Belle journée en perspective. Le soleil qui brille, la maison qui se réveille petit à petit. J'aime l'ambiance globale. Faut croire que je ne suis pas une fille bien compliquée. Puis, il en faut peu pour être heureux comme dirait l'autre. Je suis donc dans la salle de bains, brosse à cheveux en mains, essayant tant bien que mal de dompter ces quelques mèches châtains qui se font la malle. Il y a des jours comme ça, où l'image que je reflète dans le miroir m'est insupportable. Comme si j'étais la fille au physique le plus ingrat qui puisse exister. Comme si je n'étais tout simplement pas regardable. Je jette un coup d’œil à ma montre. Cette même montre que j'accroche à mon poignet.. un jour sur deux. Dix heures et quart passé. De quoi me remonter le moral. Car même si mon reflet dans le miroir m'est, présentement, insupportable, je sais que j'ai la journée devant moi. Décidée à, finalement, m'attacher les cheveux en queue de cheval, je sens un regard posé sur moi. Celui de ma voisine de lavabo. Je n'ose pas la regarder, mais mes yeux dérivent discrètement vers la gauche. Oui, oui, elle a bien les yeux posés sur moi. Elle veut quoi ? Me croquer ? « J'aurais vraiment tout donné pour avoir tes cheveux. » Rassurant. J'ai bien crû qu'elle allait me dévorer sur place avec ses yeux de biche qui me fixaient dresser ma chevelure. Je tourne la tête vers elle, un sourire accroché aux lèvres, et la remercie d'un mouvement de tête. « On pourrait peut-être s'occuper des tiens. », dis-je en pointant sa masse capillaire avec ma brosse. Ben quoi ? Ce n'était pas une critique détournée Juste une charmante proposition. Roh et puis merde. « Je pense que tu t'y prends mal. » Je souris encore et toujours. A noter: ne jamais me donner l'occasion de parler. J'ai l'impression que tout ce qui sort de ma bouche peut paraître sournois. Pourtant loin de là en est mon intention.

En y repensant, je m'y suis peut-être mal prise avec elle. La pauvre me fait un compliment sur ma chevelure, et moi, de mon côté, je ne trouve rien de mieux à lui dire qu'un truc qui sonne vachement comme un "tu te coiffes une merde". Pourtant là n'était pas mon intention. Non, à l'origine, je voulais simplement lui proposer des conseils. Oui, voilà. J'ai stupidement tenté de lui tendre une perche. Sauf que moi, les perches, je les tends pas, je les lance en pleine gueule. Et ça peut faire mal. « Disons que tous les trucs de filles, ça me prend depuis peu. Généralement je m'attache les cheveux, ça évite tout ennui. Au fait, moi c'est Neela ! » J'ai honte. Réellement. Je ne voulais pas la foutre dans cet embarras. D'autant plus qu'elle est une très belle femme. Tiens, je vais lui dire, ça. Peut-être que ça la rassurera. « T'as un visage sublime, tu peux bien te permettre les chignons et autres coiffures dans le style. » Hmm, ça sent l'incitation au laisser-aller, ça, non ? Merde. Je recommence ? Je risque de m'enfoncer encore plus.. Tant pis, au point où j'en suis, je peux bien me le permettre. « Enfin, je veux dire que tu es vraiment très belle et que.. » Stop, Elise. Arrête le massacre, ici. « Enfin, bref. Enchantée Neela. Je suis Elis- » abeth. Qu'est-ce qui me retient de donner mon nom dans son intégralité, au fait ? « -abeth. Mais, tu peux m'appeler Elise. » Voilà qui est mieux.