Les animaux peuvent-ils réellement ressentir des émotions, sont-ils capable de s’attacher aux êtres humains où est-ce seulement un rapport dominant dominé ? Voilà le débat très intéressant sur lequel nous discutons avec un autre candidat depuis quinze minutes, nos avis divergent mais se rassemblent en quelque sorte sur la conclusion. Nous sommes tous les deux d’accord que les animaux peuvent ressentir la douleur, la joie, la peine alors pourquoi ne seraient-ils pas comme nos camarades les singes, capables d’éprouver tout simplement ? Bon, ils ne sont pas aussi intelligents que nos amis les primates… Quoique, je ne trouve pas qu’ils soient particulièrement proches de nous intellectuellement mais bon. « Jaheim. Je peux te parler? » Je reconnais sa voix, je la reconnaitrais entre toutes et voilà pourquoi la surprise peut se lire sur mon visage. Est-elle vraiment venue vers moi de son plein gré pour discuter ? Il y a de quoi sincèrement être choqué, elle qui a toujours refusé de m’adresser la parole ici. « Bien-sûr. » Est-ce normal que je sois très inquiet et stressé ? Pour qu’elle fasse le déplacement et demande à me voir c’est qu’il doit y avoir quelque chose de très important. Je la suis bien sagement jusqu’au couloir des mirages au milieu duquel elle s’arrête pour à nouveau me faire face. « Merci pour tes paroles.. Dimanche. Très surprenante et étonnante et incohérente. J'ai dû mal à comprendre pourquoi tu es autant attaché à moi. Dans le sens où je n'arrive pas à t'apprécier et pourtant toi, alors qu'en apparence tu n'es pas fan non plus... tu continue à creuser et essayer de me connaître. » Je relève un sourcil, est-elle en train de se moquer de moi ou s’est-elle coupée du jeu ces derniers jours ? Je reste perplexe et les traits de mon visage l’expriment à la perfection. « Tu as loupé la révélation de Sacha, tous les habitants savent maintenant que nous sommes sortis ensemble à une époque. Inutile de faire comme si tu ne me détestais pas pour certaines raisons bien précises et comme si je ne te connaissais pas suffisamment pour savoir que je dois continuer à creuser et me racheter. » Mon secret n’a heureusement pas été découvert, le sien non plus. Je devrais peut-être enquêter sur ce dernier d’ailleurs ?

Ana se comporte toujours comme si les autres ignoraient pour notre lien, nous avons partagé tellement tous les deux. Ce fut une relation intense, ça n’a peut-être duré que six ou sept mois mais ce fut l’une de mes plus belles histoires d’amour… Seulement j’ai tout gâché et même si on peut très facilement l’excuser en mettant en cause notre jeunesse et le besoin de vivre de nouvelles aventures une part de moi regrettera toujours ce que j’ai fait. « J'y étais. » Elle a donc pu m’entendre confier qu’elle avait été mon premier grand amour et c’est à présent à mon tour d’être mal à l’aise. Je ne me suis jamais livré de cette manière à elle, même lorsque nous sommes sortis ensemble les quelques mois que j’ai passé dans un vrai lycée à ses côtés. Je suis un éternel pudique sentimentalement parlant, il m’arrive de me confier mais ça reste très rare et exceptionnel. « Ce que je ne comprends pas... » Je sens qu’elle va pouvoir enfin se confier, être plus sincère et ça me fait autant de bien que ça me fait peur. « Pourquoi tu veux pas me laisser tranquille. Tu m'as fait du mal et ne dis pas que c'était involontaire car j'en suis sûr que si. Tu n'as jamais tenu à moi et maintenant... maintenant tu essayes de te racheter! » C’est dur de l’entendre dire de telles choses, ça me fait tellement mal parce qu’elle se trompe royalement et qu’elle ne s’en rend pas compte. « Tu te sens coupable pas vrai? Mais t'as tout gâché et je veux pas... je veux pas que ce soit facile pour toi! » Elle me repousse et je me sens obligé d’intervenir, je ne peux tout simplement pas accepter qu’elle parle ainsi sans connaitre la vérité. Nous n’avons jamais pu parler de tout ce qu’il s’est passé, il est temps maintenant. « Parce que.... ça n'a... c'était horrible... ce sentiment... » J’ai peur de me livrer à elle après autant d’années mais je crois que c’est important, il le faut. J’attrape ses mains avant qu’elles ne quittent mon torse et les serre fort contre la paume de mes mains, je capte son regard et je me lance, il est temps. « Ne dis pas n’importe quoi, par pitié ! » J’en viens à la supplier, elle ne peut pas penser cela. « Je n’ai jamais voulu te faire du mal, j’étais fou amoureux de toi… Oui, je t’aimais comme jamais je n’avais aimé quelqu’un auparavant. » Pendant un temps je me suis même cru capable de faire face à ma famille et de l’imposer, mais je n’ai finalement pas eu le cran suite à ce qui nous a tous les deux mis face à un mur trop imposant pour deux jeunes de nos âges. « Je ne t’ai pas trompé pour te faire souffrir, je peux te promettre sur tout ce que j’ai de plus cher que ce n’était pas prémédité. L’alcool a énormément joué et… Nous étions jeunes, ce n’est pas une excuse mais je ne me suis pas rendu compte de ce que je faisais et je le regrette… Tu n’as pas idée d’à quel point ! » Qu’il est difficile de s’ouvrir, de se confier, j’en chie et pourtant tout cela doit sortir. « Quant au reste… Je suppose qu’on devra attendre encore un peu. » Je ne me sens pas prêt à descendre sur ce chemin-là.

Il est tellement difficile de faire entendre sa voix lorsque vous faites face à un mur de pierre. Ana et moi nous avons pourtant été très proches, nous nous sommes aimés passionnellement mais j’ai tout gâché en la trompant ce soir-là. Je n’ai pas été très intelligent et je m’en suis mordu les doigts, l’alcool ne me faisait pas de bien à ce temps-là et les choses se sont déroulées naturellement avec la meilleure amie d’Ana, en plein milieu de la fête nous nous sommes embrassés sans vraiment comprendre pourquoi et… Comme vous pouvez vous en douter tout est très rapidement parti en cacahuètes. Il n’y a rien à dire de plus, nous avons fait l’amour une fois et nous avons immédiatement décidé de nous arrêter, il y avait beaucoup trop en jeu et pas de réel désir. Oui, ce ne fut qu’une fois sous l’impulsion du moment et j’ai eu du mal à me regarder dans le miroir après cela. « Tu mens... » Elle me met en rogne, comment peut-elle tout remettre en question alors qu’elle me connait, Ana pourra bien dire ce qu’elle veut, au fond d’elle je suis persuadé qu’elle comprend, elle se sert juste de cette énorme erreur pour ne pas avoir à m’affronter. Serait-elle parfois tentée de me pardonner ? Ce serait-elle déjà posée la question ? « Ne dis pas cela, tu sais très bien que c’est faux. Je ne t’aurais pas avoué avoir couché avec elle dès le lendemain si ça avait été le cas. » Mes yeux brillent et j’ai tout le mal du monde à affronter son regard car il y a beaucoup en jeu, pas seulement pour notre situation actuelle mais parce qu’il s’est passé énormément de choses par le passé. Par ma faute ! « Tu... m'as rendue faible. Tu m'as humiliée. Tout comme tu as humilié la personne avec qui tu as couché. Tu étais trop fier. Tu... » J’ai la gorge serrée, c’est dur de l’entendre me dire de telles choses. Qu’attendais-je d’autre finalement ? Il n’y a personne d’autre que moi à blâmer dans cette histoire, je suis celui qui l’a trompée. « Vas-y, tu peux le dire… Je quoi ? » Qu’elle se libère, qu’elle m’insulte si elle en a envie, le principal c’est qu’elle vide son sac, j’en ai besoin et je pense qu’elle aussi. « Tu me juges beaucoup sur ce que j’ai fait, mais as-tu déjà essayé de comprendre pourquoi j’ai agi ainsi ? » Elle doit forcément s’être posé la question, je l’espère en tout cas. « Tu connais ma famille, je n’ai pas eu le cran à l’époque de te présenter à eux car ils auraient beaucoup trop attendu de toi… De nous… Alors ce qu’il s’est passé ensuite, je les aurais perdus ! » Je suis paniqué mais Ana doit se mettre à ma place et comprendre le dilemme qui m’a ruiné la vie. « Je ne suis pas parti pour rien, j’étais trop jeune pour me mettre à dos toute ma famille… Trop jeune pour… » Je n’arrive même pas à mettre des mots là-dessus, j’ai eu peur ce jour-là mais je regrette ma décision, il y a tellement de choses que j’aimerais être capable de refaire. Si seulement les deuxièmes chances et autres retours dans le passé existaient vraiment. « On peut dire que tu m'as rendue service dans un sens. Cela n'aurait jamais marché dans la durée nous deux. » Je ne prends même pas en compte ce qu’elle dit, il n’y a pas pire comme défense lorsque ta fierté est attaquée. « Mais si je te pardonne hein? Qu'est-ce que cela changerait? » Mon cœur bat la chamade, cette discussion nous l’avons repoussée pendant des années et je n’aurais jamais pensé que l’avoir aujourd’hui me retournerait à ce point. « Puis non... » Je relève les yeux, affrontant son regard à nouveau même si cet exercice est pénible. « Est-ce juste ce que tu désires de moi? Pas que je demande autre chose. » Dans une autre situation j’aurais été amusé par cette petite remarque mais le ton est bien trop grave pour que je puisse me risquer à faire de l’humour là-dessus. « Mais tu penses que mon pardon va te déculpabiliser de tout?! » Non, elle n’a pas compris je crois. J’hoche la tête nerveusement de droite à gauche. « Non, non pas du tout. » Je retire mes mains des siennes pour les libérer. « Je me sentirais pour le restant de mes jours coupables, ce que je veux c’est une chance de tourner la page, de passer à autre chose… » Il y a bien des choses sur lesquels nous devons revenir, notamment le mensonge qu’elle a pu inventer, surement pour me faire du mal. Mais le moment n’est pas encore bien choisi.

Les erreurs du passé permettent d’avancer, elles ont été faites et il n’y a rien à faire pour les arranger. La seule chose que l’on peut faire c’est choisir de les assumer, prendre les notes nécessaires pour ne plus les répéter ou fuir lâchement et ne pas assumer. Mon choix n’a pas été aussi simple que cela, il y avait tellement de choses en jeu, j’ai assumé cette nuit passée avec sa meilleure amie mais je n’ai pas été capable de faire face à ce qui a suivi. Comment m’en vouloir ? Nous n’étions qu’en terminale et je n’étais pas prêt à… Non, je ne pouvais tout simplement pas, ma famille ne l’aurait jamais accepté et à cette époque j’étais nettement moins capable de prendre des risques. Difficile à croire quand on me voit me découvrir une bisexualité qui fait probablement scandale chez moi, mais j’ai grandi, j’ai appris à être plus indépendant dans Fake Lover et peut-être que je pourrais enfin assumer ce que je n’ai pas eu la force de faire quelques années en arrière au moment des faits. « Tu pensais quoi? Tu pensais vraiment qu'après m'avoir avoué que tu avais couché avec... elle. Je t'aurais pardonné? » Pourquoi suis-je en train de faire cet effort ? Parfois je me pose réellement la question car elle et moi on sait très bien que quoiqu’il arrive elle ne me pardonnera pas. A-t-elle raison ? Je suppose que oui, je suis le fautif et je n’ai pas mon mot à dire là-dessus. « Je pensais que tu essaierais au moins de comprendre, nous étions jeunes et tu savais que je t’aimais. N’ose pas dire le contraire, tu te mentirais à toi-même. » L’amour n’excuse pas tout, loin de là, mais à l’époque peut-être que cela aurait pu faire la différence… Peut-être que ça nous aurait aidé à affronter les conséquences nous sont tombées dessus juste après. « D'accord. Tournons la page alors. Essayons du moins. » Ana vient de réussir là où beaucoup ont échoué, elle m’a cloué le bec sur place. Je reste un temps ainsi, les yeux en proie au doute, tentant de lire le plus de choses possible dans son regard pour définir si elle est sérieuse ou non. « C’est la seule chose que je demande ! » Je reste perplexe parce que je ne m’attendais pas à cela, mais c’est vraiment ce que je veux, que l’on puisse tourner la page.