☼ SIOMHA

La semaine prend fin et je me rends compte que j’ai quasiment rien glander durant ces derniers jours. L’ennuie complet. J’ai limite l’impression de faire partir des meubles du château. En même temps, avec ce froid de canard, sortir devient risqué. Je l’ai appris à mes dépends puisque j’ai attrapé la crève pas plus tard qu’hier. Fuck. Aujourd’hui, ça va mieux et j’en ai ras-le-cul de rester enfermer dans le nid d’amour et de supporter les cris incessants des candidats. J’ai donc décidé de sortir et de m’aventurer un peu plus loin que le cimetière. Me voilà donc rendu aux falaises. Un endroit encore jamais exploré. La vue est imprenable. Il ne faut pas avoir le vertige. Je continue à grimper tout en regardant où je marche. Et là je me casse légèrement la gueule. Aie. J’entends quelqu’un rire. Merde, on m’a vu. La honte. Je cherche alors d’où prévient ce son si désagréable. Un rire sadique en somme. Et là, le visage d’une peste apparait dans mon champ de mire. J’aurais dû m’en douter. « Dommage pour toi, je suis encore en vie. » J’adresse mon plus beau sourire d’enfoiré à la blonde tout en me posant sur un rocher, non loin d’elle. Je sors alors de quoi fumer. « Désolé, c’était la dernière. » Tout en allumant ma cigarette, j’hausse les épaules et fais mine d’être désolé. Provoquer les salopes, c’est ma passion.

Les falaises. Sans doute le meilleur endroit dans ce château. Le calme qui y régnait contredisait les mouvements de la mer qui se faisaient parfois presque agressifs. C'était agréable de contempler l'horizon et l'océan qui semblait sans fin. Et le fait que peu de candidats viennent dans le coin était un plus. Elle aimait pouvoir se retirer du groupe, de pas avoir à écouter des conversations qui ne l'intéressaient pas. Malgré qu'elle devait braver le froid à chaque fois et qu'elle finissait toujours gelée lorsqu'elle retournait au chaud, elle appréciait être sur cette falaise. Elle se contentait de rester assise et d'observer. Malheureusement, il y avait toujours quelqu'un pour venir l'emmerder. Que ça soit ici, ailleurs, n'importe où. Il y a toujours quelqu'un dans ce château, pas moyen d'être tranquille. Il suffit qu'elle jette un coup d'œil pour savoir de qui il s'agissait. Son nouveau partenaire. Joie. Son manque d'enthousiasme n'avait rien à voir avec lui. Elle aimait être seule, c'était tout. Et clairement, devoir partager son lit avec qui que ce soit ne lui plaisait pas. Pas ici du moins. Lorsqu'elle l'entendit se casser la gueule en beauté, elle eut une once de réaction. L'esquisse d'un rire. Un soupir dédaigneux. Rien de plus. Elle n'était pas sadique au point de rigoler de bon cœur. Tout comme elle s'en foutait s'il se faisait mal, se tuait ou n'avait rien du tout. Sa voix vint agresser ses oreilles, lui signalant qu'il vivait toujours. Ouais. Tant mieux pour lui. Elle ne lui accorda même pas un regard. Quelques secondes plus tard, il l'ouvrit de nouveau. Sans même savoir de quoi il parlait, elle souffla d'une voix lasse: « J'en ai très franchement rien à foutre. » S'il souhaitait la provoquer, il faudrait bien plus que cela. Obtenir une quelconque réaction de sa part était bien plus difficile. Et pour tout dire, quasiment impossible.

Me voilà, en fin d’après-midi, hors du château à m’aventurer entre terre et mer. C’est la première fois depuis le début de l’aventure que j’escalade les falaises et ça ne sera certainement pas la dernière. La vue est incroyable. Elle vaut vraiment le coup d’œil. Pas besoin d’être un as de l’escalade pour s’y rendre d'ailleurs. Il suffit simplement d'un peu de patience, d'un peu de marche et surtout d’attention. Oui, de beaucoup d'attention pour ne pas trébucher par exemple. Ce que j’ai malencontreusement fait. Bon, pas de blessure, je ne suis pas mort, simplement, ma presque chute n’est pas passée inaperçu. Siomha, ma nouvelle partenaire, l’a bien remarquée. C'est un peu vexé par sa moquerie mais surtout par son attitude jusqu’à présent que je décide de provoquer la jeune femme en sortant un paquet de cigarette et en proclamant qu’il n'en reste plus qu’une. La jeune femme semble toutefois imperturbable. Elle n’est visiblement pas en forme. « De toute façon, tu te fou de tout. Si t’avais pas envie de participer à ce foutu jeu de télé-réalité, fallait rester chez toi. Tu participes à aucune activité, tu restes dans ton coin à déprimer à longueur de journée, tu critiques tout. MERDE, t’es nominée ! C’est pas comme ça que tu vas rester et gagner du blé. T’as rien comprit à la vie ma grande. » Voilà, ça fait du bien. Je viens d’exprimer le fond de ma pensée en toute sérénité. Je me doute que la jeune femme va soit faire comme si de rien n’était, soit me dire que son attitude ne me regarde pas. Je m’en fou. J’ai dis ce que j’avais à dire, maintenant qu’elle réagisse ou pas, libre à elle. C’est son aventure, elle en fait ce qu’elle veut, dommage après si elle la gâche. En attendant, je profite un maximum de la vue qui s’offre à moi tout en consumant ma santé à petite dose. Je constate ainsi que la mer est plutôt agitée. Ça ne m’étonne guerre vu le grand froid et le vent incessant.

Eh bien, Sonny avait déjà compris une chose: elle se foutait de tout. D'absolument tout. Rien ne l'intéressait, rien ne la faisait ciller, rien du tout. Ce n'était d'aucune utilité de tenter de comprendre pourquoi. C'était un fait établi. C'est tout. Alors, son petit discours n'allait très clairement rien changer à l'équation. Et en effet, elle était nominée. Et son aventure risquait de s'arrêter le lendemain. Cependant, ça ne lui faisait rien du tout. Ça ne la stressait pas, ne l'attristait pas, ne la remplissait pas de joie pour autant. Elle restait sur sa ligne de neutralité, comme c'était toujours le cas. Qu'il n'essaye pas, elle ne ressentirait rien de spécial, même s'il essayait de jouer sur le côté sentimental des choses. Ce qu'elle reteint de son monologue, c'était sa naïveté. Alors comme ça, elle serait ici pour l'argent? Il avait faux. Plus encore sur le fait qu'elle n'avait rien compris à la vie. Elle pouvait assurer qu'il était bien loin du compte sur ce point-là. Elle avait naïvement pensé qu'il aurait assez d'imagination pour comprendre cela, de part le peu qu'il savait d'elle. Mais visiblement, elle l'avait surestimé. Qu'importe. Elle garda son regard fixé sur l'horizon encore un court instant, avant de lui faire le privilège de le regarder. « Qui a dit que j'étais là pour l'argent? Certainement pas moi. Si je pars, je pars. Je ne vais pas changer pour sauver mon cul. » déclara-t-elle très sobrement, comme à son habitude. Oh que non, elle n'allait pas changer, ne serait-ce que le plus minimum de ses défauts. Elle n'était vraiment pas là pour ça. « Oh et mon pote, fais pas comme si tu me connaissais, je te remercie. » lui lança-t-elle d'une froideur exquise après une minute de silence. Ouais, c'est pas comme s'il était en position de juger quoi que ce soit sur sa vie ou sur sa façon de voir les choses. Ils n'étaient pas intimes à ce point-là. Il ne faudrait pas brûler les étapes, pas vrai?

Je ne sais pas si c’est l’air de la mer ou l’altitude mais en tout cas je me sens pousser des ailes. Sans vraiment me poser de questions, je viens de déballer le fond de ma pensée à Siomha sur son inutilité au sein du jeu. Bien que je ne porte pas la jeune femme dans mon cœur, son côté "je m’en foutiste" m’énerve trop pour que je passe à côté. Je veux la faire réagir et je n’y vais pas de main morte. Pourtant je garde une certaine tranquillité et un détachement face à mes propos. Preuve que je ne m’intéresse pas réellement à ce que je dis. « Tu ne me sembles pas être le genre de personne à être là pour le côté humain, et encore moins pour trouver l’amour, donc je suppose que l’argent est ta motivation. » J’ai peut-être faux. Autant la jeune femme se fait passer pour une autre personne ou même, elle a un complice au sein de la maison. Je ne sais pas. La raison de sa présence à Fake Lover est source d'interrogation. « Je te connais pas, en effet, et je cherche pas à te connaitre, rassures-toi. » Je préfère mettre les choses au clair à mon tour. La froideur de la jeune femme ne m’intimide pas. Elle n’est rien face aux monstres que j’ai pu côtoyer dans une autre vie. Bref. Je tire une nouvelle latte de ma clope avant de m’apercevoir que celle-ci est déjà bien consumée.

Dire qu'elle venait sur cette falaise afin d'être tranquille. Ça ne marchait jamais. Ou que trop peu. Peut-être devrait-elle venir ici durant la nuit, avec un bon moins quinze degrés à l'extérieur pour trouver le calme tant désiré? Même pas sûr. Et cela signifierait se geler les miches et clairement, les candidats ne méritaient pas qu'elle fasse tant d'effort pour les éviter. Passons. Sur un raisonnement clairement douteux, il affirma qu'elle devait être là pour l'argent. Certes, elle n'était pas là pour le côté humain du jeu – cela semblait un peu contradictoire, puisque c'était justement un jeu et que pour y briller, le mieux était sans doute de ne se préoccuper que de sa gueule – encore moins pour l'amour, qui était la dernière de ses préoccupations. Malgré tout, l'argent, non plus, n'était pas sa motivation. « Eh bien, tu as tort. » affirma-t-elle en affichant un sourire suintant le sarcasme. C'était tellement jouissif de contredire les gens, elle n'y pouvait rien. Et puis, ce n'est pas comme si ce n'était pas la vérité. Elle n'était vraiment pas là pour la tune. « Tu me rassures là, c'est vrai. J'ai cru que tu allais sérieusement tenter d'avoir une conversation avec moi. » Traduction: tu peux te la fermer, je ne veux surtout pas te connaître non plus.