Ce soir l’ennui me gagnait, moi qui parvenait toujours à trouver quelque chose à faire j’étais à court d’idées, j’avais déjà terminé les trois tomes de la saga littéraire Hunger Games, je n’avais pas prévu d’autres bouquins m’imaginant que j’aurais mieux à faire. C’est dans cette optique que je me dirigeais vers la bibliothèque, il ne pouvait y avoir que de bons livres de toute manière et ça me passerait une ou deux heures au moins. Ouvrant la porte, je jetais un coup d’œil à l’ensemble de la pièce, plus grande que ce que j’aurais cru. Il y avait une fille, assise prêt d’une table et qui semblait lire, souriant je m’approchais. Bon, peut-être qu’elle avait envie d’être tranquille, mais j’aurais quand même essayé de faire sa connaissance. « Je te dérange pas… Sixtine c’est ça ? »

J’étais en train de parcourir les lignes d’un bouquin sur la prostitution, et c’était drôlement intéressant. Si si. Après l’invention des horodateurs pour prostituées par Bonn, c’était instructif de se renseigner sur les diverses réglementations possibles. Je sursautai légèrement lorsqu’on m’adressa la parole. J’étais si absorbée par ma lecture que je n’avais pas remarqué que je n’étais plus seule. « C’est exact ! Non non tu sais, c’est surtout pour passer le temps. » J’agitai le bouquin dans les airs, tentant de mettre un nom sur son visage. C'était Basil, non ? Ou quelque chose du genre. « Pour ma part j’aurais une autre façon de t’identifier, mais je préfère m’abstenir et attendre ton prénom. » Un sourire au coin des lèvres, je croisai les bras sur ma poitrine. Je faisais référence à ses exploits de la première semaine dans le jacuzzi, qui avait rapidement fait le tour du château. Je ne connaissais pas beaucoup plus sa partenaire. Il me semblait avoir dansé avec elle une fois, mais cet épisode s’était passé de tout commentaire oral. « Tu es venu pour un peu de culture ou bien toi aussi tu as du mal à remplir les trous ? » Il était vrai que nous étions souvent confrontés aux autres candidats, mais l’ennui s’emparait aussi de moi à certains moments de la journée. Et pour une boule d’énergie, c’était relativement difficile à gérer, et parfois frustrant. La lecture m’aidait quelque peu à évacuer ce sentiment d’inaction, en me plongeant dans la fiction afin d’éluder la réalité. « Parce que le jacuzzi ça ne dure pas toute la journée non plus » achevai-je, pour le taquiner.

Les journées pouvaient paraitre courtes à la télévision, mais ce n’était qu’une illusion. Il y avait de nombreuses heures pendant lesquelles nous comptions les secondes, les moutons pour parvenir à trouver le sommeil même dans la journée. Je ne regrettais cependant pas qu’il y ait autant de candidats cette année, il y avait beaucoup de personnes avec qui nouer contact, apprendre à connaitre tout le monde dans les moindres détails prenait beaucoup de temps. Les heures passaient plus vites pendant ces instants. Hélas, il restait quelques heures pendant lesquelles je tournais en rond, me décidant à rejoindre la bibliothèque j’y avais rencontré Sixtine. Certains candidats avaient du mal avec elle si je me souvenais bien alors qu’elle me paraissait au contraire agréable. Me décidant à forger ma propre opinion en essayant de l’aborder, j’étais agréablement surpris. « C’est exact ! Non non tu sais, c’est surtout pour passer le temps. » Je jetais un petit coup d’œil sur le livre qu’elle était en train de potasser, un petit sourire amusé sur le visage. « Je vois… » J’avais la chance de retenir très facilement les prénoms, j’avais juste eu un peu de mal à me rappeler qui se cachait sous quel prénom. « Pour ma part j’aurais une autre façon de t’identifier, mais je préfère m’abstenir et attendre ton prénom. » Je laissais s’échapper un petit rire de mes lèvres, décidément… Tout le monde savait pour cette histoire dans le hammam. « Moi c’est Baptiste… Ou Tom si tu parles de moi à Connor… » Je lui adressais un petit clin d’œil, j’étais toujours souriant. « Tu es venu pour un peu de culture ou bien toi aussi tu as du mal à remplir les trous ? » Faisant mine de réfléchir je lui répondais pourtant du tac au tac. « Les deux à la fois… J’ai du temps devant moi et… Plutôt que de tourner en rond je me suis dit qu’il serait temps que je reprenne une activité intelligente. » Bon, si j’étais venu dans cette émission pour bouquiner ça se saurait, mais bon… Faute de mieux ! « Parce que le jacuzzi ça ne dure pas toute la journée non plus » Je rigolais, décidant moi aussi de me mettre à la taquiner. « J’ai coupé court à tout ça… J’avais envie de m’ennuyer et… De venir préparer ton projet… La prostitution c’est une énorme ambition, il faut beaucoup de travail pour parvenir à entrer dans le réseau privilégié des catins. » Je lui souriais d’une manière très amusée et pleine de défi.

Baptiste donc. Je ne compris pas vraiment son allusion à Tom, m’enfin s’agissant de Connor cela ne pouvait qu'être une ânerie. C’était pas mal, comme prénom. Ca faisait du bien d’entendre un patronyme un tant soit peu normal et prononçable dans ce château, je n’aurais aucun mal à le retenir. Je posai mon livre, le titre en évidence. Inutile de le cacher plus longtemps, j’avais repéré son petit coup d’œil lorsqu’il était arrivé. Il avait lorgné sur la couverture avec un sourire qui en disait long. Ben quoi, on ne pouvait plus se renseigner sur les sujets de société maintenant ? Je fus partiellement soulagée de voir que je n’étais pas la seule à m’ennuyer dans cet endroit. La Bibliothèque était effectivement l’un des lieux de prédilections pour les âmes ennuyées comme nous. On ne pouvait pas regarder la télévision, et sortir par ce temps était un véritable parcours du combattant. Je me serais volontiers livrée à une petite balade si la neige ne s’était pas invitée de manière indésirable. « C’est vrai que les conversations avec les autres candidats ne se révèlent pas toujours être une activité intelligente » fis-je remarquer après un rire bref. Avouons-le, ils ne brillaient pas tous par leur lumière intellectuelle. Sa remarque suivante m’arracha un sourire, il ne semblait pas prêt à accuser mes espiègleries sans riposter. « Oh j’ai pas mal de ressources tu sais. » J’appuyai mes coudes sur la table, les bras toujours croisés, tentant de mettre ma poitrine en valeur en battant des cils. Ce qui était risible en somme, puisque de ce côté-là je n’avais pas franchement d’atouts. Un petit 85 B, pas de quoi faire grimper les hommes au rideau. J’esquissai un sourire, ancrant mon regard dans le sien. « Mais qui te dis que je ne suis pas déjà dans le business ? » l’interrogeai-je avec sérieux. Si si, je savais faire l’air sérieux.

Il est vrai que de lui demander de m’appeler Tom si elle parlait de moi à Connor était un peu étrange, en réalité toute cette histoire remontait à la première semaine du jeu, lorsque j’avais fait sa rencontre dans le cimetière et qu’il m’avait appelé Tom. M’enfin bref, j’étais maintenant en train de faire la connaissance avec une nouvelle candidate qui s’annonçait extraordinairement intéressante et surtout… Intelligente, même s’il y avait pas mal de personnes sympathiques, je doutais parfois de l’intelligence de certains d’entre eux. Bon, je ne pourrais pas dire que j’étais énormément intelligent, j’avais arrêté mes études au lycée, je travaillais dans un McDonald, mais j’avais le mérite de me cultiver, de me poser sans arrêt des questions… C’était ça qui rendait intelligent selon moi, de toute manière ce que l’on apprenait en cours, que ce soit en maths, en philosophie et ce genre de choses ça n’apportait pas grand-chose, résoudre une équation à deux inconnus on ne peut pas dire que ça se produisait souvent dans le quotidien. « C’est vrai que les conversations avec les autres candidats ne se révèlent pas toujours être une activité intelligente » Je souriais, elle avait tout à fait raison. Je n’avais pas eu de conversations bien intelligentes pour le moment, j’apprenais surtout à connaitre les autres avant de m’aventurer dans des débats d’opinions et tout le bordel qui va avec. « J’avoue… J’ose espérer que c’est parce qu’on est aux premières semaines de l’aventure ! » Elle me taquinais ensuite sur cette aventure dans le hammam, d’ailleurs je me demandais bien pourquoi tout le monde pensait que ça s’était produit dans le jacuzzi, je me décidais à lui répondre, en prenant appui sur le bouquin qu’elle avait entre les mains. « Oh j’ai pas mal de ressources tu sais. » Je laissais un petit rire m’échapper, ne prêtant guère attention à son décolleté, pas parce qu’elle n’avait pas de poitrine, je n’étais pas fan des quatre-vingt-quinze H, mais parce que c’était un principe, je ne matais pas aussi facilement. « Mais qui te dis que je ne suis pas déjà dans le business ? » Elle parvenait à maintenir son sérieux, je faisais de même, déposant mes coudes sur la table pour approcher mon visage du sien et lui susurrer d’une manière faussement sensuelle. « Je ne crois que ce que je vois. » Je restais sérieux encore quelques minutes, me retenant de rigoler.

Le jeune homme souligna qu’effectivement l’intelligence ne semblait pas être le point fort de certains candidats. Je doutai que le temps soit salvateur à bon nombre d’entre eux, cependant je m’abstins de tout commentaire. Je ne me classais pas non plus parmi les grosses têtes de la saison, avec mes trois années d’études et mon métier atypique, je ne correspondais pas aux critères habituels. Je notai qu’il ne lorgna pas ma poitrine quasiment inexistante avec un léger sourire, Monsieur était-il un gentleman ? En tout cas il semblait décidé à rentrer dans mon jeu, cherchant certainement à tester mes limites concernant la frontière entre le sérieux et la plaisanterie. Bien bien, je n’étais pas résolue à me laisser impressionner aussi facilement, et pour une fois je parvins à conserver un air grave. Je me levai sans prévenir et poussai ses deux épaules du bout de mes doigts, d’une pression faible mais autoritaire afin de le contraindre à s’asseoir sur la chaise posée derrière lui. Je m’installai tranquillement sur ses genoux, une jambe de chaque côté de son corps, les mains accrochées autour de sa nuque. Ma canine se planta dans ma lèvre inférieure d’une façon qui se voulait sensuelle, tandis que le coin droit de ma lèvre se relevait en un sourire taquin. L’une de mes mains glissa jusqu’à sa cuisse, l’effleurant innocemment, et mes lèvres s’approchèrent de son oreille jusqu’à ce que je puisse sentir sa respiration se perdre dans mes cheveux blonds. « Je prends les chèques et le liquide » lui glissai-je dans un murmure. Suite à quoi je me mis à rire de bon cœur en me relevant. J’attrapai le bouquin et le plaquai sur le torse de Baptiste, certaine que ça l’intéresserait. « On pourrait s’associer » lui suggérai-je d’un regard malicieux. Suite à quoi je m’éloignai en direction de la sortie. Oh ça va, ne me regardez pas comme ça. J’étais certainement la seule du château à n’avoir pas encore joué la carte de la femme fatale –ou grosse chaudasse, selon les interprétations-. Enfin bon, ce garçon avait l’air sympathique malgré notre bref échange, il faudrait remettre ça à l’occasion. Je parlais d’une conversation, bien entendu !


[je me grouille de finir avant la fin du prime, parce qu’il paraît qu’après on peut plus répondre aux sujets de la semaine ! Ouais je sais je débarque . . .]