Lloyd-Snö est un adepte de la salle de sport. Pour de multiples raisons. La première c'est qu'il aime ça, traîner en survêtement chez lui ça le fait profondément chier, mais être productif et se maintenir en forme est une source de catharsis assez conséquente pour qu'il se l'inflige avec le sourire. La deuxième raison est plus intime, Arthur est beau, beau mais plus vieux que lui quoiqu'il soit divinement conservé pour un mec ayant dépassé la trentaine depuis presque cinq ans. En allant à la salle de sport, Lloyd s'assure que la flamme dans son couple reste allumée et brûlante. Oui, les gens disent que la passion s'essouffle après trois ans et si pour eux, ce n'est pas le cas c'est en partie parce qu'ils la conservent en étant toujours aussi attirés par le corps de l'autre qu'au premier jour. Et la troisième raison, la plus égoïste, c'est qu'il aime voir des hommes dans des tenues assez révélatrices soulever de la fonte. Mais dans les abysses pas de fonte ou presque, quelques altères et un terrain de basket. C'est pas la panacée mais c'est un minimum. Son jogging lui manque, mais il fait sans, sa combinaison n'est pas à proprement parler inconfortable, il doute simplement que pour faire du sport elle lui permette une liberté de mouvement immense. Sur le terrain il découvre Lawrence, qui fait partie de son équipe et qu'il aime bien. Il l'aime bien sans savoir pourquoi, il ne le connaît pas vraiment, c'est juste qu'il est beau, c'est un début, et il y a aussi la façon dont il a rebondi sur les paroles obscènes de Zélie la veille qui a convaincu Lloyd de leur possible entente. « J'me demande s'ils ont ajouté les altères pour nous... Je veux dire, laisser des objets potentiellement contondants à des détenus ça semble plus dangereux qu'autre chose. Non ? » lâche-t-il en pointant du doigt les pauvres barres de métal sur lesquelles on avait glissé des poids. Dans une autre vie elles avaient dû voir de vrais caïds, le casting de la saison quinze de Fake Lover, pour elles, devait faire tache sur leur CV. « On a un ballon pour jouer ou faut se servir de celui qui a vingt ans et qui traine dans la cabane ? » qu'il demande presque excité à l'idée de se dépenser physiquement. Les gars qui héritent de dix ans derrière les barreaux doivent vraiment avoir de l'énergie à revendre à force de ne rien foutre.

Les mots de Lawrence le font sourire. Faut avouer que la prison n'est pas de toute modernité. C'est même plutôt l'inverse, tout y est décrépi, vieux, pourri ou pourrissant. La véritable image d'Épinal de ce qu'une prison doit être. Et encore, en y réfléchissant bien, Lloyd se dit que peut-être les livres ont été ajoutés pour leur donner de quoi se distraire en supplément, parce qu'il ne voit pas des criminels s'intéresser à « la peinture de la Renaissance à nous jours ». Mais c'est sur le procès supposé que Fake Lover a dû combattre pendant l'inter-saison. Il a une connaissance assez extensive du dossier pour avoir suivi la saga judiciaire de près.« Oh il ne fait pas que paraître, ils ont failli payer une fortune dans cette affaire ! » Les chiffres qu'il a pu voir ou entendre étaient hallucinants mais le monde de la télévision génère des fortunes colossales et de ce fait les procès affiliés à ce domaine sont généralement juteux. Tout ça emporte son esprit vers la pile de dossiers qu'il a laissée à Marty et Joana, ses collègues. Ils doivent le détester pour la charge de travail supplémentaire. « Espérons seulement qu'il rebondit ! » Parce qu'un ballon qui ne rebondit pas, pour jouer un basket... ça pourrait s'avérer un tantinet compliqué. Pas impossible mais dribbler cassé en deux parce que le ballon ne décolle pas à plus de vingt centimètres du sol risque de leur causer des douleurs dorsales. Douleurs dont ils se passeraient tous. Lino fait une apparition, repart aussi vite qu'il est venu. Ça donnerait presque le tournis à Lloyd toute cette agitation. La poignée de main est vigoureuse, s'il tient tout avec une telle poigne il risque de se faire une nécrose génitale. Voilà ! Voilà ! Zélie dépeint sur lui avec son langage de poissonnière. « J'avais deviné, moi c'est Lloyd-Snö. » fait-il en réciproquant la poignée de main, serrant un peu plus histoire de ne pas passer pour un mec qui n'échange des germes en délicatesse. « Je vous préviens, je suis super doués aux sports de balles. » Peut-être qu'il serait plus crédible s'il avait dit « ballons » plutôt que « balles ». Mais c'est trop tard pour ça, il va juste devoir prouver que malgré un vocabulaire inapproprié il se défend avec une balle -un ballon !- entre les mains. « Le premier à trois lancers-francs gagne le droit de poser une question aux deux autres ? Pas qu'une loi nous interdise de nous poser des questions, mais les perdants seront soumis à la loi du sport et du fair-play. » Pas qu'il existe une loi du sport et du fair-play mais c'est bien connu que le perdant est toujours obligé envers celui qui le défait.