ft. Ithaque

La veille avant de se coucher Neila avait noté un fait qui, selon elle, était plutôt notable : elle dormait dans une chambre tarzan. Peau de bête sur le sol, mur en bois, à peine vernis et toute la décoration était chocolat. Elle s’était directement faite la réflexion qu’elle dormait en fait dans la maison de Jane et Tarzan. Elle était Jane et Ithaque bah… Vous voyez quoi. La jeune femme ne s’était cependant pas épanchée sur ce sentiment à son partenaire, elle avait juste enfilé un mini short de jogging et un débardeur avant de filer sous la couette. Certaines dormaient avec des nuisettes et bien, pas elle. Elle souhaita la bonne nuit à son partenaire et sombra dans le sommeil assez rapidement, habitué de partager son lit avec les danseurs de la troupe quand ils partaient en tournée, partager son lit avec son partenaire n’était donc pas un problème. Quelques neufs heures plus tard la jeune femme se sentit doucement émerger, elle respirait lentement mais de plus en plus vite tout de même jusqu'à prendre le rythme régulier et caractéristique de l’état de réveil du corps. Elle se mouva alors afin de se tourner vers son partenaire qui semblait encore à moitié endormit. Elle le fixa de longues minutes, comme si elle tentait de lire à travers les traits de son visage, paisible dans le sommeil. Mais qu’est-ce qu’un visage pouvait bien dire, surtout endormit ? Rien, selon elle il était futile de croire que le visage reflétait une personnalité, l’expression certes reflètent l’humeur et l’attitude mais là, maintenant, son partenaire n’avait que l’air d’un homme endormit. Il remua finalement un peu et Neila se recula à peine, elle tourna le visage vers le plafond, faisant semblant qu’elle venait également de se réveiller afin qu’il ne sache pas qu’elle l’observait. Elle se retourna après avoir compté jusqu'à dix mentalement et sourit à Ithaque. « Bonjour. » fit-elle d’une voix un peu éraillée, il fallait toujours un temps pour que sa voix revienne le matin. « Bien dormit ? » demanda-t-elle en glissant une main sous son oreiller.

J'ai peur de ne rien avoir à faire ici. Pas dans le sens où je remettrais ma participation à ce jeu en question, en terme de désoeuvrement. Au réveil il me reviens en mémoire des flash de la veille, après le Prime tout les candidats s'étaient dispersés et peu étaient aller se coucher directement. Pour faire quoi et ou telle était la question. Moi je n'avais rien trouvé d'excitant à faire à part me retrouver dans la salle de projection avant de venir m'assoupir auprès de Neila. Et maintenant que je contemplais les heures qui me séparaient de celle à laquelle je retournerais me coucher le soir venu, j'avais du mal à envisager la journée et les activités qui viendraient la ponctuer.

Quand on me demande ce que je fait de ma vie généralement je répond "rien" parce-que c'est le cas. J'ai pas encore appris à connaître les autres mais quelque chose me dit que je suis le seul à ne pas avoir de vie. Pas de job, pas de passé qui vaille la peine d'être raconté et pourtant, je suis tellement doué pour ne rien faire que ça ne me laisse pas le temps de tenter de faire quelque chose. Neila s'agite suite à mon propre mouvement dans le lit, voilà environ une heure que j'attendais qu'elle se réveille. Mais sans impatience.

"Kalimera...Pas assez. Décalage horaire."

Huit heures d'écart entre la Corée du Sud et l'Irelande plus le fait que j'y vive principalement la nuit, ca donne un décalage du futur dont il me faudrait plusieurs jours voir une semaine entière pour me faire à mon nouveau rythme de vie. Je n'avais quasiment rien dormi. J'étais même déjà réveillé depuis un sacré bout de temps à regarder le plafond dans le noir jusqu'à ce que la production allume les lumières ce qui soyons clair, ne réveilla strictement personne, et j'avais attendue une heure décente pour commencer à...ben à vivre à priori.

"Je suis descendu déjeuner puis je suis revenu me coucher. Je voulais être présent quand tu te réveillerais."

Par politesse. Je ne laisse jamais une fille qui à dormi à coté de moi se réveiller seule le matin. C'est valable pour tout le monde. Une petite amie imaginaire, l'histoire éphémère d'une nuit ou ma partenaire dans cette aventure.

Il lui dit bonjour en grec, c’était à peu près le seul mot qu’elle connaissait, à et merci aussi. Ayant été en Grèce avec le lycée une fois elle avait du apprendre deux ou trois mots dont les seuls vestiges étaient encore ‘bonjour’ et ‘merci’. Deux mots bien utiles selon elle. Les gens aiment quand on parle leur langue, même si ce n’est que pour dire une politesse. Bref. « Tu viens d’où ? » Grèce ? Sans blague, mais ce n’est pas ça qu’elle demandait car il n’y avait que deux heures de décalage horaire entre la Grèce et Dublin, elle voulait savoir où il vivait pour avoir un tel décalage. Sa seconde réplique tira un sourire à Neila. Elle ne savait pas tellement comme réagir ni même quoi répondre, c’est pourquoi elle prit quelques instants avant de, finalement, prononcé quelques mots. « Il existe encore des hommes avec ce genre d’intentions ? » Oh elle n’avait jamais été désabusée, elle pensait juste que l’égalité des sexes provoquait une certaine perte des valeurs, ce dont elle ne s’était jamais plainte. « C’est gentil. » En effet, ça l’était, mais si il était trop gentil ça allait probablement aussi la faire chier sur le long terme, hm. Neila ou premier facteur de maux de tête des hommes à Londres… Et dans Fake Lover.

"Les hommes strictes, rigides et sévères oui"

Lui dis-je avec un clin d'oeil mais sans sourire. C'est pas spécialement l'histoire d'être à cheval sur les conventions, je suis d'ailleurs le premier à me mettre à l'aise de partout où je passe et à foutre mes pieds sur la table de partout ou je m'assoie par exemple. C'est plus une façon d'être générale. J'aime instaurer des codes de conduite dans mon environnement, ça me donne une impression de stabilité. Puisque c'est le chaos dans ma tête j'apprécie que tout le reste tienne en place, et pour que ça tienne, il ne faut pas être quelqu'un de gentil, loin de là.

D'ou je viens, si tu savais. Bon de Grèce ça tout le monde l'aura compris et de Seoul en Corée du Sud ou j'habite depuis environ un an et demi et ou je reste prostré chez moi nuit et jour sauf quand je décide d'aller me chercher quelque chose à manger dans la rue, auprès des vendeurs locaux sous leur baraques de fortunes au pieds des tours gigantesques et illuminées du quartier d'affaire qui auraient tout à fait pu servir de décors à la version 2012 de Total Recall. Le concept de se faire implanter des souvenirs de choses qu'on à réellement jamais vu ou faites me convient tout particulièrement. Je préfère rester énigmatique.

"D'un endroit d'où on envoi pas de cartes postales."

Ainsi, Ithaque était strict rigide et sévère ? C’était ce que Neila entendait par ce qu’il venait de dire. Voilà qui avait l’art de refroidir la jeune femme, ce n’était pas très chaleureux comme impression sur son partenaire. Sa seconde réplique l’était tout autant, elle soupira et se retourna sur le dos, le regard callé sur le plafond. « Tu parles comme si tu étais le héros d’un film chiant. » Au moins, ça, c’était dit. Mais le fait est que c’était la vérité et Neila n’en démoderait pas. Elle tourna à nouveau la tête vers son partenaire. Elle connaissait son secret, il connaissait le sien mais ça ne voulait pas dire qu’ils se connaissaient, loin de là. « T’es toujours comme ça ? » Neila et le tact : ça fait 45.

Le héro d'un film chiant. Le chant des Insectes par exemple ? Un essai d'une heure vingt huit minutes sur un personnage principal qu'on ne voit heureusement jamais dont l'histoire commence par sa décision de se suicider par la faim et qui décide d'écrire le journal intime du temps qui passe trop lentement alors qu'il dépérit jours après jours avec une intensité de plus en plus violente jusqu'au moment ou tout s'arrête, enfin ? Et en bande originale, le dôme de verdure d'une forêt dans laquelle il à décidé un peu par hasard de s'échouer ? Ca, se serait parfait, Parce-que sinon je vois pas. Au moment où elle tourne à nouveau la tête dans ma direction, je suis devenu livide. Et elle fait pour ainsi dire, enfin ma rencontre depuis qu'on s'est vu hier soir. Ca aura pas trainé. Si j'étais elle je profiterais du fait que je parle comme un hero d'un film chiant pendant que je parle encore et que je ne me suis pas tout à fait replongé dans la neurasthénie.

"Non, c'est exceptionnel parce-que c'est le début du jeu. Petit à petit ce sera pire et je vais m'enfermer dans un mutisme impénétrable dont il te sera parfaitement impossible de me déloger sans une volonté de fer et la conviction que tu peux y arriver. Tu t'attendais à quoi ?"

Etrange. Quelque chose me dit qu'elle est déçue de ma façon d'être et pourtant j'ai du mal à imaginer qu'on puisse penser une seule seconde que je suis quelqu'un d'hilarant. Ma douce, ça ne sera pas le cas, de tout les candidats avec qui Cupidon aurait pu te mettre en couple si il y a quelqu'un avec qui tu ne fera pas la fête ni tout les jours ni jamais, c'est moi.

Il parle et tout ce à quoi elle pense c'est 'merde, on m'a refilé un boulet'. Elle ne juge pas forcément vite les gens, mais c'est vrai que c'est pas du tout son genre de gars, pas forcément pour envisager une relation oula, ne nous emballons pas, mais même pour une simple amitié Neila fait déjà doucement un trait dessus. "Pas à ça." Réplique-t-elle en se redressant doucement, laissant tomber le drap jusqu'a sa taille, elle se met en tailleur et commence à s'étirer les bras. "Je ne vois pas ce qu'un mec comme toi fout dans un jeu comme ça." Fait-elle finalement. Elle résiste à l'envie soudaine de le laisser en plan, la danseuse veut apprendre à connaitre son parte aire. Coûte que coûte.

"Je te comprend"

Je passe mon bras derrière mon oreiller et je me tourne vers elle, pour l'observer en silence un moment. Je la plains, une fille pleine de vie et de bonne humeur qui n'a fait que bien me traiter depuis notre rencontre alors que d'autres filles ont tout de suite cherché le conflit avec leur partenaire, je suis gâté. Pas elle. C'est pas cool pour elle mais que faire, à part faire confiance à Cupidon et croire qu'il nous a mit ensemble pour une bonne raison. C'est pas dit que ça fonctionne entre nous, c'est pas dit qu'on soit amis, c'est même pas dit qu'on s'entendent, mais on a surement quelque chose à apporter l'un a l'autre. C'est ce que je veux croire depuis la bonne impression que j'ai eu d'elle dès le moment où je l'ai vu dans le SAS. Elle à du mal à comprendre ce que je fais là, pourtant, elle connait mon secret. Je sors une de mes mains de dessous les draps pour poser mon index sur ses lèvres en signe de silence et l'empêcher de continuer à penser à des choses négatives, même si je suis bien conscient que c'est ce que je lui renvoie. Elle sait très bien ce que je fait là. Je lui murmure de me faire confiance.

"Pour que tu ailles le plus loin possible."

Il la comprend, ah ouais cool comme ça ça l’avance à loin la Neila. Elle soupire, ne sachant pas vraiment quoi dire. Elle ne peut pas partir comme ça, elle veut vraiment apprendre à connaitre son partenaire mais voilà, elle se demande si elle va tenir longtemps. La production les a surement collés ensemble au random, eux comme tous les autres. Ce n’est pas parce qu’elle a vu de très belles unions naitre des partenariats, à la télévision, que c’était le cas pour tout le monde mais de là à tout de suite enterré toute complicité entre eux ? Non, jamais. Elle était certaine qu’il y avait quelque chose à faire mais Neila n’était pas une fille patiente et elle avait surement très vite baisser les bras. Après quoi il posa son doigt sur ses lèvres à elle avant de prononcer quelques mots, l’empêchant ainsi de l’interrompre. Il était là pour l’emmener le plus loin possible. Elle fronça les sourcils et attrapa la main d’Ithaque dans la sienne pour couper tout contact avec ses lèvres. « Et pourquoi ce ne serait pas toi qui devrait aller le plus loin possible, hein ? » Sauf que des deux, c’était peut être elle qui en avait le plus envie. Elle était ici pour gagner, elle allait tout faire pour ça, rien n’était un obstacle et il le savait mieux que les autres dans ce nid.

C'est étrange, elle se saisit de ma main pour l'écarter de sa bouche et me parler malgré tout et je réalise que si elle, m'avait touché alors qu'on ne se connait pas encore, je l'aurait pas aussi bien pris peut être même que j'aurais eu un mouvement de recul. Je viens juste de m'en rendre compte et je constate une fois encore que Cupidon m'a attribué une partenaire à la patience qui m'impressionne. Dans quel but, c'est quoi le projet ? Compenser ma brutalité pour s'assurer que notre binôme ne finira pas par s'entretuer peut être. Je réfléchi à la meilleure réponse à apporter à sa question, une question qui me touche d'ailleurs, même si ça ne se voit pas.

"Parce-que que je suis pas seul et que ça implique qu’on me fasse confiance, qu’on décide que je le mérite. Avec ma personnalité que j’essaye même pas de cacher, c’est pas gagné."

Mais qui dit sport collectif dit également sport d'équipe. Il n'y a plus qu'à espérer qu'on en fasse une belle.