Très honnêtement, et compte tenu des récents évènements - notamment les nombreux départs survenus lors du dernier prime - Raphaël se sentait honteux. Terriblement honteux, même. Honteux d'avoir exprimé sa joie suite au sauvetage de Lulu au point de l'avoir embrassé en direct. Honteux d'avoir exprimé celle qu'il avait ressenti suite au sauvetage d'Arès en l'ayant étreint. Honteux également de se trouver là, dans cette salle de bain, les yeux rivés sur ledit jeune homme, qui semblait torse-nu et être en train de se raser, et d'avoir l'irrésistible envie de le prendre à nouveau dans ses bras, pour lui exprimer combien il l'appréciait, combien il se réjouissait de l'avoir encore à ses cotés aujourd'hui. Pourtant, il savait que la fin du prime en avait fait souffrir beaucoup. Lui même avait eu un peu de mal à vivre certains départs, mais il fallait avouer que les personnes auxquelles il tenait le plus, que les nominés qu'il avait le plus soutenu, étaient restés, et donc que cela avait quand même tendance à clairement le réjouir. Il n'y pouvait rien, il s'était particulièrement attaché à Lulu, Arès, Joshua. Et finalement, après quelques longues d'hésitation, le suisse se décida à avancer, arrivant bien vite dans le dos de son camarade, sur lequel il déposa ses mains, peut être un peu froides, mais qui seraient probablement réchauffé par la tendresse de ses gestes. Sans Arès - et par extension, sans Elliot - les choses auraient été trop difficiles à vivre pour lui. Il n'aurait pas pu les supporter, c'est certain. « J'ai un peu honte de l'avouer ... » articula-t-il tout d'abord, laissant ses doigts grimper le long du dos de son camarade, dans un geste enfantin. « ... mais je suis heureux. » Un large sourire gagna ses lèvres, tandis que sa tête se déposa sur l'épaule de son camarade, dans le dos duquel il se trouvait toujours. Pitié, que personne ne note l’ambiguïté évidente de cette situation ... Il s'en passerait bien. « C'est la première fois de ma vie que je peux le dire avec autant de certitude. » Il soupira d'extase, déposant un baiser amical sur l'épaule de son camarade puis se recula quelques peu, tournant une fois sur lui même, les yeux clos, le sourire toujours aux lèvres. « Je suis heureux, Arès » répéta-t-il, comme pour s'en persuader lui même. Il se sentait bien en ce début de semaine. Vraiment bien. Parce qu'il voulait se laisser une nouvelle chance d'accéder au bonheur. C'en était maintenant définitivement fini de cette merde de fatalité qui semblait le poursuivre. Non, désormais, les choses iraient beaucoup mieux pour lui, il le savait. Et rien que parce qu'on lui avait laissé Lulu, Arès, Elliot ... il voulait reprendre pleinement ses efforts. Pour lui-même, également. Après tout ce qu'il s'était infligé, il se devait bien ça, au fond.

Je suis là, encore présent. Ce dernier coup d'oeil que j'avais jeté à la chambre, au lit que je partageais avec Dani n'avait pas été le dernier. Et pour preuve, je me trouve torse nu dans celle-ci, les yeux rivés sur le côté vite de mon lit. Je suis célibataire cette semaine. C'est une habitude à prendre. Et d'ailleurs, j'ai dormis tel une étoile de mer. Les bras et les jambes écartés. J'ai pu prendre toute la place. Et ce simple fait est carrément jouissif, sans exagération. J'accroche une serviette autour de ma taille et me dirige à la salle de bain, dans l'optique même de me raser. Je passe ma main sur mes joues, mon menton, pour constater de l'étendue des dégâts de ma barbe. Elle me donne l'air beaucoup plus vieux, plus fatigué et peut-être même plus sévère, aussi. Qu'importe, elle sera bientôt disparue dans le tourbillon du robinet. J'entreprends de me raser et, quelques minutes plus tard, tandis que mon rasoir contourne mes lèvres, le reflet d'un Raphaël tout sourire m'apparaît dans le miroir. Il se plante derrière moi et je n'ai d'autre choix que de sourire. Parce que j'aime le voir heureux. Parce que la perspective qu'il puisse l'être me fait chaud au coeur. Et surtout, parce que savoir qu'il est heureux que je sois resté me redonne le sourire, à moi aussi. Je sais ainsi, que je peux compter sur lui. Qu'il est de ceux qui ne me décevrons probablement pas. Ses doigts caressent mon dos, je frissonne. Je n'ai toujours pas l'habitude avec ce genre de contacts, ces poses suggestives qui ne le sont pourtant pas aux yeux de mon camarades. J'ai parfois honte d'être si gêner face à un simple contact humain. Mais le baiser qu'il dépose me fait frémir, je serre les dents, essayant de paraître le plus naturel possible. Je ne veux pas brusquer sa joie. Il tournoie sur lui même, je ris gaiement. « Qu'avez-vous fait de Raphaël monsieur ? » Je dis, l'air mutin, le regardant toujours à travers le miroir qui me fait face. Je suis heureux, moi aussi. D'être resté malgré les trois chances de sortir qui m'étaient imposées. Je suis heureux d'être encore là, avec eux. Et je suis heureux de le voir heureux, justement. Je termine de me raser avec précision, me rince le visage et me tourne enfin de manière à lui faire face. « Ne me refais plus jamais le coup de la dernière fois. » cette phrase sonne presque comme un ordre. Parce que le voir crier, pleurer, rager ne m'enchante absolument pas. Il est tellement plus beau, plus étincellent lorsqu'il rit.

Peut être attendait-on de Raphaël qu'il taise la joie qui était la sienne, ne serait-ce que par respect pour ses camarades, qui pour de nombreux cas vivaient une semaine difficile suite aux départs de certains candidats. Car peut être estimait-on qu'il ne faisait pas suffisamment preuve de compassion, alors qu'il estimait pourtant ne pas manquer de respect à qui que ce soit. Après tout, il avait bien le droit d'être heureux lui aussi, non ? Pour une fois qu'il allait bien, fallait-il véritablement qu'il tempère son envie de le crier sur tous les toits, simplement parce que le timing était douteux et que l'on prendrait ça pour de la vantardise, pour un manque de respect évident vis à vis de ceux qui n'allaient pas aussi bien que lui ? C'était pour le moins problématique, car à cause de tout cela, et même s'il n'avait pas envie de s'empêcher de sourire quand il en avait tant envie, Raphaël se sentait mal à l'idée qu'on puisse le juger, lui reprocher d'aller aussi bien. On trouverait probablement à redire de la présente situation notamment, du fait qu'il soit venu faire savoir à Arès combien il était heureux, ce que l'on pouvait de toute manière aisément deviner en le regardant. Et Arès, lui même, semblait plutôt apaisé. Sans doute savourait-il son retour, et celui d'Elliot. Pourtant, lui aussi avait perdu quelqu'un, en la personne de Dani. Mais si l'on commençait comme ça, et vu qu'il l'avait apprécié également, Raphaël l'avait lui aussi perdu. Il fallait simplement garder en tête que tout ce qu'il restait serait court, concis, et que tout le monde serait à nouveau réuni en moins de temps qu'il en faut pour penser à ces retrouvailles. Toutefois, Raphaël ne pouvait s'empêcher de penser qu'il n'aurait pas réfléchir de la même manière si Lulu, Arès, Joshua ou Elliot avait été à la place de l'un des exclus. Tout aurait été considérable différent, sans doute. Ainsi donc, il préférait cesser d'y penser pour le moment. Quant à l’ambiguïté certaine de ses gestes, il faut savoir qu'il n'avait pas tellement conscience du caractère particulier de telles choses, du fait qu'on pourrait trouver cela déplacé, mais également du fait qu'Arès puisse s'en sentir mal à l'aise. Il ne voulait pourtant pas lui causer la moindre gêne, tout partait ici d'une bonne intention. Il ne pensait véritablement pas à mal. Après avoir brièvement tournoyé sur lui-même, Raphaël ne put que rire suite aux propos de son camarade. Sa question - qui n'en était assurément pas vraiment une - n'avait pu que le faire réagir. « Il est toujours là, simplement, il a jugé bon de se laisser une véritable chance d'aller mieux » répondit-il alors, avec tendresse et sincèrement. Ses résolutions étaient plus que sérieuses à ce jour. Ses efforts également. Tout allait prendre une ampleur différente, c'était certain. Son camarade finit par se tourner vers lui, et le suisse esquissa cette fois-ci un sourire plus embarrassé. « Ça n'arrivera plus, je te le promets » lui assura-t-il alors, là encore avec beaucoup de sincérité. « J'ai eu tellement peur de vous perdre, Elliot et toi » reprit-il, plus ému, en baissant doucement la tête. Si les tourtereaux avaient assurément souffert à la fin du prime de dimanche soir, ce fut également le cas du suisse. Lui qui avait encore beaucoup de mal à supporter le fait qu'ils soient liés, et donc que le départ de l'un implique celui de l'autre.