon ça après tout, non ? « Demande à Cupidon, il doit bien savoir ça lui. » Avais-je donc simplement plaisanté, mais au fond c'était une solution. Bon, je ne savais pas si déclencher l'alarme en buzzant simplement pour poser sa question serait tout à fait au goût du chérubin, mais on n'avait rien sans rien alors c'était à Nolene de voir à quel point elle voulait sa réponse. M'apprêtant à sortir mon briquet je venais de me rendre compte que je n'avais même pas demandé à la jeune femme si la fumée la dérangeait « Oh oui bien sûr ne t’en fais pas pour moi. » Bon, dans ce cas là j'avais donc sortit une clope de mon paquet, la coinçant entre mes lèvres avant de l'allumer, et de ranger paquet et briquet à leur place initiale dans mon jean. Que dire sinon que c'était déjà au moins ma cinq ou sixième de la journée, et ce malgré le fait que je me sois levé bien plus tard que d'habitude ... Je pense qu'à ma sortie il ne serait définitivement plus la peine que j'espère faire croire à qui que ce soit que j'essayais d'arrêter. Nolene avait alors évoqué mon partenaire, ou plutôt le fait que je devais être soulagé qu'il soit resté. Et elle avait raison, bien qu'il ne faille pas perdre de vue que si Mickael était toujours là c'était grâce à Apolline uniquement « Pourquoi ? Ce n’est pas plutôt à ton partenaire d’aller la remercier ? » Tournant un instant la tête pour recracher ma fumée ailleurs qu'en face d'elle, j'avais reposé mes yeux sur elle en souriant légèrement. « Oh mais j'espère bien pour lui qu'il le fera, si ce n'est pas déjà fait. Mais un merci supplémentaire ça ne mange pas de pain ... Et puis grâce à elle j'évite de me retrouver à partager mon lit avec quelqu'un d'autre. Quelqu'un qui prend toute la place, qui a les pieds froids, qui ronfle ou qui file des coups de pied au chat pendant la nuit. » Par exemple. Non, plus sérieusement je savais bien qu'il y avait d'autres personnes ici que j'aurais accepté sans mal comme partenaire, mais maintenant que j'avais celui-là je n'avais tout simplement plus envie d'en changer ... Après, qui vivrait verrait, comme on dit. « Oh et tu fais quoi dans la vie ? » Elle venait de passer du coq à l'âne de façon tellement inattendue que j'avais mis une seconde à réagir, tapotant ma cigarette dans le vide du bout du doigt pour en faire tomber le surplus de cendre. « Reporter. En Orient principalement. » Principalement parce que les exceptions existaient. La preuve, comme je l'avais dit à Sido qui me posait la question la semaine passée, mon dernier reportage s'était bien fait en Somalie, et je me rendais en fin de compte assez peu souvent sur le continent africain. Un peu par choix, si j'avais spécialisé mes études c'était bien pour les rentabiliser ensuite après tout. « Et toi ? Je suis sûr que tu as fait de super longues études ... » Enfin j'étais sûr, disons que je supposais. Parce qu'elle avait l'air d'être quelqu'un d'assez cultivé, et avec une façon de penser très carrée ; Et c'était souvent le cas des personnes qui avaient la foi et la patience de s'engager dans des études immensément longues. Alors que moi, mes cinq années m'avaient déjà semblé une éternité, il aurait fallu me payer bien cher pour me convaincre de continuer plutôt que de commencer à bosser.

Franchement les autres pouvaient bien garder ce qu'ils avaient reçu à la tombola durant les castings, du plus utile au moins utile, il était certain que jamais je n'échangerais Tixy contre quoi que ce soit d'autre. Non à vrai dire j'en étais déjà à avoir décidé que contente ou pas la production ne pourrait pas m'empêcher de repartir avec à ma sortie du jeu ... Mais je ne pensais pas qu'ils insisteraient beaucoup, qu'est-ce qu'ils pourraient bien foutre d'un chat qu'ils n'avaient fait qu'observer depuis l'autre côté de leurs caméras ? Non et puis, vous pouviez rêver que je la laisse à n'importe qui, c'est qu'on s'y attachait vite à ses petites bêtes, et ce n'était pas comme si je m'en étonnais encore avec la tripotée d'animaux de compagnie que j'avais pu avoir depuis mon enfance. « C’est que tu as l’air de beaucoup l’aimer ce chat. Tu en parles presque comme ton enfant, c’est vraiment mignon. » J'avais ri pratiquement en même temps qu'elle, même si pour ma part c'était plutôt la comparaison qui m'amusait. C'est vrai que j'avais tendance à m'emballer à propos de ce chat mais pour ma défense, y'avait ici certains candidats qui ne m'inspiraient pas confiance à ce sujet, à commencer justement par le partenaire de Nolene qui semblait avoir une dent contre Tixy. « Dio mio non, quand je passe en mode père je suis bien pire que ça. » C'était dit sur le ton de la plaisanterie mais cela n'en était pas moins vrai, je devais être un père un brin excessif même si je n'en avais pas toujours conscience. Quelque part dans un coin de ma tête se tramait déjà l'interrogatoire en règle que subirait le premier crétin sur lequel ma progéniture déciderait de poser un regard énamouré. « Du coup ne t’inquiète pas je ne ferai pas de mal à ton chat, enfin pas intentionnellement du moins. » Bon, même si tout cela n'était qu'une plaisanterie c'était toujours bon à savoir, et puis au moins la nuit elle pourrait toujours assommer Esteban avec le premier truc qui lui passerait sous la main, si ce dernier profitait de l'obscurité pour la martyriser, huhu. Et si c'était la protection de l'intégrité de mon nouvel animal de compagnie qui m'inquiétait, dans le cas de Nolene il semblait bien que la hauteur de cet immeuble soit véritablement une question qui nécessitait réponse ; Je lui avais donc suggéré Cupidon, parce que par principe je trouvais que toutes les questions sans réponses devaient revenir à celui qui pensait avoir réponse à tout. « Oh non je ne vais pas le déranger pour si peu. » Soit, il avait sans doute d'autres chats à fouetter, sans mauvais jeu de mot. D'ailleurs, en parlant justement de chat j'avais tellement intégré Tixy à mon quotidien dans le nid que j'avais même du mal à m'en défaire, comme me le fit remarquer la jeune femme en répondant « Oh d’accord je comprends. Et je vois surtout qu’on en revient encore au chat. » tandis que je lui vantais les mille et une qualités de mon dévoué partenaire. Celui-là même que j'avais failli ne pas revoir la veille au soir. « Que veux-tu, tout le monde m'appelle l'homme au chat depuis que je suis là, j'ai une réputation à tenir du coup. » Ceci dit je ne savais pas si c'était hyper flatteur au bout d'un moment, ce surnom. Je veux dire, la première semaine c'était un bon moyen mémo-technique, tout comme j'avais associé l'acolyte de Jasmine à une marque de parfum ou bien Sega à une société de jeu vidéo pendant les castings, mais après trois semaines quand même ... J'avais un prénom, quoi. Bref, pour changer de sujet puisque la principale source d'activité ici consistait à apprendre à connaître ses petits camarades Nolene avait fini par me demander ce que je faisais dans la vie, ce à quoi j'avais répondu « Oh ça doit être passionnant comme métier ! Tu as dû en voir des paysages et des gens différents. Tu es spécialisé dans un domaine ? » C'était bien la première à me poser cette question en revanche, et à s'intéresser aux gens que cela permettait de rencontrer surtout. Les gens ne se rendaient pas toujours compte devant leur poste de télévision, que derrière les images de désolation ou de chaos arrivant de l'autre bout du monde se cachaient des milliers de personnes qui continuaient de vivre au milieu de tout ça. « A la base c'était ça ma spécialité, l'Orient. Sauf que le onze septembre et la guerre en Afghanistan sont passés par là, et mes études ont trouvé une toute autre utilité ... Du coup maintenant, ma spécialité c'est plutôt les pays en conflit. » Je préférais ce mot là, conflit, plutôt que le terme de guerre qui à mon sens était employé un peu à tort et à travers. Et je ne vais pas mentir quand j'avais entamé mes études ce n'était pas vraiment le genre de carrière que j'avais envisagé, toutes ces langues que j'avais apprises c'était plutôt pour rester dans un but de communication et interprétariat uniquement, mais enfin. « Mais c'est passionnant oui, même si c'est aussi très prenant. » Inutile d'édulcorer le tableau, hein. Oui j'étais passionné par mon métier, mais oui aussi il m'avait demandé pas mal de sacrifices ... La vie de famille par exemple ? C'était carrément niet, comme notion. Quoi qu'il en soit maintenant que j'avais répondu j'estimais avoir le droit légitime de lui retourner la question et de lui demander ce qu'elle faisait dans la vie, tout en supposant qu'elle devait avoir fait des études à rallonge. « Longues pas tant que ça, enfin tout dépend de ton point de vue. J’ai fait neuf ans d’études, je possède trois diplômes, et maintenant je suis chercheuse en sciences humaines et sociales. » Neuf ans d'études ce n'était pas si long que ça ? Effectivement nous n'avions pas la même vision des choses pour ce qui était des proportions « Neuf ans d'études, pratiquement une décennie ... T'avais du courage. » avais-je en tout cas répondu après avoir émis un léger sifflement d'admiration. « Et ça consiste en quoi au juste, chercheurs en sciences humaines et sociales ? » Parce que comme ça c'était un peu flou. Mais un peu comme tous les métiers de chercheurs ... En fait je me demandais bien ce que l'on pouvait faire toute la journée, quand on était chercheur ; C'était un peu abstrait comme appellation, je trouvais Et du coup si Nolene éclairait ma lanterne je pourrais définitivement me coucher moins bête ce soir, ce qui n'était jamais négligeable.

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