@naveen
Depuis ce matin, Scar à un nœud dans le ventre. Une étrange chaleur dans l’estomac qui n’a rien d’agréable. Comme un mauvais pressentiment. Cette sensation elle la traine depuis le réveil et ça la bloque dans ses mouvements. Elle n’arrive pas à la quitter de son esprit malgré le fait qu’elle tente tout ce qu’elle peut pour se changer les idées. Elle se plonge dans un volume dans une langue étrangère, qui lui demande beaucoup de concentration. Mais rien y fait, rien ne semble pouvoir l’éloigner de cette sensation néfaste. Et quand l’heure du prime arrive à grand pas, c’est pire encore. C’est alors qu’elle se rend compte qu’elle a l’intime sensation qu’à l’issue de ce prime les choses vont changer pour elle. Depuis le début de la semaine, elle se sent bien. Légère, elle a envie d’aller vers les autres et entrevoit un futur peut être plus rayonnant que d’habitude. Elle commence à avoir des envies, des curiosités pour les autres et à se détacher de ses faux-semblants. Pourtant à deux heures du prime, elle est certaine qu’elle en sortira changer. Que tout va se renverser. L’attitude lunaire habituelle, elle entre dans le dressing décidé cette fois à prendre le temps de se préparer. Elle espère pouvoir se changer les idées de cette façon. La rouquine prend le temps de regarder ce qu’elle a dans son placard, rien ne lui satisfait. Si ce n’est cette longue robe rouge, mais dont le buste ne lui plait pas vraiment. Rien ne l’arrête quand il s’agit de couture, alors elle décide de la modifier du tout au tout et en à peine une demi-heure elle se retrouve avec une toute autre robe. Satisfaite de son ouvrage elle la laisse de côté pendant qu’elle range sa machine à coudre. La demoiselle relève la tête sur l’entrée de Naveen. Elle observe sa fine montre en or qui orne son poignet, l’heure avance. Il faudrait mieux qu’elle commence à se préparer. Mais maintenant qu’elle voit Naveen, elle vient de se souvenir de quelque chose. « Tu tombes bien. » Qu’elle lui murmure du bout des lèvres, massant son nombril dans l’espoir stupide de faire passer sa douleur dans le ventre, sachant qu’en réalité il s’agit plus d’une histoire d’instinct que de biologie. « Je sais que la date est passé, et maintenant que j’y pense je ne sais même pas si tu fête Noël ? » Elle lui demande d’un air curieux, parce que bon elle connait pas du tout la culture dans laquelle il baigne depuis l’enfance. La rouquine se met à fouiller dans son placard, elle a caché quelque chose il y a quelques jours, cherchant le moment le plus propice pour lui offrir. Soudainement timide, elle se rend compte que ce n’était peut-être pas l’idée du siècle. Pourtant elle tient tout de même entre ses doigts un Sherwani bleu et or. Enfin ce n’est certainement pas fait dans la tradition pure, mais la coupe est la bonne. C’est assez simple, elle a fait avec les moyens du bord. « Ce n’est pas grand-chose, je sais pas si ça va te plaire, t’es même pas obligé de le mettre hein. » Qu’elle précise en lui tendant tout de même le vêtement encore plié entre ses doigts. Un petit sourire au bout des lèvres, elle n’attend pas vraiment de le voir un jour là-dedans, c’est juste que ça lui plaisait l’idée de coudre ce genre de vêtements. Elle est même certaine que ça va lui aller niveau taille, elle connait toutes ses mensurations à l’œil. La demoiselle est maladroite dans la façon dont elle lui offre ce cadeau, ce n’est pas une habitude chez elle. Et faut dire que ça lui a surtout fait plaisir à elle, de s’évader pendant un peu plus d’une semaine sur toutes ces broderies sur le col et les manches.
CADEAU

Il était rare que l'indien soit angoissé au point de faire les cents pas, mais ce soir, il risquait sa place au même titre que quatre autres candidats, et si généralement il parvenait à relativiser un minimum, l'idée de peut être rentrer chez lui à la fin de la soirée était incroyablement perturbante. Parce que rentrer, ça voudrait dire reprendre l'avion, retourner à plusieurs milliers de kilomètres d'ici, et retrouver un quotidien très différent de ce qu'il avait vécu ici, pendant plusieurs semaines. Parce que rentrer, ce serait aussi retrouver ses proches, sa famille, des personnes qui pour la plupart avaient désapprouvé son choix de partir pour l'Europe et lui en voudraient certainement un petit peu, dans le fond, d'avoir raté des occasions symboliques de passer du temps avec eux. Parce qu'il se verrait poser toutes sortes de questions, aussi, et serait peut être amené à évoquer des points qu'ils ne comprendraient pas, des points qui les inciteraient à le juger, et à s'interroger sur la personne qu'il avait pu devenir au contact de ces occidentaux que la plupart de ses proches avaient tendance à diaboliser. Parce qu'il serait amené à ouvrir son cœur, à confier à sa mère des choses qu'elle n'avait peut être pas envie d'entendre, des choses qui lui donneraient certainement l'impression que son fils s'était perdu quelque part, à l'autre bout du monde, et était revenu différent. Et parce que rentrer, ce serait surtout laisser ses camarades derrière lui, des personnes qui s'étaient peu à peu installées dans son cœur, qui lui avaient fait découvrir beaucoup de choses, et s'étaient progressivement imposées comme des évidences pour lui, à différents niveaux. Alors oui, il appréhendait ce prime, et pour une fois ce n'était pas à cause des rubriques. Alors, c'est seulement après de longues minutes passées à stresser dans son coin que l'indien s'était finalement décidé à gagner le dressing, dans l'espoir de se préparer un peu à l'avance, histoire de penser à autre chose. Sur place, il trouva Scarlett, et la jeune femme s'adressa presque aussitôt à lui. « Oh ? » Il était toujours un peu inquiet lorsque quelqu'un l'abordait de cette façon, mais ici il ne voyait aucune raison pour que Scarlett lui annonce une nouvelle catastrophique. Et en effet, ce qu'elle lui demanda le rassura quelques peu. « Je fête Noël, oui. Chez moi, il y a beaucoup moins d'organisation autour de tout ça, mais c'est une fête de plus en plus répandue, quelles que soient les religions. » Ce n'était pas la première fois qu'on lui posait la question, et c'était bien normal, après tout personne ici ne pouvait deviner que ce qui se fêtait dans un pays comme l'Irlande, se fêtait aussi à plusieurs milliers de kilomètres. Néanmoins intrigué par le fait qu'elle évoque Noël avec quelques jours de retard, l'indien arbora subitement une mine époustouflée lorsque la rousse lui tendit ce qui ressemblait fort à un sherwani. « Scarlett, enfin, il ne fallait pas ... » Il souffla, sous le coup d'une émotion inévitable, autant parce qu'il était toujours touché lorsqu'on lui faisait un cadeau, que parce qu'ici il croyait comprendre que c'était elle qui l'avait confectionné. Pour lui. « Je ne sais pas quoi dire. » Les mains un peu tremblantes, il saisit minutieusement la tenue, puis releva les yeux jusqu'à ceux de Scarlett. « Il est magnifique, mais … ça a du te prendre un temps fou. » C'est du moins ce qu'il supposait, mais il ne demandait qu'à se tromper, et à ce qu'elle lui dise qu'elle ne s'était pas donnée trop de mal pour lui, parce que le contraire aurait tendance à l'embarrasser. « Merci beaucoup. » Il souffla finalement, dans un sourire ému, avant de s'approcher d'elle et d'initier une étreinte reconnaissante, qu'il n'éternisa cependant pas, ayant cru comprendre que c'était le genre de choses qui pourraient la gêner. « Je me demandais justement ce que je pourrais porter ce soir, mais à présent je sais. » Il reprit, ses lèvres s'étendant cette fois en un sourire plus large, et réellement enthousiaste. « Qui sait, peut être qu'il me portera chance ? » Il risquait en tout cas de s'en convaincre, jusqu'à l'issue du prime, parce que c'était précisément le genre de choses auxquelles il lui fallait se raccrocher s'il voulait profiter de ce qui serait peut être sa dernière soirée. « Je suis embêté, parce que moi je n'ai rien à t'offrir. Si j'avais su que tu me ferais un cadeau, j'aurais été demander à Jade si elle n'avait pas une idée … Alors là, je me sens vraiment bête. » Il baissa timidement la tête et se frotta la nuque avec embarras, mais ne mit finalement pas longtemps à reprendre la parole. « Il n'y a pas une chose qui te ferait plaisir ? » Ils ne se connaissaient pas encore assez bien pour qu'il ait la réponse à ce genre de questions, mais peut être que quelque chose ici ferait plaisir à Scarlett, et dans ces cas-là elle n'aurait qu'à le lui dire, et l'indien ferait son possible pour accéder à sa requête. Par reconnaissance, oui, mais aussi et surtout par envie de dessiner un sourire sur les lèvres de la rousse, qui elle-même ne semblait pas particulièrement sereine cette après-midi.

La veille s’était soldée par la découverte du secret de Jade. Le reste de la semaine, Scar avait été assez encline à la découverte, curieuse, presque agréable naturellement. Toujours en recherche d’un petit moment spécial avec l’une de ses camarades. Mais depuis la découverte du secret de sa petite sœur, elle a l’intime impression que tout va changer. Elle a peur qu’on ne regarde plus Jade de la même façon, qu’on puisse la mettre de côté comme a pu le faire la famille. Elle a peur d’une réaction stupide de la part de ses camarades, de l’oublier parce qu’elle n’est pas comme tout le monde. La laissé dans son coin, parce qu’on peut difficilement la comprendre. L’éloigner de peur qu’elle les blesse, qu’elle se blesse. Rien ne peut enlever cette sensation qu’elle a dans le creux du ventre, alors elle décide de prendre le temps de se faire belle pour le prime. Pour qu’une fois Rowan soit un minimum contente de sa tenue. Ravie d’avoir pu emmener avec elle sa machine à coudre, elle a pris le temps de refaire le buste d’une robe qui ne lui convenait plus. Une robe qu’elle avait faite elle-même comme la grande majorité de son dressing. Scar n’aime pas les magasins, à cause du monde qui les peuples et aussi parce qu’elle ne trouve jamais rien à son goût. Les coutures sont trop artificielles, les tissus trop moches. Il faudrait qu’elle passe son temps dans les boutiques de luxes, moins fréquentées. Mais elle n’en a pas les moyens. Alors c’est plus facile d’aller trouver un beau tissu et de se faire une robe de princesse juste pour le défis de réaliser tout ça sans patrons. Elle n’avait pas pensé avoir l’utilité de cette robe un jour. Elle la remet dans un coin le temps de ranger son matériel, et se retrouve en compagnie d’un Naveen qui tombe bien. Elle lui a fait quelque chose pour Noel, en réalité c’était une démarche assez égoïste, elle besoin de s’occupé et puis les vêtements de Naveen la font rêvé. Elle voulait pouvoir dire qu’elle aussi elle peut faire ça. Il lui précise qu’il fête bien Noêl, elle n’en savait rien mais est contente de le savoir. Un petit sourire sur les lèvres elle lui tend la tenue qu’elle a confectionné pour lui. « Tu n’aimes pas ? » Qu’elle lui demande presque alarmé, quand il lui dit qu’il ne fallait pas. Pire qu’il ne sait pas quoi dire. Mais bien vite il balaye ses doutes en lui disant qu’il est magnifique. « J’ai pris mon temps, j’aurais pu avoir fini en une journée si je voulais. » Qu’elle lui précise sans aucune once de vantardise. « Ça m’a occupé l’esprit, alors c’est moi qui te remercie de m’avoir inspiré tout ça. » Qu’elle formule dans un petit sourire. Il parle de le porter pour le prime et ça lui fait vraiment plaisir, même s’il ajoute que ça va peut-être lui porter chance. Il est nominé c’est vrai. « Tu devrais peut-être porter autre chose, je ne suis pas vraiment porteuse de chance tu sais… » Qu’elle lui avoue, même si elle pense qu’il n’aura pas besoin de chance. Il semble mal à l’aise, parce qu’il n’a pas de cadeau pour elle. Oh, faut pas qu’il se fasse du souci, elle n’a pas fait ça pour recevoir un cadeau en retour. « Faut pas, je te jure que ça m’a vraiment fait du bien de le faire alors… c’est déjà un cadeau en soi que tu le portes un jour. » Elle formule d’une voix légère. Il lui demande si quelque chose lui ferait plaisir, rien de matériel en tout cas. Alors elle ne sait pas quoi répondre. « Je ne sais pas… » Elle hausse les épaules, mord sa lèvre inférieure. « On pourrait essayer de devenir des amis ? » Qu’elle lui demande d’un air un peu gêné. Ce n’est pas … enfin c’est pas facile pour moi, alors je te promet rien, mais j’aimerais bien essayer. » S’il veut bien, elle ne souhaite pas lui forcer la main.