@lawrence
Ça fait bien une heure qu’elle observe cette fausse cheminée, l’air hagard. Elle n’en a pas encore trouvé une utilité convainquant. Alors elle continue de regarder cette danse qui est devenue presque hypnotique. Celle des fausses flammes dont émane aucune chaleur. La rouquine serait presque tentée d’y toucher si elle n’avait la sensation débile que ça allait lui brûler les doigts. Accroupie au sol elle en a oublié pourquoi elle se trouvait dans cette position à la base. En effet la demoiselle était tranquillement en train de lire un livre pioché au hasard de la grande bibliothèque, le cul dans un des fauteuils confortables du lieu quand le livre lui a échappé des mains. Elle s’était donc empressé de se lever pour venir s’agenouiller par terre et chercher à tâtons sous l’une des tables basse le polard qu’elle lisait sans trop de convictions. Son regard émeraude avait remarqué la fausse cheminée et sans trop savoir comment elle se retrouvait à l’observer, tenant la position pendant plus d’une heure. Ce n’est que lorsqu'une petite douleur aiguë se fait sentir dans son dos qu’elle se décide enfant à reprendre une position un peu plus supportable. Sans quitter des yeux la cheminée, elle se met en tailleur et vient appliquer une pression sur sa colonne vertébrale. Le bouquin est finalement pas trop mal là où il se trouve. Scar n’est plus réellement dans un état d’esprit agréable pour les autres. Enfin elle ne l’a jamais été complètement, mais s’était toujours efforcer de montrer un visage plutôt agréable et de laisser un peu de côté son esprit lunaire. Aujourd’hui et ce depuis le prime dernier elle ne se sentait plus les pieds sur terre. L’américaine se levait avec l’impression de ne pas exister et se couchait toujours avec ce creux dans le cœur. Ce n’est pas un fait nouveau, mais depuis quelque temps c’était plutôt ponctuel. Une sensation dans la journée qui se faisait apaiser par le sourire de sa sœur. Mais ce sourire ça faisait quelques jours qu’elle ne l’avait plus vu sur le doux visage de Jade. Elle essayait de ne pas trop s’en inquiéter, mais à vrai dire son esprit était toujours trop ailleurs et elle n’arrivait plus vraiment à s’ancrer dans le regard de la danseuse. Elle semble comme entendre des pas au loin, comme s’ils faisaient partie d’un rêve dont elle venait subitement de se souvenir. L’américaine pivote la tête sur le côté pour rencontrer la silhouette de Lawrence. En entrant dans ce jeu, elle avait eu la certitude qu’elle n’allait pas rester bien longtemps, parce que de toute façon elle n’était pas tellement capable de se souvenir des autres et encore moins de s’y intéressé. Pourtant il y avait du nouveau, elle avait ressenti de la curiosité pour certains ici et elle arrivait même à se souvenir des prénoms de chacun, d’y associer un visage ou un fait. Lawrence, est proche de sa sœur. Comme beaucoup ici. Son regard glisse sur le grand monsieur, elle n’est pas avenante pour un sou. Elle est complètement ailleurs. La jeune femme se sent vide à l’intérieur pourtant quand on la regarde de loin on peut y voir une cicatrice béante, des doutes, des craintes et une douleur suffocante. « C’est quoi ton remède quand t’as passé une salle journée ? » Qu’elle le questionne d’une voix blanche, sans même lui jeter un second regard. La fausse cheminée la rend perplexe et arrive à occuper son attention suffisamment longtemps pour qu’elle évite de faire des conneries.

Scar ne cherche jamais la compagnie. Elle laisse toujours les autres venir à elle. Même s’il lui arrive de graviter autour de quelques personnes, elle a toujours beaucoup de mal à être celle qui vient demander de la compagnie. Elle attend souvent que ça vienne à elle. Pourtant elle aime assez être entouré, mais pas participé. Elle préfère être celle qui observe et qui témoigne des réactions des uns et des autres. Souvent elle ne comprend pas, mais il y a des choses qu’elle a déjà eu l’occasion de voir chez d’autres. Elle se complait pour autant à rester seule, surtout parce qu’en ce moment elle se sent complètement hors du temps, hors de son corps. Un rien peut attirer son attention, comme cette fausse cheminée qu’elle semble regarder comme si c’était la chose la plus intéressante qu’elle pourrait trouver ici. Dans une pièce qui regorge de livres en tout genre et tout le monde à du comprendre qu’elle aime particulièrement se perdre dans les lignes d’un monde inventé, dans la plume d’un écrivain connu ou moins. Les fausses flammes sont pour autant plus intéressante qu’un Oscar Wilde ou un Agatha Christie. Le feu, la chaleur, c’est quelque chose qu’elle craint plus que tout mais qui la fascine. C’est un cercle vicieux, une attirance vile qu’elle ne peut réellement contrôler. Mais là ce n’est pas la même chose, même si elle se laisse berner en imaginant qu’elle pourrait se brûle le bout des doigts. Mais l’odeur n’y est pas, la chaleur est inexistante. Et elle cherche alors, elle cherche l’idée, l’intérêt dans cette fausse cheminée. Lawrence entre dans la pièce, elle l’observe d’un air distrait essayant de savoir si elle fantasme sa présence ou bien s’il est réellement ici avec elle. Le silence se pose sur ses lèvres avant qu’elle ne se décide à le briser, curieuse d’avoir un retour ou non. Il répond automatiquement l’alcool. Et elle se demande pourquoi elle n’y a pas pensé alors qu’elle se trouve dans un bar-bibliothèque. Chose étrange qu’elle n’aura jamais connu ailleurs qu’ici. Curieuse d’en apprendre plus elle pivote sa tête pour le chercher du regard. Il a pris place près du bar. Il parle d’une solution temporaire, d’un pansement plus que d’un remède. Ce n’est déjà pas mal non ? Elle en sait rien, mais elle pourrait clairement s’en contenter à l’heure actuel, si ça lui permet de tenir jusqu’à demain. « Je n’y avait pas pensé, mais c’est plutôt pas mal, même si c’est juste une solution temporaire. »  Qu’elle glisse en déroulant ses jambes jadis en tailleur. Il lui demande si elle a passé une salle journée. « Non, c’est plutôt un sentiment général. »  Rien ne va jamais complètement, mais c’est vrai que le début de semaine est franchement pas terrible. Elle entend les verres tintés et elle comprend qu’il aura le rôle du barman psychologue qui écoute les soucis de ses clients. La rousse se hisse sur ses jambes et vient rejoindre l’américain. Lui raconter ? « Je ne sais pas comment te raconter. »  Qu’elle lui dit d’un air distrait en venant enrouler ses doigts fins autour du verre ambré. « Comment tu fais toi ? Pour te faire des amis ? »  Elle préfère d’abord lui poser une question avant d’en dire plus. « C’est compliqué pour moi de me faire des « amis » et du coup il m’arrive d’avoir l’impression de ne pas exister. Tu vois ? »  Elle ajoute en buvant une petite gorgée de sa boisson, ça lui réchauffe les cordes vocales. « Parce qu’on existe surtout dans le regard des autres non ? »  L’alcool ce n’est pas typiquement son truc, mais elle pense que ça pourrait le devenir. Elle continue son verre, grimaçant quelque peu, puisqu’elle n’est pas très habituée. « J’ai l’impression de ne pas être moi. » Qu’elle lui murmure comme si c’était une chose à ne pas dire, elle imagine encore que ça va être le genre de truc à se faire diffuser sur le prime. Et elle commence à avoir peur de ce qu’elle dit quand Jade n’est pas là.

Elle ne va certainement pas le juger pour sa réponse. C’est certes rapide et presque naturel pour lui de répondre à la question par le mot alcool. Mais Scar n’est pas de nature à juger les autres, parce qu’ils n’ont pas réellement d’impact sur sa personne. De plus elle a tendance à « s’intéresser » aux gens qui sont fait de défauts aussi multiples soit-il. Elle apprécie les qualités aussi. Mais quand elle joue la comédie de la fille sociale, elle espère se trouver en face de personnes qui vont rendre au moins l’exercice compliqué. Et c’est justement le cas quand elle se retrouve en face de gens aux facettes aussi multiples qu’intéressantes. L’alcool, ce n’est pas quelque chose qu’elle connait vraiment. Mais l’idée semble la séduire, assez pour que son attention quitte la fausse cheminée pour se laisser accrocher sur la silhouette sculptée dans le marbre de Lawrence. La rouquine s’approche de lui, pour l’accompagner pour un verre. Il vient lui demander de parler, de lui raconter les choses qui justifient l’utilisation de l’alcool comme pansement. Elle ne sait pas comment dire les choses, elle ne se confie à personne d’autre que Jade. Faut se dire que c’est certainement la même chose, mais en réalité ce n’est pas le cas. Parce qu’elle ne nourrit pas l’envie de se confier à quelqu’un d’autre que sa petite sœur. Pourtant elle a bien envie d’essayer. En plus, quand elle observe Lawrence elle ne peut s’empêcher de le voir en compagnie de sa sœur. Et elle croit bien qu’il y a un bon contact entre les deux. Scar accorde au jugement de Jade assez de crédit pour se dire que Lawrence doit être quelqu’un d’intéressant. Et qui aura peut-être quelque chose d’assez percutant à lui dire, quelque chose qui va la faire tenir pendant toute une conversation et peut être débloquer quelque chose chez elle ? Il ne faut peut-être pas en attendre autant de lui, mais l’idée est plutôt séduisante. « Comme elles me passent par la tête. » Répète la jeune femme sur un ton qui se voulait doux. Elle commence en lui demandant comment il fait lui pour se faire des « amis », pour se lier, pour converser. Parce qu’il a l’air de quelqu’un qui manie très bien la parole. Il parait qu’il fait de la politique ? « Vraiment ? Tu n’as pas quelqu’un sur qui tu sais que tu peux compter en toutes circonstances ? » Elle lui demande réellement curieuse, parce qu’elle n’a jamais réellement l’occasion de rencontrer des gens qui lui affirme ne pas avoir d’amis. Elle continue d’essayer de lui expliquer les choses, entre deux gorgées de Whisky. Intimidante ? Elle n’avait jamais entendu quelqu’un parlé d’elle de cette façon. Enfin pas devant elle en tout cas. Elle a plutôt l’air d’un oiseau tombé du nid, que d’une nana intimidante. Du moins c’est ce qu’elle imaginait volontiers. Mais il n’a peut-être pas tellement tort. « Oh… Tu trouves ? » Qu’elle questionne d’un air sérieux. L’air grave elle le lui concède. Mais c’est surtout parce qu’ici elle essaye d’être un peu plus proche d’elle-même que de al Scarlett actrice, celle qui manie la fraude des sentiments avec brio. « Je peux sourire avec conviction, mais ce n’est pas ce que je suis. » Elle croit du moins. Parce qu’en réalité elle ne sait pas qui elle est. Justement quel genre de personne elle aimerait être ? C’est la question que lui pose Lawrence. Il continue de la surprendre, cette conversation est assez stimulante. « Hm, je crois que pour ça je vais avoir besoin d’un verre de plus. » Qu’elle fait d’un air qu’elle voudrait amuser, mais ça tombe à plat. Elle termine d’un cul sec son verre, dans une grimace. « Je crois que j’aimerais être plus … vivante. » Elle lui affiche un sourire vraiment convaincant, les yeux brillant et les pommettes roses. « En fait, j’ai l’étrange impression d’être entre deux mondes… enfin je ne sais pas trop comment dire. Comme si j’étais là, sans être là. » La rouquine se perd dans ses songes. Il va certainement lui dire de consulter pour tout ça, mais elle a été suivit Scar, ça n’a jamais rien donné. On l’a souvent prise pour une menteuse, pour une nana qui s’invente une attitude pour qu’on lui colle l’étiquette d’une pathologie sur le front. « Maintenant c’est à ton tour. » Qu’elle souffle, en espérant ne pas être la seule à tenir un discours si désespérant.